É
glise
É
vangélique
Libre d'Aix
en Provence
BP 510 3 Avenue du Deffens 13 091 Aix en Provence Cedex 02 Pasteur Frédéric Baudin
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Prédication du 2 juin 2013
Les Dix Commandements (9)
Exode 20.16
Frédéric Baudin
[Lire les précédentes prédications de la série]
Lecture
Exode 20.16
« Tu ne diras pas de faux témoignage contre ton prochain »
Prédication
À l’origine, cette loi était appliquée essentiellement dans le domaine judiciaire : il s’agissait, lors
d’un procès, d’établir la vérité sur un fait précis, un délit, notamment à partir de laclaration
d’au moins deux témoins, et ces témoins devaient dire « la vérité, et rien que la vérité », et donc
ne pas dire de faux témoignage contre leur prochain, ne pas les accuser à tort…
Il vaudrait donc mieux traduire cette phrase, en suivant le texte hébreu de très près :
«Tu ne répondras pas (à la question posée par le juge) comme un témoin qui ment pour accuser
(faussement) ton prochain ».
Le but était d’éviter toute erreur judiciaire, toute erreur de jugement, et surtout d’éviter la
vengeance personnelle d’un individu (ou de plusieurs) contre une autre personne, sans que celle-ci
soit vraiment coupable.
Il y a dans le Nouveau Testament, au moins deux exemples de faux témoignage que j’aimerais
évoquer brièvement ce matin, et je commencerai par le récit de la femme adultère dans
l’évangile :
Jean 8.1-11
sus se rendit au temple et tous les gens s’approchèrent de lui. Il s’assit et se mit à leur donner son
enseignement.
Les maîtres de la loi et les Pharisiens lui amenèrent alors une femme qu’on avait surprise en train de
commettre un adultère. Ils la placèrent devant tout le monde et dirent à Jésus :
«Rabbi, Maître, cette femme a été surprise au moment même où elle commettait un adultère. Moïse
nous a ordonné dans la loi de lapider (tuer à coups de pierres) de telles femmes. Et toi, qu’en dis-tu ?
»
Ils disaient cela pour lui tendre un piège, afin de pouvoir l’accuser.
Mais Jésus se baissa et se mit à écrire avec le doigt sur le sol.
Comme ils continuaient à le questionner, Jésus se redressa et leur dit :
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«Que celui d’entre vous qui n’a jamais péché lui jette la première pierre. »
Puis il se baissa de nouveau et se remit à écrire sur le sol.
Quand ils entendirent ces mots, ils partirent l’un après l’autre, les plus âgés d’abord. sus resta seul
avec la femme, qui se tenait encore devant lui.
Alors il se redressa et lui dit :
« Eh bien, où sont-ils ? Personne ne t’a condamnée ? »
« Personne, Maître », répondit-elle.
«Je ne te condamne pas non plus, dit Jésus. Tu peux t’en aller, mais désormais ne pèche
plus. »
Ce récit est un peu énigmatique. Certains ont pensé qu’il avait été ajouté au texte d’origine car il
n’apparaît pas dans certains manuscrits anciens.
Mais d’autres commentateurs pensent au contraire qu’il a vraiment sa place dans l’Évangile, car il
apparaît comme une nouvelle tentative des pharisiens de déstabiliser Jésus et de le prendre en
défaut.
À cet égard, ce récit est donc tout à fait conforme à d’autres récits dans le même genre
rapportés par les évangélistes.
Voici donc juste quelques commentaires :
1. D’abord, on ne sait rien de cette femme, on s’étonne qu’elle soit seule car la loi précise que
l’homme et la femme adultères sont autant coupables l’un que l’autre et qu’ils doivent donc être
jugés ensemble, et ils sont passibles tous les deux de la peine de mort ( Lévitique 20.10)
On a le sentiment que les hommes qui l’accusent ne sont pas tout à fait nets, au moins sur ce
point…
S’ils ont surpris cette femme en flagrant délit d’adultère, ils ont forcément vu aussi l’homme
coupable du même adultère : pourquoi donc n’est-il pas présent ici ? (les hommes ont le beau rôle
!)
2. On comprend alors très vite que les pharisiens ont en fait trouvé un prétexte, comme c’est
d’ailleurs précisé par Jean, pour tendre un piège à Jésus, et notamment pour le mettre en
contradiction avec la loi de Moïse (prétexte pour tendre un piège : il est question de onze pièges
tendus à Jésus dans l'évangile de Jean !).
Car après les miracles que Jésus a déjà accomplis ( Jean 1 à 7) et en entendant son
enseignement percutant, beaucoup de juifs le considèrent comme « Le prophète plus grand que
Moïse », le Messie… (c’est l’objet de tout le chapitre 8 : Jésus est-il le Messie).
Mais les pharisiens refusent de croire que le Messie peut venir de Galilée ( chapitre 7). Et donc
s’ils parviennent à montrer que Jésus nenseigne pas la vérité selon la loi de Moïse, alors plus
personne ne pourra croire qu’il est le Messie…
Et donc,
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·Si Jésus répond qu’il ne faut pas lapider cette femme adultère, il sera en contradiction avec
la loi de Moïse. Et s’il dit qu’il faut la lapider, ce sera alors contraire à la loi romaine, car seul
le pouvoir romain peut prononcer et faire appliquer la peine de mort.
En d’autres termes, si Jésus donnait l’ordre de lapider cette femme, il revendiquerait le
pouvoir, il montrerait qu’il est le roi d’Israël, il prendrait la place de l’empereur romain.
Jésus donnerait ainsi une preuve qu’il est le Messie, du moins le Messie tel que beaucoup de
juifs l’attendaient : un chef politique qui renverserait le pouvoir romain.
·Mais s’il donne l’ordre de lapider cette femme et qu’il n’est pas le Messie, il sera alors
condamné lui-même à mort et exécuté par le pouvoir romain.
Les pharisiens pensent donc que Jésus est « coincé » et qu’il n’a aucun moyen d’échapper à leur
piège.
Mais la loi de Moïse précise aussi que les premiers à jeter les pierres pour lapider les coupables,
pour accomplir la condamnation à mort, ce sont les témoins eux-mêmes, les témoins (au moins
deux) directs du délit (Deutéronome 17.7).
La loi dit aussi que si les témoins manipulent le procès, si les juges qui mènent l’enquêtent
finissent par comprendre qu’ils mentent, qu’ils ont don un « faux témoignage », ces témoins «
malveillants », mal intentionnés, subiront eux-mêmes le châtiment qu’ils ont souhaité pour celui
ou celle qu’ils ont accusé ! (Deutéronome 19.16-21).
On imagine alors que les accusateurs ne sont plus aussi sûrs d’eux à ce moment-là ! En tout cas,
le fait qu’ils doivent participer à l’exécution du coupable les place devant leur conscience : s’ils
disent vrai, le jugement prononcé contre le coupable est en quelque sorte celui de Dieu, il est
juste.
Mais s’ils mentent, ils prononcent un jugement contre eux-mêmes et ils sont passibles de la
peine qu’ils réclament contre un innocent…
3. Et puis, il y a le silence de Jésus. Jésus ne répond pas à la question des pharisiens, qui
reviennent à la charge, car un « rabbi » doit toujours répondre à ceux qui lui posent une
question.
C’est son « métier » en quelque sorte, sinon il n’est pas digne de ce titre de rabbi : c’est pour
cette raison que les pharisiens l’utilisent pour Jésus, intentionnellement.
4. Il y a encore ces fameux mots que Jésus trace alors au sol…
On a à peu près tout imaginé pour trouver ce que Jésus a écrit à ce moment-là !
Certains pensent qu’il a écrit une phrase basée sur la loi ou sur les écrits des prophètes (ou
encore en fonction du nombre de lettres qu’on peut tracer au sol en étant agenouillé !).
Par exemple :
« Tu ne rendras pas de faux témoignage » ;
« Si vous ne vous repentez pas, vous mourrez… » ;
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ou peut-être, comme Jésus l’a dit lors de son Sermon sur la montagne : « Si un homme regarde
la femme d’un autre en la désirant, il a déjà commis l’adultère avec elle en lui-même. »
5. Jésus parle : En fait, les pharisiens ne réagissent pas vraiment à ce que Jésus écrit, mais
plutôt à ce qu’il dit ensuite :
«Que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre ». Quand ils entendirent ces mots, ils
partirent l’un après l’autre, les plus âgés d’abord.
Certains commentateurs en ont déduit que par ce geste, Jésus a en fait rappelé comment Dieu
lui-même avait écrit la loi sur une table de pierre, et comment les israélites avaient aussitôt
péché en rendant un culte au veau d’or, puis comment Dieu avait brisé la première alliance en
signe de jugement, et enfin comment Dieu avait pardonné son peuple en lui donnant une
deuxième table de la loi…
En écrivant par terre, Jésus montre qu’il est l’auteur même de la loi, il connaît le cœur de tout
être humain (il le dit ailleurs, « il connaît les pensées de ceux qu’il rencontre »), il sait que tout
homme ou femme, est pécheur.
Mais il montre aussi qu’il est prêt à pardonner.
Et c’est ce qu’il va dire à cette femme :
« Eh bien, où sont-ils ? Personne ne t’a condamnée ? »
« Personne, Maître », répondit-elle.
«Je ne te condamne pas non plus, dit Jésus. Tu peux t’en aller, mais désormais ne pèche
plus. »
On note au passage que les hommes les plus âgés sont partis les premiers : ils savent bien qu’ils
ne sont pas irréprochables, ils en ont fait l’expérience à bien des reprises, tandis que les plus
jeunes pensent encore qu’ils peuvent vivre de façon irréprochable, entièrement conforme à la loi
de Moïse
Ce récit ne propose pas une excuse à l’adultère, comme si ce péché n’était pas si grave…
Jésus montre au contraire combien il est grave : semblable à l’idolâtrie, comme une image ou une
conséquence de l’adultère spirituel.
Mais Jésus a tout accompli pour pardonner nos fautes, à commencer par celle de l’infidélité
envers Dieu, et aussi toutes nos infidélités…
C’est pour lui une façon de dire qu’il est vraiment le Messie, qu’il peut pardonner les fautes
comme Dieu, car il est Dieu au milieu des hommes, Emmanuel.
Jésus dira juste après qu’il est "la lumière du monde", "le chemin, la vérité et la vie" : c’est
grâce à lui que l’on peut retrouver le chemin de la communion avec Dieu
Mais il y a un deuxième récit de faux témoignage dans les Évangiles, et qui aura des
conséquences incalculables…
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Matthieu 26.59-66
Les chefs des prêtres, les anciens et tout le sanhédrin cherchaient un faux témoignage contre Jésus
afin de le faire mourir, mais ils n’en trouvèrent pas, quoique beaucoup de faux moins se soient
présentés.
Enfin, il en vint deux qui dirent :
«Celui-ci a dit : ‘Je peux détruire le temple de Dieu et le reconstruire en trois jours.’ »
Le grand-prêtre se leva et lui dit : « Ne réponds-tu rien? Pourquoi ces hommes témoignent-ils contre
toi ? »
Mais Jésus gardait le silence.
Le grand-prêtre prit la parole et lui dit : « Je t’adjure, par le Dieu vivant, de nous dire si tu es le
Messie, le Fils de Dieu. »
sus lui répondit : « Tu le dis. De plus, je vous le déclare, vous verrez désormais le Fils de
l’homme assis à la droite du Tout-Puissant et venant sur les nuées du ciel. »
Alors le grand-prêtre déchira ses vêtements en disant :
« Il a blasphémé !
Qu’avons-nous encore besoin de témoins ?
Vous venez d’entendre son blasphème.
Qu’en pensez-vous ? »
Ils répondirent : « Il mérite la mort. »
Cette fois, ce sont non seulement des pharisiens, mais aussi des sadducéens, des prêtres, qui
ont cherché par tous les moyens à tendre un piège à Jésus, et pas n’importe quel piège, mais un
faux témoignage contre Jésus.
Et en fait, ils n’en trouvent pas !
Ils finissent tout de même par trouver deux témoins qui vont témoigner contre Jésus.
Cependant, même si leur accusation porte sur une phrase que Jésus a réellement prononcée, il
est évident que les chefs religieux du Sanhédrin cherchent en fait un moyen de faire mourir
Jésus, ils sont mal intentionnés.
Ils savent très bien que cette phrase est en fait une sorte de parabole, une métaphore, car il
est précisé dans l’Évangile que Jésus parlait de son corps, et non du temple de Jérusalem.
Ils savent très bien que personne ne peut reconstruire le temple en trois jours… ( Jean 2.18-21)
Mais comme ils sont intelligents, ils savent aussi très bien ce que Jésus veut dire, et c’est pour
cette raison qu’ils lui posent la question cruciale : " Es-tu le Messie ?"
Jésus leur dit alors la vérité, tout simplement : oui, il est le Messie, et il cite le prophète Daniel
(7.13).
Mais ses accusateurs ne le croient pas.
Et voici comment leur faux témoignage, car c’est finalement bien un faux témoignage, va se
retourner contre eux : ils sont incapables de croire la vérité, incapables de reconnaître la
vérité.
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