
188
ùanlel
esserHet
(2
.
le .
factice
décor: les
ma
nuscrits
eta
ient
des
f
aux,
la
preuv
e
de
va
it
êt
re
faite,
elle
le
fu
t.
Au
camp
des
r
êve
ur
s,
de
s pa
tri
ots à bon compte,
ce
fut
une
expl
os
i6n de
colère
qui
acheva
de
convaincre le jeune philosophe
de
la
profondeur
du
mal
et
du
réel
péril
que
cet
opi
um
f
ai
sa
it courir à toute
la
nation. A
vec
quelle
fermeté
il
débrida
la
plaie!
Il
savait bien
ce
qu
'il risquait.
Il
n'en .
avaif
cur
e.
11
possédait
ju
stement,
lui
, la qualité
qui
é
tai
t la
plus
rare autour
de
lui
et
dont
l'absence
cau
sait
tou
t
le
mal:
la
courage. C
ou
r
age
en
face
des
idées:
voir
les
choses telles qu'elles sont et
pou
r cela ne
pas
hésiter à dépister et à s
ou
mettre
à u
ne
sévère critique tous.
les
préjugés. Co
ura
ge en
face
des hommes:
re
st
er
dr
oit,
le
front haut, devant les maîtres
de
Vi
.enne et leurs
va
lets, risguer situ-
a
ti
o
n,
fortune, payer
de
sa
vie
s'il le fauUa
fid
élité à
un
grand id
éa
l.
Dès
ce
.
mo
me
nt,
Masaryk sut
ce
que serait sa philosophie: elle serait génératri
ce
de
courage intellectuel et
moral,
elle ser
ai
t
un
réalis
me,
en
ce
sens
qu'~lle
oppo
-
sait sans c
esse
la
réa
l
ité
non
pas
à l
'i
déal,
mais
à l'imaginaire, f
ru
it
d'une
lâche
complaisance pour
soi-m
ême;
et
elle
se
rait
un
réa
lisme
critique, car
elle
pa
s-
serait
au
cribl
e d'une taison intransigeante les no
ti
ons
mal
fo
rmées,
acceptées
de
toutes
main
s, trop
fa
vor
ables à l'éclosion
de
s
so
phismes.
Mais
ce
réalisme crit
iqu
e n'était qu'u
ne
préface.
Il
fallait d'abord qu'il
fut
bien établi qùe,
en
d
eho
rs
de
la
vérité
ou
contre e
ll
e,
r
ie
n n'était
viable.
Ce
la
p
osé
,·la t
âc
he était-elle terminée? Elle
ne
faisait que c
om
m
enc
er.
·
..
*
. .
L'
oe
vre
masar
yk
ienne n'est
pas
une
oeuvre pureme
nt
critique:
elle
veut
a
va
nt 'tout
con
str
uire. L'humanité a besoin d'
une
fo
i, d'un idéal; d'une
raison
de
vivre: la
tâch
e de la philosophie est
de
les l
ui
fou
rni
r.
Le
s anciens
temps sont détruits,
il
lui appartient d'en bâtir de
no
u
veaux
. Méditer sur
les
ruin
es,
proclamer l'irrémédiabile
vani
té
de
tout, se
comp
l
aire
aux jeux
des
idées
est indigne d'elle.
La
philosophie est
un
sacerdoce.
Elle
est responsable
du
bonhe
ur
ou
du
malheur des
hommes
. Elle doit les sauver
du
désespoir et
de
la ruine morale. Elle
ne
combat pas
la
religion, elle l'épure: elle cherc
he
à
dégager
de
s religions historiqu
es,
fruit
de
l'expérience
hu
maine,
expres
si
on
d'
un
invi
nci
ble
beso
in,
la
religion
qui,
e
nfin
réconciliée
avec
la
science, est
la
se
ule
quf
pui
sse
sat
isfa
ire
l'
homme
moderne.
Ne
se
rait-elle pas,
en
dernière
a
na
ly
se,
cette religion
ell
e-mê
me
? ·
L'
oe
uv
re
de
Masaryk
me
parait sortie tout entière
de
la recont
re
de
sa
;,philosophie
de
l'histoire"
avec
la
profondeur de ses
conv
inctions
persol').nellès
Nou
s
so
mm
es
ici
en
pr
ésence d'une très haute conscience
qui
s'est c
ons
idér
ée
comme
le
point d'aboutissement normal et naturel d'une logique évolution
collective.
Ces grands id
éau
x,
qu
'e
lle
ne pourrait
pas,
elle
Je
sent bien, arracher
d'elle
mê
me,
qui rég!ent impérieusement
sa
pensée et
sa
conduite, ont
été
élaborées par l'humanité
to
ut
entiè
re,
au
prix
de
qu
elles luttes et de
quelles
sou
ffra
nces
l
Dès
lo
rs
ne
sont-ils
pas
l
es
suprêmes réalités?
Ne
serait-
il
pas
va
in d'aller chercher ailleurs
les
pi
erres
su
r l
esq
uelles
il
cqnvient de bâtir l'Eglise
nouve
ll
e? L'erreur d'Auguste Comte a été
de
cro
ir
e que l'
human
ité pourrait
se
passer
de
Die
u,
à partir
du
j
our
- · d'ailleurs absolument
improbable-
où
elle
au
rait r
eë
onnue qu'illui
es
t à tout j
ama
is
inacce
ss
ible.
Il
a
pri
s pour
un
e indi-
cation
de
l'avenir l'irreligion d'un moment: par une
incom
préhensible aber·
La
ph
llos~phie
de
Masa
ryk
n'est elle qu'
un
r
éa
li
sme critique? 189
r~ttion,
il
lui a donné le pas sur
une
expé
rie
nce
plu
si
eur
fois
millénaire. n n'a
pas
vu
que
si
Di
eu
n'existe pas et si l'â
me
n'
est
pas
im
mo
rtelle
la
vie
humaine
n'a
plus
de
sens, le devoir n'a
plu
s
de
base,
le
bien
s
ocial
se
r~lâche.
Mai
s
ce
n'est pas
pour
éviter c
es
con
séquences qu'il
faut
ma
ntenir
les
i
déau
x tradition-
nels.
Ce
s idé
aux
ne
dépendant pas d'
un
décret
de
notre esprit. L'humanité les
a
forgés
dans la douleur, notre conscience les consacre.
Où
trouverons
-n
ous
de
meill
eu
rs fondations? Par quel
moy
en
pouvons nous
es
pé
rer
de
mieux
assurer
la communion
des
hommes?
R
éa
lism
e
criti
qu
e,
en ta
nt
que méthode, la philosophie
de
M.
Masaryk en
tant que sys
tèm
e,
nous parait
bien
être
un
idéalisme const
ru
cteu
r.