Gérer la santé des plantes comme un bien commun

publicité
Séminaire international SMaCH Gérer la santé des plantes comme un bien commun Paris, 26 février 2015 Background scientifique Le bien commun est une notion utilisée en économie et qui fait référence a un bien accessible à tous les membres d’un collectif ; chacun peut l'employer ou le consommer sans que les autres membres puissent l'en empêcher, par contre chacun peut l'endommager (le dénaturer) ou le surexploiter et l’épuiser. Le concept de bien commun fut rendu célèbre par Garrett Hardin qui grâce à son article publié dans Science en 1968, sous le titre « la tragédie des biens communs », a souligné la problématique de gestion de ce type de biens. Le problème central traité par la littérature scientifique sur le bien commun est comment administrer et gérer durablement ce type de ressources dont l’utilité est individuelle mais dont le coût de l’usure est partagé collectivement (Hardin, 1968). Ces biens peuvent être détruits par un usage abusif et l’on peut difficilement exclure un individu de son l’utilisation (Ostrom, 1990). De ce fait, la rationalité économique doit a priori pousser des individus qui se partagent un bien en commun à le surexploiter. Par exemple l’atmosphère terrestre, et plus particulièrement le taux de CO2 atmosphérique, est un bien commun et l’échec des négociations internationales sur les émissions de carbone (Conférence de Copenhague 2009) est assez symptomatique de la difficulté de gérer durablement un bien commun. En effet, tous les biens communs se caractérisent par le fait qu’ils sont utilisés et gérés conjointement par des acteurs aux dimensions et aux intérêts variables et la littérature traditionnelle sur le bien commun comprend un grand nombre d’études sur les problèmes de gestion durable de ressources collectives et les dilemmes sociaux tels que le « dilemme du prisonnier », « le free‐riding» et la pollution. Afin de résoudre le problème posé par la durabilité des biens communs, il existe plusieurs courants de pensée. Le premier, formé autour de la vision de Hardin (1968) véhicule une vision chaotique de l’action collective et propose deux modalités d’organisation : soit la gestion centralisée par l’Etat (taxation, réglementation de l’accès au bien, quotas,…) ; soit la privatisation du bien (en internalisant les externalités. C'est‐à‐dire en créant des droits de propriétés individuels transférables qui pourront être vendus) et sa gestion par le marché. Pour les partisans de ce courant de pensée, les biens communs ne peuvent subsister en tant que tel, les stratégies d’acteurs mèneront inévitablement à sa surexploitation et disparition. Les solutions proposées ici reviennent à essayer de transformer le bien commun soit en bien privé soit en bien public. Cette vision des choses a formalisé le modèle de pensée qui a inspiré depuis la plupart des grands textes et conventions internationales concernant la gestion des ressources communes de l’humanité, telles que l’eau, la biodiversité, les océans, ou le taux de CO2 atmosphérique. Ce courant semble néanmoins ignorer une autre alternative qui a donné naissance à un deuxième courant, la coopération entre les parties‐prenantes. En effet, plusieurs travaux dans plusieurs pays montrent que des acteurs locaux peuvent gérer de façon durable des ressources communes et ce via des formes d’auto‐
organisation. La vision du courant inspiré par Hardin et les politiques qui se fondent sur ses postulats sont aujourd’hui remises en cause (échec du protocole de Kyoto, gestion des ressources halieutiques…) et sont très critiquées. Des travaux récents ont montré que les biens communs peuvent exister en tant que tel et être géré durablement en bien commun. Ces travaux et ce courant de pensée ont été récompensés par un prix Nobel d’économie (prix d’Elinor Ostrom en 2009) et transmettent l’idée d’une gestion via des modes de propriété, de participation et de responsabilité partagés. Même si ces travaux sur une « gestion en bien commun » ont donné lieu a un cadre d’analyse a une théorisation poussée les chercheurs travaillant sur ce front de recherche peinent à expliquer pourquoi dans certains cas une gestion en bien commun est efficiente et résiliente et pourquoi dans certains cas cela n’arrive pas à émerger. Afin de lever ce verrou scientifique, il importe d’agréger des études de cas sur la possible gestion en bien commun de ressources collectives. Pour plus d’informations ‐ Sur le séminaire : [email protected] ou [email protected] ‐ Sur le Métaprogramme SMaCH : http://www.smach.inra.fr/ 1
Séminaire international SMaCH La gestion de la santé des plantes comme un bien commun Le modèle de production agricole subit actuellement un changement majeur vers la réduction des intrants polluants, dont les produits phytosanitaires, qui sont particulièrement utilisés pour gérer la santé des plantes cultivées. Ce changement induit de recourir à d’autres méthodes de lutte telles que la résistance génétique ou la lutte agronomique. Ces méthodes induisent le plus souvent de raisonner la santé des plantes à une échelle plus large que la parcelle ou l’exploitation agricole. La santé des plantes devient alors un « objet » à gérer collectivement comme le suggèrent des tentatives de recommandations pour le déploiement régional de variétés résistantes faites en Grande‐Bretagne et en France. Par exemple, la sur‐utilisation d’un gène de résistance sur un territoire conduit à son contournement rapide. Les gènes de résistance, comme les produits phytosanitaires, sont ainsi soumis à une tragédie des communs : une utilisation non raisonnée de la ressource conduit à la disparition de celle‐ci. Il convient donc de faire émerger les conditions organisationnelles et inter‐
organisationnelles, mais aussi réglementaires permettant de gérer durablement cette ressource dans un système productif. Or, les résistances variétales, comme les produits phytosanitaires sont aujourd’hui considérées comme des biens privés. Objectif du séminaire Ce séminaire vise à explorer la possible émergence d’une gestion « en bien commun » des composantes de la santé des plantes (résistance, génétique, biocontrôle, produits phytosanitaires,…). Il s’agira de faire dialoguer des chercheurs et des professionnels autour d’une séries de présentations sur une possible gestion en bien commun de la santé des plantes, et ce afin de : ‐ Préciser les divergences d’intérêt des différentes catégories d’acteurs concernés ; ‐ Sensibiliser les parties‐prenantes de la problématique à leur interdépendance et à la durabilité et à la proactivité d’une stratégie collective ; ‐ Définir et maturer un champ de recherche interdisciplinaire sur la gestion en bien commun de la santé végétale. Programme prévisionnel du séminaire 13h30 : Introduction du séminaire par François COLENO et Mourad HANNACHI, Inra SAD‐APT 13h50 : « la tragédie des anticommuns dans le domaine de la santé humaine » par Fabienne Orsi. Biographie: Fabienne Orsi est économiste, chargée de recherche à l’Institut de Recherche pour le Développement. Elle a fait sa thèse sur les "Droits de propriété intellectuelle et marchés financiers dans les nouvelles relations science/ industrie : le cas de la recherche sur le génome humain" (2001). Son thème de recherche a longtemps concerné l’articulation entre l’établissement de nouvelles normes de droit de propriété intellectuelle et la problématique de l’accès à la connaissance et aux innovations dans les domaines du vivant et du médicament. Avec le lancement en 2010 du projet ANR "Propriété intellectuelle, Communs, Exclusivité" elle s’engage dans une recherche pluridisciplinaire sur les communs de la connaissance avec comme principal champ d’intérêt l’étude du lien entre gouvernement des communs et propriété. Elle est l’une des coordinatrices du numéro de la Revue de la Régulation consacré aux communs et à Elinor Ostrom : http://regulation.revues.org/1028 15h20 : « Biens communs génétiques locaux et globaux: pour une méthodologie transdisciplinaire de recherche» par Tom Dedeurwaerdere. Biographie : Tom Dedeurwaerdere est professeur à la Faculté de philosophie de l'Université catholique de Louvain (Louvain‐la‐Neuve, Belgique) et directeur de recherche de l'Unité Gouvernance de la biodiversité au Centre de philosophie du droit. Ses travaux de recherche portent sur la théorie de la transition, la gouvernance de la biodiversité et des services écosystémiques ainsi que l’épistémologie de la recherche transdisciplinaire. Son principal domaine de recherche est l'analyse institutionnelle de la gouvernance des biens communs environnementaux et les « knowledge commons ». 16h50 : table ronde. 18h (fin). 2
Téléchargement