28 Santé animale A B Bactérie - cibles cellulaires des antibiotiques Action : altération Quinolones Fluoroquinolones inhibition Aminosides Tétracyclines Macrolides et apparentés Phénicolés Sulfamides Triméthoprime Bêta-lactamines duplication du chromosome synthèse du peptidoglycane (absent chez les Tenericutes dont mycoplasmes) ribosomes : synthèse protéique membrane externe cytoplasme : synthèse acides nucléiques (bactéries à Gram négatif) Polymyxines (ex. colistine) membrane cytoplasmique A : E. coli résistant à 13 antibiotiques sur les 16 testés B : E. coli ne présentant pas de résistance aux 16 antibiotiques testés L’antibiorésistance en élevage porcin Le porc, comme tous les autres animaux et l’Homme, est soumis à une pression infectieuse microbienne. Les bactéries occupent une place essentielle dans ces infections, d’autant plus qu’elles peuvent se défendre contre les médicaments destinés à les détruire : les antibiotiques. Les antibiotiques sont primordiaux pour soigner l’Homme ou l’animal lorsqu’il subit une infection bactérienne. La découverte (1929) du premier antibiotique (la pénicilline) a été une révolution médicale : la possibilité d’attaquer spécifiquement les bactéries sans que l’arme ne soit dangereuse pour l’individu. Mais le monde bactérien a mené sa contre-révolution en élaborant des stratégies de défense. Les années passant, la contre-offensive bactérienne est devenue critique car l’antibiorésistance s’est propagée et la découverte d’antibiotiques réellement nouveaux s’est raréfiée. nes au sein de la bactérie. En se fixant sur ce ribosome, les antibiotiques empêchent la production de protéines, ce qui entraînera la mort bactérienne. C’est ainsi qu’agissent par exemple les aminosides Bactérie - cibles cellulaires des antibiotiques Quinolones Fluoroquinolones Tech Porc duplication du chromosome Bêta-lactamines synthèse du peptidoglycane (absent chez les Tenericutes dont mycoplasmes) Action : altération inhibition Actions (des antibiotiques) et réactions (des bactéries) Les molécules antibiotiques sont regroupées en familles en fonction de leur structure chimique et de leur mode d’action sur les bactéries. Le constituant bactérien visé par le plus grand nombre de familles d’antibiotiques est le ribosome, qui est le lieu de fabrication des protéi- (ex. gentamicine, néomycine), les tétracyclines, les macrolides (ex. tylosine) et les phénicolés (ex. florfénicol). Les sulfamides et le triméthoprime vont, quant à eux, inhiber la synthèse des acides membrane externe (bactéries à Gram négatif) membrane cytoplasmique ribosomes : synthèse protéique Mars - Avril 2013 - n° 10 cytoplasme : Aminosides synthèse acides nucléiques Tétracyclines Macrolides et apparentés Phénicolés Polymyxines (ex. colistine) Sulfamides Triméthoprime Santé animale spontanées dans ses propres gènes. Ces nucléiques également nécessaires, entre modifications génétiques vont permetautres, à la fabrication des protéines. Les tre à la bactérie de contrer l’action des antibiotiques des familles des quinoantibiotique et de survivre : lones (ex. acide oxolinique) et dégradation de l’antibiotique, des fluoroquinolones (ex. enrofloxacine, marbofloxacine) vont “Les bactéries modification de la cible bacempêcher la duplication du peuvent réagir térienne qui n’est alors plus reconnue par l’antibiotique, chromosome et stopper ainsi le (ou résister).“ protection de la cible vis-à-vis développement bactérien. Une de l’antibiotique, imperméabiautre cible possible des antilité de la bactérie à l’antibiotique, expulbiotiques est la structure qui entoure la sion de l’antibiotique vers l’extérieur de la bactérie et qui maintient son intégrité : la bactérie. membrane cytoplasmique associée (sauf chez les mycoplasmes) à une paroi. Cette Cette résistance acquise aux antibiotidernière est le lieu d’action des bêta-lacques peut être détectée dans un laboratamines (ex. pénicilline, amoxicilline, ceftoire d’analyses vétérinaires grâce, entre tiofur, cefquinome) qui vont empêcher autres, à l’antibiogramme par diffusion sa synthèse. Les polymyxines (ex. colisen milieu gélosé. tine) vont également agir à ce niveau en détruisant cette structure. Les bactéries peuvent réagir (ou résister) aux actions de ces antibiotiques. Cette résistance peut être naturelle ou acquise. La résistance naturelle est due à une caractéristique appartenant à la définition même d’un type de bactérie. Par exemple, les mycoplasmes sont des bactéries sans paroi et sont donc de fait résistantes aux bêta-lactamines. La résistance acquise correspond à une bactérie initialement sensible à un antibiotique donné, mais qui devient résistante à ce même antibiotique dans un second temps. Cela peut se faire par acquisition de gènes provenant d’autres bactéries environnantes, ou suite à des mutations La surveillance de l’antibiorésistance : un dispositif essentiel En France, la surveillance de l’antibiorésistance des bactéries pathogènes pour les animaux est assurée par le Résapath qui collige les résultats d’antibiogrammes des laboratoires d’analyses vétérinaires adhérant à ce réseau. Entre 2003 et 2011, 21439 antibiogrammes relatifs aux porcs ont été enregistrés par l’Anses. Ils ont été réalisés pour des bactéries isolées en élevage porcin au cours d’infections. Ils ont été transmis par 49 laboratoires, dont dix qui repré- Figure 1 : Pourcentages des Escherichia coli sensibles aux antibiotiques les plus fréquemment testés Pourcentage de E. Coli sensibles 100 90 Ceftiofur 80 70 Gentamicine 60 Enrofloxacine 50 Néomycine 40 Ac. oxolinique 30 Amoxicilline 20 Trim. + Sulf 10 Tétracycline 0 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 sentaient 94 % des don-nées. Toutes pathologies confondues, la majorité des antibiogrammes (81 %) concernait Escherichia coli (E. coli : 59 %), suivis par Streptococcus suis (9 %), Pasteurella multocida (7 %) et Actinobacillus pleuropneumoniae (6 %). L’analyse de l’évolution de l’antibiorésistance de E. coli a été réalisée pour les antibiotiques les plus fréquemment testés (figure 1). Entre 2003 et 2010, les analyses statistiques ont mis en évidence une diminution de la proportion des E. coli sensibles à l’ensemble de ces antibiotiques, à l’exception de la tétracycline et de l’association triméthoprime-sulfamide. Néanmoins, les données 2011 indiquent un début d’inversion de tendance pour une majorité des antibiotiques étudiés. Ce phé-nomène reste à être confirmé par les données 2012. Il devrait être conforté par l’action conjointe de l’ensemble des acteurs inter-venant dans la santé animale autour du plan «EcoAntibio2017» mis en place par la Direction Générale de l’Alimentation et dédié à la préservation de l’activité des antibiotiques en médecine vétérinaire. L’avenir de l’antibiothérapie chez les animaux de rente passe par une utilisation raisonnée et pertinente des antibiotiques associée à une maîtrise globale des conditions zootechniques et de biosécurité des élevages. C’est l’ensemble de ces conditions qui contribuera à la gestion optimale de la santé animale et du coût des traitements médicamenteux tout en minimisant les risques de transfert de l’antibiorésistance à l’Homme. Eric JOUY1, Claire CHAUVIN1, Jean-Yves MADEC2 et Isabelle KEMPF1 Anses - Laboratoire de Ploufragan/Plouzané1 et Lyon2 [email protected] 2011 Tech Porc Mars - Avril 2013 - n° 10 29