La Lettre du Rhumatologue - n° 278 - janvier 2002
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INFECTION ET ARTHRITES
écidives et passage à la chronicité de l’arthrite réaction-
nelle sont désormais le plus généralement attribués à la
persistance de bactéries arthritogènes dans l’articulation.
Une étude montrant l’efficacité d’une antibiothérapie par tétra-
cycline dans les arthrites réactionnelles à Chlamydia tracho-
matis n’a pas été confirmée par d’autres travaux. Plusieurs tra-
vaux présentés à l’ACR peuvent apporter quelques éléments
d’explication quant à l’inefficacité des antibiothérapies habi-
tuellement proposées dans ces arthrites à médiation bactérienne.
ANTIBIOTHÉRAPIE DANS
LES SPONDYLARTHROPATHIES
INDIFFÉRENCIÉES
Carter et al. (235) ont comparé deux protocoles d’antibio-
thérapie chez 14 patients présentant une spondylarthropathie
indifférenciée. Sept d’entre eux ont reçu de la doxycycline
(200 mg/j), tandis que les sept autres prenaient une associa-
tion de doxycycline (200 mg/j) et de rifampicine (600 mg/j).
Les deux traitements étaient administrés pendant 6 mois. Les
évaluations cliniques ont été effectuées de façon aveugle par
des médecins ne connaissant pas le traitement pris par le
patient. Une différence significative en faveur de l’association
doxycycline-rifampicine a été mise en évidence pour certains
des paramètres d’évaluation : la diminution de la raideur
matinale, les douleurs articulaires périphériques et le nombre
d’articulations gonflées et douloureuses. Une association
d’antibiotiques pourrait ainsi s’avérer plus efficace qu’une
monothérapie dans le traitement des arthrites à déclenchement
infectieux.
PERSISTANCE DE C. TRACHOMATIS
APRÈS TRAITEMENT PAR DOXYCYCLINE
IN VITRO
Fliedner et al. (1756)ont évalué l’efficacité de la doxycycline
in vitro sur des cellules Hep-2 infectées par C. trachomatis.
Après exposition à l’antibiotique, une recherche de C. tra-
chomatis a été effectuée à J4, J8, J14 et J20 selon différentes
techniques : recherche de corps infectieux par culture,
recherche de corps élémentaires par immunofluorescence,
recherche d’ARN messager du gène de l’ARNr 16S par RT-
PCR. Si les éléments infectieux, directement cultivables, dis-
paraissent en quelques jours après antibiothérapie par cycline,
les corps élémentaires sont encore détectables au 8ejour, et
des ARN messagers, témoignant de la persistance d’éléments
bactériens biologiquement actifs, sont encore présents au
20ejour (tableau I). Des éléments bactériens viables persis-
tent donc plus de trois semaines après une antibiothérapie par
doxycycline, tout au moins in vitro. Les cyclines n’ont qu’un
effet bactériostatique sur C. trachomatis, et ne constituent peut-
être pas le traitement antibiotique de choix dans les arthrites
réactionnelles.
Infection et arthrites
!Th. Schaeverbeke
"Différents travaux confirment l’incapacité du
traitement antibiotique à éradiquer les bacté-
ries au cours des arthrites réactionnelles et
dans l’arthrite de Lyme.
"Une association d’antibiotiques semble avoir
un effet supérieur à une monoantibiothérapie
dans l’arthrite réactionnelle.
Points forts
R
J4 J8 J14 J20
Corps infectieux +
+
(+) –
Corps élémentaires (+)
ARN messagers + + + (+)
Tableau I. Persistance de Chlamydia trachomatis après doxycycline in
vitro (cellules Hep-2).
La Lettre du Rhumatologue - n° 278 - janvier 2002
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INFECTION ET ARTHRITES
PERSISTANCE DE BORRELIA APRÈS
ANTIBIOTHÉRAPIE
Les rechutes des arthrites de Lyme après un traitement a priori
efficace pourraient avoir plusieurs explications : soit l’auto-
nomisation d’une arthrite inflammatoire, après disparition
de la bactérie, soit la persistance d’éléments bactériens dans
l’articulation.
Bockenstedt et al. (588) ont évalué la persistance de Borre-
lia burgdorferi après antibiothérapie dans un modèle murin de
maladie de Lyme. L’infection à B. burgdorferi a été transmise
aux souris C3H/HeJ par exposition à des tiques porteuses de
Borrelia. Un premier groupe de souris a été traité par
ceftriaxone pendant 30 jours, un deuxième groupe par
doxycycline, et un troisième a simplement reçu du sérum salé.
Ces souris, ainsi qu’un quatrième groupe de souris non infec-
tées, ont ensuite été exposées à des tiques non porteuses de
Borrelia à 1, 3, 6 et 9 mois après le traitement antibiotique.
Après 24 heures, ces tiques ont été prélevées et analysées
(détection de Borrelia par immunofluorescence et par PCR).
Des souris ont été sacrifiées à différents temps pour recher-
cher la présence de Borrelia au sein de divers tissus. Par PCR,
il a été possible de détecter l’ADN de Borrelia dans une petite
proportion de tiques, quel que soit le groupe “infecté”, jus-
qu’au 3emois, et pas au-delà.
Les PCR sur différents tissus des souris ont permis de mettre
en évidence de l’ADN bactérien sur certains tissus jusqu’à
9mois après le traitement antibiotique. Il semble que la cef-
triaxone permette de mieux assurer l’élimination articulaire
de la bactérie, les PCR sur tissu synovial s’étant avérées néga-
tives chez les 4 animaux testés, alors que chez 4 souris sur 5,
l’ADN de Borrelia est détecté dans la synoviale 9 mois après
une antibiothérapie par cycline (tableaux IIa et IIb).
Le retard de clairance ou l’absence d’élimination de Borrelia
de l’organisme hôte après antibiothérapie pourraient expliquer
une partie des rechutes articulaires de la maladie de Lyme.
Il apparaît ainsi clairement que l’antibiothérapie ne permet
que très inconstamment d’éradiquer de l’articulation les bac-
téries impliquées dans les arthrites d’origine infectieuse.
D’autres schémas thérapeutiques mériteraient d’être testés :
associations d’antibiotiques, traitements combinés associant
antibiotiques et thérapeutiques de fond... #
à 1 mois à 3 mois
Groupe de souris PCR +
Non infectées 0/12 0/5
Ceftriaxone 3/15 5/14
Doxycycline 3/14 3/24
Sérum salé 21/29 10/15
Tableau IIa. PCR ospA sur les tiques mises en contact avec des souris
infectées par Bb puis traitées : persistance de Borrelia après antibio-
thérapie.
Cœur Vessie Articulation
Groupe de souris PCR 16Sr ADN +
Non infectées 0/3 0/3 0/3
Ceftriaxone 0/4 2/4 0/4
Doxycycline 1/5 2/5 4/5
Sérum salé 4/4 4/4 4/4
Tableau IIb. PCR 16SrADN sur tissus des souris infectées par Bb puis
traitées.
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