capacité de l’émetteur à traduire les éléments du temps dans le langage et
celle du récepteur à savoir les décoder facilitent la construction d’une même
représentation du monde.
Le jeune enfant prend conscience du temps à travers son vécu personnel. Il
construit d’abord son concept du temps en observant les causes et les consé-
quences, ainsi que les étapes consécutives des situations de sa vie quotidienne.
Cette construction conceptuelle provient majoritairement d’informations
visuelles, abondantes et variées dans l’environnement immédiat des enfants.
Par ailleurs, l’enfant peut approfondir sa connaissance du monde qui l’entoure
grâce à l’interprétation qu’on fera des événements vécus, qu’il apprendra à
reconnaître par lui-même et à interpréter. Au fur et à mesure, le concept se pré-
cise, jumelé au langage, supporté par les marques temporelles contenues dans
des mots et par certaines marques grammaticales intégrées aux verbes.
Le verbe… chef d’orchestre !
Dans le langage oral et écrit, la façon de traduire les éléments temporels est
complexe. Ainsi, le temps est véhiculé sur les plans sémantique, syntaxique
et morphologique.
Dans l’élaboration de nos messages, nous utilisons des marqueurs de temps
qui portent le sens dans leur contenu propre (hier, plus tard, l’été, etc.). Le
rôle de ces marqueurs est de situer l’interlocuteur ou le lecteur dans un
contexte temporel commun afin de partager avec lui le moment où s’est
déroulée l’action. (Le lecteur trouvera une liste de marqueurs de temps à la
fin de ce chapitre.) L’émetteur doit établir la distinction entre le moment où
l’action s’est déroulée ou se déroulera, et le moment où il la rapporte dans
son discours. Par exemple :
Hier soir, j’ai rencontré Annie au cinéma.
Ce soir, je rencontrerai Annie au cinéma.
Chaque mardi soir, je rencontre Annie au cinéma.
Outre les marqueurs temporels, le temps est aussi véhiculé par les verbes.
Mais le verbe, en plus de sa racine sémantique (son radical), doit porter la
marque du pronom ou du sujet (agent de l’action, son genre et son nom-
bre), le mode (manière dont le verbe s’exprime, qui traduit l’intention de
celui qui parle ou écrit) et le temps, qui situe l’action sur la ligne de temps
(présent, passé ou futur) et donne une idée du déroulement chronologique
de l’action. Il n’est donc pas surprenant que l’apprentissage de la conjugaison
soit complexe et ardu, et qu’il soit l’objet de très nombreuses erreurs orales
et écrites. Les erreurs de conjugaison des verbes regroupent les mauvais
accords en nombre (forme plurielle), les mauvais choix de mode (subjonctif,
impératif, indicatif, conditionnel) et les mauvais choix de temps (passé,
présent et futur).
Illustrons les multiples rôles du « verbe chef d’orchestre » à l’aide d’exemples
concrets.
Chapitre 6
58 Parler du temps
Une hirondelle
ne fait pas
le printemps !
Danserons
Verbe «danser » (racine sémantique qui porte le sens de « danser »).
Première personne du pluriel (suppose que la personne qui parle est le
sujet de l’action en compagnie d’autres personnes).
Futur simple (indique que l’action se déroulera à un moment ultérieur à
celui où l’émetteur l’annonce).
Indicatif (indique que l’action est présentée comme une action réelle, se
situant à un moment déterminé dans le temps).
Sautez
Verbe «sauter » (racine sémantique qui porte le sens de « sauter »).
Deuxième personne du pluriel (suppose que plusieurs sujets sont l’agent
de l’action, que la personne qui parle s’adresse à eux mais n’est pas le sujet
de l’action).
Impératif (indique que l’action doit se réaliser).
Présent (indique que l’action doit se dérouler maintenant).
Pour compliquer cet apprentissage, les verbes en français se regroupent en caté-
gories. Les partisans de la nouvelle grammaire (Suzanne-G. CHARTRAND et
Claude SIMARD, Grammaire de base, ERPI, 2000) s’entendent maintenant
pour reconnaître deux types de conjugaisons:
La première conjugaison comprend les verbes qui se terminent en -er à
l’infinitif.
La deuxième conjugaison, qui comprend tous les autres verbes.
Dans le Bescherelle (L’art de conjuguer, Montréal, Hurtubise HMH,
1998), par contre, on classifie les verbes en trois groupes :
Le premier groupe correspond aux verbes dont l’infinitif est marqué par
l’affixe -er (on en dénombre plusieurs milliers).
Le deuxième groupe réunit les verbes dont l’infinitif est marqué par l’affixe
-ir, dont le participe présent se termine par issant (plus de 300).
Le troisième groupe réunit tous les autres verbes (environ 370).
Très tôt, au cours de l’apprentissage de la langue écrite, dès que la lecture est
suffisamment maîtrisée, les jeunes élèves doivent apprendre à conjuguer des
verbes, les mémoriser et comprendre l’utilité des conjugaisons. Sujet aride et
peu apprécié, la conjugaison des verbes est la plupart du temps considérée
comme un mal nécessaire qui ouvre la porte à l’acquisition de la grammaire
et de la syntaxe écrite.
Les verbes sont, parmi les éléments de la langue, ceux qui posent le plus de
problèmes au cours de l’apprentissage du français. Dans le développement
normal du langage oral, on remarque que la maîtrise parfaite des verbes
survient tardivement. En effet, il n’est pas rare qu’un enfant de six ou sept
ans invente des formes, en généralisant des accords appropriés pour un
groupe de verbes à un autre groupe. Ainsi, on aura des formes du type « il est
reviendu », « tu boivais », « il a pleuvu », « il prendait », etc.
Chapitre 6
Chapitre 6 59
1 / 2 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !