ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » INVESTIR DANS UN PROJET DANS LE SECTEUR DES RESSOURCES NATURELLES DANS UN PAYS EN VOIE DE DÉVELOPPEMENT : PRINCIPAUX ÉLÉMENTS À CONSIDÉRER LORS DE LA NÉGOCIATION D’UNE CONVENTION D’ÉTABLISSEMENT AVEC LE PAYS HÔTE Louis Péloquin 1 La convention d’établissement 2 établit le régime juridique et financier qui s’appliquera aux activités d'exploitation qui seront exercées à l’intérieur du périmètre pour lequel la concession minière a été octroyée. Idéalement, elle devra couvrir l'exploration et la mise en valeur, de même que l'exploitation minière. La convention d’établissement garantit que les frais engagés pour l’exploration, la mise en valeur et l'exploitation de ressources naturelles dans un pays en voie de développement ne seront pas soumis à des variations incontrôlables et imprévues. La convention d’établissement constitue en quelque sorte l’assurance pour l’investisseur que le pays hôte ne modifiera pas, du moins durant une certaine période, le cadre juridique, économique et financier à l’intérieur duquel s’effectuera l’exploitation du gisement considéré. En d’autres termes, la convention d’établissement sécurise pour une période donnée l’investissement qui sera effectué. 1 Chargé de cours à la Faculté de droit de l’Université de Montréal. 2 Aussi appelé parfois « contrat d’État » ou « accord de développement économique ». © Louis Péloquin 2013 1 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » Deux catégories d'enjeux sont généralement associées à la négociation d'une convention d’établissement : La première catégorie, de nature financière, concerne la division des recettes du projet, dont, notamment, l'impôt sur le revenu, les redevances («royalties»), la participation économique et financière du gouvernement ainsi que les autres paiements devant être faits au pays hôte. Cette première catégorie porte essentiellement sur les droits économiques des parties. La deuxième catégorie concerne des questions plutôt reliées aux droits de gérance du projet comme, par exemple, le degré de contrôle exercé sur le projet, l'obligation d’embaucher de la main-d'œuvre locale, le régime environnemental, l'obligation d’acheter des biens et des services auprès de fournisseurs locaux, la commercialisation des minéraux extraits du sous-sol et les relations avec les collectivités locales, y compris les peuples autochtones. Cette deuxième catégorie porte essentiellement sur les droits politiques des parties. Il est impératif que tous ces enjeux soient traités ensemble dans un seul et même document. Ils ne devraient idéalement, jamais être séparés. Plus précisément, la convention d’établissement devra traiter des points suivants : la gestion des aspects économiques du projet, le cadre réglementaire dans lequel s’inscrit le projet, la garantie de la sécurité juridique des titres miniers, les critères objectifs d’octroi des droits miniers, l’étendue de la discrétion de l’administration gouvernementale, le rôle de l’État dans le développement, la mise en place d’institutions efficaces pour gérer le projet, les droits et responsabilités de chacun dans la mise en place et l’utilisation des infrastructures requises, le régime fiscal et douanier, la protection de l’investissement étranger, le développement durable et la protection de l’environnement, © Louis Péloquin 2013 2 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » la responsabilité sociale et la contribution de l’investisseur au développement économique du pays-hôte et la transparence dans la gestion de la convention, notamment en matière de lutte contre la corruption. 1. Parties à l'entente L'investisseur étranger et le pays-hôte sont les parties à l'entente. Dans certains cas, un ministre signera l'entente pour le compte du gouvernement du pays-hôte. Dans d'autres cas, l'assemblée législative ratifiera l'entente lui donnant ainsi force de loi. Il est primordial de consulter la législation du pays hôte (y compris sa loi constitutionnelle) pour s'assurer que, légalement, le signataire de l'État a le pouvoir nécessaire pour signer le document et, ainsi, lier l'État relativement à l'ensemble des dispositions de l'entente. Par exemple, il est possible que le ministre des mines n’ait pas le pouvoir de lier le gouvernement relativement à certains aspects fiscaux du projet. L’intervention du ministre des finances pourra alors s’avérer nécessaire. 2. Garantir la sécurité juridique des droits miniers La convention d’établissement devra garantir à l'investisseur le droit d'exploiter le gisement qu’il a découvert grâce à ses efforts d’ordre technique et financier. La façon la plus simple de garantir ce droit est d'octroyer à l'investisseur un titre combiné, c’est-à-dire un titre qui confère à la fois le droit d'explorer le territoire pour lequel il a été délivré et le droit d'exploiter tout gisement qui pourra éventuellement y être découvert. Si un titre distinct doit être obtenu, la convention d’établissement devra très clairement prévoir les © Louis Péloquin 2013 3 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » conditions d'octroi du titre minier. Il devra être octroyé uniquement sur la base de critères purement objectifs lors de la découverte d'un gisement commercialement exploitable de substances minérales. Du point de vue de l’investisseur, en aucun cas, le gouvernement du pays hôte ne devra avoir le droit d'exercer une quelconque discrétion dans l'octroi du droit d'exploitation. D’autres intervenants pourraient cependant contester l'octroi de la concession minière. Il n’est pas rare en effet, dans certains pays, que certains groupes d’individus contestent systématiquement les droits miniers conférés à une entreprise étrangère dans l’espoir que cette dernière leur paie un certain montant d’argent pour « acheter la paix ». C’est une forme de chantage qui se retrouve malheureusement trop souvent dans certaine juridictions. Le risque d'une telle contestation aura nécessairement pour effet de créer de l'incertitude à l’égard du titre détenu par l’investisseur étranger. L'unique façon d'écarter ce risque est de faire en sorte que le titre minier soit octroyé par l'assemblée nationale du pays hôte, directement, par le biais de la convention d’établissement, ce qui aura pour effet, à toutes fins utiles, de supplanter tout autre titre qui a été octroyé auparavant. Les modalités du titre minier doivent permettre à l'investisseur de faire tout ce qui est nécessaire pour passer à l'étape suivante. Ainsi, le temps alloué pour compléter une étude de faisabilité sur le gisement qui aura été découvert devra être suffisant. La moyenne de l'industrie est de sept ans à compter de l’octroi du permis d’exploration. Un délai de moins de sept ans est donc inacceptable dans la plupart des cas. De plus, après le dépôt de l'étude de faisabilité, l'investisseur doit disposer de suffisamment de temps pour © Louis Péloquin 2013 4 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » financer le projet et construire la mine et la mettre en service avant de commencer son exploitation commerciale. Le titre minier doit également prévoir un délai approprié pour l'exploitation du gisement afin de permettre à l'investisseur, à tout le moins, de récupérer son investissement et de générer un rendement adéquat sur celui-ci. De manière générale, un délai de 25 ans est jugé suffisant. Le gouvernement veut s'assurer de la diligence de l’investisseur étranger dans toutes les phases du projet et exige habituellement que chaque phase des travaux soit complétée dans un délai donné. De son côté, l'investisseur souhaite maintenir la plus grande souplesse possible. Les variations de prix, par exemple, peuvent souvent avoir une incidence sur la décision de commencer les travaux de mise en valeur, mais étant de nature temporaire, ne devraient pas entraîner la perte totale de son investissement par l'investisseur. La clause de force majeure sera souvent utilisée pour régler cette question. La convention d’établissement peut également contenir une clause spécifique prévoyant la prolongation de la durée d'une phase de travaux pour un certain nombre de raisons, notamment la baisse des cours des substances minérales pour lesquels le permis a été octroyé. La convention d’établissement constitue de loin la façon la plus efficace d'encadrer l'investissement pour ce qui est des conditions régissant l'octroi d'un titre minier. Ces conditions doivent être parfaitement claires dès le départ et doivent demeurer stables tout au long de la durée du projet. Le gouvernement du pays hôte ne devrait en aucun cas avoir le droit de résilier la convention d’établissement ou de révoquer les droits © Louis Péloquin 2013 5 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » du détenteur du titre à l'égard du gisement, à moins que l'investisseur n'ait omis de corriger un manquement important aux conditions régissant son octroi, après avoir été dûment avisé par écrit de ce manquement. Les manquements qui ne portent pas sur un fait important ne devraient jamais donner lieu à la révocation d'un titre minier. De plus, du point de vue de l’investisseur étranger, le gouvernement du pays hôte ne devrait pas avoir le droit d'adopter de nouvelles lois (par exemple : des lois environnementales, des règles en matières de droit social et des lois foncières) qui pourraient avoir une incidence sur la capacité du détenteur du titre à pleinement exercer ses droits et à réaliser la valeur de son investissement tel qu’envisagé au départ sur la base de l’étude de faisabilité. En effet, du point de vue de l’investisseur, l’adoption de telles lois pourrait constituer une expropriation déguisée et devrait être susceptible d’une compensation juste et équitable. 3. Régime fiscal et douanier Le régime fiscal détermine le mode de division des recettes du projet entre l'investisseur et le pays hôte. Même si les deux parties essaieront de maximiser leur part, chacune d'entre elles sera assujettie à certaines restrictions. Si le pays hôte est trop gourmand, il ne pourra obtenir certains investissements importants, ce qui nuira ultimement au développement du pays. L'investisseur, quant à lui, doit tenir compte des autres choix s'offrant à lui pour l'utilisation de son capital. Il est tout à fait possible, vu la qualité du projet, qu'il ne soit pas en mesure d'obtenir un rendement supérieur ailleurs. Les exigences des prêteurs devront également être prises en compte. Dans certains cas, © Louis Péloquin 2013 6 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » ce qui serait acceptable pour le pays hôte et l'investisseur étranger ne le sera pas pour les prêteurs, empêchant ainsi la mise en valeur du projet. Bon nombre de pays n'encouragent guère la négociation des dispositions de la convention d’établissement. En effet, les modalités du contrat sont souvent déjà établies par une loi générale. C’est le cas de plusieurs pays qui ont adopté un code des investissements. Dans un tel cas, le régime juridique et financier est un donné qu’il faut analyser afin de déterminer s’il y a lieu de procéder à la mise en valeur du projet. Il est, cependant, souvent possible de convaincre le pays hôte de modifier sa loi s'il est démontré que les conditions sont trop sévères et qu'elles empêcheront un investissement spécifique, jugé stratégique, mettant ainsi un frein au développement économique du pays. La convention d’établissement est l'instrument juridique le mieux adapté pour établir le cadre financier régissant un investissement étranger. Règle générale, l'investisseur favorisera la situation où le gouvernement prélèvera sa juste part du projet sous deux formes d'impôts seulement, soit un impôt sur les bénéfices générés par le projet et une redevance («royalty») fondée sur les bénéfices. Ces deux formes d'impôts sont idéales du point de vue de l’investisseur et des prêteurs car elles tiennent compte de la capacité de payer du projet. Plusieurs facteurs doivent être considérés lorsqu'il est question de l'imposition des bénéfices des sociétés, notamment le taux d'imposition sur le revenu des sociétés, les taux de retenue à la source sur les dividendes payés à des non-résidents (« withholding © Louis Péloquin 2013 7 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » taxes »), les provisions pour amortissement, les congés fiscaux, les dispositions relatives au calcul de revenu imposable des sociétés et l'impôt sur les bénéfices exceptionnels (« windfall profit tax »). La convention d’établissement vise à garantir une certaine stabilité fiscale à l'investisseur, du moins pendant la période de récupération de son investissement (« payback »). Cette stabilité fiscale est souvent une condition préalable à l'obtention de financement. La convention d’établissement doit donc énoncer le taux de l'impôt sur le revenu ainsi que son mode de calcul. Les règles relatives au calcul du revenu imposable constituent l'un des principaux enjeux au moment de la négociation de la convention d’établissement. La convention d’établissement devrait toujours énoncer les déductions permises dans le calcul de l'impôt sur le revenu. Cela pourra être fait directement dans la convention ou en vertu d’une incorporation par référence à la loi fiscale du pays-hôte au moment de sa conclusion. Il est important que ces déductions ne se limitent pas à la dépréciation et à l'amortissement des coûts immédiats du projet; il faudrait également tenir compte des sommes affectées aux travaux d'exploration infructueux réalisés, directement ou indirectement, dans le cadre du projet. En outre, les règles relatives à la déduction des dépenses en immobilisations du revenu imposable auront une incidence importante sur les deux parties puisqu’elles modifieront le calendrier des paiements d'impôt et, par conséquent, la valeur du projet par le biais du calendrier des flux de trésorerie. © Louis Péloquin 2013 8 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » En raison de la très grande volatilité des revenus provenant de l'exploitation minière, les investisseurs demandent souvent à obtenir le droit de reporter prospectivement sur plusieurs années les pertes ou le revenu moyen. Dans la plupart des cas, les pertes peuvent être reportées prospectivement sur cinq ans. L'effet du régime fiscal du pays hôte sur les bénéfices après impôt dans le pays d'origine de l'investisseur devra également être étudié. Il faudra ainsi vérifier l’application des conventions fiscales ou conventions relatives à la double imposition. Parfois, à l’instar de certains pays d'Afrique, le régime financier prévoit un congé fiscal qui élimine l'impôt des sociétés pour un certain nombre d'années, souvent jusqu'à ce que le capital investi dans le projet ait été récupéré. Le même résultat peut être atteint grâce à l'amortissement accéléré, mécanisme qui a gagné en popularité ces dernières années dans certaines régions. L'un des points les plus controversés dans la négociation de la convention d’établissement est l'imposition d'un impôt sur les bénéfices exceptionnels. Le pays hôte peut insister pour obtenir à un moment donné sa part de ce qu'il considère comme des bénéfices excédentaires, c’est-à-dire en sus du rendement espéré ou normal du projet. L'impôt sur les bénéfices exceptionnels est généralement perçu de deux façons, soit 1) sous forme d'un impôt calculé en pourcentage sur le revenu qui dépasse un taux de rendement normal, fondé sur les dépenses en immobilisations accumulées, soit 2) sous forme d'un impôt calculé en pourcentage sur la valeur actuelle accumulée des rentrées de fonds nettes à un taux d'accumulation donné (« valeur actualisée nette » ou « VAN »). © Louis Péloquin 2013 9 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » Du point de vue de l'investisseur et des prêteurs, les redevances ad valorem fondées sur la production ont l'inconvénient de constituer un coût de production supplémentaire et, par conséquent, elles peuvent avoir une incidence directe sur la viabilité du projet. Elles ont en effet pour conséquence d’accroître sensiblement, du point de vue de l’investisseur, le risque associé au projet et donc de diminuer sa valeur actuelle nette. Pour cette raison, les investisseurs préfèrent les redevances fondées sur les bénéfices aux redevances fondées sur la production. Les redevances fondées sur la production ne tiennent pas compte, notamment, des variations des coûts de production ou du revenu qui sont temporairement causées par la faiblesse des teneurs ou des prix des métaux. Les taux des redevances fondées sur les bénéfices sont toujours plus élevés que les taux des redevances fondées sur la production. Dans tous les cas, les taux doivent être stables pendant la durée de vie de la mine. Du point de vue du gouvernement, les redevances fondées sur la production ont l'avantage d'être une source plus stable de revenus que l'impôt des sociétés ou les redevances fondées sur le bénéfice net. Elles ne dépendent pas de la rentabilité de la mine. Les investisseurs accepteront cependant rarement des redevances fondées sur la production dépassant 2 ou 3 % quoique, depuis quelques années, suite aux importantes augmentations des prix des matières premières sur les marchés mondiaux et leur corollaire, la montée du « nationalisme des ressources », nous assistons à une légère augmentation du pourcentage jugé acceptable. Ainsi, il n’est pas rare maintenant de voir des pays imposer des taux de redevance sur la production de 4%. Enfin, le mode de calcul des redevances ne doit en aucun cas porter à confusion. Il © Louis Péloquin 2013 10 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » doit, dès le départ, être établi d’une manière claire et précise dans la convention d’établissement. Il faudra toujours éviter les redevances de fait qui incluent, notamment, les frais ferroviaires et portuaires, les loyers et autres impôts fonciers de même que les prix de vente artificiellement gonflés par le gouvernement en place de l'énergie requise pour exploiter la mine. Les redevances de fait peuvent faire augmenter considérablement les coûts d'exploitation de la mine et ainsi avoir une incidence directe sur la rentabilité du projet et, par conséquent, la décision de l’investisseur d’aller de l’avant avec le projet. Les droits de douane et les taxes à l'exportation peuvent également nuire considérablement à la rentabilité d’un projet. La convention d’établissement devra toujours prévoir de manière non équivoque que l'équipement, les pièces de rechange et les matériaux nécessaires à la réalisation du projet peuvent être importés en franchise des droits de douane, des taxes de vente et des taxes sur la valeur ajoutée (« TVA »). Dans certains cas, toutefois, l'exonération des droits de douane ne s'appliquera qu'aux marchandises qui ne seraient pas autrement disponibles à des prix concurrentiels dans le pays hôte. D'une manière générale, elle s'applique pendant les périodes de mise en valeur et d'exploitation du projet, mais elle peut, parfois, également s'appliquer pendant la phase d'exploration. Chose certaine, l'administration ne devrait avoir qu'un pouvoir discrétionnaire minimal à cet égard. © Louis Péloquin 2013 11 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » 4. Prise de participation de l’État dans le capital du projet Historiquement, les gouvernements des pays en voie de développement ont exprimé le souhait de prendre une participation dans le capital des projets miniers situés sur leur territoire. De cette façon, ils estiment pouvoir accroître leur emprise sur le développement des ressources naturelles situées sur le territoire national et contribuer à la formation d'une nouvelle génération de fonctionnaires possédant une connaissance approfondie d'une des principales industries du pays. De plus, ils veulent ainsi participer directement aux bénéfices qui seront générés par les sociétés minières étrangères opérant sur leur territoire. Les investisseurs accepteront généralement une participation étatique tant et aussi longtemps qu'elle ne dépasse pas 25 % et qu'elle n'a pas d'incidence importante sur le contrôle de la gestion du projet. Selon les circonstances, la participation étatique peut prendre diverses formes : il peut s'agir d'une participation gratuite (« free equity interest »), d’une participation reportée (« carried interest »), d'une participation pleine et entière (« working interest ») ou d’une combinaison de deux ou plusieurs d’entre elles. L'un des arrangements les plus courants permet au gouvernement ou aux nationaux du pays hôte d'acheter une participation dans le projet à un prix déterminé selon une formule établie d’avance. L'acheteur peut également souvent bénéficier des travaux d'exploration effectués préalablement sur le site minier ou se voir créditer la valeur des infrastructures construites par le gouvernement pour le bénéfice du projet. Parfois, l’État peut avoir le droit d'augmenter sa participation à une date ultérieure. Le prix à payer par l’État pour sa © Louis Péloquin 2013 12 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » participation aura évidemment une incidence directe sur la valeur du projet pour l'investisseur. En effet, si l’État peut s’approprier d’une part du projet à un prix inférieur à sa juste valeur marchande, cela aura un effet direct sur la valeur de la participation de l’investisseur étranger et, par conséquent, sur la viabilité du projet. 5. La clause de stabilisation Les clauses de stabilisation dans les conventions d’établissement constituent l’instrument le plus efficace à la disposition de l’investisseur étranger souhaitant se prémunir contre le risque politique d’un changement dans les règles du jeu. Elles constituent en quelque sort un compromis entre les besoins en capitaux des pays en voie de développement pour mettre en valeur leurs ressources naturelles et leur volonté de préserver une certaine autonomie politique dans certains secteurs clés de leur économie, notamment en matière sociale et environnementale. La question est non pas tant de savoir s’il y a lieu d’insérer une clause de stabilisation dans la convention d’établissement, mais plutôt d’en déterminer la portée. En d’autres mots, dans quelle mesure le pouvoir de réglementation de l’État sera-t-il circonscrit? Cette question est évidemment très sensible du point de vue politique et un des éléments les plus complexes de la négociation. En effet, jusqu’à quel point l’État renoncera-t-il à exercer sa souveraineté? La convention d’établissement devra donc toujours contenir, du point de vue de l’investisseur, une clause de stabilisation. Il s’agit, en fait, d’empêcher le pays-hôte d’exercer ses droits souverains pour modifier unilatéralement les conditions initiales © Louis Péloquin 2013 13 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » dans lesquelles a été réalisé l’investissement. En effet, dans le cadre d’une clause de stabilisation, l’État s’engage à ne pas appliquer une nouvelle disposition législative aux matières couvertes par la convention d’établissement (protection contre les risques politiques). On parle alors de gel de la politique gouvernementale; il s’agit en effet de restreindre les possibilités d’opportunisme réglementaire du gouvernement du pays-hôte de manière à sécuriser l’investisseur étranger dans sa décision d’engager des dépenses en capital importantes qui, une fois faites, seront, pour ainsi dire, de par leur nature, sujettes au chantage de l’État. Ainsi, la clause de stabilisation protégera généralement l'investisseur contre un changement unilatéral dans le régime fiscal. L’État ne pourra ainsi prélever de nouveaux impôts ou changer les taux d'imposition applicables et les règles de calcul du revenu imposable. Dans bon nombre d'ententes, la stabilité fiscale n'est garantie que pendant une période limitée qui correspond généralement à la période de récupération. De plus, dans bien des pays, les ententes de stabilité fiscale doivent être approuvées par l'assemblée nationale pour avoir un caractère exécutoire. Il est cependant moins en moins fréquent de trouver des clauses prévoyant un gel total de la capacité réglementaire de l’État, notamment dans des secteurs aussi névralgiques que les droits de l’Homme et la politique sociale ou environnementale. La portée de ces clauses variera évidement avec le risque politique associé au pays-hôte, la qualité du projet et les capacités de négociation des parties impliquées. 6. Ratio d'endettement et intérêt sur les emprunts © Louis Péloquin 2013 14 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » L'intérêt appliqué au capital emprunté n'est généralement pas imposable. Le montant des fonds empruntés utilisés pour financer un projet dans le secteur des ressources naturelles aura donc une incidence importante sur les revenus fiscaux du gouvernement, puisque, comme nous venons de le mentionner, les intérêts débiteurs doivent être déduits dans le calcul du revenu imposable. Par conséquent, le pays hôte essaiera généralement de limiter la part que représentent les emprunts dans l'investissement en exigeant que le projet respecte un certain ratio d’endettement, ce qui permettra d’augmenter les revenus fiscaux provenant du projet. Le gouvernement du pays hôte exigera également que les prêts consentis aux sociétés affiliées le soient selon des modalités semblables à celles pouvant être obtenues sur les marchés internationaux. 7. Approbation par le gouvernement du programme de mise en valeur du site et de son plan minier De manière générale, le gouvernement du pays hôte a le droit d'approuver l'étude de faisabilité définitive avant l'octroi d'une concession. Dans certains cas, une étude d'impact environnemental, une étude d’impact social et un plan d'investissement seront également préparés. Pour le gouvernement du pays-hôte, une telle démarche permet de garantir que les ressources nationales seront utilisées efficacement et pour le bénéfice de l’ensemble de la communauté. Pour l'investisseur étranger, elle présente un risque additionnel de corruption et d'abus de pouvoir. De plus, lorsque l’État prévoit faire un investissement important dans un projet, il souhaite pouvoir en examiner les aspects techniques afin de s’assurer que les ressources naturelles se trouvant sur son territoire © Louis Péloquin 2013 15 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » seront exploitées de la manière la plus efficace possible, dans une perspective de développement durable à long-terme tenant compte de l’état des connaissances techniques. 8. Guichet unique La convention d’établissement devrait réduire au maximum les formalités administratives imposées par le gouvernement et prévoir un service administratif tout-enun ou guichet unique. Un seul organisme gouvernemental (par exemple : le ministère des mines et de l'énergie), désigné dans la convention d’établissement, devra être habileté à accorder toutes les approbations nécessaires au projet. Cela est notamment particulièrement vrai en matière de douanes, une source constante de frustration pour l’investisseur étranger. En l'absence d'un guichet unique, la nécessité d'obtenir de trop nombreuses approbations de la part de trop nombreux organismes pourrait entraîner de longs délais, voire même augmenter substantiellement les risques de corruption. Or, l’adoption de législations sévères par la plupart des pays occidentaux en ce domaine, sans compter l’adoption de la Convention des Nations Unies contre la corruption, a considérablement augmenté les risques de ce côté pour les investisseurs étrangers et leur direction. Ainsi, ce qui auparavant, n’était qu’un coût supplémentaire pour l’entreprise, est désormais une source de préoccupation grandissante, d’où la nécessité de négocier des dispositions dans la convention qui permettent de minimiser ce type de risque. © Louis Péloquin 2013 16 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » 9. Des relations des explorateurs et des exploitants entre eux ou avec les propriétaires de la surface La convention d’établissement constitue la façon la plus efficace d'encadrer l'utilisation séquentielle du sol dans le cadre d'un projet minier. La convention d’établissement devra prévoir très clairement les droits des tiers (par exemple : les exploitants artisanaux, les propriétaires de la surface et les peuples autochtones) par rapport aux investisseurs en ce qui concerne l'utilisation du sol. Elle devra également établir le mode de calcul de l'indemnisation à verser dans l’éventualité où l'utilisation du sol par l'investisseur empêcherait certains d'en profiter. Idéalement, un tiers indépendant devrait déterminer l'indemnisation, et sa décision devrait être ultimement soumise à l'arbitrage international. Le montant de l'indemnisation devrait toujours être établi en fonction des dommages subis par le tiers et non en fonction de la valeur des substances minérales se trouvant dans le sous-sol. La convention d’établissement devra prévoir très clairement les utilisations du sol (par exemple: exploitation forestière, aéroports, sites archéologiques, cimetières religieux, installations militaires, exploitation minière à petite échelle, et ainsi de suite) qui auront préséance sur l'exploitation minière, s'il y a lieu. En ce qui concerne l'exploitation minière à petite échelle, la convention d’établissement devra énoncer très clairement les droits des parties. Ainsi la convention d’établissement doit apporter une réponse aux questions suivantes : L'exploitation minière à petite échelle ne sera-t-elle permise que pendant la phase d'exploration? Est-elle limitée aux gisements se trouvant près de la surface? Qui a la priorité dans le cas d'utilisations concurrentielles? © Louis Péloquin 2013 17 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » Qui sera ultimement responsable des dommages causés à l'environnement? Qui sera responsable de faire respecter ces dispositions en cas de violation? 10. Rapatriement des profits et de l’investissement La convention d’établissement doit garantir que les profits provenant de l’exploitation du projet seront ultimement distribués à l'investisseur étranger. Le risque que les lois sur la réglementation des changes soient modifiées constitue une source d'inquiétude réelle pour l'investisseur étranger, tout comme d’ailleurs le risque de pénurie de devises. Le droit d'avoir des comptes bancaires à l'étranger, et d'y conserver en devises fortes le produit de la vente des substances minérales dont le montant est suffisant pour respecter les obligations envers les prêteurs, les sous-traitants et les actionnaires, constitue un rempart efficace contre ce type de risque et devra se retrouver dans la convention d’établissement. 11. Liberté de commercialisation Les clauses relatives à la commercialisation doivent prévoir que l'investisseur a le droit de vendre la production de la mine sur les marchés étrangers et locaux, de conclure des contrats pour la livraison future de la production (« hedging ») et de fixer les prix et les autres conditions de vente. Le gouvernement du pays hôte entend souvent acheter une portion de la production de la mine à un prix déterminé. Par conséquent, la convention d’établissement doit prévoir le droit de vendre l'ensemble de la production à l'étranger. Il ne devrait exister aucune obligation d'approvisionner le marché local. Le gouvernement © Louis Péloquin 2013 18 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » du pays hôte ne devrait pas avoir le droit de forcer l'investisseur étranger à vendre sa production sur le marché local à des prix prédéterminés. La convention d’établissement peut prévoir certaines exceptions, notamment lorsque la vente de la production sur les marchés étrangers porterait atteinte à la sécurité nationale ou pour garantir que les ventes soient faites aux prix du marché mondial et non à des prix artificiellement bas pour éviter de payer les redevances requises (« prix de transfert »). Tous les montants mentionnés dans la convention d’établissement devraient être exprimés en dollars américains ou en devise du pays de l'investisseur étranger. La convention d’établissement devrait également prévoir clairement que la société n'est pas tenue de construire une usine pour traiter localement sa production. Si la société était tenue de le faire, elle pourrait éprouver de la difficulté à négocier des contrats à long terme avec ses principaux clients qui, pour des raisons de coûts notamment, préfèrent généralement voir le traitement se faire en aval plutôt qu’en amont. 12. Relations avec les collectivités locales Pratiquement toutes les conventions d’établissement conclues avec des pays en voie de développement contiennent une clause obligeant l'investisseur à privilégier l'équipement, les matériaux et les services du pays hôte, et à n'importer que les marchandises et les services qui ne sont pas disponibles à des prix concurrentiels sur le marché du pays hôte. La nature de la mise en œuvre de cette clause et la souplesse dont il est fait preuve dans celle-ci varieront d'une entente à l'autre. La convention d’établissement devrait mentionner, le cas échéant, les avantages qui reviendront aux © Louis Péloquin 2013 19 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » collectivités locales. L'investisseur étranger ne devrait pas être tenu d'acquérir des marchandises fabriquées localement ou d'utiliser des services locaux si leur prix et leur qualité ne sont pas concurrentiels par rapport à ceux des marchandises ou des services pouvant être obtenus ailleurs. Les ententes sur l'exploitation minière les plus récentes renferment des dispositions imposant l'embauche et la formation de la main-d'œuvre locale du pays hôte à tous les niveaux et dans un délai raisonnable, l’objectif étant la plupart du temps d’assurer, à terme, la gestion du projet par des nationaux du pays-hôte. Un tel objectif ne pose généralement pas problème, du point de vue de l’investisseur étranger, tant et aussi longtemps qu’il demeure général. Les situations conflictuelles sont plus fréquentes lorsque les gouvernements imposent des objectifs stricts relativement à l'embauche de la main-d'œuvre locale. Idéalement, l'investisseur étranger ne devrait pas se voir imposer des objectifs fixés arbitrairement pour l'embauche et la formation de la main-d'œuvre locale. Il ne devrait pas être obligé d'atteindre certains objectifs sans que ne soit évalué le niveau de compétence de la main-d'œuvre locale. L'emplacement de la mine aura une incidence sur sa rentabilité. Si les coûts liés à l'utilisation d'une infrastructure existante sont élevés, le projet risque d'en subir les contrecoups. La convention d’établissement devrait prévoir clairement que l'investisseur étranger ne sera pas forcé de construire des infrastructures inutiles ou d'ériger les infrastructures requises selon un cahier des charges trop contraignant qui ne tient pas © Louis Péloquin 2013 20 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » compte des conditions d’opération de la mine mais vise plutôt à desservir les communautés locales et favoriser le développement d’une région entière. 13. Questions environnementales La convention d’établissement devrait prévoir, pour la gestion de l'environnement et la protection du site du projet, un régime transparent qui fixe dès le départ les objectifs et la façon de les réaliser. Le régime environnemental doit permettre à la mine de demeurer concurrentielle au niveau international tout au long de sa durée de vie et de satisfaire les normes environnementales de plus en plus sévères de la collectivité. Les prêteurs exigeront généralement, de toute façon, que le projet satisfasse les critères les plus sévères à l’échelle internationale en cette matière. Lancé en 2003 à l’initiative d’un groupe de banques internationales, les principes de l’Équateur sont une référence en la matière. Les objectifs de protection de l'environnement devraient être fixés dès le départ, et l’État et l'investisseur devraient s'entendre sur la façon de les réaliser. L'investisseur a besoin d'un ensemble de normes et d'obligations transparentes pour pouvoir évaluer son rendement et ainsi justifier sa décision d’aller de l’avant avec le projet. 14. Règlement des différends Il est inévitable que des différends surviennent pendant la durée de la convention d’établissement. La question sera de savoir s'ils doivent être réglés par les tribunaux locaux ou dans le cadre d’un arbitrage international. © Louis Péloquin 2013 L'investisseur avisé portera 21 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » évidement son choix sur l'arbitrage international. En effet, les ententes d'arbitrage international protègent contre ce type de risque, stabilisent les modalités des contrats et constituent un élément essentiel des conventions d’établissement. La clause d’arbitrage étant la dernière protection des parties, elle ne doit donner lieu à aucune ambiguïté quant au droit applicable ou quant au lieu et au mode de règlement des différends. De plus, du point de vue de l'investisseur, l'entente doit être exécutoire. En cas de conflit entre le droit local et l'entente, l'entente doit avoir préséance. Les traités bilatéraux sur l’investissement (« TBI ») se sont multipliés au cours de vingt dernières années – on en compte plus de 2 500 aujourd’hui - et prennent de plus en plus d’importance dans la gestion des différends portant sur les conventions d’établissement. Il est donc très important de déterminer dès le départ s’il existe un TBI qui régira toute contestation relative à l’investissement réalisé par un ressortissant étranger dans le secteur des ressources naturelles. L’étendue des protections accordées par le traité applicable aura de plus une influence déterminante sur la négociation de la convention. L’existence d’une « clause parapluie » notamment sera souvent d’une importance capitale pour l’investisseur étranger car elle aura pour effet d’élever un manquement à la convention d’établissement, en soi un contrat privé entre un État et un ressortissant étranger, au statut de manquement aux dispositions du TBI, c’est-à-dire à un manquement à un traité en vertu du droit international. De plus, en vertu de la plupart des TBI, l’investisseur étranger, dans la mesure où il est un national d’une partie contractante, pourra avoir directement recours à l’arbitrage international sans avoir recours à la protection de son État. © Louis Péloquin 2013 22 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » Les clauses attributives de compétence peuvent prévoir l'application des lois d'un pays donné, des principes généraux de droit ou du droit international à l'ensemble de l'entente ou seulement à certaines questions précises. Comme nous l’avons mentionné un peu plus tôt dans le cadre des clauses de stabilisation, les parties peuvent également convenir que le droit applicable est celui qui s'applique à une date donnée. Les tribunaux respecteront généralement les clauses attributives de compétence, sous réserve qu'il existe un lien raisonnable entre la nature du différend et l'État dont les lois sont choisies. L'autonomie des parties n'est toutefois pas absolue. Les questions liées à la capacité, aux formalités, à la validité substantielle et à l'illégalité ne peuvent pas être réglées par accord explicite, mais doivent être réglées conformément au droit local du pays hôte. Le choix de la compétence législative inclut le droit portant sur le règlement des différends de l'État choisi, à moins que les parties n'en décident autrement. Il ne peut cependant pas être utilisé pour contester une clause attributive de compétence. Les règles de droit international privé de l'État choisi devraient donc toujours être exclues. Dans tous les cas, il est toujours essentiel d'évaluer les politiques du pays hôte pour s'assurer que le choix du forum est valide. Cette évaluation devrait toujours être incluse dans l'avis du conseiller juridique local. Le texte de l'entente doit prévoir très clairement qu'en cas de différend entre les parties, l'investisseur ne sera pas tenu d'épuiser les recours locaux avant d'avoir droit à l'arbitrage. Tous les différends entre les parties doivent être réglés dans le cadre de la clause de règlement des différends. © Louis Péloquin 2013 23 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » Au moment de la rédaction de la convention d’établissement, il faut généralement choisir entre l'arbitrage institutionnel et l'arbitrage ad hoc. La rédaction d'une clause d'arbitrage ad hoc constitue tout un défi. Il est extrêmement difficile de couvrir tous les cas possibles. Pour cette raison, il est toujours plus prudent de rédiger une clause de règlement des différends qui comprend un ensemble de règles de procédure préconisées par une institution telle que le Chambre de Commerce International, le Centre International pour le Règlement des Différends relatifs aux Investissements (« CIRDI ») ou la Commission des Nations Unies sur le droit commercial international. Ces organisations fourniront des modèles de clauses de règlement des différends qui sont à l'épreuve du temps. Dans tous les cas, pour des raisons évidentes, il est toujours important de s'assurer que la procédure d'arbitrage aura lieu à l'extérieur du pays hôte. 15. Droit applicable au contrat Le droit applicable sera celui du pays hôte ou un autre ensemble de lois choisi par les parties. Il est extrêmement rare qu’un droit autre que celui du pays hôte s’applique. Il est, toutefois, conseillé de mentionner dans l’entente que les principes de droit international s’appliqueront également. 16. Financement de la mise en valeur et de l’exploitation du gisement La convention d’établissement constitue la façon la plus efficace de fournir aux banques les garanties et les assurances nécessaires pour qu'elles avancent les fonds nécessaires à la mise en valeur du projet. Aucun investisseur sérieux n'entamera des © Louis Péloquin 2013 24 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » travaux d'exploration tant que ces garanties ne seront pas en place. De manière générale, le développement minier est financé soit par financement de projet avec un droit de recours limité aux éléments d’actif constituant le projet, soit par financement de projet avec un droit de recours limité contre d’autres éléments d’actif du promoteur du projet. Dans un financement de projet avec droit limité de recours, le remboursement du prêt est essentiellement « garanti » par les revenus générés par le projet. Dans un tel cas, la garantie principale prise par les prêteurs sera limitée au titre minier, aux éléments d’actif de la mine et au produit provenant de la vente de la production de la mine. En cas de financement où le risque de défaut n’est supporté que par le projet, les banques assujettissent généralement les versements de fonds au respect des exigences suivantes : • la garantie du titre • la liberté de vendre la production sur les marchés internationaux aux prix internationaux et en devise forte • la liberté de conserver le produit de la vente dans des comptes à l'étranger • les droits miniers et les droits portant sur les éléments d’actif du projet étant dans une forme pouvant être grevée, mise en gage, hypothéquée ou cédée • le droit de l'emprunteur de gérer le projet sans ingérence indue du gouvernement • le droit des prêteurs, en cas de défaut, de prendre la place de l'emprunteur et de gérer le projet • un régime stable et transparent en matière d'imposition et de redevances © Louis Péloquin 2013 25 ÉCOLE INTERNATIONALE D’ÉTÉ CÉRIUM 2013 FACULTÉ DE DROIT « Ressources naturelles : une planète entre vos mains » • le règlement des différends par l'arbitrage international Au risque de nous répéter, pour assurer la réussite de la mise en valeur du projet, la convention d’établissement ne doit pas seulement être acceptable pour l'investisseur, mais elle doit également convenir aux prêteurs qui partageront eux aussi le risque lié au projet. Idéalement, il faudrait dans la mesure du possible prévoir que les parties modifieront la convention d’établissement de la manière requise pour satisfaire les conditions de financement du projet imposées par un prêteur. La convention d’établissement vise à créer un cadre juridique harmonieux favorisant l’investissement étranger dans les pays en voie de développement de manière à promouvoir leur développement durable en tenant compte des nécessités économiques qui influent sur le processus décisionnel de l’investisseur. Elle vise à cristalliser dans un cadre contractuel les meilleures pratiques internationales en la matière et, pour cette, raison constitue un instrument incontournable de la pratique internationale en matière d’investissement dans le secteur des ressources naturelles des pays en voie de développement. © Louis Péloquin 2013 26