AS
TR
O
P
HYS
I
QUE
C
iel & Espac
e
28
JU
IN
2009
O
USS
É
E de fièvre chez les astro
-
physiciens.
A
pr
è
s moins de trois
a
nnées passées en orbite sur le
s
atellite Resurs-DK1, l
exp
é
rience italo
-
russe Pamela vient de d
é
tecter une bizarre-
rie dans le flot de particules cosmiques qui
h
l
T
rr
n
n
in
D
n
n
c
ertaine gamme d
’é
nergies, entre 1,5 et
100 GeV
(1)
V
, les positrons sont
j
usqu
’à
100
f
ois
p
lus abondants que la théorie ne le prédit !
Pour le moment, cet excès d’antiparticu
-
les de masse
ég
ale et de char
g
e oppos
é
e
à
l’électron ne porte que sur 9 430 spécimens.
A
utant dire une poi
g
née.
Mais tout le monde
s’excite beaucoup sur le sujet”
, confie Pierre
Salati, astrophysicien du Lapp
(
2
)
qui travaille
s
ur ce résultat à Princeton (
É
tats-Unis).
C
ar si l
exc
è
s de
p
ositrons se con
f
irme, il
p
ourrait correspondre tout simplement à
la premi
è
re d
é
tection de la mati
è
re noire !
C
es quelques particules ultral
é
g
è
res nous
d
ir
a
i
e
n
t
e
nfin
et
co
mm
e
n
t
se
cac
h
e
l’
es-
s
entiel de la masse de l
Univers. Et l
un des
p
lus grands myst
è
res de l
astrophysique,
v
ieux de 75 ans (voir encadré), serait sur le
p
oint d
’ê
tre r
é
solu.
À
Rome, c’est en tout cas l’es
p
oir de
Piergiorgio Picozza, le concepteur de
P
a
m
ela.
En t
h
éorie, les ra
y
ons cosmiques
q
ui nous atteignent sont produits lors de la
co
lli
s
i
on
d
e no
y
aux accé
l
érés avec
d
es atomes
du milieu interstellaire.
C’
est le mécanisme
de spallation
, précise Pierre Salati. Or jus-
tement, pour le chercheur italien et son
é
quipe,
l
excès d
abondance découvert
p
a
r
P
amela est incompatible avec ce mécanisme
.
I
l s’explique parfaitement, en revanche, si
P
Matière noire :
la piste des particules
cosmiques
>
M
atière noire, éner
g
ie sombre :
à
l’aube d’une r
é
volution cosmologique,
u
ne s
é
rie de www
.
cieletes
p
aceradio.
f
r
POUR EN SAVOIR PLUS
L’expérience spatiale Pamela vient-elle de d
é
tecter l
é
nigmatique mati
è
re noire ?
L
’annonce, en avril, de la d
é
tection d’un exc
è
s d’antimati
è
re dans le flux de
p
articules
q
ui bombarde
la Terre en permanence pourrait être une piste.
Da
vi
d
F
ossé
CEE469_int.pdf 28 12/05/09 9:08:28
JU
IN
2009
29
Ciel & Espac
e
l
a mati
è
re noire est
p
r
é
sente dans l
Uni
-
vers sous forme de
p
articules exoti
q
ues
q
ui
se désintè
g
rent en particules plus “classi-
q
ues
, dont les
p
ositrons. Existent-elles, ces
p
articules miracles dotées de masse et
q
ui
n
e doivent que très peu intera
g
ir avec la
m
ati
è
re normale
?
O
ui, mais
p
our l
heure
u
ni
q
uement dans les cerveaux des th
é
ori
-
ciens, qui les ont baptisées wimps
(
3
)
.
Au
j
ourd’hui, les wimps, ces ‘particules mas-
sives intera
g
issant
f
aiblement
, sont les can
-
didates les plus sérieuses pour la matière
noi
r
e”
, explique Pierre Salati. Pour autant,
mal
g
r
é
plusieurs exp
é
riences men
é
es sous
terre, dans la mer et sous la glace pola
i
re, la
preuve de leur existence n’a toujours pas été
a
pport
é
e. Et selon le chercheur, pas davan-
tage par Pame
l
a que par un autre c
h
asseur
de wimps : “D’abord, il
f
aut être certain que
l
ex
p
érience mesure bien un excès de
p
osi
-
t
rons.
C
ar souvent, un
p
roton
p
eut
ê
tre
p
ris
pour un positron ! D’autant que Pamela n’a
a
cc
è
s qu
’à
une quantit
é
relative : le rapport
du nombre de
p
os
i
trons sur le nombre total
d’électrons et de positrons. Enfin, le modèle
canonique auquel les mesures sont compa
-
es est loin d
’ê
tre
p
ar
f
ait.
L
a
p
lu
p
art des
p
art
i
cules
q
u
i
nous atte
i
-
gnent, c’est entendu, sont produites par
sp
allat
i
on. Ma
i
s
q
uelles
i
nteract
i
ons au
j
uste produ
i
sent telle ou telle part
i
cule
s
econdaire ? Et dans quelle proportion ?
P
ar a
i
lleurs, comment les ra
y
ons cosm
i
ques
s
e propagent-ils dans la
G
alaxie en
f
onc
-
t
ion de leur masse, de leur charge ? Et dans
le
Sy
st
è
me solaire, quelle est l
in
f
luence
d
u
S
oleil, en
p
articulier de son activit
é
m
agnétique, sur le flux de particules élec-
t
ris
é
es
q
ui atteint nos satellites
?
Bien
q
ue
les chercheurs aient travaill
é
dur sur cha
-
c
un de ces points, ils sont loin de les com-
p
rendre
p
ar
f
aitement. Du cou
p
, la r
é
alit
é
d
e l
exc
è
s de
p
ositrons doit elle-m
ê
me
ê
tre
p
rise avec des pincettes
.
E
n admettant
q
ue cet exc
è
s soit con
f
irm
é
p
ar l
ex
rience euro
enne
A
M
S
,
p
lus
p
erformante que Pamela et qui devrait
voler en 2010 sur la station s
p
atiale inter
-
n
ationale, il
f
audra s
interroger sur un
aut
r
e
r
ésu
l
tat
i
ta
l
o
-r
usse
m
o
in
s
m
éd
i
at
i
:
le
f
lux d
antiprotons dans le ra
y
onnement
osmi
ue, lui,
ara
t tout
ait con
orme
à la théorie de la spallation. Au grand dam
es tenants des wim
s, il ne n
cessite
aucune
p
roduction su
pp
l
é
mentaire
p
ar de
la matière noire. Et pourtant, les wimps
s
ont cens
é
s
f
ormer autant de
p
ositrons
q
ue
d’
anti
p
rotons !
A
lors
?
C
ertains th
é
oriciens
explorent déjà des modèles dits “lepto
-
p
hiles
, dans les
q
uels la mati
è
re noire ne
p
eut se d
é
sint
é
grer qu
en leptons
(
la
f
amille
d
e particules dont le positron fait partie,
m
ais pas l
antiproton
)
. Reste que, pour
beaucou
p
, c
est aller un
p
eu vite en beso
-
gne. D’autant que le bestiaire des astrono-
m
es poss
è
de au moins un ob
j
et capable de
p
rodu
i
re des
p
os
i
trons en masse…
Les
g
ens se sont
j
etés à bras raccourcis su
r
l
a mat
i
ère no
i
re, ma
i
s un
p
u
l
sar à mo
i
ns
d
e 3 000 années-lumière expliquerait assez
b
ien le résul
t
a
t
d
e Pamela”, précise Pierre
S
alati. Dans leur publication, Pier
g
ior
g
io
P
icozza et ses coll
è
gues n
en
f
ont d
ailleurs
p
as mystère. Pourquoi ont-ils alors mis
l
’acce
n
t
su
r l
a
m
at
i
è
r
e
n
o
ir
e
?
Parce
q
ue
c’est beaucoup plus excitant !”
répond un
brin candide le chercheur italien
,
avant
d’
avouer qu
il n
a pas d
ar
g
ument
“f
erme
en
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aveur des wim
p
s. Il reste donc d
é
sor
-
m
ais
à
d
é
busquer un pulsar proche qui
n
ous aurait
é
chapp
é
jusqu
ici. Justement, le
s
atellite Fermi devrait être capable de voir
l
’é
mission
g
amma de la sur
f
ace surchau
f-
e d
une telle
é
toile
à
neutrons. Et comme
il a lui-même repéré récemment un excès
lectrons dans le ra
onnement cosmique,
ex
p
licable
p
ar la
p
r
é
sence d
un
p
ulsar, nul
d
oute qu’il est déjà en chasse ! Sa détection
d
e mati
è
re noire n
est pas encore totale-
m
ent
é
cart
é
e, mais
p
our Pamela le com
p
te
à
r
ebou
r
s
a
sa
n
s
doute
co
mm
e
n
cé.
.
(
1
)
Un gigaélectronvolt
(
GeV
)
vaut un milliard d’électronvolts,
c
ette unité correspondant à l’éner
g
ie d’un électron accéléré dans
u
n cham
p
électri
q
ue de 1 volt.
(
2
)
Laboratoire d’Annecy-le-Vieux de physique des particules.
(
3
)
Acronyme de
w
eakl
y
interactin
g
massive particles
.
Difficile à croire, mais sur la photo ci-contre, les
neuf dixièmes de la masse de l’amas de Persée sont
invisibles au regard. Ils sont constitués de matière
noire, dont la nature demeure énigmatique. Cet amas
de galaxies, situé dans la constellation de Persée,
est éloigné de 250 millions d’années-lumière.
Le Suisse Fritz Zwick
y
mesure
l
a vitesse des
g
alaxies de
l’amas de Coma et en déduit
q
ue la masse
de cet amas est des centaines de fois
p
lus
im
p
ortante
q
ue sa lumière ne le laisse
p
araître.
I
l conclut à la
p
résence d’une vaste
q
uantité
de
m
a
ti
è
r
e
invi
s
i
b
l
e
.
V
e
r
a
R
ub
in
e
t K
e
nt F
o
r
d
m
o
ntr
e
nt
q
ue les étoiles de la
p
éri
p
hérie
de la
g
alaxie M 31 filent bien plus vite qu’elles
n
e le devraient. Oubliée de
p
uis des décennies,
l
a
m
a
ti
è
r
e
n
o
ir
e
r
e
f
a
it
su
rf
ace
.
S
elon Heinz Pa
g
els et Joel Primack,
la matière noire
p
ourrait être
constituée de
g
ravitinos, des particules issues
de la su
p
ersymétrie. La recherche
des
p
articules exoti
q
ues
p
rend son envol.
Les
obse
rv
a
ti
o
n
s
du
f
o
n
d
d
iffus cosmolo
g
ique ou
l’étude de la nucléosynthèse
p
rimordiale
indi
q
uent
q
ue la matière ordinaire (celle dont
n
ous sommes faits) com
p
te
p
our
p
res
q
ue rien
da
n
s
l
a
m
asse
t
o
t
a
l
e
de
l’
U
niv
e
r
s
.
P
arallèlement, les
g
rands pro
g
rammes
de recherche de naines brunes ou autres ob
j
ets
f
roids, envisa
g
és comme matière noire,
fo
nt
c
h
ou
b
l
a
n
c
.
Ce
ll
e
-
c
i
es
t
sa
n
s
dou
t
e
de
n
ature exoti
q
ue.
Les
s
im
u
l
a
ti
o
n
s
n
uméri
q
ues mimant
la naissance des
g
alaxies montrent que
celles-ci ne
p
euvent se former sans la
p
résence
de vastes
q
uantités de matière invisible
.
1933
1970
1982
Années 1990
Années 2000
Une brève histoire
de la matière noire
J.Gaban
y/
C&E Photos
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