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INFLUENCE DE LA MYCORHIZATION ARBUSCULAIRE SUR LA
CULTURE INTENSIVE DE L’OIGNON (ALLIUM CEPA L.) AU SENEGAL
H. A. SOW, T. A. DIOPi, F. NDIAYE, A. G. B. MANGA, A. DIALLO
Laboratoire de Biotechnologies des Champignons, Département de Biologie Végétale, Faculté des
Sciences et Techniques, Université Cheikh Anta Diop, BP. 5005 Dakar-Fann, Sénégal
Abstract:
A field experiment was carried out on onion (Allium cepa L.)
under intensive cultivation conditions in presence of three
arbuscular mycorrhizal fungi : Glomus aggregatum, G.
fasciculatum and G. mosseae. Despite the high soil
mycorrhizal potential, the introduced species improved the
productivity of the onion cultivar’s “Sivan”. Arbuscular
mycorrhizal inoculation allowed a significant onion yield
increase as a result of significant increase of the average
diameter and bulb weight of onion bulbs compared to the non
inoculated and fertilized plants. Furthermore, this study
showed that mycorhization is not inhibited by a NPK
fertigation and that it can even increase the efficiency use of
these nutrients for the profit of onion crop.
Résumé:
La variété d’oignon « Sivan » a été cultivée au champ dans les
conditions de culture intensive en présence de trois souches de
champignons mycorhiziens arbusculaires : Glomus
aggregatum, G. fasciculatum et G. mosseae. Malgré le
potentiel mycorhizogène élevé du sol, les souches introduites
se sont avérées efficaces sur la productivité de « Sivan ».
L’inoculation mycorhizienne arbusculaire a permis une
augmentation significative du rendement , du calibre et du
poids moyen des bulbes d’oignon comparativement aux
plantes non inoculées et fertiguées. D’autre part, cette étude a
montré que la mycorhization n’est pas inhibée par une
fertigation en NPK et qu’elle peut même augmenter
l’efficience de ces minéraux au profit de la culture d’oignon.
Keywords : Allium cepa, fertigation, Glomus spp., crop
intensification Mots clés : Allium cepa, culture intensive, fertigation, Glomus
spp.
1 . INTRODUCTION
L’oignon (Allium cepa L.) est la spéculation maraîchère la plus cultivée et la plus consommée au
Sénégal (Anonyme, 2003). Sa culture nécessite en plus d’une grande quantité d’eau, de fertilisants
chimiques et/ou organiques. Mais selon Mosse (1973), plus de 75% des fertilisants phosphatés utilisés
ne sont pas immédiatement disponibles pour les cultures. En effet, les différentes réactions
biogéochimiques les transforment souvent sous des formes inutilisables particulièrement en milieux
alcalins. Ainsi la nature cosmopolite des champignons mycorhiziens arbusculaires doit être exploitée
pour une utilisation plus efficiente et plus raisonnée des fertilisants chimiques de synthèse au profit
des plantes cultivées (Lovato et al. 1995 ; Bethlenfalvay et Lindermann, 1992). L’inoculation avec des
souches mycorhiziennes arbusculaires sélectionnées permet aussi d’assurer une disponibilité et une
continuité hydrique au niveau de l’interface sol-racine (Gianinazzi-Pearson et Diém, 1982). En outre
la mycorhization arbusculaire peut aider à surmonter les chocs lors de la transplantation (Charron et al.
2001 ; Diallo, 2001), à accélérer la décomposition de la matière organique et à réduire les maladies
racinaires (Sharma et Adholeya, 2000 ; Dehne, 1982).
Cette présente étude se propose d’évaluer les effets agronomiques de l’inoculation des champignons
mycorhiziens arbusculaires sur la productivité de l’oignon en intégrant les itinéraires techniques
utilisés en agriculture moderne.
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II . MATERIELS ET METHODES
II . 1 Site expérimental
L’expérience s’est déroulée à la Ferme Pilote d’irrigation de Keur Momar SARR, situé à 50 Km de
Louga. Ce site est caractérisé par une pluviométrie moyenne de 250 mm/an et les températures
maximales fluctuent entre 31 et 36°C avec des minimales qui se situent entre 15 et 25°C. L’humidité
relative de l’air au cours de l’année varie entre 21% et 95% avec une évaporation journalière élevée
surtout au mois de Février où elle atteint 11,5 mm. Le sol, comme la plupart des sols de cette zone est
sableux à sablo limoneux avec une texture fine. C’est un sol pauvre en matières organiques avec un
pH proche de la neutralité (pH=6,8). Le phosphore assimilable varie de 11,5 ppm dans les couches
superficielles (0-20cm) à 16 ppm dans les couches plus profondes (20-40 cm).
II . 2 Potentiel mycorhizogène du sol
La richesse du sol en propagules mycorhiziennes arbusculaires a été évaluée par la méthode MPN en
utilisant le mil comme plante test et en diluant le sol au 10ème avec 5 répétitions par dilution. Après 28
jours de culture, l’estimation des propagules s’est faite en utilisant la méthode de Alexander (1965).
II . 3 Partenaires symbiotiques
Le matériel végétal est composé de la variété d’oignon « Sivan » récemment introduite pour test de
vulgarisation.
Trois souches de champignons mycorhiziens arbusculaires (Glomus agregatum Glomus mosseae
Glomus fascilatum) provenant de la collection du laboratoire de microbiologie des sols
IRD/ISRA/UCAD ont été utilisées. Ces isolats fongiques sont préalablement multipliés en serre dans
des pots contenant du sable grossier de plage stérilisé et pauvre en phosphore assimilable en utilisant
comme plante piége le maïs. Les plantes sont ensuite régulièrement arrosés à la capacité au champ et
reçoivent en plus tous les 15 jours, 100 ml d’une solution nutritive de Long Ashton.
III . DISPOSITIF EXPERIMENTAL ET CONDUITE DE L’ESSAI
Des semis directs ont été mécaniquement réalisés à raison de 4 lignes par planche avec un écartement
de 25 cm entre les lignes. La densité recherchée est de 20 pieds par mètre linéaire. 8 traitements ont
ensuite été effectués en fonction des itinéraires techniques avec des plantes témoins non inoculées sans
ou avec fertigation, les autres plantes sont inoculées avec Glomus fasciculatum, G. mosseae et G.
aggregatum et soumises ou non à la fertigation.
La fertigation ou fertilisation par irrigation apporte l’engrais (NPK 23 7 23) à la culture dans le même
circuit que l’eau et débute 52 jours après semis. Les quantités d’eau et doses d’engrais (tableau I)
nécessaires au développement des plantes de même que les traitements phytosanitaires appropriés
(tableau II), ont été apportées selon le calendrier cultural.
Tableau I : Programme d’irrigation et de fertigation pendant la culture.
Jours après semi Quantité d’eau en m3Dose d’engrais (NPK) en kg
01 au 45ième 585 0
45ième au 48ième 39 1,2
48ième au 59ième 88 4,4
59ième au 61ième 10 1,0
61ième au 83ième 88 11,0
83ième au 106ième 92 18,0
106ième au 127ième 63 10,5
TOTAL 965 46,1
L’inoculation a lieu 20 jours après semis, à raison de 16 g de mélange/m linéaire dans des sillons de 3
cm de profondeur, creusés le long des lignes de semis. L’inoculum fongique est constitué d’un
mélange de spores (27 spores/g sol) des différentes souches de champignons mycorhiziens
arbusculaires et de fragments de racines colonisées de maïs (fréquence de mycorhization : 80%).
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Tableau II : Calendrier des traitements phytosanitaires (insecticides)
Jours après semi Produit Quantité
08 Endosulfan 150 mL Injection
16 Diméthoate 150 mL Injection
20 Décis 150 mL Injection
25 Méthiocarbe 120 mL Injection
42 Diazinon 150 mL Injection
51 Endosulfan 150 mL Injection
58 Décis 150 mL Injection
94 Diméthoate 150 mL Injection
106 Diméthoate 50 mL atomiseur
TOTAL 1220 mL
Une parcelle de 1/8 d’hectare a été préparée avec des lignes de Leucaena servant de brise- vents. Les 8
traitements sont répartis dans un dispositif aléatoire totalement randomisé. Après trois mois de culture
et pour chaque traitement, 7 unités expérimentales (parcelles de 1,5 m2) sont sélectionnées au hasard
afin d’y effectuer les mesures. Les bulbes récoltés sont décolletés et mis en sac pour être acheminés
vers l’aire de conditionnement. Des mesures sur la productivité de l’oignon ont été effectuées en
calculant le diamètre et le poids moyen des bulbes de même que le rendement total rapporté à
l’hectare. Le pourcentage de mycorhization racinaire est estimé en utilisant la méthode de Furlan et
Fortin (1975).
Toutes les données mesurées sont ensuite soumises à l’analyse statistique avec le test F de Newman et
Keuls (P<0,05) pour la comparaison des moyennes en utilisant le logiciel STATITCF. Les données en
pourcentage ont été préalablement transformées en arc sinus avant l’analyse de variance.
IV . RESULTATS
IV . 1 Développement végétatif
La culture de la variété « Sivan » s’est déroulée normalement avec une homogénéité dans la réalisation
des différentes phases du développement végétatif. A la récolte, la maturité du bulbe est complète avec
100% de bulbes sains récoltés dans toutes les unités expérimentales.
IV . 2 Effectivité des propagules indigènes et colonisation racinaire
Les résultats obtenus donnent une estimation de la richesse en propagules de champignons
mycorhiziens arbusculaires avec 1800 propagules pour 50 g de sol utilisé et un intervalle de
confiance variant de 54,5 à 39,4.
Le degré de mycorhization des racines pour tous les traitements montre une différence
significative des plantes inoculées par rapport aux témoins avec des gains de colonisation
allant de 137% pour la fertigation à plus de 230% pour les autres traitements. Les plantes non
inoculées fertiguées ou non ont donné respectivement 51% et 37% de colonisation racinaire.
L’inoculation mycorhizienne induit toujours une colonisation racinaire supérieure ou égale à
85%. Et c’est avec G. aggregatum que l’on obtient le taux le plus élevé après 120 jours de
culture. Avec la fertigation, le pourcentage de colonisation racinaire diminue légèrement chez
les plantes inoculées avec G. aggregatum et G. mosseae par contre chez les plantes inoculées
avec G. fasciculatum, le pourcentage de mycorhization passe de 85 à 93% (tableau III).
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Tableau III: Paramètres de mycorhization et de rendement.
Traitement Intensité de
mycorhization
en %
Rendement en
tonnes/ha Poids moyen en
g Taille du bulbe
en mm
Témoin 37% d 13,16d 53,43 b 48,02a
G mosseae 89% ab 42,12a 199,00 a 53,9a
G aggregatum 93% a 38,82a 177,14 a 54,12a
G fasciculatum 85% b 40,16a 213,14 a 53,83a
Fertigation 51% c 27,00c 98,86 b 52,16a
G mosseae+Fertigation 93% a 34,35b 162,00 a 53,01a
G aggregatum+Fertigation 86% b 40,77a 151,00 a 53,57a
G fasciculatum+Fert 88% ab 41,87a 213,86 a 54,8a
Dans chaque colonne, les valeurs suivies par les mêmes lettres ne sont pas significativement différentes au seuil
p<0,05 (Test de Newman et Keuls)
IV . 3 Effet de l’inoculation et de la fertigation sur les rendements
Pour les plantes soumises à l’inoculation mycorhizienne arbusculaire seule, le rendement
moyen obtenu est de 40 tonnes/ha. Comparées aux plantes non inoculées et celles soumises à
la fertigation, les plantes mycorhizées présentent respectivement une augmentation du
rendement de plus de 27 et de 13 tonnes/ha. Quant à la fertigation, elle améliore sensiblement
le rendement chez les plantes inoculées avec Glomus aggregatum et G. fasciculatum,
contrairement aux plantes inoculées avec G. mosseae (tableau III).
La mycorhization améliore significativement le poids moyen des bulbes par rapport aux
témoins, cependant chez les plantes inoculées fertiguées ou non, on ne note aucune différence
significative sur le poids moyen des bulbes (tableau III).
L’inoculation mycorhizienne de même que la fertigation n’induit aucun effet significatif sur la
taille des bulbes (tableau III). Toutefois, on note en moyenne une légère différence de taille
des bulbes chez les plantes inoculées fertiguées ou non (54%) par rapport aux témoins (50%).
V . DISCUSSION
Le sol de la station expérimentale de Keur Momar SARR est très riche en propagules
mycorhiziennes arbusculaires viables. Les techniques culturales pratiquées au niveau du site,
à savoir la rotation culturale, le maintien de l’humidité dans les parcelles, la microaspersion
du sol avant les semis, font de ce sol un substrat propice pour un développement soutenu des
champignons mycorhiziens arbusculaires. Des travaux antérieurs ont montré que le potentiel
infectieux des champignons mycorhiziens arbusculaires est plus élevé dans les zones humides
Soudano-guinéennes que dans les zones sahéliennes sèches du Sénégal (Diop et al., 1994).
D’autre part, la pauvreté du sol du site en phosphore assimilable pourrait aussi expliquer sa
richesse en propagules mycorhiziennes arbusculaires (Plenchette et al., 1983 ; Sieverding,
1996 ; Diop, 1996). Cependant, leur agressivité sur la culture de l’oignon est moindre que
celle des souches introduites. La compétitivité des souches introduites malgré la vitalité des
champignons mycorhiziens arbusculaires indigènes, rehausse aussi l’intérêt de la sélection et
de la préservation de germplasmes fongiques efficientes au laboratoire. La fertigation
soutenue en NPK et la fréquence des traitements phytosanitaires n’ont pas inhibé l’action
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bénéfique des champignons symbiotiques sur le développement des plantes. Des études en
milieu contrôlé permettront de mieux apprécier l’interaction la fertigation NPK et les produits
phytosanitaires sur la colonisation racinaire des champignons symbiotiques. Toutefois des
travaux ont montré que le phosphore, l’azote et le potassium sont bien assimilés par les
complexes mycorhiziens et stimulent la colonisation racinaire (Strullu et al., 1991 ; Francis et
al., 1986 ; Declerck et al., 1994).
L’absence de maladies au niveau des bulbes peut s’expliquer par la qualité des produits
phytosanitaires utilisés et la forte colonisation racinaire par les champignons symbiotiques
(Sharma et Adholeya, 2000). L’inoculation mycorhizienne arbusculaire améliore
quantitativement le rendement à l’hectare de l’oignon et ceci en présence ou non de
fertigation. Ce résultat confirme que la mycorhization peut être combinée à la fertigation
chimique et accroît leur efficience en agriculture intensive (Bansal et Mukerji, 1994 ; Clark et
Zeto, 2000). D’autre part l’inoculation mycorhizienne et la fertigation agissent
significativement sur le poids et la taille des bulbes d’oignon. En fait sur des sols peu fertiles,
la maturation et la bulbaison de l’oignon requièrent une fertilisation importante en NPK et une
bonne infection mycorhizienne (Charron et al., 2001).
Ces résultats permettent d’envisager l’intégration des mycorhizes arbusculaires dans les
schémas de production pour l’amélioration de la culture de l’oignon et d’autres spéculations
maraîchères d’importance économique tout en réduisant les quantités de fertilisants chimiques
utilisés.
REMERCIEMENTS
Les auteurs remercient M Ousseynou Gueye pour son assistance technique et la Fondation
Internationale des Sciences pour sa contribution financière à la réalisation de ce travail
(contrat C/2896-1).
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