Au cours des dix dernières années, les performances des
méthodes moléculaires d’amplification et de détection des
génomes viraux (ADN et ARN) n’ont cessé de progresser,
non seulement en matière de sensibilité et de spécificité
mais aussi de par une automatisation les rendant utilisables
à grande échelle ; leur utilisation en diagnostic clinique et
dans les laboratoires de recherche ne cesse de se dévelop-
per. Ces méthodes moléculaires, dont la plus populaire est
la PCR, associent une détection directe et extrêmement
spécifique des séquences virales ciblées, avec une sensibi-
lité analytique bien supérieure à celle des méthodes de
détection sérologique des antigènes viraux ou d’isolement
des virus. Un des moteurs particuliers de ce développement
est la recherche de la sécurité transfusionnelle en matière
d’infections virales : cela implique le dépistage à grande
échelle de marqueurs sérologiques et/ou génétiques des
virus présents même en faible quantité dans les dons de
sang, qui constituent un risque pathogène pour les rece-
veurs. Ce dépistage nécessite, non seulement une sensibi-
lité maximale afin de détecter de faibles concentrations des
marqueurs viraux recherchés, mais également une très
grande spécificité de manière à limiter l’élimination de
dons identifiés de façon erronée comme contaminés. Ces
deux conditions sont nécessaires au maintien d’un rapport
coût/efficacité favorable du dépistage viral systématique en
transfusion. Les performances des tests actuels détectant
l’antigène de surface du virus de l’hépatite B (HBV) et les
anticorps dirigés contre le virus de l’immunodéficience
humaine de type 1 (VIH1) et le virus de l’hépatite C (HCV)
permettent de réduire le risque de transmission par transfu-
sion de ces trois virus à un niveau compris entre 1 : 50 000
et 1 : 1 500 000. Un risque transfusionnel résiduel demeure
du fait de la fenêtre sérologique qui suit le contact initial
avec le virus et précède l’apparition de niveaux détectables
des marqueurs sérologiques (antigènes et anticorps), et de
la période suivant la disparition de ces marqueurs sérologi-
ques dans les phases tardives de l’infection dans le cas du
HBV. Ce risque résiduel peut être à son tour significative-
ment réduit grâce au développement récent de méthodes
moléculaires de détection des génomes viraux.
L’utilisation en diagnostic clinique et en transfusion de ces
méthodes moléculaires souvent complexes est également
limitée par leur coût élevé et parfois le volume d’échan-
tillon à tester disponible. En particulier, dans le domaine
transfusionnel, elle est caractérisée par un rapport
coût/efficacité élevé dans les pays développés dans lesquels
le risque résiduel est extrêmement faible [1]. Le rapport
coût/bénéfice en année de vie de qualité (Qaly) y est de plus
de 1 000 000 dollars au lieu du seuil généralement accepté
de 50 000 dollars. Cependant, la volonté des pouvoirs pu-
blics et des populations elles-mêmes de payer pour un sang
« sans risque » a encouragé le développement de méthodes
de détection génomique, non seulement des HBV, HCV et
VIH1 représentant un risque majeur, mais aussi du parvo-
virus humain B19 (B19), du virus West Nile et du virus de
l’hépatite A. Le coût considérable de ces nouvelles techno-
logies, pour une grande part lié à des frais de brevets, a
stimulé la recherche de diverses stratégies destinées à le
réduire et à accroître la capacité diagnostique des méthodes
de détection génomique. Une première solution, utilisée en
sécurité transfusionnelle, a été de pratiquer le dépistage des
génomes viraux sur des mélanges (pools) contenant de 8 à
500 échantillons de plasma mais cela s’accompagne d’une
baisse de sensibilité due au facteur de dilution introduit.
Cette limitation peut cependant être partiellement atténuée
par l’introduction de procédures, souvent compliquées,
permettant de concentrer les virus recherchés. Une telle
approche est essentiellement applicable au dépistage à
grande échelle mais semble peu adaptée au diagnostic
clinique. Une seconde approche consiste à développer des
méthodes capables de détecter simultanément plusieurs
génomes différents dans une même réaction. Elle réduit le
coût en réactifs, le volume d’échantillon à tester, le temps
nécessaire à l’obtention des résultats, mais rend encore plus
complexe un procédé qui nécessite déjà plusieurs étapes
pour la détection d’un seul génome viral.
La présente revue a pour objectif de donner un aperçu non
exhaustif des méthodes de détection génomique en format
multiple (multiplex) actuellement disponibles en tant que
tests commerciaux manufacturés ou tests « maison » déve-
loppés dans un but de recherche ou de diagnostic, en parti-
culier dans le domaine de la sécurité transfusionnelle ; à
cette occasion, seront discutés les problèmes techniques
liés à ces nouvelles méthodes et donnés des exemples de
leurs applications cliniques.
Tests d’amplification génomique
en format multiple (multiplex)
pour le dépistage des génomes viraux
Au cours de dix dernières années, plusieurs études ont
démontré la faisabilité et l’efficacité de la détection des
génomes viraux en multiplex dans différentes situations
cliniques et épidémiologiques (tableaux 1 et 2) [2-28]. Ces
méthodes de détection mutiple peuvent constituer une ré-
ponse pratique au besoin d’un dépistage rapide, simultané
et à grande échelle de plusieurs virus. Elles sont suffisam-
ment sensibles pour détecter des infections virales, telles
que les infections à VIH1, HCV, HBV et virus humain
T-lymphotrope (HTLV), en l’absence de toute réponse sé-
rologique (fenêtre de préséroconversion). Le multiplexage
s’applique également au typage/sous-typage de souches
virales dans des études épidémiologiques. La plupart de ces
tests multiplex sont des tests « maison » à but diagnostique
ou de recherche. Seuls quelques-uns ont été développés
commercialement, en particulier dans le but d’être appli-
revue
Virologie, Vol. 11, n° 2, mars-avril 2007
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