mt cardio, vol.2, n° 2, mars-avril 2006 191
Actualités
patients avec MP par opposition
à ceux n’ayant pas de MP.
Commentaire
Définition du MP.
Les discor-
dances de résultats des précé-
dentes études sont principale-
ment dues au fait qu’elles
n’utilisaient pas le même para-
mètre pour définir le MP. Certains
auteurs ont ainsi défini le MP par
la surface de l’orifice géomé-
trique interne de la prothèse.
Cette surface, fondée sur une
mesure
ex vivo
du diamètre de
la prothèse, se base sur des cri-
tères qui différent d’un type de
prothèse à l’autre et cette surface
géométrique surestime la surface
effective de l’orifice, en particu-
lier pour les bioprothèses. Il a été
notamment prouvé, que cette surface géo-
métrique indexée ne pouvait pas prédire
les gradients post-opératoires.
Impact du MP sur les événements car-
diaques.
Les données de cette étude vont
dans le sens des études précédentes, qui
notaient que le MP était indépendamment
associé à une plus grande survenue d’évé-
nements cardiaques. Milano
et al.
[1]
avaient rapporté que l’absence d’événe-
ments cardiaques tardifs était de 56 ± 15
% pour les patients avec un MP sévère
(SEOi ≤0,60 cm2/m2), de 80 ± 5 % pour
les patients avec un MP modéré (SEOi ≤
0,90 cm2/m2et > à 0, 60 cm2/m2) et de 94
± 4 % pour les patients sans MP (SEOi
> 0,90 cm2/m2). Dans une étude plus
récente de Ruel
et al.
[2] incluant 681
patients, le MP défini par une SEOi ≤
0,80 cm2/m2était associé à une augmen-
tation de 60 % du risque d’insuffisance
cardiaque après RVA.
Impact du MP sur la survie.
Plusieurs
études ont montré que le MP avait un
impact significatif sur la mortalité intra-
hospitalière. Dans l’étude décrite, le
nombre de décès périopératoires était trop
faible pour permettre ce type d’analyse
sur l’impact du MP sur la mortalité intra-
hospitalière. Cette étude est la première
étude à observer que le MP est un facteur
de risque indépendant de mortalité à
moyen terme. Ceci n’a probablement pas
pu être prouvé par des études antérieures,
car les populations étudiées étaient hété-
rogènes et incluaient non seulement des
SA pures, mais également des insuffisances
aortiques et des maladies aortiques mixtes.
Mécanismes potentiels responsables des
effets délétères du MP.
Dans cette étude,
la présence d’une hypertrophie ventricu-
laire gauche sévère avant l’intervention
est un facteur de risque indépendant d’évé-
nements cardiaques après RVA. Une étude
antérieure [3] avait suggéré que la sur-
charge de pression résiduelle due au MP
pouvait empêcher la régression de l’hy-
pertrophie ventriculaire gauche après RVA.
Ceci a pu contribuer à la survenue accrue
d’événements cardiaques et de décès dans
le groupe avec MP. D’autre part, chez les
patients avec SA et angiographie coronaire
normale, l’amélioration de la réserve du
flux coronaire après RVA est directement
dépendante de l’amélioration de la SEOi
de la valve et donc l’augmentation de la
pression ventriculaire gauche systolique
associée au MP. La conséquence en serait
un délai dans la normalisation du flux de
réserve coronaire après RVA, favorisant le
développement d’une dysfonction ven-
triculaire gauche et à la survenue d’évé-
nements cardiovasculaires délétères.
Implication clinique.
L’implication pra-
tique de ces données est importante si l’on
considère que la fréquence du MP est
notable avec une prévalence de 47 % dans
l’étude actuelle, ce qui coïncide avec les
résultats reportés dans la littéra-
ture (19 à 70 %). D’autre part,
contrairement aux autres fac-
teurs de risque d’événements
cardiaques et de mortalité, le MP
est un facteur de risque modi-
fiable qui peut être évité si on uti-
lise une stratégie prospective au
moment de l’intervention. Cette
stratégie proposée par Pibarot et
Dumesnil [4] consiste en un cal-
cul systématique de la SEOi pro-
jetée avant l’implantation de la
prothèse. Si cette dernière est
plus basse que la valeur recom-
mandée (0,8 à 0,9 cm2/m2), le
chirurgien doit, soit utiliser un
autre type de prothèse avec un
profil hémodynamique meilleur,
soit réaliser un élargissement de
l’orifice aortique pour adapter la
prothèse. Une attention particulière doit
être adoptée pour éviter le MP, c’est-à-dire
obtenir une SEOi minimum ≥0,9 cm2/m2
chez les patients jeunes physiquement
actifs ainsi que chez les patients ayant une
dysfonction ventriculaire gauche.
Limites de l’étude.
Le nombre de patients
avec MP sévère n’était pas suffisant pour
permettre une analyse séparée de ces
patients et déterminer si un MP sévère était
associé à une survenue d’événements plus
significatifs comparés aux patients avec
un MP modéré, moyen ou absent. Enfin,
il ne s’agissait pas d’une étude randomi-
sée et il est possible que des biais aient pu
influencer les résultats.
Sandra Janower
Références
1. Milano AD, De Carlo M, Mecozzi G,
et al
. Cli-
nical outcome in patients with 19-mm and 21-
mm St. Jude aortic prostheses: comparison at long-
term follow-up.
Ann Thorac Surg
2002 ; 73 :
37-43.
2. Ruel M, Rubens FD, Masters RG,
et al
. Late
incidence and predictors of persistent or recur-
rent heart failure in patients with aortic prosthe-
tic valves.
J Thorac Cardiovasc Surg
2004 ; 127 :
149-59.
3. Tasca G, Brunelli F, Cirillo M,
et al
. Impact of
valve prosthesis-patient mismatch on left ventri-
cular mass regression following aortic valve repla-
cement.
Ann Thorac Surg
2005 ; 79 : 505-10.
4. Pibarot P, Dumesnil JG. Hemodynamic and
clinical impact of prosthesis-patient mismatch in
the aortic valve position and its prevention.
J Am
Coll Cardiol
2000 ; 36 : 1131-41.
40
01
50
60
70
80
90
100
2 3 4 5 86 7
(299)
p = 0,005
Pas de MP 87 % ± 4
75 % ± 4MP
(228) (164) (113) (70) (35) (4)
Suivi (en années)
Survie sans événement cardiaque
Figure 2.
Survie sans événements cardiaques des patients avec mismatch
prothétique par rapport à ceux n’ayant pas de MP. Les nombres entre paren-
thèses indiquent le nombre de patients à chaque suivi annuel.
NewsMTCAVRIL2006-P184-191ok 8/06/06 16:15 Page 191
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.