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T H É ÂT R E
Texte: Katia Meylan
C
e jeune homme avait une
écriture bien prolifique. Il écrit
à sa mère et à sa sœur tous les jours,
leur raconte qu'il apprend à monter
à cheval, à conduire les camions,
à manier des armes. À tuer. Il leur
parle de la vie aussi, de ses amis, et il
semble beaucoup penser à une jeune
amie de la famille, Rosalie. Durant
ses années loin de la maison, il vit
toutes sortes d'expériences, rencontre
des personnages qui semblent faits
pour être joués sur scène. Il parle
à sa mère d'un certain Auguste, de
quelques années son aîné, qu'il admire
beaucoup. Dans le regard de Constant,
Auguste est un banquier, fondateur
d'un journal, fiancé à une très belle
fille…
moins belles histoires de vie. Véritable
enquêtrice, la metteuse en scène
aura aussi découvert des choses que
Constant n'a jamais su, et certains
personnages sont moins reluisants que
ce qu'ils avaient laissé croire…
Là débute son travail de metteuse
en scène. Ces lieux, ces objets et ces
personnages ont besoin d’acteurs pour
les faire revivre. Et dans ses propos,
on comprend bien qu'"un acteur seul
sur scène qui lit des lettres, c'est vu et
revu". Il faut de la vie, du mouvement!
Elle façonne des personnages scéniques
à partir des vrais, et se met en quête
de jeunes poilus; les soldats étaient
parfois âgés d'à peine dix-huit ans. Le
casting éclectique de la pièce comporte
donc de jeunes comédiens en cours de
formation ou ayant tout juste fini leurs
cours de théâtre. Le rôle du personnage
principal en 1916 sera tenu par Elie
Scaldino, un horticulteur amoureux
du théâtre, qui apporte à la pièce sa
spontanéité et jouera un Constant
encore jeune et naïf. Le Constant qui
connait la guerre quelques années plus
tard sera interprété par Nicolas Ruegg,
un comédien doté d'une expérience
de la scène beaucoup plus longue
puisqu'il était déjà sous les projecteurs
dès l'âge de trois ans et demi. Enfant
de la balle, il grandit dans le monde
du cirque, et au fil de son enfance, de
son adolescence et de sa vie d'adulte,
il écrit des spectacles et des pièces de
théâtre. Il est également comédien
au théâtre et à l'écran. La richesse du
casting ne s'arrête pas là. Parmi les
acteurs, Christophe Gorlier, membre
de la Compagnie Paradoxe, chuchoteur
et dresseur de chevaux pour le théâtre.
Anthony Gerber, directeur technique
au théâtre l'Oriental. Coralie Garcia,
maman et responsable des réseaux
sociaux pour la pièce. Quant à la
metteuse en scène, qui a eu pour tâche
ces derniers mois de diriger les talents
et caractères divers et variés de cette
équipe, on la retrouvera dans plusieurs
petits rôles: de la mère à qui les lettres
sont adressées à la femme poète un
peu folle au milieu des tranchées, en
passant par la chanteuse de cabaret...
bref, elle jouera "un peu de tout", et on
ne la reconnaîtra pas, nous dit-elle!
La Compagnie qu'elle a créée il y a six
ans a une certaine expérience pour
aborder les thèmes forts, puisqu'elle
s'attaque au monde carcéral suisse avec
"Dis à ma fille que je pars en voyage",
au statut familial des hommes d'église
avec "Femme de Prêtre", et récemment
aux croyances religieuses et aux droits
de l'Homme avec "Lapidée", que la
troupe a joué à Paris. Elle s'est aussi
autorisée des visites à la poésie et au
chant avec "Cocteau, l'âme du poète".
Dans "1916; Ciel bleu à l'horizon", c'est
l'amitié et les relations humaines plus
que la guerre qui tissent la pièce. Les
hommes sont des hommes plus que
des soldats, des petites étincelles de
courage et d'abnégation plus qu'une
grande machine.
"1916; Ciel bleu à l'horizon" se veut
résolument moderne et transmédia,
puisque la compagnie imagine
même une page Facebook au nom
de Marcelle, la sœur du personnage
principal, qui publie au jour le jour
depuis le 1er janvier les lettres du front
qu'elle recevait de son frère Constant,
en partageant également son vécu,
ses impressions durant toute cette
période.
Rendez-vous alors avec Marcelle sur
Facebook en attendant la pièce, qui
aura lieu sur dix dates du 26 avril au 7
mai à l'Oriental de Vevey, puis les jeudi
11 et vendredi 12 mai à l'Espace Culturel
des Terreaux à Lausanne.
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Verdun aujourd'hui. Photo: David Klaus
Lorsque le photographe JeanClaude Boré lui confie qu'il a
chez lui pas moins de 800 lettres
écrites par son père, Constant Boré,
datant de l'époque où ce dernier
était soldat de la Première Guerre
Mondiale, Nathalie Pfeiffer ne
peut faire autrement qu'imaginer
déjà sa prochaine création. Une
occasion également de célébrer
le 100ème anniversaire de notre
Europe moderne. En nous parlant
de "1916; Ciel bleu à l'horizon", la
metteuse en scène passionnée de la
Compagnie Paradoxe nous promet
une pièce non pas poussiéreuse
telles les lettres conservées un siècle
durant, mais vivante comme le
jeune homme de dix-neuf ans qui
les écrivait en ce temps-là.
Aujourd'hui, toutes ces lettres sont
dactylographiées grâce au travail de
Jean-Claude Boré. Ces sources en main,
Nathalie Pfeiffer passe plusieurs années
à la recherche de villages, de maisons,
de véritables d'objets de collection, de
noms, et trouve même des descendants
qui peuvent lui raconter de belles et
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