Dans la majorité
des pays musulmans,
la liberté de croire
et de s’exprimer est
limitée, voire interdite.
L
es musulmans du monde entier
ont l’habitude de s’appeler “frère”
mais leur religion varie beaucoup d’un
pays à l’autre. Quel rapport, par exemple,
entre l’islam en France et l’islam en Arabie
Saoudite ? Dans ce pays, la population
suit une version très stricte de l’islam,
appelée “wahhabisme”. La charia, la
loi islamique, y est appliquée d’une
façon intransigeante, voire choquante
pour beaucoup.
En 2015, un blogueur saoudien, Raif
Badawi, a été condamné à 10 ans de
prison et 1 000 coups de fouet pour “insulte
à l’islam”. Il avait demandé dans son blog
que la religion joue un rôle moins impor-
tant dans son pays. En Arabie Saoudite,
renoncer à l’islam est aussi considéré
comme un crime passible de la peine de
mort… Ce fait de renier sa religion ou
d’en changer, l’apostasie, est puni dans
plusieurs pays musulmans. Au Pakistan,
une chrétienne a été condamnée à mort
parce qu’elle aurait insulté Mohammed.
Voilà de quoi brouiller fortement l’image
de tolérance de la religion…
un espoir
pour la démocratie ?
Les textes de l’islam réglementent
la vie familiale et sociale mais aussi
le fonctionnement politique des pays
musulmans. C’était le cas avec la reli-
gion chrétienne dans la plupart des
pays européens. Mais à partir du
18
e
siècle, les idées de démocratie ont
abouti à séparer la religion de la politique.
Les hommes sont devenus des citoyens
qui peuvent s’exprimer librement, élire
leurs dirigeants politiques et choisir
de croire ou de ne pas croire en Dieu.
Cette liberté n’existe pas dans la plupart
des pays musulmans, notamment
au Moyen-Orient.
La démocratie est-elle alors impossible
en terre d’islam (qui signifie “soumission
à Dieu”) ? L’Indonésie, 1
er
pays musulman
du monde par sa population, est une
démocratie. Comme la Turquie ou le
Sénégal. Ces exemples sont rares… Et la
violence du terrorisme islamiste (Daesh,
Ces ados tunisiennes
ont participé
à la révolution qui a permis au peuple
de chasser le dictateur du pouvoir, en 2011.
Manifestation
en faveur de
Raif Badawi.
Ce Saoudien a été
condamné à 10 ans
de prison et 1 000
coups de fouet
dans son pays.
Son crime : avoir
créé un blog
où il demandait
plus de tolérance
et jugeait que
la religion jouait un
rôle trop important
dans son pays,
l’Arabie Saoudite.
al-Qaïda, les taliban, etc.)
qui s’exerce d’abord dans
les pays musulmans semble
laisser peu de place aux
espoirs démocratiques. Mais
les peuples sont capables de
réagir comme le montre
l’exemple du “printemps
arabe”.
la révolution
tunisienne
En 2011, de nombreux pays
arabo-musulmans ont vécu
des mouvements de révolte
surnommés le “printemps
arabe”. En Tunisie, en
Égypte, en Libye, les dicta-
teurs ont été chassés du
pouvoir par le peuple qui
ne supportait plus la pau-
vreté et l’injustice. Les Tuni-
siens ont réussi à mettre en
place une démocratie. Si elle
est encore fragile, le pays
s’en sort bien mieux que ses voisins. En
Égypte, l’armée s’est emparée du pouvoir.
Et la révolution libyenne s’est transformée
en une terrible guerre civile. Des mani-
festations ont aussi eu lieu dans d’autres
pays, mais les autorités ont réussi à garder
leur pouvoir (sauf au Yémen).
Même s’il semble être un échec, le “prin-
temps arabe” a montré que les popula-
tions n’étaient pas résignées. Il est pro-
bable qu’un jour elles se révolteront
à nouveau, avec, peut-être, plus de succès.
Cet événement considérable montre que
les musulmans, tout comme les autres
citoyens du monde, ont envie de liberté
et de justice.
Texte : F. F.
Peut-on être libre
en terre d’islam ?
© OSNOWYCZ AUDE/SIPA
© STEPHANE DE SAKUTIN/AFP
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Malaise et tensions