Les gestes élémentaires de survie
Le médecin, témoin direct ou sollicité pour un acci-
dent de submersion, se retrouve en situation de leader
malgré lui, n’ayant pourtant aucun matériel à disposition
auquel se raccrocher... Il ne pourra refuser sa position de
référent face aux témoins et aux secouristes, qui arriveront
le plus souvent avant une équipe du SMUR. Les règles de
base du secourisme sont les plus utiles dans ces circons-
tances déstabilisantes. Il faut se rappeler que la durée de
l’hypoxie est le facteur pronostique le plus important.
L’oxygénation et la perfusion doivent être restaurées le
plus précocement possible [6, 7]. L’ordre de prise en
charge des détresses vitales est bien codifié : A-B-C-D.
A) Air way : un patient en détresse respiratoire respire
mieux en position demi-assise. La majorité des noyés
inhalent peu d’eau (qui sera rapidement absorbée par la
circulation centrale) ; aucune manœuvre d’évacuation
n’est donc recommandée.
B) Breathing : reconnaître un arrêt respiratoire et le
ventiler au bouche-à-bouche. En cas d’absence de respi-
ration spontanée, il est recommandé de ventiler le patient
pendant 1 minute avant d’entreprendre le massage
cardiaque. Si le patient ne peut être ramené en moins de
5 minutes au bord, il faudra ventiler la victime 1 minute de
plus. Une fréquence respiratoire supérieure à 30 mouve-
ments par minute est un signe de gravité.
C) Cardio : l’absence de réponse à la stimulation et
l’absence de réaction à l’insufflation suffisent pour débuter
un massage cardiaque (victime installée sur un plan dur).
D) Drogues : dès que possible, d’une voie veineuse
sera posée suivie d’une injection de 1 mg d’adrénaline en
cas d’arrêt cardiorespiratoire, à renouveler toutes les
3 minutes en cas d’absence de récupération d’un pouls.
Chez l’enfant, les doses sont de 30 lg/kg puis 10 lg/kg
toutes les 5 minutes (il est plus facile de l’injecter après une
dilution au 1/10 dans une seringue).
À propos du massage cardiaque : il est moins préjudi-
ciable de faire un massage cardiaque à un noyé incons-
cient qui ne respire pas ou qui gaspe que de perdre du
temps à rechercher la présence d’un pouls qui n’affirmera
pas l’efficacité et la pérennité d’une circulation.
Les dernières publications internationales proposent
une alternance de 30 compressions pour 2 insufflations en
toute situation. La réanimation doit être prolongée jusqu’à
l’arrivée de l’équipe médicale, en particulier en cas de
noyade en eau froide. Il est aussi recommandé de se
relayer toutes les 3 minutes.
Les manipulations doivent être très prudentes en cas de
circonstances à risque de lésion du rachis cervical
(vagues, plongeon, rochers...).
Réchauffer la victime est un geste primordial. Il faut
donc déshabiller la victime, la sécher et la recouvrir avec
des vêtements et une couverture, le tout enveloppé dans
une couverture de survie (côté argenté vers la victime).
Des boissons chaudes peuvent être administrées en
l’absence de détresse respiratoire ou neurologique.
Stratégie de la régulation médicale
L’appel est classé prioritaire au centre 15. En cas
d’indisponibilité du médecin régulateur, la notion de
« noyade avec difficulté respiratoire » peut déclencher
une procédure réflexe d’envoi d’équipe médicale. Dès
que possible, le médecin régulateur sera informé et pourra
rappeler si besoin le témoin.
Le médecin généraliste,
premier intervenant médical
Les transporteurs sanitaires sont équipés de masque à
haute concentration et d’oxygène. Ils ont reçu une forma-
tion pour ventiler les patients au ballon autoremplisseur.
Néanmoins, le seul signe d’efficacité d’une ventilation au
bouche-à-bouche ou au ballon reste la présence d’une
élévation de la poitrine à l’insufflation. Il est souhaitable
qu’ils possèdent aussi une minerve afin de stabiliser le
rachis cervical. Ils peuvent être habilités à mettre en
œuvre un défibrillateur semi-automatique (DSA). La pro-
cédure d’utilisation est très simple et indiquée par la
machine. Pendant que les secouristes installent le DSA, il
ne faut pas arrêter les gestes de réanimation. Lorsque
l’appareil donne ses consignes, il faut l’écouter. Aucune
défibrillation par excès lorsqu’une situation de « choc
conseillé » est formulée par l’appareil. Il est prudent
d’avoir séché le patient et l’avoir éloigné de l’eau avant la
pose du DSA.
Ce que fera le SMUR
L’oxygénation est poursuivie par l’équipe médicale.
Soit par masque à haute concentration, soit après intuba-
tion en cas d’arrêt cardiaque ou de détresse respiratoire
majeure. L’intérêt de la mise en place de ventilation non
invasive n’est pas démontré actuellement. L’intérêt de la
mise en place d’une sonde gastrique est démontré. La
victime aura été perfusée et un remplissage prudent et lent
débuté. En cas d’hypotension, le recours aux amines
vasoactives est précoce.
La décision d’arrêt de réanimation n’est pas aisée chez
le noyé. Plusieurs paramètres paracliniques pourront aider
à la décision d’arrêt de soins. Lors de l’intubation, un taux
de CO
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expiré bas mesuré peut aider à la décision d’arrêt
de soin. Par ailleurs, les signes cliniques de mort
(mydriase, raideur) peuvent être directement liés à l’hypo-
thermie ; dans ce cas, la kaliémie est un paramètre défa-
vorable lorsqu’elle est supérieure à 10 mmol/L. C’est
En attendant le SMUR
mt, vol. 12, n° 5-6, septembre-décembre 2006
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