Exemple d’études et recherche Valorisation des connaissances acquises sur la gestion des habitats du grand tétras L’enjeu est de taille, du fait de la spécificité de la population pyrénéenne de grand tétras : une sous-espèce génétiquement à part, un contexte montagnard avec des influences climatiques très différentes (atlantiques et méditerranéennes), une niche écologique élargie à celle du tétras-lyre (i.e. la capacité à utiliser des habitats quasiment non forestiers), cinq entités politiques, de nombreux gestionnaires, et bien d’autres fonctions assignées à ces espaces… En outre, le grand tétras est listé dans les annexes I et II de la Directive « Oiseaux », et l’espèce a été validée comme déterminante des « Trames Verte et Bleue », deux raisons supplémentaires pour une prise en compte sérieuse de ses exigences dans la gestion des milieux montagnards. © D. Maillard/ONCFS L’ouvrage doit permettre à tout gestionnaire des espaces concernés de connaître et de comprendre les exigences du grand tétras à quatre échelles : micro-locale (choix au moment du martelage), de la parcelle (condition de vie de l’individu), de la forêt (définition de sa capacité d’accueil actuelle et potentielle), du paysage (définitions d’objectifs stratégiques en fonction de la connectivité, de la population source, des corridors). La manière d’établir un diagnostic sur l’intérêt actuel des habitats à ces quatre échelles est également présentée dans ce guide, ainsi que l’évaluation du temps nécessaire pour atteindre une situation optimale et la faisabilité technique et financière d’une Échelle de perception Micro-locale (de l’arbre, à quelques ares) Parcelle (10-25 hectares) Forêt (300-5 000 hectares) Paysage (Pyrénées) Impact sur le grand tétras Acteurs concernés Conservation ou restauration d’éléments importants du paysage (arbre perchoir, tâche de myrtille, micro-tourbière). Bûcheron, ouvrier forestier, agent marteleur, éleveurs… Conservation ou restauration du milieu de vie à l’échelle d’un individu. Technicien et Ingénieur forestier, technicien pastoraux… Conservation ou restauration de l’habitat d’une ou quelques places de chant. Aménagistes forestiers publics et privés, DDT… Conservation ou restauration de la connectivité entre noyaux de population, et maintien ou redéploiement de l’aire de répartition. Organismes planificateurs et organismes gestionnaires (ONF, CRPF, DREAL, DRAAF, Commissariat de massif, politiques). Tableau 1. Relation entre les quatre échelles de perception de l’habitat du grand tétras, leur impact sur l’espèce, et les acteurs concernés. amélioration de la situation. La mise en cohérence de l’objectif de conservation et/ou d’amélioration des habitats du grand tétras avec les autres objectifs et documents cadres s’appliquant à ces espaces [Stratégie nationale « Grand tétras » en France et en Espagne, orientations régionales forestières, guides de sylvicultures, directives régionales, nationales ou européennes s’appliquant aux autres habitats d’espèces ou habitats naturels (ours brun, Directive Habitat)] est également abordée. Déterminer les « bons gestes » au moment des martelages et des travaux culturaux (respect ou dégagement d’arbres favorables à l’hivernage, attention particulière aux lisières intra et supraforestières, par exemple) est une étape essentielle. De même, un itinéraire technique doit être établi en fonction du diagnostic. À l’échelle de la parcelle ce seront, par exemple, le type de sylviculture et les modalités de l’exploitation forestière et du débardage qui seront définis. Des objectifs pourront être assignés à l’échelle de la forêt, et des zones où les interventions devront être plus soutenues seront délimitées. Enfin, à l’échelle du paysage, la création ou la restauration de corridors, l’établissement de schémas de mobilisation des bois ou, plus généralement, des efforts ciblés sur des forêts revêtant une importance particulière pour la conservation pourront être envisagés. Le cas échéant, des opérations de génie écologique adaptées aux situations locales et aux facteurs limitant identifiés seront concevables. Les études et expérimentations réalisées dans les chaînes pyrénéenne et cantabrique depuis 25 ans revêtent une grande importance dans la rédaction de ce guide afin d’adapter la démarche au contexte des reliefs de l’Europe du Sud-Ouest, telles que les Pyrénées. Rapport scientifique 2009sONCFS [ 43 ] CNERA – Faune de montagne La prise en compte du grand tétras dans la gestion forestière et pastorale est un des fondements de la conservation de la sous-espèce propre aux Pyrénées, dont le déclin n’est pas encore enrayé. Cet effort de conservation doit avoir une portée transfrontalière, puisque la pérennité de l’espèce dans la chaîne dépend des effectifs français, andorrans et espagnols. Pour cette raison, la rédaction d’un guide spécifique à ce thème est l’une des actions d’un programme INTERREG (Gallipyr), qui regroupe neuf partenaires français, andorrans et espagnols, et dont les objectifs sont la connaissance et la conservation transfrontalières et coordonnées des galliformes de montagne des Pyrénées.