franges de ramsey - ESPCI

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Quelques thématiques actuelles en Physique Quantique
129
FRANGES DE RAMSEY
(mesure spectroscopique sur un jet de neutrons)
Référence bibliographique : G.L.Greene, N.F.Ramsey, W.Mampe, J.M.Pendlebury,
K.F.Smith, W.D.Dress, P.D.Miller and P.Perrin : Phys. Rev. D 20 , 2139 (1979).
Dans ce problème on présente une méthode très précise de mesure de la pulsation de
G
Larmor de neutrons libres dans un champ magnétique B0 . Basée sur les transitions que
subissent des neutrons traversant deux zones de champ magnétique oscillant séparées par une
zone de champ magnétique uniforme, cette méthode de spectroscopie sur un jet de particules
a de multiples généralisations en physique atomique. Elle est par exemple applicable à des
transitions atomiques entre niveau fondamental et un niveau excité sous l'action successive de
plusieurs faisceaux issus du même laser. C'est aussi la méthode de choix pour la mesure de
fréquence de la transition "d'horloge" du Césium, qui est l'étalon de temps.
Plus que l'application aux neutrons, c'est le principe de l'excitation par des zones de champ
séparées, mais cohérentes, qu'il est important de comprendre ici .
On prépare un faisceau de neutrons, de vitesse v << c , dirigée suivant l'axe Ox . Ces
G
neutrons interagissent avec un champ B0 uniforme dirigé suivant Oz . On note + et − les
états propres de la projection Sˆz du spin des neutrons suivant Oz , et γ n le rapport
Gˆ
G
gyromagnétique du neutron. Le moment magnétique µ̂ et le moment cinétique S sont liés
par la relation :
Gˆ
G
µˆ = γ n S
Les neutrons sont initialement dans l'état − . Lorsqu'ils s'approchent de l'origine, ils
G
traversent une zone où règne un champ magnétique oscillant B1 dont les composantes sont :
D.Marchand
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r

− 2
 z
 B1x = B1e 2 a cos ω  t − 
 c


r2
−
2
2
z
(1)
 B1 y = B1e 2 a2 sin ω  t −  ; r = x + y
c



B = 0
 1z

G
On suppose B1 constant (en toute rigueur B1 devrait être variable pour assurer ∇B = 0 ) dans
G
la zone d'interaction et B1 << B0 . On suppose aussi que le mouvement des neutrons peut être
2
(
)
décrit par une trajectoire classique. En revanche, l'évolution de leur spin est décrite
quantiquement.
1- Soit un neutron dont la trajectoire est : ( x = vt , y = 0, z = 0 ) . Quel est l'Hamiltonien
d'interaction dipolaire magnétique Ĥ ( t ) dans son référentiel en présence des champs
G
G
B0 et B1 ? On posera ω 0 = −γ n B0 et ω1 = −γ n B1 et on écrira la matrice 2 × 2 représentant
Ĥ ( t ) dans la base
{+
, − }.
2- En traitant le terme relatif à B1 comme une perturbation, et en appliquant la théorie des
perturbations dépendant du temps au premier ordre, calculer la probabilité de trouver le
neutron dans l'état + à l'instant t = +∞ (loin de la zone d'interaction), sachant qu'à
t = −∞ il était dans l'état − . (On utilisera le fait que la transformée de Fourier d'une
fonction gaussienne est également une fonction gaussienne).
+∞
On donne :
∫ dt e
− iδ t
e
−β2
t2
2
=
2π
−
δ2
2β 2
e
β
On mesure le flux de neutrons qui sont passés dans l'état + (par exemple par un
dispositif de Stern et Gerlach muni d'un compteur à neutrons), donc la probabilité
P− → + qu'ils aient effectué cette transition.
−∞
• Montrer que P− → + a un comportement résonnant en fonction de ω .
• Tracer P− → + en fonction de l'écart à la résonance : δ = ω − ω 0 .
• Comment varie la largeur de la courbe de résonance en fonction de v et δ ?
L'existence de cette largeur met une limite à la précision de la mesure de ω 0 (donc de
γ n ).
• Peut-on expliquer la valeur de cette largeur par des considérations générales, sans
calculs ?
3- Méthode des franges de Ramsey
G
On rajoute sur le trajet des neutrons une deuxième zone de champ oscillant B1' identique à
la première, mais décalée d'une distance b ( b >> a ) le long de Ox :
D.Marchand
130
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131
( x − b ) 2 + y 2 



−
 z
 B' = B e
2 a2
cos ω  t − 
1
 x
 c

2
2
( x − b ) + y 



(2)
 B ' = B e − 2 a2 sin ω  t − z 
1


 y
 c
 '
 Bz = 0


Montrer que l'amplitude de probabilité de transition S + → − dans le passage au travers des
deux zones s'exprime de façon simple à partir de celle calculée à la question précédente.
Calculer la nouvelle probabilité P− → + . Expliquer pourquoi il est préférable d'utiliser deux
zones de champ décalées de b plutôt qu'une seule, comme dans la question 2-, si l'on
veut mesurer avec précision la fréquence ω 0 . Quel est alors l'ordre de grandeur de la
précision obtenue ?
4- Quel résultat obtiendrait-on pour P− → + si l'on utilisait N zones de champ identiques
distantes de b les unes des autres ? A quel système optique vous fait penser ce dispositif?
5- On suppose maintenant que les neutrons, initialement toujours dans l'état − , se
propagent le long de l'axe Oz (au lieu de Ox ) à la vitesse v (mouvement des neutrons :
x = 0, y = 0, z = vt ). On suppose que la longueur de la zone d'interaction est égale à b ,
b
 b b
c'est-à-dire que le champ oscillant est donné par (1) pour z ∈  − ,  et nul pour z > .
2
 2 2
'
Calculer la probabilité de transition P− → + dans cette situation.
Pour quelle valeur de ω cette probabilité est-elle maximum ? Expliquer la différence
avec le résultat obtenu à la question 2- .
6- En pratique, dans un jet, les neutrons ont une certaine distribution de vitesse. Entre les
deux méthodes envisagées aux questions 3- et 5- laquelle est la plus intéressante ?
7- On considère un faisceau de neutrons pour lequel la longueur d'onde de de Broglie vaut
D
λ0 = 31A . Calculer leur vitesse v sachant que la masse M n d'un neutron est égale à
1, 675 ×10−27 kg . Pour la mesure de leur rapport gyromagnétique γ n , on utilise la
méthodes des franges de Ramsey décrite dans la question 3- . On pourra convenir que la
π v
précision sur la mesure de ω 0 est donnée par δω 0 =
.
2b
La valeur du rapport gyromagnétique du neutron (ou, de façon équivalente, de son
moment magnétique) est actuellement mesurée avec la précision absolue
q
γ n = ( −1,91204184 ± 8,8 × 10−7 )
Mp
(où q = 1, 602 × 10−19 Coulomb , est la charge élémentaire et M p = 1, 673 × 10−27 kg , la
masse du proton).
D.Marchand
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Dans un champ B0 = 1 Tesla , quelle doit être la longueur b pour atteindre cette
précision?
D.Marchand
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C
orrigé
G G
Hˆ = − µˆ .B = −γ n B0 Sˆz + B1x S x + B1 y Sˆ y
(
)
1- or x = vt et y = z = 0 donc :


v 2t 2

− 2
Hˆ = −γ n  B0 Sˆz + B1e 2 a
Sˆx cos ω t + S y sin ω t


1
= Sˆ e−iω t + Sˆ eiω t

−

2 +
La matrice représentative de Ĥ dans la base { +
(
)
(

ω0
=
Hˆ = 
2  − v2t22 +iωt
2a
 ω1e
)


v 2t 2


− 2
1
 = −γ n  B0 Sˆz + B1e 2 a Sˆ e−iω t + Sˆ eiω t
+
−
2





, − } est donc :
(
ω1e
( )
−
v 2t 2
2 a2
−iω t
−ω 0





2- L'amplitude de probabilité de transition est :
+∞
v 2t 2
+∞
− 2
1
ω
i ω −ω t
S +− = ∫ dt eiω0t + Hˆ − = 1 ∫ dt e ( 0 1 ) e 2 a
( 3)
i= −∞
2i −∞
v
soit en posant δ = ω − ω 0 (écart à la résonance) et β = , on a, d'après l'intégrale donnée
a
dans le texte :
π a −
S +− = i ω1 e
2 v
d'où la probabilité de transition − → + :
2
( 4)
δ 2a2
π ω a  −
P−→+ = S +− =  1  e v
( 5)
2 v 
est maximum pour δ = ω − ω 0 = 0 soit ω = ω 0 d'où un comportement résonant.
2
• P−→+
δ 2a2
2 v2
2
P−→+
D.Marchand
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)

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La largeur en fréquence de la courbe donnant P−→+ (cf. ci-dessus) est de l'ordre de
v
. Cette
a
a
d'un neutron dans la zone du champ
v
oscillant. D'après l'inégalité de Heisenberg ∆Eτ ≥ = , quand une interaction dure un temps
=
τ fini, l'énergie n'est mesurée qu'avec une précision ∆E ≥ . Il est normal que la courbe de
quantité est l'inverse du temps de passage τ =
τ
=
1
résonance ait une largeur de l'ordre de en énergie et de en pulsation.
τ
τ
3- L'amplitude de probabilité de transition est maintenant égale à :
( vt −b )2 − i ω −ω t 
v 2t 2
+∞
− 2 − i (ω −ω 0 )t
−
(
0)
ω1  +∞
2

S +− =  ∫ dt e 2 a
+ ∫ dt e 2 a
2i  −∞

−∞


b
dans la seconde intégrale, on obtient :
v
En effectuant le changement de variable t ' = t −
2 2
S +−
− i (ω −ω
ω 
= 1 1 + e
2i 
S +−
δ b +∞
− 2 − iδ t
−i

ω1 
=  1 + e v  ∫ dt e 2 a
2i 
 −∞
0
)
b
v
v t
− 2 − i (ω −ω 0 )t
 +∞
2a
 ∫ dt e
 −∞
v 2t 2
( 6)
δb
−i


soit l'expression précédente de S +− multipliée par le terme 1 + e v  , d'où :


2 2
δ
a
δb 
−i


π a − 2 
S +− = 1 + e v   i ω1 e 2 v  et par conséquent :


  2 v

−i
2
δb 2
v
P−→+ = S +− = 1 + e
δ
b
=4cos2
2v
2
π a −
i ω1 e
2 v
δ 2a2
2 v2
2
δ 2a2
δb
ω a  − 2
P−→+ = 2π  1  e v cos 2
(7)
2v
 v 
L'allure de P−→+ en fonction du désaccord à la résonance δ est donnée par la figure ci-dessous.
L'enveloppe gaussienne est (à un facteur 4 près) la courbe de la question précédente.
b
π
Les oscillations rapides ont une demi largeur de l'ordre de
ou T est le temps mis par un
T
v
neutron pour passer d'une zone d'interaction à l'autre.
Pour des mesures spectroscopiques, il est important de pointer avec précision le centre de la
b
raie centrale. Le fait de diminuer sa largeur dans le rapport permet donc d'obtenir une
a
meilleure précision sur le centre de résonance.
D.Marchand
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P−→+ (δ )
δ = ω − ω0
4- Les résultats précédents se généralisent immédiatement
P−→+
v 2t 2
b
b
i (ω 0 −ω )
i ( N −1)(ω 0 −ω ) 

ω
v
v
2 a 2 i (ω 0 −ω )t
=
+" + e
1 + e

∫ dt e e
4 −∞


2 +∞
1
−
2
P−→+ =
π  ω1a 

 e
2 v 
−
v 2t 2
a2
Nδ b
2v
b
δ
sin 2
2v
sin 2
2
(8)
Il existe une grande analogie entre ce résultat et l'expression donnant la transmission d'un
réseau en optique. Ceci peut s'interpréter de la façon suivante : le neutron a une certaine
amplitude de probabilité de transition de l'état − à l'état + dans chacune des zones
d'interaction. L'amplitude totale est la somme des amplitudes : il est donc naturel de voir
apparaître une somme de la forme
t + teiφ + te 2iφ +"
où eiφ est le déphasage entre deux zones d'interaction et t l'amplitude de transition dans une
seule zone.
5-
On pose maintenant z = vt , ce qui va en particulier modifier la phase du champ (effet

v
− iω  t − 
=
 z
 v
Doppler) : ω  t −  devient ω  t −  et on a + Hˆ I − = ω1e  c  . La durée d'interaction
2
 c
 c
b
vaut T = . On en déduit la probabilité de transition
v
v b
2
2
ω
−
ω
+
ω
sin
v

0
2 +∞


i  ω0 −ω +ω  t
ω
c  2v

c
P−→+ = 1 ∫ dt e 
= ω12
(9)
2
4 −∞
v

ω0 − ω + ω 
c

v
b

Cette courbe a une largeur de l'ordre de et est centrée en  ω 0 − ω + ω  = 0 d'où
v
c

D.Marchand
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Quelques thématiques actuelles en Physique Quantique
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ω0
 v
ω0 1 + 
(10 )
c
 v

1 − 
 c
Par rapport à la question 2- on trouve une fréquence décalée puisque le neutron se déplaçant
sur l'axe de l'onde électromagnétique voit une fréquence déplacée par effet Doppler.
ω=
6-
S'il y a dispersion de vitesse du faisceau de neutrons, le résultat expérimental sera la
moyenne sur la distribution de vitesse des résultats calculés pour une vitesse donnée.
Dans la méthode de la question 3- la position des franges latérales varie avec v ainsi que la
largeur de la frange centrale. Une distribution en vitesse produira des franges latérales plus
larges et s'estompant progressivement par effet de recouvrement.
En revanche, la position de la frange centrale est indépendante de la vitesse, cette frange sera
un peu élargie par la dispersion en vitesse mais demeurera au même endroit. Cette situation
est analogue à l'observation en optique de franges d'interférences en lumière blanche où seule
la frange correspondant à la différence de marche nulle subsiste.
Dans la méthode de la question 5- par contre, la position de la frange centrale dépend
directement de la vitesse. Une dispersion sur cette dernière entraînera donc une imprécision
du même ordre de grandeur sur la position de la résonance.
Il est clair que la méthode décrite dans la question 3- (et introduite par Ramsey) est la plus
intéressante au niveau de la précision.
7- Application numérique :
D
λn = 31A
On atteint expérimentalement
p=
h
λn
v=
h
M n λn
128 m.s -1
δω 0 δγ n
=
= 4, 6 ×10−7 .
ω0
γn
Avec B = 1T on a une pulsation ω 0 = γ n B0 1,83 × 108 s -1 , d'où b =
D.Marchand
π v  ω0 

 2, 4m .
2 ω 0  δω 0 
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