I. - Introduction.
Piloter un aéronef est une tâche qui demande des compétences et des connaissances
particulièrement difficiles à acquérir, après de longs apprentissages et une sélection physique et
intellectuelle rigoureuse. Le pilote doit notamment être capable de traiter un très grand nombre de
données pour assurer la plus grande sécurité dans l’accomplissement d’une mission la plus
performante possible.
Depuis longtemps, des dispositifs technologiques aident le pilote dans la prise d’information, son
intégration et son traitement en fonction d’objectifs évolutifs qu’il convient de mettre en œuvre
dans un environnement dangereux et toujours changeant. Depuis quelques années, la recherche se
porte sur les afficheurs (displays en anglais) et sur les modes de présentation des informations. Les
limites de la technologie sont cependant repoussées moins vite que ne l’exigent de nouvelles
charges imposées aux pilotes. Parallèlement, l’enjeu est de rentre accessible le pilotage à un plus
grand nombre de clients potentiels, tout en diminuant les coûts d’une formation devenue trop
onéreuse et trop longue pour les contraintes actuelles du marché de l’aéronautique civile et
notamment de l’aviation générale ou privée.
L’option a alors été prise d’augmenter directement les capacités perceptives de l’homme et de
l’aider technologiquement dans la décision et la compréhension des informations qui lui sont
données par les interfaces du cockpit. Tel est le cas de la procédure dite « vision tête haute » (HUD
en anglais 3), ainsi nommée par opposition à l’affichage classique des informations de vol sur des
afficheurs intégrés dans une planche de bord, plus classiquement accessible en vision « tête basse »
(HDD 4). Un dispositif optique, appelé « collimateur tête haute » (CTH) permet de superposer
directement sur le paysage vu par le pilote des informations complémentaires. Celles-ci concernent
l’état et la trajectoire de l’engin, mais aussi l’environnement, la réglementation, ou d’autres
paramètres nécessaires au pilotage et au contrôle du vol.
Ce projet d’une aide visuelle a été initialement développé, dans les années 1950, en aéronautique
militaire, pour les systèmes de viseur de tir au canon des avions de chasse. Ce n’est que bien plus
tard qu’on a intégré son intérêt pour fiabiliser les phases d’approche et d’atterrissage des avions
civils (Naish, 1963). En 1969, le concept a été amélioré par l’introduction d’une iconographie et
l’affichage de paramètres physiques permettant un contrôle précis de la trajectoire (Klopfstein,
1976). Le dispositif a alors été adopté très rapidement aux Etats-Unis (Debiesse, Marzuoli,
Tourdjman, 2005), a été généralisé sur de nombreux avions militaires ou civils, et a même équipé la
navette spatiale. Il n’a malheureusement connu en France qu’un développement limité dans
l’aviation commerciale (Steenblick, 1992) ou dans les hélicoptères (Leger, 1994).
Certaines applications du principe développé en aéronautique sont envisagées ou même déjà
utilisées dans d’autres domaines, pour augmenter l’efficacité et diminuer la complexité d’un tâche
précise ou difficile. C’est le cas dans la conduite automobile (Tonnis et al., 2005), dans les tâches
industrielles de maintenance (Haritos et Macchiarella, 2005) ou d’ajustage de précision (Tang et al.,
2003), ainsi que pour certaines opérations chirurgicales (Fuchs et al., 1998).
Les progrès de l’électronique permettent aujourd’hui des enrichissements performants, mais il
dépassent parfois les limites d’usage (Claverie, Fouillat, 2009). Ils imposent donc une conception
prenant en compte la connaissance des aptitudes et des contraintes psychophysiologiques des
utilisateurs. Ils nécessitent également une adaptation à des conditions d’utilisation variées, en
favorisant performance, sécurité et confort, tout en simplifiant les tâches à effectuer, dans une
véritable perspective d’augmentation des capacités humaines spontanées.
3 - HUD pour « Head-Up Display » (dispositif d’affichage électronique tête haute).
4 HDD pour « Head Down Display », par opposition à) HUD.