
La réflexion sur les fonctions de l’initiative privée dans la développement
économique et social notamment des pays africains est d’une nécessité impérieuse.
Elle revêt une très grande importance au moins pour trois raisons tenant :
D’abord de l’absence ou à l’extrême rareté des recherches et analyses sur
l’entreprise privée et son apport dans le processus de transformation et
d’organisation du système des forces productives. Depuis les travaux de
J.SHUMPERTER annonçant « le crépuscule de la fonction d’entrepreneur » par
suite de son écrasement par l’entreprise géante1 les réflexions se sont faites rares
de même que les informations quantitatives et qualitatives sur l’initiative privée,
les bases de son fonctionnement et ses indices dans le processus de
transformation.
Ensuite au recul de l’Etat des « hauteurs dominantes » des économies
nationales. En effet, le fonctionnement de l’économie socialiste avait imposé la
socialisation des instruments de production et de travail et avait conféré à l’Etat
les fonctions de principal architecte de la construction économique, -le secteur
publique était le principal instrument du fonctionnement de l’économie. Dans
ce contexte, l’initiative privée était admise comme un mal nécessaire, elle était
tout simplement tolérée. En d’autres termes les bases d’extensions d’un
capitalisme sont sous surveillance très stricte. Les pays africains venant
d’accéder à l’indépendance ont observé dans leur système productif une
absence de capitalistes nationaux de capacité d’entreprise. Face à cette
situation, certains Etats conscient du rôle moteur d’une classe d’entrepreneurs,
donc d’une élite audacieuse, ont fait la création de cette classe un objectif
prioritaire alors qu’a l’opposé, d’autres Etats, plus nombreux ont cru devoir faire
l’économie d’une étape capitaliste et ont alors investi l’Etat de fonctions
économiques exorbitantes dans le développement économique et social.
Cependant, depuis quelques années s’est amorcer d’une part, au niveau des pays
socialistes un vaste mouvement de remise en question du paternalisme étatique
qui prend conscience des avantages que présente l’initiative privé2 et d’autre
part, dans les pays africains, une tendance dominante à l’encouragement à la
création d’un secteur privé dynamique et la promotion de l’esprit d’entreprise et
d’innovation. Tout se passe comme si les socialistes découvrent, certains
théoriquement3, d’autres à l’épreuve du pouvoir les méfaits d’une étatisation
1 Sur ce point Joseph SHUMPETER observe que «l’initiative capitaliste, de par ses réussites mêmes,
tend à automatiser les progrès, nous conclurons qu’elle tend à se rendre elle-même superflue…L’unité
industrielle géante parfaitement bureaucratisée n’élimine pas seulement, expropriant leurs
possesseurs, les firmes de taille petite ou moyenne, mais enfin de compte, elle élimine également
l’entrepreneur exproprie la bourgeoisie. In capitalisme, Socialisme et Démocratie », Paris 1951, p.232.
2 Depuis 1965, beaucoup d’économistes des pays socialistes en reconnaissant l’inefficacité de
l’organisation économique centralisée ont proposé des reformes allant dans le sens d’une plus grande
libéralisation et à l’introduction d’éléments de l’économie marchande comme le marché, le profit,
l’intérêt, la rentabilité strictement économique. On peut citer les travaux de E. LIBERMANN : plan,
bénéfice et prime, de V. NEMCHINIV : question de planification ; de V .TRAPEZNIKOV : pour une
gestion souple, du tchécoslovaque ; de OTASIK : la troisième.
Nous avons analysé ce débat dans notre thèse complémentaire : la problématique de la transition vers
le socialisme (faculté des sciences juridiques et politiques de Dakar 1976) et dans un ouvrage sous
presse « du développement au socialisme
3 Il faut dire que V. I. LENINE soulignait inlassablement dans beaucoup d’écrits que certaines
innovations techniques et organisationnelles dans certains secteurs ne pouvaient être réalisées que
grâce à l’initiative privée créatrice. A titre d’exemple, il note « apprendre à travailler, voilà la tâche que