Compte-rendu des Journées Roche Cancérologie Hématologie

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Compte-rendu des Journées Roche
Cancérologie Hématologie
News from the Roche Symposium in Oncology and Hematology
● N. Charbonnier*
Comme chaque année, Roche a organisé les Journées Roche Cancérologie Hématologie présidées par R. Bugat et J.-L. Harousseau, les 18 et 19 novembre, autour de deux thèmes principaux : les nouvelles approches thérapeutiques
et le patient au cœur du dispositif de santé.
Extraits des Journées Roche Cancérologie Hématologie
NOUVELLES APPROCHES THÉRAPEUTIQUES :
DES CONCEPTS AUX PATIENTS
Acquis thérapeutiques des anticorps monoclonaux
en cancérologie
J.Y. Blay
Cette communication a fait le point sur les anticorps monoclonaux
utilisés aujourd’hui en cancérologie et sur les questions qui se
posent dans la pratique avec ces nouvelles molécules. Les anticorps
monoclonaux thérapeutiques utilisés actuellement en oncologie
ciblent des cytokines ou des récepteurs. Plusieurs molécules ont
été développées par Roche dans le domaine de l’oncologie.
Angiogenèse : mécanismes et applications
G. Tobelem
L’angiogenèse est un processus complexe impliqué très tôt au
cours du développement embryonnaire puis en postnatal précoce ; chez l’adulte, elle intervient au cours du cycle menstruel
du remodelage osseux et à visée compensatoire en cas d’ischémie ou de cicatrisation ; elle peut intervenir au cours d’un certain nombre de pathologies telles que les tumeurs, les rétinopathies, ou certaines maladies inflammatoires comme la polyarthrite
* Journaliste, Paris.
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rhumatoïde. On sait maintenant que l’angiogenèse tumorale est
un processus indispensable au développement de la tumeur, en
favorisant sa croissance grâce au développement d’une néovascularisation anarchique et en facilitant la dissémination de cellules tumorales à distance. Le facteur clé de l’angiogenèse tumorale est le VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor), facteur
de croissance vasculaire produit par les cellules tumorales en
hypoxie et sous l’influence de facteurs oncogènes. Les néovaisseaux tumoraux issus de l’angiogenèse présentent des caractéristiques qui les distinguent des vaisseaux normaux. Ils ne sont
pas stables et nécessitent pour leur survie l’intervention permanente du VEGF. De récentes données ont montré qu’un phénomène de mimétisme vasculaire tumoral peut se produire au sein
des tumeurs, avec transdifférenciation des cellules tumorales en
cellules endothéliales et développement de néovaisseaux.
Antiangiogéniques : les différentes voies thérapeutiques
C. Soria
Au cours de sa communication, C. Soria a rappelé les mécanismes
de l’angiogenèse tumorale, avec le rôle clé du VEGF (Vascular
Endothelial Growth Factor), et a présenté les différentes cibles
potentielles d’un traitement antiangiogénique “direct” (VEGF, site
extracellulaire des VEGFR localisés sur la cellule endothéliale, site
intracellulaire tyrosine kinase des VEGFR).
La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 1 - janvier-février 2005
Génomique et protéomique : état actuel de la recherche
H. Avet-Loiseau
Parmi les études du génome, du transcriptome et du protéome,
l’analyse des profils d’expression génique est probablement
l’étape la plus avancée. À partir des cellules tumorales dont on
extrait l’ARN, les profils d’expression génique sont comparés à
des ARN de référence. L’une des pathologies dont l’analyse du
transcriptome est le plus avancée est le lymphome B diffus à
grandes cellules, avec au moins quatre sous-groupes moléculaires identifiés à ce jour ; sur le plan pronostique, trois groupes
de patients avec des taux de survie à cinq ans différents ont été
définis. Les études génomiques devraient permettre dans l’avenir l’identification de nouvelles entités nosologiques, la détermination du pronostic, l’identification de nouvelles cibles thérapeutiques et peut-être aussi la prédiction de la réponse à un
traitement donné. L’analyse du protéome est moins avancée : les
conditions analytiques restent à définir ; d’autre part, elle nécessite des technologies lourdes, coûteuses, et doit faire appel à des
compétences biotechnologiques très développées. Il n’y avait
jusqu’ici pas de grandes études françaises publiées ; deux études
viennent d’être initiées, l’une sur le cancer du sein et l’autre sur
le myélome.
L’articulation entre les données biologiques et les données
cliniques : une priorité pour le transfert en cancérologie
D. Maraninchi
Les altérations observées dans le cancer touchent l’intégrité
du génome de façon constitutionnelle ou acquise, influencées
par le “hasard” et l’environnement. Les nouvelles technologies ont permis de grands progrès des connaissances à propos
du génome tumoral, avec plus de 8 000 gènes tumoraux identifiés à ce jour. Un des grands objectifs de l’Institut national
du cancer est de favoriser et de dynamiser la politique de
transfert en cancérologie. L’analyse génomique devrait permettre, au cours des prochaines années, de nouvelles classifications biocliniques permettant une approche individuelle de
chaque patient, avec l’élaboration d’une véritable carte d’identité tumorale et un traitement personnalisé à la carte. Pour réaliser ces analyses, la mise en place de biothèques est nécessaire, mais implique de lourdes contraintes et fait appel à des
technologies de plus en plus sophistiquées. Le plan d’action
“Tumorothèques 2004-2006” proposé par l’Institut national
du cancer s’articule autour de cinq thèmes de réflexion-action
nationale et internationale :
1. La définition des besoins et des bonnes pratiques de conservation à visée sanitaire ; faut-il congeler toutes les tumeurs, soit
plus de 450 000 tumeurs chaque année ? Comment s’assurer de
l’équité des moyens mis en place ? Quelles sont les contraintes
à prévoir ?
2. Le soutien d’un programme de recherche fondé sur l’analyse
rétrospective de milliers de tumeurs afin d’obtenir des signatures
moléculaires pronostiques.
3. La mise en place d’une base prospective de collection de tumeurs
(cohorte de patients, données cliniques, données biologiques et
tissulaires-tumeur, tissus sains, sérum, lymphocytes, etc.).
La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 1 - janvier-février 2005
4. Dans ces contextes, il est important de prévoir une charte de
participation des patients relative à l’éthique des prélèvements
tumoraux à visée de recherche.
5. Il faudra aussi envisager la création d’un système d’information national des tumorothèques.
LE PATIENT AU CŒUR DU DISPOSITIF DE SANTÉ
Qualité de vie des patients en cancérologie
E.C. Antoine
La qualité de vie est un paramètre difficile à définir et à évaluer
du fait de l’interpénétration de concepts très différents. Chez les
patients atteints de cancer, la souffrance est une constante pluridimensionnelle qui repose sur une réalité clinique et psychologique, ainsi que sur l’environnement affectif et social du patient,
paramètres qui varient au fil du temps et de l’évolution de la maladie. Un grand nombre d’échelles de qualité de vie sont proposées, mono- ou multidimensionnelles, parfois adaptées à certains
symptômes, parfois, au contraire, très complexes, avec pour
objectif une évaluation scientifique la plus objective possible.
L’optimisation de la qualité de vie des patients nécessite la mise
en jeu de ressources pluridisciplinaires (soutien social, action
thérapeutique spécifique, soutien émotionnel, stratégie thérapeutique de support). Depuis 20 ans environ, les soins de support
en cancérologie ont connu de grands progrès avec la mise à disposition de traitements efficaces contre la douleur, contre les
nausées et contre l’anémie. L’anémie est une complication fréquente ; une enquête européenne avait évalué son incidence
auprès de 15 370 patients et l’avait retrouvée chez 66 % des
patients atteints de tumeur solide et 72 % des patients atteints
d’hémopathie maligne ; la fatigue corrélée à l’anémie est un
symptôme prioritaire chez ces patients, plus important que les
nausées, les vomissements, les douleurs, les diarrhées et qui
affecte chaque aspect de leur vie quotidienne. Parmi les traitements de support, la classe des érythropoïétines représente une
innovation thérapeutique importante. En corrigeant l’anémie chimio-induite, elle permet de réduire environ de moitié le nombre
de transfusions sanguines et de stabiliser le taux d’hémoglobinémie entre 11 et 12 g/l, et améliore la qualité de vie des patients.
La qualité de vie des patients atteints de cancer est un paramètre
essentiel à prendre en compte, au même titre que la “quantité” de
vie. Les approches plus ciblées et moins toxiques, les soins de
support spécifiques tels que le soutien social et émotionnel sont
autant de paramètres qui concourent à une meilleure qualité de
vie de ces patients.
Des soins palliatifs vers les soins de support
D. Bordessoule
Les soins palliatifs se définissent comme “un soin qui n’a pas
pour objet de guérir le malade, mais de soulager ses symptômes.”
Jusqu’à il y a peu de temps, on opposait soins curatifs et soins
palliatifs, qui se succédaient dans le temps. Aujourd’hui, il existe
bien souvent chevauchement entre soins curatifs et soins palliatifs. Progresser sur la formation des médecins, la complémentarité de la prise en charge des patients, les questions éthiques,
l’évaluation des pratiques, le recours à des moyens humains sup37
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plémentaires et le développement de réseaux de soins représente
la voie indispensable à mettre en œuvre si l’on veut tenter d’améliorer les soins de support. La formation initiale et continue des
médecins est sûrement une des étapes clés avec l’apprentissage
de la prise en charge de la douleur et du maniement des soins de
support et la sensibilisation à une information de qualité des
patients et de leurs familles. On sait, par exemple, combien le
moment de l’annonce du diagnostic constitue une étape clé pour
la mise en place d’une bonne relation entre le médecin et son
patient. La complémentarité de la prise en charge ne concerne
pas seulement les médecins (médecins généralistes-spécialistes,
public-privé). Elle implique tous les acteurs de santé, médecins,
infirmières, l’ensemble des personnes concernées par les soins
de support (psychologues, assistantes sociales, kinésithérapeutes,
socio-esthéticiennes, sophrologues, bénévoles, etc.). Pour entériner les décisions au sujet des patients, une réflexion d’ordre
éthique est souvent nécessaire ; outre les comités d’éthique des
sociétés savantes, des comités multidisciplinaires instaurés dans
les services peuvent apporter leur aide pour la prise de décision.
L’évaluation des soins de support se généralise aujourd’hui avec
la mise en place de projets de recherche clinique.
Pour optimiser le dépistage des cancers,
lancement du programme EDIFICE
D. Serin
Pour les médecins, l’enjeu du dépistage d’un cancer est un diagnostic plus précoce pour un meilleur pronostic et une augmentation des chances de guérison. Mais le taux de participation aux
campagnes de dépistage en France reste très insuffisant, de 38,5 %
en moyenne, des chiffres encore loin des recommandations européennes, qui préconisent des taux de participation de plus de
70 % ! Les autres chiffres concernant le taux de fidélisation des
femmes aux programmes de dépistage organisés ne sont pas plus
rassurants. À l’initiative de Roche, un nouveau programme d’envergure nommé EDIFICE (Étude sur le dépistage des cancers et ses
facteurs de compliance) sera bientôt lancé pour contribuer à optimiser la participation au dépistage du cancer. Ce programme, élaboré sous l’égide d’un comité scientifique pluridisciplinaire, se
déroulera en trois étapes : la réalisation d’un état des lieux en
France des comportements face à la démarche de dépistage du
cancer, une réflexion approfondie sur ces nouvelles données, qui
devrait enfin aboutir à des propositions d’actions en partenariat
avec les autorités de santé publique et l’Institut national du cancer. En pratique, la première étape consiste en une enquête de
grande envergure et concernera les quatre cancers les plus fré-
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quents (sein, prostate, colorectal, bronchique), dont le dépistage
est recommandé ou non. Deux évaluations seront menées en
parallèle auprès de la population générale et auprès d’une population de médecins. Cette enquête devrait être lancée au début de
cette année, avec des premiers résultats prévus à la fin du premier
semestre 2005.
Le Plan cancer en novembre 2004
P. Briand
La mission interministérielle pour la lutte contre le cancer s’est
attachée à rassembler autour de la table tous les acteurs concernés et a fait en sorte que les objectifs ambitieux inscrits au Plan
cancer dès 2003 et 2004 soient atteints. Au cours de son intervention, P. Briand a rappelé les grandes priorités du Plan cancer et a présenté de nombreux exemples illustrant la mise en
place de mesures efficaces pour répondre à ces objectifs. Plusieurs actions ont été menées pour favoriser la prévention des
cancers, comme la mise en place de nouveaux registres du
cancer, l’“Étude nationale nutrition santé” destinée à mieux
cerner les comportements alimentaires, le travail spécifique
engagé sur l’amiante, etc. La lutte contre le tabagisme a été
intense au cours de ces 18 derniers mois, menée sur tous les
plans, avec des résultats édifiants. D’autres mesures ont été initiées pour permettre une meilleure prévention des cancers professionnels et familiaux et pour inciter à des attitudes favorables à la santé comme, par exemple, l’opération “Lycée non
fumeur”, ou encore les campagnes d’information sur les risques
du soleil. Le dépistage est aussi un chantier très actif, avec un
renforcement des laboratoires et des consultations d’oncogénétique, à terme un dépistage généralisé du cancer colorectal,
et des actions prévues pour augmenter le dépistage du cancer
du sein et du col de l’utérus. L’équité d’accès à des soins de
qualité est une autre priorité (généralisation pluridisciplinaire
autour de chaque patient, projet personnalisé de soins et dossier communicant). Des actions sont aussi menées afin de renforcer l’accompagnement des patients avec une approche personnalisée (Numéro vert Info service, dispositif d’annonce,
développement de l’hospitalisation à domicile, etc.). La modernisation des équipements et des modes de financement, le renforcement des capacités de formation sont aussi des chantiers
sur lesquels cette mission travaille activement. Enfin, la création de l’Institut national du cancer, des cancéropôles, de tumorothèques sur tout le territoire, permettra de favoriser la
recherche, essentielle pour accélérer l’innovation et renforcer
■
la recherche clinique.
La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 1 - janvier-février 2005
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