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Ethique et gestion de cas
Workshop – 27 juin 2011 - Marseille
Synthèse des débats.
Pour cette synthèse, 7 thèmes ont été identifiés :
1. REFLEXION A PROPOS DE LA DENOMINATION ET DES DEFINITIONS .......................... 2
2. DIALECTIQUE AUTOUR DU RESPECT DE LA PERSONNE ET DE SON INTIMITE :
INFORMATION / SECRET. DISCRETION / INDISCRETION ..................................... 4
3. CONSENTEMENT ET REFUS : RESPECT DU PRINCIPE DAUTONOMIE .......................... 7
4. DROIT, RECONNAISSANCE ET LEGITIMATION ................................................... 10
5. RESPONSABILITE POUR ET AVEC LES AUTRES .................................................. 13
6. ELEMENTS DE REFLEXION EN SANTE PUBLIQUE ET ECONOMIE DE LA SANTE ................ 15
7. LA GESTION DE CAS : UNE FONCTION INNOVANTE…. ......................................... 18
Pour chaque thème, quelques lignes de résumé sont proposées en exergue. Puis
des citations extraites du texte intégral ont été choisies de façon à illustrer au
mieux les problématiques débattues par les participants au Workshop. Les
fonctions des intervenants de cette synthèse sont disponibles en fin de
document.
L’intégralité des échanges retranscrits par une sténotypiste, puis relus et
amendés par les participants est disponible sur le site de l’EREMA (www.espace-
ethique-alzheimer.org)
Pour poursuivre le travail, ce document de synthèse sera proposé comme base
de réflexion aux gestionnaires de cas réunis lors d’une journée d’étude, le 10 mai
2012, à Marseille.
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Réflexion à propos de la dénomination et des
définitions
Le « gestionnaire de cas » est le professionnel qui intervient auprès des
personnes malades en situation de complexité. Il est référent unique de la prise
en soins, à la croisée des champs sanitaires et sociaux. Traduit de l’anglais
« case manager », la dénomination ne semble pas toujours servir la définition de
cette nouvelle fonction. Les représentations qu’elle véhicule varient selon les
domaines professionnels de chacun, et selon la place occupée, d’usager ou
d’intervenant.
Fabrice GZIL.- Je crois me souvenir qu’il y a quelques années, une consultation
avait été lancée dans un colloque pour savoir comment traduire « case
manager ». La traduction littérale par « gestionnaire de cas » n’est pas
entièrement satisfaisante, car elle met l’accent sur la gestion, alors qu’un
« manager », en anglais, c’est aussi un responsable, un « chef », et quelqu’un
qui sait se débrouiller dans une situation délicate, comme quand on dit : ça va,
je « gère ».
Elodie LYS.- Coordonnateur de santé. C'est le titre du diplôme. Encore une fois,
c’est réducteur parce que ce n'est pas juste en santé. Et ce n'est pas que de la
coordination.
Pierre LE COZ.- Gestionnaire est un mot qui évoque l'économie,
l'administration. Est-ce une transposition ? Où y a-t-il vraiment des tâches de
gestionnaire stricto sensu ? La gestion, c’est la distribution rationnelle,
budgétaire, administrative de ressources économiques au sens précis. Est-ce que
cela n'a rien à voir ou est-ce qu’il y a cette dimension dans le travail de
gestionnaire de cas ?
Frédéric BALARD.- On a gardé « gestionnaire de cas » comme l’ont fait les
Québécois, qui n'ont pas eu de difficulté à s'approprier ce terme-là. C'est plus
difficile en France. Peut-être aussi pour les gestionnaires de cas eux-mêmes car
ce n'est pas forcément simple pour se présenter aux gens. Le mot
« gestionnaire » peut évoquer une dimension financière ou économique et celui
de « cas » peut être perçu comme péjoratif.
Perrine MALZAC.- Le gestionnaire de cas est souvent présenté comme un
porte-parole de la personne dont l'autonomie est fragilisée par la maladie
d'Alzheimer.
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Jean-Philippe FLOUZAT.- Le terme de porte-parole me paraît extrêmement
fort, trop fort. On est là pour aider à faire évoluer une situation, à faire travailler
ensemble un certain nombre de professionnels, pour être auprès des malades.
Dominique SOMME.- Le mot « advocacy » m’intéresse. Il n'a pas été traduit.
En fait, il y a des avocats ici, ils me corrigeront si je dis des bêtises. Un avocat
est un lawyer aux Etats-Unis. Il ne devient advocate que quand il est en train de
faire son travail devant la barre. L’advocacy, ce serait donc la représentation au
moment où il y a lieu de le faire. Je trouve qu’il est intéressant qu'il y ait deux
mots dans le langage anglais ; en tout cas, cela peut porter à réflexion sur le
terme advocacy qui me paraît plus complexe, et donc forcément plus intéressant
que le mot de porte-parole. Le porte-parole, c'est compliqué pour la personne à
qui on retire la parole, mais c'est aussi compliqué pour la personne qui doit
porter parce que, du coup, il devient en charge de quelque chose d'extrêmement
précieux qu'il devrait avoir du mal à porter. Je trouve que ce terme est
doublement piégeant, et je n'aurais pas tendance à l'utiliser.
Aline CORVOL.- Ce terme de porte-parole, dans le sens où la personne a bien
une parole, peut l'exprimer, mais ne peut pas la porter, la défendre et se battre
pour qu’elle soit respectée, me semble valable et respectable. Par contre, ce
n’est pas du tout l'idée d'une représentation, mais simplement l'idée de prendre
la parole de la personne et de la mettre sur la place publique.
Catherine MOLINES.- Par rapport au terme de porte-parole, effectivement, il y
a le gestionnaire de cas qui a une position de porte-parole, on a oublié un
intervenant, qui est la personne de confiance. Est-ce que, finalement, le
gestionnaire de cas n'est pas plus un médiateur et le porteur d'une situation ?
Fabrice GZIL.- Pour moi, il vaudrait mieux dire que la déontologie des
gestionnaires de cas leur impose de veiller au bien-être et à la sécurité des
personnes aidées, de veiller à ce qu’elles puissent avoir accès aux aides et aux
soins auxquelles elles ont droit, et de veiller à ce que leurs préférences soient
respectées. Car dire que la mission du gestionnaire de cas est d’être le porte-
parole de la personne pose toutes sortes de difficultés. Pourquoi le gestionnaire
de cas serait-il plus légitime, ici, que la famille, la personne de confiance, le
mandataire de protection future, le tuteur… qui peuvent aussi revendiquer ce
statut de porte-parole ?
Joelle REVOCAT.- En médecine, nous y sommes confrontés tous les jours. La
mission est une mission d’aide ; ce n'est pas une mission de porte-parole.
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Dialectique autour du respect de la personne et
de son intimité : Information / Secret,
Discrétion / Indiscrétion
Les informations qui circulent, dans le cadre de la gestion de cas, sont de sources
multiples et diversifiées. Elles concernent toutes les composantes de l’être
humain et relèvent, en particulier, de tout ce qui a trait à son intimité. L’éthique
du gestionnaire de cas lui impose respect et discrétion quant à la communication
des informations recueillies. Un devoir de discernement est requis dans le
partage des informations pertinentes, celles qui sont utiles pour le bien être de la
personne.
Dominique SOMME.- Je pense que le gestionnaire de cas devient possesseur
d'un certain nombre d'informations. Un certain nombre ne sont pas d'ordre
médical, et sont tout autant importantes que celles qui sont d'ordre médical. Je
pense qu’il est important d’élargir le problème de la confidentialité et du secret
car ce sont les deux parties de ce même problème.
Patricia SILVESTRE.- Au départ, les sources d’informations sont multiples. Il
faut d’abord apprendre à connaître la personne, la connaître du mieux possible.
Cela se fera par la personne elle-même, mais également par celle qui nous fait le
signalement. On va essayer de reconstituer le puzzle au niveau social, médical,
de l’entourage, des ressources… Nous avons besoin d'un tas d'informations.
Cette démarche s’inscrira nécessairement dans le temps, puisque l’on va rentrer
en confiance progressivement. Ces informations vont s'enrichir au fur et à
mesure, et seront de tous ordres. Parallèlement, il nous appartient de faire
attention à ce qui est utile. Continuellement, on se pose des questions : l'intérêt
de la personne, l'utilité de ce que l'on fait, et ne pas divulguer quelque chose qui
n'a pas d'intérêt ou qui pourrait se retourner contre la personne.
Michel PONCET.- Je crois que c'est vraiment un problème très important, une
évaluation multidimensionnelle par un gestionnaire de cas amène à vraiment
connaître la personne. Le gestionnaire de cas est en possession de beaucoup
d'informations sur une personne donnée et doit apprendre à ne les utiliser qu’au
bénéfice du patient.
Valérie CERASE.- Et des informations sur son entourage aussi. Cela peut
engager une fille, un mari, toute la famille, tout le milieu naturel qui l'entoure,
qui peut donner des informations sur des gens qui n'ont pas envie que quelqu'un
détienne ces informations, au-delà de celui qui est pris en considération par le
gestionnaire de cas.
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Fabrice GZIL.- Le fait qu’une information ne soit pas communiquée entre
professionnels peut être une perte de chance pour la personne. Mais d’un autre
côté, la question de savoir « quelles informations on a le droit de communiquer à
qui » est assez délicate. Que disent les médecins ? Sont-ils réticents à vous
communiquer des informations ?
Jean-Marc HENRY.- C'est une question difficile parce que, entre médecins,
entre confrères, on ne doit délivrer aux confrères que les informations
nécessaires à l'exercice de son art ; en aucun cas, on ne peut délivrer tout ce
que l'on sait sur le patient. Le patient ne peut pas nous relever du secret. Et on
voit bien, actuellement, dans la société, que sur le principe de la promotion de
l'autonomie, on met à mal ce secret.
Aline CORVOL.- Il y a un auteur américain qui dit qu'il ne faut pas raisonner, en
gestion de cas, en termes de secret, mais en termes de respect de l'intimité : ne
pas mettre le secret comme un absolu, mais voir la finalité pour la personne.
Fabrice GZIL.- Mais on voit qu’il y a pour le gestionnaire de cas toutes sortes
de questions qui se posent : quelles informations puis-je demander (et à qui) ?
Quelles informations puis-je communiquer (et à qui) ? Et quelles informations
dois-je m’interdire de recevoir (même si on voudrait me les donner) ?
Frédéric BALARD.- Recevoir l'information n'est pas anodin, dans le sens où,
souvent, celui qui est porteur d'informations, la source, utilise cette information
pour instrumentaliser le gestionnaire de cas dans le sens qui l’arrange.
Annagrazia ALTAVILLA.- Il y a des principes généraux, mais ce qui compte,
c'est vraiment de voir si, en faisant cette action, je peux porter atteinte de
quelque manière à la personne. Pour moi, c'est cela qui compte : c'est le
questionnement permanent dans les choix que je fais. Je fais cela, je suis
astreinte au secret professionnel, quelles sont les conséquences de mes actions ?
Fabrice GZIL.- Je suis favorable à une clarification, même si le droit ne règlera
bien sûr pas tous les problèmes. Avant de communiquer une information, les
gestionnaires de cas pourraient se demander si celle-ci est vraiment
indispensable, si le fait de ne pas la communiquer entrainerait vraiment une
perte de chance, ou une mise en danger de la personne. On voit déjà que
l’information « cessaire » n’est pas évidente à définir. Se pose aussi la
question de savoir quand, avant de transmettre une information à un tiers, il faut
obtenir un accord exprès de la personne, et non pas seulement un accord tacite.
Il y a des opinions très divergentes sur ce point. Concernant la communication à
la famille du diagnostic de maladie d’Alzheimer, certains auteurs estiment que les
proches doivent être pleinement informés, qu’on ne peut leur opposer le secret
médical. D’autres auteurs estiment au contraire que les professionnels n’ont
aucun droit moral ni légal à informer les proches, sauf s’ils ont obtenu l’accord
formel de la personne ; et que quand la personne n’est plus en mesure de
donner son accord, on ne peut informer les proches qu’en cas de danger grave et
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