Bull-Inf_K-3-2014-presse:RevuePresse n°1 vol6 03/12/14 11:32 Page100 Revue de presse internationale stasés. Si seulement un de ces facteurs est présent lors de traitements à base de thérapies ciblées, le patient a de fortes chances de développer une cardiotoxicité. Cardiotoxicité des inhibiteurs HER2 (trastuzumab, pertuzumab et lapatinib) Les cardiomyocytes et les cellules endothéliales sont pourvus de récepteur erB. L’inhibition de ce récepteur entraîne une cardiotoxicité réversible. Le taux de dysfonctionnement du ventricule gauche suite au traitement par trastuzumab est constaté entre 0,5 % et 19 % des cas (Piccart et al. 2005 ; Tan-Chu et al. 2005). Le lapatinib a un profil d’effets indésirables moindre. Les recommandations pour le suivi des patients traités par trastuzumab, particulièrement en association avec des anthracyclines, incluent avant tout traitement une fraction d’éjection du ventricule gauche, puis tous les 3 mois durant le traitement, et tous les 6 mois et cela jusqu’à 2 ans après la fin du traitement. Le traitement doit être (temporairement) interrompu lors d’une baisse de 16 % ou plus de la fraction d’éjection. Le traitement peut être repris dans les 4 à 8 semaines si la fraction d’éjection retourne à la normale. Le traitement doit être interrompu de façon définitive si le patient développe une insuffisance cardiaque congestive sévère ou développe un dysfonctionnement asymptomatique du ventricule gauche de plus de 8 semaines, ou présente plus de 3 fois un dysfonctionnement ventriculaire gauche. La majorité des patients (79 %) présentant un dysfonctionnement du ventricule gauche récupèrent assez rapidement, notamment par la prise de traitements d’inhibiteurs de l’enzyme de conversion (inhibiteurs ACE), exception faite chez les personnes âgées ayant des comorbidités associées qui ne récupèrent pas complètement. Corinne Tillier, infirmière spécialiste clinique (clinical nurse specialist), Amsterdam, Pays-Bas Effets indésirables des thérapies ciblées au niveau cardiovasculaire L es thérapies ciblées sont des thérapies moléculaires qui permettent de bloquer le fonctionnement d’une ou plusieurs protéines dans la cellule cancéreuse au niveau de la transduction du signal (la transmission du signal à l’intérieur des cellules fait appel à de nombreuses molécules, agissant en cascade, ce qui est essentiel pour le développement et la croissance des cellules cancéreuses). Ces traitements sont efficaces pour certains cancers hématologiques et tumeurs solides. Ils agissent donc au niveau des cellules cancéreuses mais également au niveau des cellules normales car la transduction du signal est primordiale pour toutes les cellules. Les thérapies ciblées peuvent avoir des effets indésirables au niveau cardiovasculaire de par le fait que certaines cellules cancéreuses ont des récepteurs communs aux cellules cardiaques (cardiomyocytes) et vasculaires (cellules endothéliales). Les toxicités cardiovasculaires comprennent généralement une dysfonction du ventricule gauche, des pathologies coronaires, des troubles du rythme, une hypertension artérielle, des pathologies thromboemboliques. Les facteurs qui jouent un rôle au niveau des risques de maladies cardiovasculaires sont : la survie au cancer, l’âge, les comorbidités préexistantes, les traitements dans le passé lors de cancers primaires, secondaires ou métaBulletin Infirmier du Cancer Cardiotoxicité des inhibiteurs ABL (imatinib, dasatinib et nilotinib) Quatre-vingt dix pour cent des leucémies myéloïdes chroniques (LMC) ont une surexpression de la protéine BCRABL et également 20 % des leucémies aiguës lymphoblastiques. Avant l’apparition de l’imatinib, 90 % des patients atteints de LMC décédaient dans les 5 ans, alors que maintenant la LMC est pratiquement devenue une maladie chronique grâce à l’imatinib. Durant les essais cliniques de l’imatinib, aucune cardio- 100 Vol.14-n°3-4 2014 Bull-Inf_K-3-2014-presse:RevuePresse n°1 vol6 03/12/14 11:32 Page101 Revue de presse internationale toxicité sévère n’a été constatée, cependant une étude prospective incluant 832 patients traités par imatinib montre que 5 patients de plus de 68 ans ont développé des pathologies cardiovasculaires sévères (hémorragie cérébrale, AVC, infarctus du myocarde). Dasatinib et nilotinib peuvent induire un allongement de l’intervalle QT. Des sténoses artérielles périphériques peuvent être constatées lors de traitement par nilotinib. Des effusions pulmonaires peuvent apparaître lors du traitement par dasatinib (entre 14 % et 43 %). Il est important de prendre en compte ces toxicités cardiovasculaires car aussi bien dasatinib que nilotinib sont prescrits après un traitement par imatinib. régulièrement les lipides sanguins dès le début du traitement, car l’hypercholestérolémie augmente le risque de maladies cardiovasculaires. Les maladies cardiovasculaires sont la cause la plus fréquente de mortalité chez les personnes ayant été traitées pour un cancer du sein. Conclusion Identifier les personnes à risque pour les maladies cardiovasculaires est primordial avant chaque traitement par thérapies ciblées. Les recommandations concernant les toxicités cardiovasculaires sont limitées. En tant qu’infirmières, nous avons une opportunité unique d’aider à améliorer et à maintenir la qualité de vie du patient en effectuant des mesures du risque cardiovasculaire, en élaborant des interventions visant à réduire les risques cardiovasculaires (alimentation saine, exercices réguliers, management du stress). Cardiotoxicité des inhibiteurs des récepteurs du facteur de croissance de l’endothélium vasculaire (VEGF, VEGF-TKI) Les récepteurs du facteur de croissance de l’endothélium vasculaire jouent un rôle important dans la vasoconstriction. L’inhibition de ce facteur lors de traitements de certaines tumeurs a donc comme effet indésirable une hypertension artérielle (entre 30 % et 80 % des patients). Les facteurs de risque pour le développement de l’hypertension sont : l’âge (> 65 ans), présence d’hypertension avant le traitement, le tabagisme et l’hypercholestérolémie. Il n’y a pas de recommandations spécifiques, si ce n’est d’utiliser les recommandations de l’hypertension artérielle en général. En plus de l’hypertension, certains traitements comme bevacizumab, sunitinib, pazopanib peuvent allonger l’intervalle QT, surtout en association avec des traitements également connus pour ces mêmes effets indésirables. Il est donc important d’effectuer régulièrement des électrocardiogrammes. Des thromboses, des embolies et des hémorragies font aussi partie des effets indésirables possibles lors de traitement par sunitinib, sorafenib, bevacizumab. Coviello JS. Cardiac Side Effects of Targeted Therapies. Seminars in Oncology Nursing 2014 ; 30 (no 3) : 175-82. Les points de vue et convictions des médecins et des infirmières lors d’essais cliniques de phase 1 en oncologie pédiatrique e développement de nouvelles thérapies est nécessaire afin d’améliorer la survie des enfants atteints de cancers. La décision de participer à un essai clinique de phase 1 est un moment difficile et complexe pour les familles des enfants. Cette décision est souvent influencée par les avis de proches mais surtout par l’avis des personnels soignants. Il est donc intéressant de connaître les points de vue et les convictions des médecins et infirmières par rapport aux essais cliniques de phase 1 chez les enfants atteints de cancer. Alors que les pédiatres/cancérologues recrutent, incluent les enfants dans les essais cliniques, les infirmières jouent également un rôle important à ce moment-là. Elles ne sont pas seulement présentes pour effectuer des soins techniques, elles se font aussi souvent les avocates de l’enfant, jouent un rôle d’éducatrice, etc. Avant l’inclusion d’un enfant dans un essai clinique, l’infirmière a des entretiens avec la famille, c’est L Cardiotoxicité des traitements hormonaux Le tamoxifène est un modulateur sélectif du récepteur des œstrogènes (SERM). Il est associé à une augmentation du risque thromboembolique. Les inhibiteurs de l’aromatase (anastrozole) sont eux associés à une hypercholestérolémie. C’est pourquoi il est essentiel d’évaluer Bulletin Infirmier du Cancer 101 Vol.14-n°3-4 2014 Bull-Inf_K-3-2014-presse:RevuePresse n°1 vol6 03/12/14 11:32 Page102 Revue de presse internationale pourquoi elle peut jouer un rôle important dans la prise de décision. Cette étude clinique américaine avait pour objectif de connaître le vécu, les convictions des médecins et infirmières par rapport aux essais cliniques de phase 1 en oncologie pédiatrique. En tout, 94 pédiatres/cancérologues et 122 infirmières travaillant en oncologie pédiatrique ont participé à cette étude. Chaque participant a reçu le même questionnaire. La majorité des participants au niveau infirmier étaient des femmes (99 %) alors que 56 % des médecins participants étaient des hommes. Les années d’expérience en oncologie pédiatrique étaient pratiquement similaires dans les 2 groupes (en moyenne 14 ans). En ce qui concerne les connaissances des essais de phase 1, les médecins pouvaient clairement expliquer le but d’un essai de phase 1, incluant entre autres l’évaluation de la tolérance d’un médicament, la recherche du dosage maximal toléré. Les infirmières (21 %), quant à elles, pensaient que les études cliniques de phase 1 avaient pour objectif de tester l’efficacité d’un traitement pour un cancer spécifique. De même, les infirmières (13 %) étaient persuadées que les phases 1 avaient pour but de prolonger la vie des enfants. Les convictions des médecins et infirmières concernant les essais cliniques de phase 1 chez les enfants ne dif- Bulletin Infirmier du Cancer 102 fèrent pas vraiment, si ce n’est que les infirmières prennent plus en compte l’enfant et croient en sa capacité à comprendre le but de l’étude clinique. Les infirmières pensent également que la famille est réaliste par rapport au but de l’étude clinique, les médecins le pensent moins. Que ce soient médecins ou infirmières, ils sont tous d’accord sur le fait que les enfants sont assez âgés pour prendre une décision concernant le traitement. Comparées aux médecins, les infirmières sont plus persuadées que l’essai de phase 1 peut être bénéfique pour les enfants. Entre 80-100 % des infirmières sont convaincues que les enfants auront des effets secondaires dus à la toxicité du traitement contre 40 % des médecins. En conclusion, on peut dire que le vécu des médecins et infirmières ne diffère que sur quelques points mais que cette étude démontre que les connaissances des infirmières concernant le but et les issues des phases 1 doivent être mises à jour. Les infirmières jouent un rôle de plus en plus important au niveau de la prise de décision auprès des familles et de l’enfant. Barnes MJ, Pressey J, Adams J, Hensler MA, Madan-Swain A. Physician and Nurse Beliefs of Phase 1 Trials in Pediatric Oncology. Cancer Nursing 2014 ; 37 (no 5. Doi : 10.1097/NCC. 0000000000000099. Vol.14-n°3-4 2014