20 / HYPNOSE & THÉRAPIES BRÈVES SUICIDE ET HYPNOTHÉRAPIE AUX URGENCES / 21 SUICIDE ET HYPNOTHÉRAPIE AUX URGENCES tains de ces patients suicidants ou suicidai- VIRGINIE LAGRÉE res. En effet, cette approche laisse le patient Psychiatre, praticien hospitalier aux urgences guider le thérapeute autour de son pro- psychiatriques du C.H.U. de Nantes, formée à blème et de ses objectifs par un type de ques- l'hypnose et aux thérapies brèves à l'AREPTA tionnement non intrusif, s’intéressant moins (Association Régionale pour une Thérapie EMOTIONS ET PARADOXES SUR LE SEUIL... au « pourquoi » qu’au « comment », facilitant ainsi l’alliance thérapeutique. En va- Active), (Institut Milton Virginie L AGRÉE lorisant le patient par la mise en exergue de Erickson de Nantes) ses ressources et de ses compétences, elle Très souvent confrontée à la crise suicidaire au service D’autre part, les patients amenés aux ur- peut permettre de renforcer un peu l’estime gences sont bien souvent peu enclins voire de soi, estime de soi nécessaire à la sortie réticents, voire même franchement oppo- de la crise. Enfin, elle tente d’offrir une vi- des urgences où je travaille, sés à la consultation avec un psychiatre, sion différente au patient et tâche de lui pro- j’étais en quête d’une ce qui rend la relation moins aisée encore. poser un éventail de choix possibles afin de Cette situation se complique par l’extrême lui redonner du pouvoir sur sa situation. manière de mieux aborder les situations de crise, singulièrement la crise diversité des patients traversant cette crise : leur histoire, leur personnalité, leur mode « Qui peut quitter sa douleur et sa solitude de vie, les raisons qui les amènent… Là où sans regret ? » (Khalil Gibran) certains présentent des pathologies psychia- suicidaire, sans heurter ni triques (schizophrénie, troubles bipolai- En 1930, voici ce qu’on pouvait lire dans juger, sans pathologiser res, troubles de la personnalité…), pour un journal autrichien : « Un jeune candi- d’autres la pathologie psychiatrique est dat au suicide se jeta dans le fleuve depuis d’emblée, en respectant la moins au devant de la scène et ils semblent un pont. Un gendarme, attiré sur les lieux position du patient, même si davantage se trouver dans une impasse du geste fatal par les cris des personnes pré- existentielle. Malgré la diversité de ces si- sentes, plutôt que de se déshabiller pour tuations, chaque fois se dégage l’expression venir en aide au jeune homme, s’empara un choix contestable, ou d’une grande souffrance derrière laquelle de son fusil, le pointa sur l’aspirant suicidé plutôt à un « non-choix ». se profile un même message implicite : en criant “sors de là ou je tire !”. Le jeune celle-ci a pu le conduire à l’attente d’un changement. sortit de l’eau, renonçant au suicide. » C’est Au cours de mon cursus, j’ai eu la chance en lisant cet extrait d’un ouvrage de Paul de découvrir l’approche systémique et stra- Watzlawick, que ma quête s’est précisée… tégique, inspirée du style utilisationnel de Le paradoxe, comme l’écrit Paul Watzla- Milton H. Erickson, qui m’a aidée avec cer- wick, est « un constant défi à notre croyance [email protected]