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En Mésopotamie, entre Tigre et Euphrate, les documents les plus anciens
attestant d’une pharmacopée ont été découverts à Nippour, au sud de Babylone,
où des milliers de tablettes d’argile, cunéiformes, datant de 2100 av.J.-C., ont
été exhumées. Des médecins possèdent alors une bonne connaissance des
vertus curatives de nombreuses plantes (250) ainsi que de substances animales
(écailles) et minérales (soufre). Ces pratiques thérapeutiques concernent
tant le médecin que le thaumaturge, guérisseur ayant recours au rituel et à
l’incantation. Si au l des générations l’empirisme est l’origine de la sélection
de beaucoup de ces plantes, la transmission des connaissances est également
le fait des dieux qui les ont révélées aux humains. Au vu de la présence
d’espèces exotiques dans les pharmacopées, une partie de ces savoirs provient
probablement aussi des peuples avec lesquels les Mésopotamiens ont été en
contact. La Mésopotamie a été en e et très tôt en lien avec le sous-continent
indien, à l’époque de la civilisation «de l’Indus».
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L’héritage méditerranéen
Le papyrus médical Chester Beatty,
vers 1200 av. J.-C., Égypte ancienne
(XIXe dynastie). Son nom vient de Sir Alfred
Chester Beatty qui a fait don de dix-neuf
papyrus au British Museum.
© British Museum, Londres, UK / Bridgeman Images
En Égypte, des inscriptions funéraires
et des bas-reliefs renseignent sur de très
anciennes pratiques médicales, en liaison
avec Imhotep (c. 2686 à 2613 av. J.-C.),
vénéré comme dieu guérisseur. Une
dizaine de précieux papyrus fournit des
informations sur l’état de la médecine,
et en particulier le papyrus Ebers, l’un
des plus anciens documents médicaux
originaux connus. Il date du début de la
XVIIIe dynastie (vers 1580 av. J.-C.) et se
présente comme un long document de
plus de 20m et 30cm de large. Véritable
encyclopédie médicale, il se décline
en 877 paragraphes qui rapportent
de nombreuses maladies et pratiques chirurgicales, et plusieurs centaines de
remèdes contre toutes sortes d’a ections. Il contient aussi une importante
pharmacopée, principalement élaborée à partir de plantes, parmi lesquelles le
caroubier, l’encens, la gomme ammoniaque ou le térébinthe.
Tablette d’argile cunéiforme, Irak,
vers 2500 av. J.-C.
© Pictures From History / Bridgeman Images
Un papyrus médical, datant de la XVIIIe dynastie, le papyrus Ebers, nous fournit l’une des plus anciennes formules
connues de parfum thérapeutique, celle du Kyphi. Elle est également gravée sur les murs du temple d’Horus, à
Edfou, et sur ceux du temple de la déesse Hathor, à Dendérah. Dioscoride, Plutarque et Galien, trois auteurs
grecs des Ier et IIe siècles apr. J.-C., en donnent chacun une version un peu différente.
Souchet (famille des papyrus), baies de genièvre, raisins secs, résine de térébinthe, roseau odorant,
jonc odorant, fl eurs de genêt, vin d’oasis, miel, myrrhe, entrent dans la plupart de ces recettes,
complétées parfois de nard (plante herbacée aromatique), cannelle, safran, menthe, séséli
(apiacée), cardamome, henné.
Utilisé en pastilles à brûler pour honorer les dieux, ce parfum « deux fois bon », à
l’odeur fl orale, résineuse et sucrée, soigne aussi, sous forme liquide, les maladies
intestinales, hépatiques et pulmonaires. Le Kyphi est réputé en outre pour ses
vertus décontractantes et déstressantes. Il en émane une vapeur suave et
bénéfi que qui dénoue sans le secours de l’ivresse la pénible tension
des soucis de la journée. C’est le premier parfum aromachologique,
censé avoir des effets sur l’humeur et le comportement.
Le Kyphi
Bas-relief de la tombe de Pairkep montrant
des servantes pressant de l’huile de lys pour
fabriquer du parfum, Egypte ancienne
(XXVIe dynastie, 664-525 av. J.-C.)/Musée
du Louvre, Paris.
© Werner Forman Archive / Bridgeman Images
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