Tumulte à Athènes
La fin semblait proche. Les quelques trières, ces grands vaisseaux grecs propulsés sur les eaux
de la Méditerranée par la seule force des rames, rescapées de cette expédition désastreuse
étaient en piteux état. Elles ne pourraient pas retourner au combat avant plusieurs mois. Sur
quoi reposerait dès lors la force d’Athènes ? Telle était la question qui hantait l’esprit des
Athéniens. De nombreux citoyens étaient présents sur les quais du Pirée. Ils attendaient le
retour de leur flotte défaite. On pouvait lire sur leurs visages la peur naissante que provoquait
la vision de ces bateaux autrefois glorieux et aujourd’hui déchus. Après l'amarrage des trières,
la population qui, regroupée près des pontons, réconfortait les survivants, soulagés de
retrouver leur cité, quand un détail attira leur attention.
Le détail n’était autre que l'une des plus grandes trières de la flotte d'Athènes, sur laquelle
embarquaient les stratèges menant les vaisseaux de guerre au combat. Cette dernière n’avait
subit aucun dégâts lors de la bataille alors qu’autour d'elle, les vaisseaux semblaient avoir
navigués au milieu d'une tempête de Poséidon. L'équipage de la trière mit pied à terre la tête
basse et le regard fuyant. Tous avaient honte de ne pas avoir prit part au combat contre la
flotte péloponnésienne et ne voulurent pas s'attarder auprès de la foule toujours plus sur les
quais. Le dernier rameur avait mis pied à terre quand enfin, Nicias et Demosthène, les deux
stratèges ayant menés le combat apparurent. Leurs pas rapides fendirent la foule en direction
du conseil. Sur leur passage et bien après, des rumeurs se propageaient. Les soldats
fraichement débarqués conservaient quand à eux leur attitude fuyante, ils se taisaient, taisaient
la lâcheté de leurs commandants, ces stratèges élus pour les mener à la victoire. Par leur
inaction, tout le vaisseau avait trahi la cité.
Seul un équipage se trouvait encore sur son vaisseau, entourant l'un de ses sous-officiers. De
timides acclamations provenaient du regroupement. Aristophane et Clémon, deux notables
d’Athènes restés à la cité grâce à de grosses donations au conseil, entendirent au loin cette
ovation, et, non sans étonnement, cherchèrent à la comprendre. Tous couvraient de louanges
leur sous-officier, Tilma, simple petit artisan d'Athènes. Après les clameurs, se furent des
accolades et des poignées de mains, puis encore une haie d’honneur, à laquelle les rameurs
des autres navires se joignirent. Bientôt, toute la flotte scanda le nom de Tilma, entre deux
vivats. Il remonta sur le quai en essayant de les calmer. Tilma essayait de les convaincre qu’il
ne méritait pas tant d’honneur, surtout pas une telle ovation indigne de son rang. La foule se
dispersa, emportant avec elle le flot de rameurs qui prenait la direction de leur foyer, tout
comme Tilma l'avait fait.
Quelques heures plus tard, Elias et Méhandre deux amis qui revenus vivants, se retrouvèrent
sur l'agora pour se détendre autour de quelques verres de vins, d'un plateau de fruits secs et de
fromage.
"Pourquoi a t-on acclamé Tilma? Seul un stratège a le droit à cet honneur. Demanda Elias
après avoir terminé son verre.
- Tu dis ceci car tu n'étais pas avec nous sur le bateau. Tilma valait bien plus que ces couards
de stratèges qui nous ont menés à la défaite.
- Que veux-tu dire par là ? Eristos n'était pas là pour vous commander ?