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Utilisation du réseau Facebook dans une campagne de prévention pour jeunes adolescents | 129
l’État, il s’agit aussi d’un enjeu stratégique ou politique (Arkin, Denniston et Romano, 1990;
Berlivet, 2004; Raftopoulou et Hogg, 2010).
Cette complexité explique probablement les limites des connaissances actuelles sur les
campagnes sociales. La nature plurielle et les contours ous de ces campagnes cadrent mal
avec les contraintes de recherches appartenant à une seule tradition disciplinaire (Kreps
et Maibach, 2008). Dans son approche de la publicité sociale, un chercheur restreint
généralement son étude à une dimension, selon son expertise et en fonction du temps et
des budgets disponibles. Son travail doit aussi répondre aux préoccupations du public à qui
les résultats sont destinés. Cette nécessaire réduction de la complexité, justiée puisqu’elle
facilite l’étude du sujet, ne doit pourtant pas en masquer les différentes dimensions et leurs
interactions.
La place du marketing dans l’étude des phénomènes de publicité sociale
Tenir compte de travaux provenant d’autres disciplines aide à reconstruire la globalité de
la publicité sociale, en liant et en associant les différentes pièces d’un véritable casse-tête
interdisciplinaire (Parrott et Kreuter, 2011). Le rapprochement des théories de la persuasion
et des théories des médias, comme le fait Frenette (2009) dans son approche en tandem de
la publicité sociale, ou comme le proposent Kreps et Maibach (2008) en plaidant pour le
rapprochement des sciences de la communication et des sciences de la santé, témoignent
d’une perspective d’intégration de cet ordre. Les contraintes d’une vision transdisciplinaire,
exigeant des chercheurs qu’ils s’aventurent hors de leur zone de confort, sont justiées
puisque l’exercice est destiné à améliorer la santé des personnes et des populations (Parrott
et Kreuter, 2011).
Les campagnes de promotion de la santé illustrent bien la complexité de la publicité
sociale. Elles sont étudiées en santé publique (Gray et al., 2012; Wakeeld et al., 2010),
en sociologie (Pratkanis et Aronson, 2002), en politique (Raftopoulou et Hogg, 2010), en
psychologie (Jessop et Wade, 2008; Philip, 2004), en communication (Bouman et Brown,
2010; Paek, 2008) et en marketing (Bernhardt, 2004; Parrott et Kreuter, 2011). L’apport
du marketing semble toutefois limité dans le discours entourant les campagnes sociales,
symptôme probable d’un malaise des milieux sanitaires à associer la santé aux activités
mercantiles (King, 2002; Ling, Franklin, Lindsteadt et Gearon, 1992).
Quand on le dit « social », le marketing s’intègre plus facilement aux réexions qui
portent sur le recours à la publicité pour promouvoir la santé (Daniel, Bernhardt et Eroglu,
2009; Edgar, Volkman et Logan, 2011; Loss et Nagel, 2010), sans pour autant s’affranchir
des doutes éthiques entourant des contributions provenant du domaine publicitaire
(Freimuth, Hammond et Stein, 1988; Loss et Nagel, 2010).
L’analyse qui suit s’appuie sur des données obtenues lors de recherches postcampagnes,
une pratique de recherche normale en marketing. Certains scientiques excluent d’emblée ce
type de recherches de leurs analyses, privilégiant les données provenant de revues savantes
ou d’ouvrages scientiques (Snyder et Hamilton, 2002). Plusieurs autres (Bertrand,
Goldman, Zhivan, Agyeman et Barber, 2011; DuRant, Wolfson, LaFrance, Balkrishnan et
Altman, 2006; Russell, Clapp et Dejong, 2005; Scheier et Grenard, 2010; Valente et Saba,
1997), par contre, y ont recours. C’est le choix que nous avons fait, cherchant à construire de
nouveaux savoirs en analysant dans une perspective de communication et de santé publique
des résultats issus de la recherche en marketing.