Prévention des risques liés à l’air en établissement de santé Risque aspergillaire Chaque spore présente dans l’environnement peut devenir pathogène si elle rencontre un hôte approprié (un patient à risque) © Nathalie OSINSKI - 2014 Nathalie OSINSKI Gestion du risque infectieux et hygiène hospitalière [email protected] Air et aérobiocontamination Définitions Aspergillus fumigatus © Nathalie OSINSKI - 2014 L’air Quelques définitions Air o Particules o o o Mélange gazeux naturellement contaminé • Par des particules inertes solides ou liquides (90%) • Par des particules vivantes - bactéries, virus, champignons, allergènes, toxines (10%) Particules visibles à l’œil nu ≥ 50µm Particules non visibles de 1µm à 0,0001µm La persistance dans l’air est inversement proportionnelle à la taille • 100µm = 6 secondes • 10µm = 17 minutes • 1µm = 18h30 • 0,01µm = 10 ans Aérosols o o Suspension de fines particules solides ou liquides dans un mélange gazeux La majorité des aérosols sont contaminants © Nathalie OSINSKI - 2014 3 Contamination exogène (externe) Contamination d’origine environnementale Liée à l’air extérieur Origine industrielle (suie, fumées, poussières, activités de transport, activités agricoles) Origine naturelle (végétation, activité biologique des océans) Milieux Nombre de particules par m3 d’air (0,5 µm) Campagne, temps calme 10 000 000 Petite ville 20 000 000 Bureaux 25 000 000 Atelier mécanique 100 000 000 Zone fumeur (pièce fermée) 150 000 000 Centre urbain 200 000 000 Site industriel 400 000 000 Salle propre 10 Source : ASPEC © Nathalie OSINSKI - 2014 4 Contamination endogène (interne) Contamination liée à l’activité à l’intérieur d’une pièce Origine mécanique (air, surfaces contaminées) Origine humaine (patient, personnel) o Origine cutanée • Squames cutanées Staphylococcus aureus o Origine oro-pharyngée • Respiration, toux, éternuements • Parole, salive Gouttelettes de Pflügge Activité Nombre de particules émises (>0,3 µm) Sans activité, debout ou assis 100 000 Mouvements importants, debout ou assis 1 000 000 Marche à 3,5 km/h 5 000 000 Monter un escalier 10 000 000 Exercices physiques 15 à 30 000 000 Source : ASPEC © Nathalie OSINSKI - 2014 5 Émissions cutanées de particules par l’homme © Nathalie OSINSKI - 2014 6 Les zones à risques de l’hôpital Zones Services concernés Zone 4 Très haut risque Cancérologie, hématologie Réanimation néonatale (prématurés) Patients greffés, brûlés SOP aseptiques Orthopédie, chirurgie cardiovasculaire, ophtalmologie, neurochirurgie Zone de conditionnement stérilisation Zone de stockage des DM stériles Zone 3 Haut risque Réanimation, soins intensifs Explorations fonctionnelles vasculaires, endoscopie Hémodialyse Néonatalogie Bloc opératoire conventionnel Chirurgie digestive, gynécologie obstétrique, urologique, ORL, thoracique Zone 2 Risque modéré Hospitalisation Médecine, chirurgie, maternité, psychiatrie Rééducation fonctionnelle Moyen et long séjour Consultations Zone de lavage stérilisation © Nathalie OSINSKI - 2014 7 Air et patients à risques infectieux Les patients immunodéprimés Pathologies immunosuppressives o Traitement immunosuppresseur o Traitement qui perturbe le fonctionnement du système immunitaire • Corticoïdes • Immunosuppresseur (post transplantation) Patients transplantés o o Patient dont le fonctionnement du système immunitaire est perturbé • Maladies auto-immunes (lupus, polyarthrite rhumatoïde, etc.) • Pathologies cancéreuses (hématologie +++, oncologie +++) • Pathologies chroniques (diabète, insuffisance rénale, hépatique, pathologies virales type hépatites) Organes solides (cœur/poumons,foie) Moelle osseuse (autogreffe, allogreffe) Les patients exposés à un risque infectieux Patients opérés au bloc opératoire Patients qui subissent un actes invasifs (plateau technique interventionnel de cardiologie, de radiologie, etc.) Patients brûlés (> 20% de la surface corporelle) Patients hospitalisés en réanimation ou en soins intensifs Patients dialysés Patients porteurs de dispositifs médicaux (sonde, cathéter, drains) © Nathalie OSINSKI - 2014 8 Air et secteurs à risques infectieux Les zones de préparation de produits sensibles Pharmacie o Laboratoires Biberonnerie o Préparation des biberon Stérilisation centrale o o Unité de conditionnement de produits stériles (médicaments, chimiothérapie) Zone de conditionnement Zone de stockage des DM stériles Les zones d’activité à risque infectieux Hémodialyse Néonatalogie Réanimations et soins intensifs Bloc opératoire Soit les zones d’activité situées en zones 3 et 4 © Nathalie OSINSKI - 2014 9 Réglementation L’air dans les établissements de santé © Nathalie OSINSKI - 2014 Référentiel normatif en vigueur Sécurité sanitaire dans les établissements de santé : textes applicables, Ministère de la Santé, 4ème édition, 2004 © Nathalie OSINSKI - 2014 11 Référentiel normatif : contenu Code du travail Obligations du chef d’établissement et du maître d’ouvrage o o Réglementation sanitaire Ventilation des locaux Traitement de l’air (locaux à risques) Code de la construction Renouvellement d’air dans les locaux à pollution spécifique Contrôle périodiques des installation (fréquence variable selon le type d’installation) Caractéristiques thermiques des bâtiments et équipements Sécurité incendie Normes NF EN ISO14644-1 (juillet 1999) o Classification de la propreté de l’air NF S 90-351 (juin 2003) o Conception des centrales de traitement d’air © Nathalie OSINSKI - 2014 12 Risques liés à l’air dans les établissements de santé Prévention et maîtrise du risque aspergillaire © Nathalie OSINSKI - 2014 Généralités sur les infections fongiques Type d’infections fongiques Candidose Mycoses Aspergillose o Agent pathogène de l’aspergillose > 80% aspergillus fumigatus Champignon filamenteux Reproduction par germination de spores libérées par la tête aspergillaire Spore de petite taille (2 à 3 microns) facilement inhalée par le système respiratoire Habitat des Aspergillus Matières organiques en décomposition o o Sol, terreau de plantes (20 000 spores/g de terre) Restes alimentaires, compost, foin moisi (109 spores/g) Aliments (épices, tisanes, thé, kiwi, agrumes) Environnement o o o o o Air Poussières, ventilation, air conditionné Literie, oreillers, tissus (couverture, dessus de lit, rideau, etc.) Faux plafonds, rainure de boiserie, caissons de volets roulants Matériau isolation anti-feu © Nathalie OSINSKI - 2014 14 Aspergillose = infection nosocomiale ? Définition difficile en raison du temps très variable d’incubation en fonction du degré d’immunodépression de chaque patient Aspergillose nosocomiale si Aspergillose non nosocomiale Apparition des 1ers signes (cliniques, radiologiques ou biologiques) après 10 à 14 jours d’hospitalisation Cas groupés suite à des travaux Signes cliniques, radiologiques ou biologiques présents à l’admission du patient Aspergillose d’origine indéterminée Apparition des 1ers signes (cliniques, radiologique ou biologiques) entre 1 et 14 jours d’hospitalisation © Nathalie OSINSKI - 2014 15 Mode de contamination et dissémination dans l’organisme Contamination par voie aérienne Colonisation des sinus, de la trachée, des bronches, des alvéoles par Aspergillus (phase de multiplication) Colonisation des tissus (adhérence et pénétration de la muqueuse) Au niveau pulmonaire o o Dissémination secondaire par voie sanguine o o Cerveau, reins, endocarde, œil, os Risques = hémorragiques, thromboses Contamination par voie cutanée Destruction tissulaire (nécrose) Envahissement tissulaire par le filament mycélien Sur plaies existantes Patients brûlés Après gestes invasifs avec effraction cutanée Pas de transmission inter-humaine Signes cliniques = signes d’une pneumonie Signes biologiques (filaments identifiés au LBA) et imagerie (radiographie, scanner = cavités, nodules, épanchement) © Nathalie OSINSKI - 2014 16 Facteurs de risques et moyens de défense Facteurs locaux Tabagisme Pneumopathie Mucoviscidose, etc. Neutropénie < 500/mm3 pendant plus de 15 jours Neutropénie < 100/mm3 qq. soit la durée Corticothérapie prolongée Immunodépression sévère ATCD aspergillose Aérocontamination 1ère ligne de défense Mucus, cils bronchiques Macrophages alvéolaires o Phagocytose des spores Facteurs généraux 2ème ligne de défense Polynucléaires neutrophiles et monocytes o Destruction des filaments Travaux intérieurs Travaux extérieurs (démolition) Défaillance d’un système de traitement d’air © Nathalie OSINSKI - 2014 17 Aérobiocontamination Mesures préventives selon les patients © Nathalie OSINSKI - 2014 Mesures préventives habituelles Patients sans risque particulier Port systématique d’un masque de soin ou chirurgical par le personnel et les visiteurs en cas de pathologies respiratoires (rhume, toux, etc.) Chambre conventionnelle Aération quotidienne de la chambre du patient o o Chambre avec traitement d’air Maintien des portes et fenêtres fermées Limiter les allées et venues Bionettoyage par voie humide Ouverture fenêtre = 10 minutes Fenêtre complètement ouverte, hors présence humaine • Problème à l’hôpital = limitation des ouverture de fenêtre • Nécessité d’évaluer les risques pour les patients = défenestration Limiter la mise en suspension de particules dans l’air Éducation du patient (toux, éternuement, rhume) Hygiène des mains par FHA régulièrement renouvelée Mouchoirs UU, crachoir UU © Nathalie OSINSKI - 2014 19 Mesures préventives complémentaires Patients à hauts risques Isolement géographique obligatoire Tenue de protection spécifique des personnels et visiteurs Journaux, revues, cartons, dossiers médicaux, humidificateur d’air, barboteurs d’oxygène, appareil avec moteur ventilé, etc. Tisanes, thés, aromates, agrumes, kiwi, etc. Privilégier le linge à usage unique, non tissé Port du masque chirurgical par la patient à l’extérieur de sa chambre Restriction des visites et du nombre visiteurs auprès du patient Suppression des fleurs et plantes en pot Interdiction d’objets ou aliments à risques Casaque ou surblouse, coiffe,masque chirurgical, gants Portes, fenêtres et sas fermés Restriction des sorties du patient ou regroupement des sorties hors de la chambre Chambre seule (avec sas de préférence) Chambre avec traitement d’air (filtration, surpression, renouvellement d’air élevé) Limiter l’émission de particules Regroupement des soins Bionettoyage par voie humide Augmentation des fréquences © Nathalie OSINSKI - 2014 20 Mesures préventives en cas de travaux intérieurs Information des personnels (service, EOH), des patients et visiteurs Délocalisation des patients à risques dans une autre unité à distance des travaux Isolation de la zone en travaux Zone de chantier en dépression (si possible) Ouvriers, personnels, patients, visiteurs, matériaux, gravats Évacuation quotidienne des déchets du chantiers (sacs hermétiques) Système de captation des poussières au sol Tenue vestimentaire Sas d’accès Définition et contrôle des circuits Services à proximité de la zone en travaux Contrôle d’accès de la zone de travaux La pression atmosphérique zone de chantier < pression autres zones à proximité Ouverture porte = c’est l’air de l’extérieur qui pénètre la zone en chantier Fermeture des portes, des fenêtres Cloisons rigides ou souples Etanchéité Draps humides régulièrement remplacés Bionettoyage répétés des locaux proches de la zone de chantier Augmenter les fréquences de nettoyage © Nathalie OSINSKI - 2014 21 Mesures préventives en cas de travaux extérieurs Information des personnels (service, EOH), des patients et visiteurs Délocalisation des patients à risques dans une autre unité à distance des travaux Arrosage de la zone de travaux Services à proximité de la zone en travaux Information sur chaque fenêtre (éducation des patients et occupants) Contrôle d’accès de la zone de travaux Définition et contrôle des circuits Humidifier la terre (creusement) Colmatage des fenêtres Affichage, plaquette d’information, stickers Ouvriers, personnels, patients, visiteurs, matériaux, gravats Évacuation quotidienne des déchets du chantiers Déchets arrosés Bâche de protection avant enlèvement © Nathalie OSINSKI - 2014 22 Surveillance de l’air pendant les travaux Où ? UNIQUEMENT les locaux avec traitement d’air situé à proximité de la zone en travaux AUTRES LOCAUX o Comment ? Prélèvement d’air (comptage particulaire) o Si comptage particulaire non conforme (niveau d’alerte atteint) Quand ? 1 fois/ semaine pendant la phase de travaux à risque aspergillaire o Rechercher l’absence de champignon filamenteux (< 1 UFC/m3 d’air) Prélèvement mycologique de l’air et des surfaces o Possibilité de mesurer l’évolution de la contamination fongique avec des prélèvements avant et pendant travaux (rythme hebdomadaire) Démolition interne ou externe, creusement des fondations But ? Niveau cible = rechercher l’absence de champignon filamenteux (< 1 UFC/m3 d’air) Niveau d’alerte si 1 à 2 UFC/m3 Aspergillus Niveau d’action si > 1 UFC/m3 Aspergillus ou > 2 UFC/m3 autres champignons => stopper les travaux avant remise au norme de la zone de travaux © Nathalie OSINSKI - 2014 23 Contrôle particulaire ou contrôle de l’aérobiocontamination ? Pas de lien entre le nombre de particules et le nombre de microorganismes présents dans l’air Le comptage particulaire = une méthode standardisée Plus aisé à mettre en œuvre Plus réactif (résultats immédiats) Permet de se référer à des normes définissant clairement des classes d’empoussièrement particulaire Les mesures de l’aérobiocontamination = méthode non standardisée Méthode moins réactive (délais de mise en culture, résultats différés) Fait référence à des classes bactériologiques ou à des recommandations (pour Aspergillus sp.) Interprétation est plus délicate en raison de la grande disparité de performances des appareils et de l’absence de normes Source : Surveillance microbiologique de l’environnement dans les établissement de santé, Ministère de la Santé, DGS/DHOS, 2002 © Nathalie OSINSKI - 2014 24 Pour conclure … La gestion du risque environnemental « air » en établissement de santé doit être programmée et conduite conjointement par La connaissance du risque environnemental doit être Évalué Connu de tous La réalisation de contrôles doit s’intégrer dans une démarche plus large d’évaluation des Les services de soins Le CLLIN Les EOH Les services techniques de l’établissement Comportements Pratiques Moyens Et d’analyse des risques © Nathalie OSINSKI - 2014 25 Abréviations ASPEC = association pour la prévention et l’étude de la contamination CLIN = comité de lutte contre les infections nosocomiales CTA = centrale de traitement d’air DM = dispositif médical EOH = équipe opérationnelle d’hygiène LBA = lavage broncho-alvéolaire MO = micro-organisme UFC = unité formant colonie Il s'agit de l'unité permettant de dénombrer les bactéries vivantes (1 UFC correspond à une colonie soit environ 1 million de bactéries) © Nathalie OSINSKI - 2014 26 Références Publications Traitement de l’air en milieu hospitalier, UNICLIMA, 1997 Surveillance microbiologique de l’environnement dans les établissements de santé : air, eau, surfaces, DGS/DHOS,2002 Sécurité sanitaire dans les établissements de santé : textes applicables, Ministère de la Santé, 4ème édition, 2004 Salles propre, le magazine de la maîtrise de la contamination, dossier : qualité de l’air en bloc opératoire, n°61, avril/mai 2009 Normes Norme NF EN 14644 : salles propres et environnements maîtrisés apparentés o o Norme NF EN 14698 (2003): salles propres et environnements maîtrisés apparentés o o © Nathalie OSINSKI - 2014 1 : classification de la propreté (1999) 2 : spécifications pour les essais et la surveillance en vue de démontrer le maintien de la conformité (2000) 1 : maîtrise de la bio contamination : principes généraux et méthodes 2 : maîtrise de la bio contamination : évaluation et interprétation des données de bio contamination Norme NF S 90-351 (2003): salles propres et environnements maîtrisés apparentés : exigences relatives pour la maîtrise de la contamination aéroportée 27 Internet Société française d’hygiène hospitalière www.sf2h.net Centre de coordination de la lutte contre les infections nosocomiales Inter région Paris Nord : www.cclinparisnord.org Est : www.cclin-est.org Ouest : www.cclinouest.com Sud-Ouest : www.cclin-sudouest.com Sud Est : www.cclin-sudest.chu-lyon.fr Nosobase Site national d'information et de documentation réalisé par les 5 CCLIN pour la gestion du risque infectieux http://nosobase.chu-lyon.fr © Nathalie OSINSKI - 2014 28