La Grande France - Michel Guénaire - 4 avril 2016
relève des accords entre végétaux et animaux, telle la symbiose entre des végétaux marins
microscopiques et de petits animaux du fond des mers qui produit les coraux. « Ainsi, répétons-le, tout
commence par la coopération », conclut Pelt, et « la compétition n’est intervenue que dans un second
temps ».2
La prise de conscience de cette solidarité doit fonder le nouveau rapport que l’homme doit avoir avec
la nature. Sans elle, l’humanité ne surmontera pas les défis qui se présentent, dont celui de l’écologie
du monde. C’est à cette solidarité qu’il faut penser comme à une loi naturelle, et c’est elle qui est la
clef de la réponse à la question écologique.
Nous proposons de mettre en place un programme d’enseignement, de l’école primaire jusqu’au
lycée, fondé sur l’idée de solidarité entre les règnes végétal, animal et humain. C’est au nom de
cette solidarité que l’homme apprendra à cohabiter avec les autres formes de vie sur terre, et gagnera
un nouveau rapport avec la nature.
Sur le plan du modèle de développement, rappelons que la nouvelle révolution économique, analysée
dans le chapitre précédent, parce qu’elle nécessite moins de facteurs de production par unité produite,
est prometteuse de sobriété. Cette révolution restera cependant fragile si elle ne conduit pas également
à une consommation maîtrisée et à moins de gaspillage des équipements et de l’énergie nécessaires à
son fonctionnement. Il faut trouver un optimum fondé sur le principe de sobriété, qui doit conduire à
prendre en compte, dans les coûts de toute nouvelle production ou de tout nouvel équipement, ses
externalités positives et négatives, c’est-à-dire les conséquences à la fois positives (gains) et négatives
(surcoûts, pollutions, etc.) pour le reste de l’économie.
Nous voulons aussi approfondir une politique de transition économique réconciliant l’énergie
avec l’écologie. Trois principes l’animeront. Le premier est un programme de mix énergétique, où les
types d’énergie les plus variés doivent cohabiter. Le tout nucléaire, comme la recherche de
l’exclusivité du développement des énergies renouvelables, sont de mauvais choix. Le second principe
repose sur des procédures d’efficacité énergétique, qui recherchent une rigueur de consommation de
tous les clients industriels et domestiques. Les incitations à l’habitat écologique définissent de ce point
de vue la bonne direction. Le troisième principe est l’économie dite circulaire, où tous les biens
produits et consommés par l’homme sont réutilisés, limités et conservés, à l’opposé de l’économie dite
linéaire, où les mêmes biens sont seulement produits, consommés, jetés. Dans toutes les décisions des
collectivités publiques comme des acteurs privés, au plan national comme au plan local, c’est le but à
rechercher.
En réunissant à Paris, du 30 novembre au 12 décembre 2015, les représentants des 195 Etats parties à
la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (C.C.N.U.C.C.), la France a
relancé l’objectif que poursuit cette Convention depuis son adoption au Sommet de la terre à Rio de
Janeiro en 1992 : engager les Etats à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. L’engagement des
Etats devra bien être accompagné par un nouveau modèle de développement.
Dans ce sens, nous proposons d’organiser la circulation alternée dans les dix principales
métropoles de France, tant il n’est plus possible de laisser se développer un usage de l’automobile à
la fois irrationnel et disproportionné par rapport à la résistance du milieu naturel.
Enfin, nous proposons d’instaurer une fiscalité écologique globale et unifiée par un verdissement
de la TVA. L’ensemble des biens et services, taxés au taux intermédiaire actuel de 10%,
2 Jean-Marie Pelt, La solidarité chez les plantes, les animaux, les humains, Paris, Fayard, 2004, p. 36.