décembre 2006 N° 91 Prévention btp
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santé
Nuisances sonores au travail :
tions pour améliorer les conditions
acoustiques sur le lieu de travail. Cela
peut concerner le matériel (une scie
circulaire fait plus ou moins de bruit
selon la qualité de sa lame), le pro-
cédé de fabrication (par exemple la
vitesse de la machine) ou encore le
local (en changeant certaines
machines de place pour que le bruit
ne se répercute pas sur les murs, en
les encoffrant ou en leur mettant un
capot, en ajoutant des revêtements
isolants ou absorbants sur les parois
de l’atelier).
L’enjeu est de réduire le bruit sans
compliquer les activités. Il convient
par ailleurs de ne pas remplacer une
nuisance par une autre, comme rem-
placer la soufflette d’air comprimé,
très nocive pour l’oreille – que les sala-
riés utilisent notamment pour le net-
toyage de leur machine –, par un
balayage ; on aura certes diminué le
bruit, mais on aura considérablement
augmenté la concentration de pous-
sières dans l’atmosphère, avec leur
cortège de conséquences sur la santé
des travailleurs.
« Notre rôle est d’ai-
der les chefs d’entreprise à trouver
des solutions, techniques et organi-
sationnelles, qui atténuent le bruit
sans créer d’autres dommages »,
pré-
cise Joël Gacoin.
Se protéger
sur les chantiers
Si, dans un atelier, on repère rapide-
ment les machines et les process les
plus bruyants, c’est plus complexe sur
un chantier.
« La mobilité des com-
pagnons et le phénomène de coacti-
vité font qu’ils sont exposés non seu-
lement aux bruits qu’ils produisent
eux-mêmes, mais aussi à ceux de tous
les autres corps de métiers »,
pour-
suit Joël Gacoin. Outre la difficulté de
mesurer le bruit s’ajoute celle de pro-
poser des solutions. Une des recom-
mandations habituelles : lorsque des
tâches très bruyantes sont effectuées
(carottage, brise-béton…), une signa-
létique identifie la zone à risque et
indique aux différents corps de
métiers présents sur le site la néces-
sité de porter des EPI.
Les deux grandes catégories de pro-
tections sont les coquilles et les bou-
chons. Les premières se portent de
manière intermittente dans un envi-
ronnement professionnel particuliè-
rement assourdissant. Sur un plan
thermique, les oreilles n’étant plus
ventilées, le port permanent de
coquilles est inconfortable, surtout
par temps chaud. Pour les travaux de
longue durée, les bouchons moulés
L
es seuils d’alerte abaissés, le
suivi médical des salariés
exposés au bruit amélioré,
l’information des personnels
sur les dangers encourus ren-
forcée… La lutte contre le bruit en
milieu professionnel a franchi une
nouvelle étape avec la transposition
en droit français de la directive euro-
péenne de février 2003. Le texte,
applicable dans notre pays depuis
juillet dernier, contient diverses dis-
positions à respecter par les
employeurs sous peine de sanctions
(lire encadré Repères, page 56). Il
concerne particulièrement le secteur
du bâtiment qui figure au palmarès
des métiers exposant à des nuisances
sonores.
« De nombreuses entreprises
nous sollicitent afin que nous mesu-
rions les sources de bruits dans le
cadre de leurs activités »,
indique Joël
Gacoin, technicien en métrologie de
la société Santé BTP (Rouen).
Mesurer le bruit,
un vrai métier !
Constater qu’un atelier est bruyant est
simple. En revanche, identifier l’en-
semble des sources sonores, invento-
rier les machines et les outils les plus
assourdissants, passer au crible
chaque poste pour détecter les phases
les plus bruyantes, connaître le niveau
d’exposition d’un travailleur au cours
de la journée, déterminer si la nui-
sance est cyclique ou non… Tout cela
requiert un savoir-faire et un matériel
adéquat. C’est après avoir collecté et
analysé ces mesures que le risque
inhérent à chaque poste est évalué.
Seconde étape : proposer des solu-
Depuis juillet dernier, la directive européenne de 2003 sur le bruit dans l’entreprise s’applique en France.
De nouvelles règles s’imposent aux employeurs pour protéger les salariés exposés. Le secteur du BTP
est particulièrement concerné par ces nouvelles dispositions.
Il est important de sensibiliser
le personnel aux risques induits par
des tâches et des outils courants.
© XAVIER PIERRE
Prévention btp N° 91 décembre 2006 55
sont préférables. En choisissant le
filtre adapté (il en existe huit), on peut
obtenir l’atténuation de bruits puis-
sants, tout en laissant passer les fré-
quences sonores correspondant à la
voix humaine. Joël Gacoin préconise
les bouchons sur mesure en silicone
ou en acrylique.
« Ils sont parfaite-
ment étanches, puisque moulés sur
le conduit auditif du sujet. Leur effi-
cacité, leur confort et leur personna-
lisation font qu’ils sont plus facile-
ment portés en continu par les com-
pagnons. Au final, c’est moins coû-
teux que d’acheter des bouchons stan-
dards et de les remplacer régulière-
ment. »
Il est aussi essentiel d’informer le per-
sonnel sur les dangers du bruit. Peu
ont conscience de l’intensité sonore
produite par certains chocs et chutes
d’objets (par exemple jeter à terre une
armature en ferraille).
« On atteint
facilement les 105-110 dB. Comme
>>
c’est très bref, les salariés sous-esti-
ment le risque, ne se protègent pas,
mais leurs oreilles souffrent ! »
De
même convient-il de sensibiliser le
personnel aux risques induits par des
tâches et des outils courants. Le mar-
teau par exemple, utilisé pour une
multitude de travaux, que ce soit en
atelier ou sur un chantier :
« Le coup
de marteau est un bruit impulsionnel,
accompagné d’une vibration (de la
structure) d’une durée inférieure à une
© EMMANUEL LEPAGE
mieux les combattre
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santé
>> Nuisances sonores au travail : mieux les combattre
seconde et qui se répète en moyenne
toutes les 0,2 seconde. On ne se rend
pas compte de sa nocivité pour l’au-
dition, or il peut provoquer d’énormes
dégâts dans l’oreille interne. »
Pas seulement l’oreille…
« Le bruit n’a pas les mêmes consé-
quences selon qu’il est brutal et court
ou répété »,
explique le Pr Patrice Tran
Ba Huy, médecin ORL. Il est démon-
tré que les bruits répétés accélèrent
REPÈRES
Auparavant, la réglementation relative au bruit en entreprise reposait sur
une directive européenne de 1986. La nouvelle directive du 6 février 2003
(2003/10/CE), transposée en droit français en février 2006, est applicable
depuis juillet dans notre pays (décret 2006-892 du 19 juillet 2006).
Elle fixe de nouveaux seuils à partir desquels l’employeur se doit d’agir.
Exemples : évaluation de l’exposition au bruit, information des salariés sur
les risques encourus et protections auditives mise à disposition dès 80 dB
(A) ; plan d’action de réduction du bruit et port des EPI obligatoires à
85 dB (A) ; valeur limite d’exposition avec protection à 87 dB (A) ; contrôle
préventif institué pour le salarié à partir de 80 dB (A) et audiométrie
systématique à partir de 85 dB (A).
le vieillissement de l’organe de Corti
(appareil de l’audition). Les stress suc-
cessifs créent en effet des réactions
enzymatiques qui retentissent sur le
fonctionnement et sur l’oxygénation
des cellules ciliées et favorisent leur
destruction. Il s’agit donc de lésions
pernicieuses, car pendant une longue
période la perte auditive est insensible.
C’est seulement lorsque cette destruc-
tion altère la perception des fré-
quences sonores vocales que l’on com-
mence à moins bien comprendre les
discussions courantes et à réaliser les
dommages subis. Il est déjà trop tard :
ce qui est perdu l’est de manière irré-
versible.
« Souvent,
précise le Pr Tran
Ba Huy,
les premiers signes sont une
gêne à la compréhension de la conver-
sation en milieu bruyant ou des acou-
phènes aigus. »
Au moindre doute, il
faut solliciter un avis médical. Une fois
la surdité installée, la chirurgie est
inopérante et l’appareillage peu satis-
faisant, car l’oreille devient intolérante
aux sons forts, amplifiés par les pro-
thèses auditives.
Quant aux traumatismes aigus, dus à
une déflagration, ils peuvent entraîner
des lésions du tympan, des osselets
(marteau…) ou de la cochlée. Leurs
conséquences immédiates sont par-
fois majeures (surdité presque totale).
Il importe de consulter au plus vite
(dans les 24 heures). Dans certains
cas, le recours à la chirurgie s’impose
(pour refaire un tympan, aspirer une
poche de sang dans l’oreille, réparer
les osselets). Dans d’autres, un traite-
ment d’urgence est prescrit à base de
corticoïdes, mais cette thérapeutique
n’est pas toujours efficace.
Enfin, les effets du bruit ne se limi-
tent pas à l’oreille. Il peut affecter les
systèmes nerveux, cardio-vasculaire,
et engendrer des déficits de l’atten-
tion, des tensions musculaires, des
vertiges, des troubles de l’humeur et
du sommeil. Les salariés qui tra-
vaillent dans le bruit sont souvent fati-
gués, irritables et plus anxieux. Autant
de perturbations susceptibles de favo-
riser les accidents de travail.
Cendrine Barruyer
Pour en savoir plus
– Lire « Le guide des EPI »,
supplément de
Prévention BTP
,
n° 90, novembre 2006.
– www.infobruit.org
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