A LA RENCONTRE des poiluS de 14-18 : Parcours et destins de soldats Dossier pédagogique d’aide à la recherche Service éducatif des Archives départementales du Nord 22, rue Saint-Bernard 59000 Lille Tel : 03.59.73.06.00 Fax : 03.20.48.07.67 Courriel : [email protected] Site internet : http://www.archivesdepartementales.lenord.fr/ Contact : Lucile Froissart / Mokrane Zegaoui 1 Ce dossier, élaboré par le Service éducatif des Archives départementales du Nord, a pour but de traiter différentes thématiques liées à la Grande Guerre. Celles-ci sont présentées ci-dessous. Certains aspects pourront directement aider l’élève au cours de l’animation proposée autour de la recherche sur les parcours de soldats. D’autres apporteront des éclairages et des connaissances historiques sur le premier conflit mondial. Histoire du recrutement militaire en France……………………p. 3 Origine des appellations, grades et principales unités de l’armée française………………………………………..p. 4 Uniformes, équipement et armement..…………………………..p. 7 Les fronts et les grandes batailles de 1914-1918………………p.10 Le registre matricule………………………………………………...p.13 Les JMO………………………………………………………………..p.15 Reconnaissance et assistance aux soldats et à leurs familles………………………………………………………..p.17 Les médailles militaires……………………………………………..p.19 Les principaux lieux de mémoire………………………………….p.22 2 Histoire du recrutement militaire en France Jusqu'à la Révolution française, le recrutement des troupes dans l'armée française repose essentiellement sur le volontariat, à quelques exceptions près, notamment en cas d'urgence. L'armée n'est alors composée que de soldats de métier. La naissance d'une armée régulière en France a pris des siècles. Au Moyen Âge, les différents corps de troupes sont levés par les seigneurs eux-mêmes et l'armée royale n'est donc que le « conglomérat de bandes » appartenant aux différents barons, comtes et ducs. Ces vieilles bandes constituent le noyau de l'armée. Elles sont regroupées au sein de formations plus grandes, les régiments, qui ne sont que des groupements tactiques. Les premiers régiments durables sont formés en 1585 et seront connus sous le nom de « vieux e régiments », puis apparaît au cours du 17 siècle une nouvelle formation, le corps, pouvant compter plusieurs régiments. Si le nombre de ceux-ci n'est pas limité, celui des corps est fixé à six. Colbert instaure, en 1669, un système de classes, avec des dossiers individuels, en ce qui concerne la marine, c'est-à-dire les marins eux-mêmes, mais aussi tous les métiers liés à l'armement des navires. Ce système ayant montré ses qualités est repris par l'armée de terre en 1716 : ce sont « les contrôles des troupes avec signalement », registres créés pour lutter notamment contre les déserteurs qui se réengagent afin de toucher une nouvelle prime de mobilisation. La conscription ou obligation pour tous les garçons de servir sous les drapeaux est instituée en 1798 (an VI), mais n’a jamais été appliquée stricto sensu. Tous les hommes peuvent alors être mobilisés en temps de guerre, tandis qu’en temps de paix, l’armée fait principalement appel à des engagés volontaires. Pour mettre en œuvre cette décision, tous les hommes âgés de 20 ans (sauf les hommes mariés, les infirmes, …) seront inscrits ensemble - d’où le terme de « conscription » - sur une liste de recrutement. Ce système de l’obligation militaire sur lequel s’appuie l’effort de guerre napoléonien est supprimé à la Restauration. Mais comme les engagements volontaires ne sont pas suffisants pour assurer les effectifs d’une armée de métier, le ministre de la guerre, Gouvion Saint-Cyr, fait voter en 1818 une loi qui institue un service long de six ans auquel doivent se plier les jeunes gens qui ont tiré au sort un mauvais numéro, ou les remplaçants qu’ils auront trouvés. Pour cette raison, entre 1815 et 1870, la masse des soldats français est constituée d’appelés ayant tiré un mauvais numéro, de remplaçants et d’engagés volontaires. La loi de 1872 introduit un changement important. Bien que le tirage au sort soit maintenu, le remplacement est supprimé. Avec cette nouvelle loi, la moitié du contingent doit effectuer cinq ans de service actif, l’autre entre six mois et un an. e Au 20 siècle, le service militaire connaît plusieurs remaniements. En 1905, l’ancien système du tirage au sort est supprimé, ainsi que les remplacements et les exemptions. Désormais, tous les hommes sont appelables pour deux ans, pour un service personnel, égal et obligatoire. En août 1913, la loi Barthou, dite loi des trois ans, fait passer le service militaire de deux à trois années, en vue de préparer l'armée française à une guerre éventuelle avec l'Allemagne, laquelle surviendra l'année suivante et deviendra la Première Guerre mondiale. Le conflit apparaissait en effet, aux yeux d'une partie de l'opinion, de plus en plus inévitable, tandis que la droite nationaliste et une partie de la gauche républicaine revendiquait la revanche contre le vainqueur de 1870. Néanmoins, toute une partie de la gauche, des radicaux-socialistes à la SFIO, s'y opposait, au nom de l'antimilitarisme et de la négociation diplomatique avec l'Allemagne visant à éloigner le spectre de la guerre. Cette loi fut ainsi l'un des débats majeurs de l'année 1913. La durée du service est progressivement raccourcie et en 1965, la loi Messmer instaure le service national, englobant deux formes de service civil. Notons enfin que le service national devient accessible aux femmes en 1970, sous la forme du volontariat. Le 28 mai 1996, le Président de la République Jacques Chirac annonce sa décision de professionnaliser les armées et de suspendre le service national. 3 Origine des appellations, grades et principales unités de l’armée française Origine des appellations et grades dans l’armée française de 1914 (par ordre croissant dans la hiérarchie et dans l’infanterie) Militaires du rang Soldat de 2ème classe Soldat. Soldat de 1ère classe Distinction et non un grade ; permet d'accéder au grade de caporal. Caporal Commande une escouade (composée de 15 hommes). Caporal-chef Fonction administrative. 2e cl. 1e cl. Sous-officiers Sergent Commande une demi-section (composée de 2 escouades, soit 30 hommes). Adjudant Chargé des corvées et de l'organisation de la compagnie. Sous-lieutenant Chargé des détails du service. Lieutenant Commande une section (composée de 60 hommes). Adjudant-chef Adjudant depuis 10 ans valorisé par ce grade. Major Sous-officier chargé de l'administration. Officiers subalternes Capitaine Commande une compagnie (composée d'environ 240 hommes). 4 Officiers supérieurs Commandant Commande un bataillon (composé de 4 compagnies, soit 1100 hommes). Lieutenant-colonel Intermédiaire ordinaire du colonel, le remplace en cas d'absence. Général de brigade Général de division Commande une brigade (composée de 2 régiments, 6800 hommes). Commande une division (composée de 2 brigades, 16000 hommes). Colonel Commande un régiment (composé de 3 bataillons, soit 3400 hommes). Officiers généraux Général de corps d'armée Commande une armée (composée d'au moins 2 divisions). Général d'armée Commande un corps d'armée (composé d'au moins 2 armées). Maréchal Distinction et non un grade. Les unités de l’armée française en 1914 et leurs symboles Groupe d’armée : Un groupe d'armées est une unité militaire regroupant plusieurs armées placées sous le commandement d'un général ou d'un maréchal. Le groupe d’armées n’existe pas dans l'armée en temps de paix. Il est cependant organisé par le décret du 28 octobre 1913 portant règlement sur la conduite des grandes unités : le groupe d’armée est un « ensemble d’armées dont les opérations sont liées entre elles par les plans du général en chef ». Le commandement du groupe d'armée revient à un officier général issu du « Conseil Supérieur de la Guerre ». Armée : Au cours de la Première Guerre mondiale, l'armée française était composée de 5 armées. Leur effectif théorique était de 200 000 hommes chacune. 5 Corps d’armée : 40 000 hommes, 120 canons commandés par un général de corps d’armée. Chaque corps d’armée regroupe 2 divisions d’infanterie. Division d’infanterie : 16 000 hommes commandés par un général de division. Chaque division d’infanterie regroupe 2 brigades d’infanterie. Brigade d’infanterie : 6800 hommes commandés par un général de brigade. Chaque brigade d’infanterie regroupe 2 régiments d’infanterie. Régiment d’infanterie : 3400 hommes commandés par un colonel. Le régiment est l’unité morale : il possède son histoire, sa devise, son drapeau. Chaque régiment d’infanterie est composé de 3 bataillons d’infanterie. Bataillon d’infanterie : 1100 hommes commandés par un commandant. Chaque bataillon d’infanterie est composé de 4 compagnies d’infanterie. Section : 60 hommes commandés par un lieutenant. Les sections sont regroupées par deux pour former un peloton. Chaque section est divisée en 2 demi-sections. Demi-section : 30 hommes commandés par un sergent. Chaque demi-section est divisée en 2 escouades. Escouade : 15 hommes commandés par un caporal. 6 Uniformes, équipement et armement Les uniformes Pantalon rouge ou bleu, képi ou casque, l'armée française modifiera plusieurs fois l'uniforme de ses soldats afin de l'adapter à la Grande Guerre. Une guerre, deux uniformes différents pour les poilus Si l’on considère l’uniforme français, la Première Guerre mondiale se divise en deux parties avec, en premier lieu, l’uniforme de la guerre de mouvement, suivi de l’uniforme de la guerre des tranchées. En effet, forcée d'admettre que le premier est devenu obsolète et dangereux (le rouge du pantalon étant notamment trop voyant), l’armée se décide à équiper ses fantassins d’une nouvelle tenue, et ce, dès le début du conflit. Mais le temps de la confectionner et de la distribuer au sein des troupes, il faudra plusieurs mois d’attente aux soldats. uniformes français uniforme allemand Pantalon rouge et képi, héritage de la guerre de 1870 Dès les premières offensives françaises de 1914, le pantalon rouge garance hérité de la guerre franco-prussienne représente un véritable danger pour les soldats qui le portent. Trop voyants, les poilus deviennent vite des cibles idéales pour l’ennemi. Et tandis que l’uniforme, dans son ensemble, n’est pas adapté aux saisons (trop chaud en été, trop froid en hiver), le képi ne protège en rien la tête des soldats. C'est alors que l’armée privilégie la confection de nouveaux uniformes, plus adaptés à ce nouveau type de guerre, la guerre des tranchées. Un uniforme qui ne fera son apparition que dans la deuxième moitié de l’année 1915. En attendant, pour passer l’hiver particulièrement rigoureux de 1914, le poilu va piocher dans ses propres réserves. Hiver 1914-1915: une armée de soldats dépareillés Alors que certains conservent le pantalon rouge, ils sont nombreux à préférer le chaud pantalon de velours côtelé que la famille leur envoie par colis. Il n'y a plus d’uniforme. Désormais, les poilus portent des lainages, s’enveloppent dans des toiles de tente et même des peaux de mouton. Aux pieds des combattants, bottes et épaisses chaussettes, ou encore jambières, remplacent les brodequins. L’apparition du célèbre uniforme bleu horizon dans l’armée française Quelques mois avant la tristement célèbre bataille de Verdun, les képis sont enfin remplacés par des casques métalliques, les casques Adrian. Le pantalon rouge, quant à lui, est abandonné au profit d’un pantalon marron, puis bleu. Les bottes épaisses et les bandes molletières remplacent les brodequins. Même les armes (fusils, baïonnettes, couteaux) sont améliorées. Des masques à gaz sont distribués aux soldats. Le poilu tel qu’on le représente aujourd’hui, tout de bleu vêtu, est paré pour une guerre qui a duré encore trois longues années. 7 L’armement L’arme chimique fait son apparition avec le « gaz moutarde » (de couleur jaune verdâtre) utilisé pour la première fois en 1915 au nord d’Ypres, en Belgique. On lui prête ainsi le nom d’ypérite. A base de chlore, ce gaz visait à infliger de graves brûlures chimiques aux yeux, sur la peau et dans les muqueuses, y compris à travers les vêtements et le caoutchouc naturel des bottes et masques. La mitrailleuse fut considérée, au début de son emploi, comme étant une arme de la défensive. Sa capacité offensive ne fut admise que tardivement, à partir de 1912. Toutefois, la mitrailleuse est peu mobile et n'accompagnera jamais les vagues serrées de fantassins chargeant l'ennemi sans aucune préparation du terrain. Elle ne remplira dans l'offensive que quelques missions spéciales : couvrir les flancs d'une attaque, occuper les points d'appui une fois emparés, jalonner une position de repli. La conception française ainsi de considérer les mitrailleuses comme renfort de feu, tandis que dans l'armée allemande, chaque régiment comprend une compagnie de mitrailleuses à 6 pièces. La conception allemande est, quant à elle, de fournir un tir de feux nourris et concentrés pendant un laps de temps très court, en utilisant le maximum de pièces. Les mitrailleuses sont adjointes aux réserves tactiques et constituent des organes du commandement. Se déplaçant rapidement d'un point à un autre du champ de bataille, elles sont un puissant élément de combat. Dès les premiers combats, en août 1914, les masses compactes de fantassins français, s'élançant baïonnette au canon contre les positions allemandes, sont fauchées inexorablement par les tirs précis, denses et réglés des mitrailleuses allemandes. Le bilan des premiers mois de campagne sera terrible, le plus élevé de toute la guerre. C’est à la fin de l’année 1915 que la mitrailleuse est reconsidérée comme l'arme à feu principale de l’infanterie et son emploi est alors redéfini sur la base de l'organisation allemande. Son rôle est de repousser une offensive ou de préparer une attaque. Les chars. Le char d’assaut français est utilisé pour la première fois le 16 avril 1917. Les chars Schneider, Saint-Chamond, FCM, Renault FT, Mark V* sont utilisés par l’armée française durant le premier conflit mondial. Les trois facteurs déterminant l'efficacité d'un char sont : - sa puissance de feu (capacité d'un char d'identifier, prendre à partie et détruire un objectif), - sa protection (capacité du char de résister à la détection, à la neutralisation ou à la destruction par le feu ennemi), - sa mobilité (mobilité tactique et stratégique sur tous les terrains du champ de bataille, capacité à être transporté). La conception d'un char est donc traditionnellement issue d'un compromis entre ces trois facteurs. Par exemple, en renforçant le blindage, on augmente la protection mais aussi le poids et on diminue donc la manœuvrabilité. Une puissance de feu supérieure, obtenue en utilisant un canon de plus gros calibre, diminue la manœuvrabilité et la protection. L'effet psychologique sur les soldats (effet négatif pour les ennemis, positif pour les alliés) de la présence imposante d'un char sur un champ de bataille est également un facteur important. L’aviation militaire s'est développée dès la Première Guerre mondiale, une décennie après le premier vol. Elle deviendra une composante essentielle de la stratégie militaire à partir de la Seconde Guerre mondiale. Les avions militaires, répondant aux besoins des forces armées d'un pays, se répartissent en deux catégories principales : les avions de combat dotés d'armements offensifs et les avions de soutien, non armés ou dotés d'armements défensifs. Parmi les aviateurs célèbres de la Première Guerre mondiale, on pourra bien entendu citer le Capitaine Georges Guynemer, mort au combat le 11 septembre 1917 au nord-est d’Ypres, et le Lieutenant Charles Nungesser, disparu en 1927 lors d'une tentative de traversée Paris-New York. Les fortifications. La Première Guerre mondiale a vu se multiplier la construction ou l’occupation d'ouvrages militaires de fortification. La France en compte un grand nombre, ayant été le terrain principal des opérations de guerre. Citons par exemple les Forts de Levreau, près de Maubeuge, de la Pompelle, près de Reims ou de Vaux et de Douaumont, près de Verdun. En Belgique, les ceintures fortifiées de Liège et de Namur en sont également de beaux témoignages. 8 Les pigeons voyageurs, un moyen de communication en temps de guerre Ils ont été utilisés par les Français pour communiquer sur le front. La Première Guerre mondiale a d'abord été caractérisée durant les premiers mois par la mobilité des troupes, qui se sont enlisées dès 1915 et pour trois ans dans une guerre de position et de tranchées. L'information et la désinformation sont alors devenues vitales et stratégiques, ainsi que les moyens de communication. Malgré le développement du téléphone, il était fréquent que des unités soient isolées ou que des messages doivent être envoyés rapidement sur de grandes distances. Pour cela, les pigeons voyageurs, élevés et transportés dans des unités mobiles de campagne, ont été utilisés principalement par les unités au sol, mais parfois aussi lancés à partir d'avions ou de navires. L'occupant allemand veille à interdire aux civils des zones occupées le lâcher de pigeons et précise que les personnes qui trouveraient des pigeons voyageurs sont tenues de les remettre à l'autorité militaire la plus proche, faute de quoi elles seront suspectées d'espionnage et s'exposeront à des poursuites. Les infractions commises par négligence sont punies d'un emprisonnement pouvant atteindre trois ans ou d'une amende s'élevant jusqu'à 10 000 marks. 9 Les fronts et les grandes batailles de 1914-1918 L’offensive allemande en 1914 et la contre-offensive côté français 10 La bataille de la Marne, six jours de combats acharnés La première bataille de la Marne, souvent identifiée comme « la bataille de la Marne » a eu lieu du 6 au 12 septembre 1914. Au cours de cette première bataille décisive, les troupes franco-britanniques réussissent à arrêter puis repousser les Allemands et donc à mettre en échec le plan Schlieffen qui prévoyait l'invasion de la France en six semaines pour ensuite se porter vers la Russie. Paris est sauvé. Dans toute la France, on parle du "miracle de la Marne". Un miracle qui aura toutefois coûté la vie à plus de 80 000 Français et près de 100 000 soldats anglais. Personne ne s'imagine alors que ce combat sanglant est le premier d'une longue, série... Elle doit être distinguée de la seconde bataille de la Marne, qui se déroula du 15 au 18 juillet 1918. Les célèbres taxis de la Marne : Dès septembre 1914, le gouvernement prévoit de réquisitionner des taxis pour évacuer de Paris les archives du ministère de la Guerre en cas de menace allemande et, à cet effet, constitue une réserve permanente de véhicules. Mais c’est par un usage inattendu que les taxis parisiens deviennent les taxis de la Marne. Avec l’avancée allemande de début septembre, Joffre décide, le 6 septembre, de contre-attaquer et d’envoyer des troupes en renfort sur le front de l’Ourcq. Les trains ne pouvant suffire à leur transport, le général Gallieni, alors gouverneur militaire de Paris, réquisitionne le jour même 630 taxis. Partis de l’esplanade des Invalides, ils achemineront, à une vitesse moyenne de 25 km/h, plus de 3 000 soldats des 103e et 104e R.I. jusqu’à Silly-le-Long et Nanteuil-le-Haudouin, à une centaine de kilomètres de Paris. La tristement célèbre bataille de Verdun Terrible bataille d'usure et d'atrocité, symbole de courage et d'opposition pour la nation entière, Verdun est sans conteste la plus tristement célèbre bataille de la Grande Guerre. Et pour cause, un bilan très lourd : près de 163 000 soldats français tués, 143 000 Allemands, au total plus de 700 000 victimes au cours de ces dix longs mois d'offensive, du 21 février au 18 décembre 1916. À son propos, le Lieutenant Jacques d'Arnoux écrira plus tard que "celui qui n'a pas fait Verdun n'a pas fait la guerre". La bataille de la Somme, la meurtrière Alors que l’atroce bataille de Verdun est sur toutes les lèvres, la bataille de la Somme est menée par le Général Foch dès le 1er juillet 1916. Elle durera jusqu’au 18 novembre 1916, opposant les forces britanniques et françaises aux forces allemandes dans un triangle entre les villes d’Albert, Péronne et Bapaume. Il s'agit de l'une des batailles les plus meurtrières de l'histoire humaine (hors victimes civiles), avec parmi les belligérants environ 1 060 000 victimes, dont environ 442 000 morts ou disparus. La première journée de cette bataille détient le triste record de la journée la plus sanglante pour l'armée britannique, avec 58 000 victimes dont 19 240 morts. La bataille du Chemin des Dames, le massacre de trop Ce qu’on appelle le plateau du Chemin des Dames est la partie des plateaux du Soissonnais qui s’étend entre les vallées de l’Aisne au sud et de l’Ailette au nord. A son extrémité est, cet étroit plateau constitue un promontoire qui domine la plaine entre Laon et Reims. La guerre de 1914 révèle toute l’importance stratégique du plateau. Après la bataille de la Marne, les Allemands s’accrochent à ses hauteurs pour repousser les attaques françaises et britanniques (septembre-octobre 1914). L’année 1917 place le Chemin des Dames au centre des évènements militaires. En décidant d’attaquer le 16 avril entre Soissons et Reims, le Général Nivelle compte sur la surprise pour remporter au Chemin des Dames une victoire décisive avec un million d’hommes. Son échec provoque une crise de confiance sans précédent dans l’armée. Les combats se poursuivent sur le Chemin des Dames tout l’été jusqu’en octobre. La victoire française au fort de La Malmaison (23 octobre 1917) amène les Allemands à abandonner le plateau et à se replier au nord de l’Ailette. 11 Un an et demi plus tard, l'armistice est signé. Mais avant, il aura fallu attendre de voir 9,7 millions d'hommes mourir au combat. Pour approfondir : consulter le site www.cheminsdememoire-nordpasdecalais.fr 12 Le registre matricule Il s’agit de la fiche des états signalétiques des services militaires d’un soldat. Il est sans conteste le document le plus intéressant pour qui cherche à retracer la carrière d'un soldat ou d'un sous-officier pendant la Grande Guerre. On y trouve le détail des affectations, mais aussi la mention des blessures et des décorations qui auront marqué la carrière militaire de l'appelé. En plus de l'état civil du soldat, figure également sa description physique avec toutes ses particularités : taille, couleur des yeux et des cheveux, forme du visage, de la bouche, ... Le registre matricule des états de services est tenu par bureau de recrutement d’arrondissement et par classe de recrutement. Sur ce registre figurent les états de services des conscrits. Il est ensuite versé aux Archives départementales, 72 ans après l'appel de la classe. Pour localiser un soldat, il faut d’abord chercher le bureau dans lequel il a été recruté (bureau de recrutement de l’arrondissement de la commune de naissance, mais attention les limites administratives militaires ne recoupent pas forcément les limites administratives civiles et politiques). Aux Archives départementales du Nord, les matricules sont rassemblés dans des volumes cotés dans la sous-série 1R. Ils sont répertoriés séquentiellement : - par classe d'âge (c'est à dire l'année durant laquelle l'individu appelé sous les drapeaux a eu ses 20 ans, âge légal du service militaire), - par bureau de recrutement (au nombre de 5 ou 6 selon les années), - puis par numéro de registre. Chaque registre comporte environ 500 fiches matricules, classées par ordre de numéro de matricule. Sont conservés aux Archives départementales du Nord les registres matricules depuis la classe 1867 jusqu'à la classe 1939 (bureaux de recrutement d'Avesnes, Cambrai, Dunkerque, Lille, Valenciennes et Valenciennes-Douai). Pour pouvoir consulter la fiche matricule d’un individu, il est nécessaire de connaître : ses nom et prénom, son année de naissance, le bureau de recrutement auquel se rattachait sa commune de résidence au moment de son appel sous les drapeaux, et son numéro de matricule. Mentions concernant le degré d'instruction des soldats : Degré 0 : ne sait ni lire ni écrire Degré 1 : sait lire seulement Degré 2 : sait lire et écrire Degré 3 : possède une instruction primaire plus développée Degré 4 : a obtenu le brevet de l'enseignement primaire Degré 5 : bachelier, licencié, etc. (avec indication de diplôme) Degré X : dont on n'a pas pu vérifier l'instruction Pour les soldats "Morts pour la France" en 1914-1918, il est possible de trouver l'indication du bureau de recrutement et de matricule sur le site internet "Mémoire des Hommes". NB : l’arrêté du 20 décembre 2012 institue une dérogation générale pour la consultation des registres matricules du recrutement militaire des classes ayant servi durant la Première Guerre mondiale. Nous vous proposons ci-après d'examiner en détail l’état signalétique des services militaires d’un soldat conservé aux Archives départementales du Nord. 13 Nom et état civil, identité des parents Mentionne le n° de matricule et la classe Signalement physique Décision du conseil de révision ("propre au service") et numéro de tirage. Jusqu'à 1905, les conscrits effectuent un service plus ou moins long, selon qu'ils ont tiré un bon ou un mauvais numéro. Unités d'affectation de l'active, de la réserve et de la territoriale Figurent ensuite les états de services. Changements de domicile Campagnes, blessures et décorations militaires Périodes d’exercices Dates successives (et théoriques) des différentes périodes militaires Extrait d’un registre matricule conservé aux Archives départementales du Nord 14 Les JMO : Journaux des Marches et Opérations Les JMO sont instaurés en décembre 1874 et ont pour but de relater les événements vécus par chaque état-major et corps de troupe au cours d’une campagne. On trouve un Journal des Marches et des Opérations par unité, quelle que soit sa taille. Il contient les faits, les combats ou les reconnaissances, au quotidien. Il s’accompagne, pour les reconnaissances et les combats : - des buts recherchés, - de la position des troupes, - de la composition du corps en mouvement, - des résultats obtenus, - d’un rapport, - des pertes subies. On y trouve également : - la composition du corps, - les itinéraires suivis, - les emplacements des camps et des cantonnements, - les emplacements sur le front. Et parfois au fil des pages : - des cartes, - des croquis, - des croquis d’observation, - des photographies, - les citations, - les promotions, - les mutations, - les renforts. Les régiments identifiés, les dates connues, il suffit alors de consulter dans le JMO les cahiers qui se rapportent à la période. On trouve sur Internet beaucoup d’extraits de JMO sur des sites spécialisés mais également sur des pages personnelles. Toutefois la base de référence depuis le 5 novembre 2008 est le site Mémoire des hommes, géré par le Secrétariat Général pour l’Administration (SGA) et plus particulièrement par la Direction de la Mémoire, du Patrimoine et des Archives (DMPA). Cette base permet la consultation de plus de 3 300 000 pages des JMO de 1914 à 1918 consultables en ligne. NB : Il n'y a que de très rares informations à caractère individuel sur les sous-officiers et soldats. Cependant, connaissant les dates d'affectation du militaire qui vous intéresse, la lecture du JMO sur la période considérée restitue parfaitement son cadre de vie. A fortiori, les circonstances de sa mort peuvent apparaître clairement. 15 Extrait du JMO du 1er régiment d’infanterie, source www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr 16 Reconnaissance et assistance aux soldats et à leur famille La carte de combattant Les militaires ayant participé à la première guerre mondiale sont les bénéficiaires de la carte de combattant. La règle de base est d'avoir appartenu à une unité reconnue combattante pendant au moins 90 jours. La carte est en outre accordée de plein droit aux blessés de guerre et aux titulaires de citations avec croix. La carte du combattant ouvre droit : - à la retraite du combattant, - au port de la croix du combattant, - au titre de reconnaissance de la Nation, - à la constitution d'une rente mutualiste majorée par l'Etat qui bénéficie d'avantages fiscaux, - à une demi-part d'impôt sur le revenu à partir de 75 ans, - à la qualité de ressortissant de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, - au privilège de recouvrir le cercueil d’un drap tricolore. La mention « Mort pour la France » Cette mention a été instituée par la loi du 2 juillet 1915 et modifiée par la loi du 22 février 1922 au lendemain de la première guerre mondiale. Les textes qui ont étendu ultérieurement le droit sont codifiés dans l'article L.488 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. Celui-ci stipule que « doit, sur avis favorable de l'autorité ministérielle, porter la mention « mort pour la France », tout acte de décès d'un militaire ou civil tué à l'ennemi ou mort dans des circonstances se rapportant à la guerre ». Une notion primordiale à retenir : la preuve doit être rapportée que la cause du décès est la conséquence directe d'un fait de guerre. Par ailleurs, si la nationalité française est exigée pour les victimes civiles de la guerre y compris les déportés et internés politiques, elle ne l'est pas pour les membres des forces armées y compris les déportés et internés résistants. Le statut de pupille de la Nation La qualité de pupille de la Nation offre aux enfants et jeunes gens qui la reçoivent une protection supplémentaire et particulière, en complément de celle exercée par leurs familles. Elle ne les place nullement sous la responsabilité exclusive de l'Etat. Les familles et les tuteurs conservent le plein exercice de leurs droits et notamment, le libre choix des moyens d'éducation. Peuvent bénéficier de ce statut les orphelins de moins de 21 ans dont le père, la mère ou le soutien de famille : - a été tué à l'ennemi, - est mort de blessures reçues ou de maladies contractées ou aggravées du fait de la guerre ou à l'occasion d'une mission sur un théâtre d’opérations extérieures ou d'un acte de terrorisme, - est dans l'impossibilité de pourvoir à ses obligations et charges de famille par suite des blessures et maladies reçues contractées ou aggravées du fait de la guerre ou des opérations extérieures ou du terrorisme. 17 La pension de veuve de guerre Elle ne concerne que les couples ayant été mariés et dont le mari était pensionné. La pension de veuve de guerre ne constitue pas une pension de réversion de la pension militaire d'invalidité du défunt. Ce qui implique que son montant n'est pas fixé en fonction du taux d'invalidité du pensionné mais d'après un certain nombre d'autres critères. La durée de mariage peut en être un exemple. Il est nécessaire que la veuve ait été mariée au moins 3 ans avec le pensionné avant le décès de ce dernier. Cette condition n’est pas exigée si un ou des enfants sont nés au cours du mariage. La période de concubinage avant le mariage est prise en compte mais seulement sur production d’un certificat de vie commune (ou de concubinage) établi par la mairie où le couple a vécu ensemble avant de se marier. Le maire n’a pas d’obligation de délivrer un tel certificat. La veuve doit être titulaire de la nationalité française pour pouvoir prétendre à l’attribution d’une pension de veuve de guerre. 18 Les médailles militaires La médaille militaire Créée par Napoléon III en 1852 pour récompenser soldats, gradés, sous-officiers et exceptionnellement des généraux ou des civils s'étant distingués au combat. « Médaille des braves » ou « bijou de la nation » sa devise est « Valeur et Discipline ». Il n'y a pas de grade, au point de vue de la décoration. Un simple soldat est l'égal d'un maréchal. La décoration est administrée par la grande chancellerie de la Légion d'Honneur. La médaille est une couronne de laurier d'argent qui entoure un médaillon d'or où figure l'effigie de la République, entourée d'un cercle d'émail bleu où sont inscrits les mots : République française. Au revers, la médaille porte au centre du médaillon d'or, entouré d'un cercle bleu, la devise « Valeur et Discipline ». Les feuilles et boutons de laurier sont liés de deux rubans entrecroisés en haut et en bas. La fourragère : cordon tressé aux couleurs jaune et verte de la médaille militaire, et que portent les militaires appartenant aux régiments décorés de la médaille militaire, ainsi que ceux dont le régiment a été cité 4 ou 5 fois à l'ordre de l'armée. Drapeau : certains régiments peuvent avoir leur drapeau décoré de la médaille militaire. Il s'agit de la plus haute décoration collective de l'armée. Durant la Grande Guerre, la médaille militaire fut systématiquement attribuée à tout soldat ayant 5 missions de guerre impliquant des adversaires humains à son actif. La Légion d'Honneur Créée en 1802 par Napoléon Bonaparte, elle récompense les éminents mérites rendus à la nation par des militaires ou des civils. Il s'agit de la plus haute décoration honorifique française. La médaille contient des grades : chevalier, officier, commandeur, grand officier, grand-croix. Sa devise est « Honneur et Patrie ». L’insigne est une étoile à cinq rayons doubles émaillés de blanc et à dix pointes boutonnées. L’étoile et les boutons sont en argent pour les chevaliers, en vermeil pour les officiers. Les rayons sont reliés par une couronne, d’argent ou de vermeil suivant le grade, émaillée de chêne (à droite) et de laurier (à gauche) et dont les extrémités inférieures, entrecroisées, sont attachées par un nœud. Le centre de l’étoile présente un médaillon en or avec un profil de Cérès symbolisant la République, entourée d’un cercle bleu, portant les mots : République française. L’étoile est suspendue à une couronne de feuilles, d’argent ou de vermeil suivant le grade, émaillée de vert et composée de feuilles de chêne (cette fois-ci à gauche) et de laurier (cette fois-ci à droite). Au revers, le médaillon d’or porte deux drapeaux tricolores avec l’inscription « Honneur et Patrie » ainsi que la date de création de l’ordre : 29 floréal An X. L'insigne est porté par un ruban rouge, comportant une rosette pour les officiers. Cette distinction peut être accordée à des régiments. 19 Durant la Grande Guerre, la Légion d'Honneur avec grade de chevalier fut systématiquement attribuée à tout soldat ayant quinze missions de guerre impliquant des adversaires humains à son actif. Dés la vingtième mission, le soldat était fait officier de la Légion d'Honneur. La croix de guerre Devant l'ampleur des sacrifices consentis, le besoin de reconnaissance fit que l'on créa plusieurs médailles durant la Grande Guerre, la plus célèbre est la croix de guerre. Instituée par la loi du 8 avril 1916, cette décoration, au ruban vert, est traversée verticalement par de minces filets rouges. Sa largeur est suffisante pour y épingler une citation : une étoile en bronze pour une citation à l'ordre du régiment ; une étoile en argent pour une citation à l'ordre de la division ; une étoile de vermeil pour une citation à l'ordre du corps d'armée ; une palme en bronze pour une citation à l'ordre de l'armée (5 palmes en bronze peuvent être remplacées par une palme en argent).Sur le revers de la médaille, 2 dates figurent. La première est invariablement 1914, la seconde (1915, 1916, 1917 ou 1918) correspond à l'année de la dernière citation du décoré. Drapeau du régiment de marche de la légion étrangère 20 Médailles commémoratives Elles sont accordées aux militaires qui ont pris part aux campagnes dont elles rappellent le souvenir : médaille coloniale, d'Italie, de Crimée, du Mexique, du Tonkin, de Madagascar, du Maroc. La médaille de la victoire commémore la victoire de 1918. Fourragère : il s'agit d'une récompense collective se portant sur l'épaule gauche. La fourragère est tressée. 21 Les principaux lieux de mémoire Les principaux lieux de mémoire sur le front de l’ouest dans la région Nord-Pas-de-Calais et en Belgique flamande : - In Flanders Fields Museum et Mémorial de la Porte de Menin à Ypres. Ossuaire français du Mont Kemmel à Heuvelland. Parc mémorial australien et le cimetière australien de Fromelles. Nécropole nationale de Notre-Dame de Lorette à Ablain-Saint-Nazaire. Lieu historique national du Canada de la Crête-de-Vimy. Carrière Wellington à Arras. Cimetière militaire allemand de la Route de Solesme et Cambrai East Military Cemetery. Orival Wood Cemetery et panorama de la crête de Flesquières. Cimetières du Commonwealth et nécropole française de la Route de Serre à Puisieux. Autres lieux de mémoire incontournables : - Historial de la Grande Guerre à Péronne. Le Chemin des Dames dans l’Aisne. Le Mémorial de Verdun et l’Ossuaire de Douaumont. Musée de la Grande Guerre du Pays de Meaux. Clairière de Rethondes, Mémorial de l’Armistice près de Compiègne. Sur le littoral, une base arrière pour les armées alliées : - Obélisque à la Dover Patrol à Escalles. Wimereux Communal Cemetery. Boulogne Eastern Cemetery à Boulogne-sur-Mer. St. Etienne-au-Mont Communal Cemetery. Etaples Military Cemetery. Statue équestre du Field Marshal Douglas Haig à Montreuil-sur-Mer. A découvrir aussi : les monuments de la région, témoins de la guerre de mouvement et de la première occupation allemande : - Monument aux morts allemand du Château Dalle-Dumont, Wervicq-Sud. Monument aux morts allemand du cimetière de Comines. Monument à Eugène Motte, Roubaix. Monument à Léon Trulin, Lille. Monument à Louise de Bettignies, Lille. Monument aux fusillés lillois, Lille. Monument aux pigeons voyageurs, Lille. Monument aux victimes de l'explosion de la poudrière des 18 ponts, Lille. Fort de Seclin. Cimetière militaire allemand d'Annoeullin. Monument aux morts de Caudry. Le Cateau Communal Cemetery, Le Cateau-Cambrésis. Le Cateau Military Cemetery et nécropole militaire allemande. Ors Communal Cemetery. Mémorial néo-zélandais, Le Quesnoy. Fort de Leveau, Feignies. Nécropole nationale d'Assevent. En Nord-Pas-de-Calais nordpasdecalais.fr et Belgique, à découvrir notamment sur le site www.cheminsdememoire- 22