déontologie journalistique pilotée par l'Union européenne.
Quels sont les principaux facteurs favorisant aujourd'hui la montée de l'extrême
droite en France ?
Le fonds de commerce électoral de la famille Le Pen n'a pas changé depuis ses
premiers succès enregistrés aux élections européennes de 1984. Trente ans ont passé
mais le Front national exploite toujours les mêmes thèmes : l'immigration, le chômage,
l'insécurité, la prétendue corruption des élites, la prétendue décadence de la France, etc.
Ce qu'il y a de nouveau, aujourd'hui, c'est le fait que de plus en plus d'électeurs français
osent voter pour lui, même quand ils éprouvent des doutes sur sa capacité à gouverner
et sur sa compatibilité avec les valeurs démocratiques.
Dans les années 1980, il y avait déjà un électeur français sur quatre qui se disait plus
ou moins d'accord avec les thèses du Front national mais, même quand ils étaient
d'accord avec ses idées, la plupart de ces gens ne prenaient pas le risque de voter pour
lui - ils le disaient dans tous les sondages d'opinion- parce qu'ils le jugeaient dangereux
pour la démocratie. Leur crainte constituait un verrou qui condamnait le Front national à
être un parti protestataire, comme le Parti communiste français l'avait été auparavant.
Aujourd'hui, ce verrou a sauté. Marine Le Pen a une image moins sulfureuse que celle
de son père, et de plus en plus de gens osent voter pour elle. D'une certaine façon, ce
changement est logique. Le raisonnement de ces gens est simple : ils constatent que les
résultats économiques et sociaux des politiques de gauche ne sont pas meilleurs que les
résultats des politiques de droite, et ils se disent que, après tout, ils n'ont plus rien à
perdre à miser sur le Front national, la seule voie politique que la France contemporaine
n'ait pas encore tentée... Ces électeurs à la vue courte se trompent dangereusement
mais, en politique, il y a souvent des comportements irrationnels. ..
Le FN est aujourd'hui à la tête de plusieurs communes, et peut-être de
départements, à partir de dimanche, chose inconcevable par le passé. Peut-il
remporter, dans les prochaines années, les élections législatives ou une
présidentielle ?
-Il ne faut pas sous-estimer la force électorale du Front national, qui est désormais bien
installé dans le paysage politique français. Mais il ne faut pas non plus la surévaluer car
c'est le niveau des abstentions qui grossit artificiellement son importance. Dimanche 22
mars, à l'occasion du premier tour des élections départementales, 5,15 millions
d'électeurs ont voté pour ses candidats, et cela faisait 9,3% de plus qu'aux élections de
2014, mais la France compte plus de 43 millions d'électeurs. Le Front national reste donc
très loin de pouvoir disposer d'une majorité électorale.
La droite, au premier tour des élections départementales, a d'ailleurs progressé plus
spectaculairement que le Front national puisque les candidats de l'UMP-UDI, rassemblés
derrière Nicolas Sarkozy, ont progressé, eux, de 44,2% par rapport à 2014 ; ils sont
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