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L’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par le Saint Esprit qui nous fut donné (Rm 5, 5)
Or, je vous le dis, laissez-vous mener par l’Esprit et vous ne risquerez pas de satisfaire les tendances de
la chair. [...] Le fruit de l’Esprit est charité, joie, paix, longanimité, serviabilité, bonté, confiance dans
les autres, douceur, maîtrise de soi. […] Puisque l’Esprit est notre vie, que l’Esprit nous fasse aussi agir
(Ga 5, 16 ; 22-23 ; 25)
Au regard de ces passages, il apparaît donc que la personne de l'Esprit a bien quelque chose à voir
avec le mystère de l'amour, car c’est lui qui produit l’amour dans les cœurs et qui fait de tout
croyant, un enfant de Dieu. C’est ce qu’affirmait Augustin : « Que Dieu t’a donné de son Esprit, d’où
le sais-tu ? Interroge ton cœur : s’il est plein de charité, tu as l’Esprit de Dieu »
. Et c’est pourquoi
tout un courant de la théologie chrétienne (Augustin, Bonaventure, Thomas d’Aquin) a regardé et
pensé l’Esprit Saint comme l’amour de Dieu qui s’échange entre le Père et le Fils, comme le lien
d’amour entre le Père et le Fils. Le Père est le don gratuit, sans limite, la source qui se donne sans
retenue ; le Fils est l’accueil de ce don sans aucune résistance, sans aucun obstacle, il est le Fils
Eternel en se recevant totalement du Père ; l’Esprit est l’échange amoureux entre ce Père et ce Fils,
leur baiser, le « nous de la Trinité ».
C’est saint Augustin qui ouvrira la voie à de telles considérations. Selon lui l’Esprit est possédé en
commun par le Père et le Fils, il est l’unique Esprit des deux
. Il est l’Esprit du Père comme le
soulignent certains passages du Nouveau Testament :
Ce n’est pas vous qui parlerez, mais l’Esprit de votre Père qui parlera en vous (Mt 10, 20 ; Rm 8, 11)
Mais il est aussi l’esprit du Fils :
Et la preuve que vous êtes des fils, c’est que Jésus a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils qui crie
"Abba, Père"! (Ga 4, 6)
Pour lui, l’Esprit se présente donc comme une réalité commune au Père et au Fils, tout en étant
distinct de chacun d’eux. Sur ce fond saint Augustin voit en lui l’amour de Dieu, la charité commune
aux deux premières personnes divines :
- « L’amour qui est de Dieu et qui est Dieu est donc proprement l’Esprit Saint : c’est par lui que
se répand dans nos cœurs la charité de Dieu par laquelle la Trinité tout entière habite en
nous »
;
- « Ce Saint Esprit n’est, ni seulement l’Esprit du Père, ni seulement l’Esprit du Fils, mais des
deux : par là-même, il nous enseigne cette charité commune au Père et au Fils par laquelle il
nous enseigne mutuellement »
;
La voie ouverte par saint Augustin sera reprise, plus tard, par saint Bonaventure de l’école
franciscaine (théologien du XIIIème siècle, contemporain de saint Thomas) : « Mais l’amour qui est le
Saint Esprit ne procède pas du Père en tant qu’il s’aime soi-même, ni du Fils en tant qu’il s’aime soi-
AUGUSTIN, Commentaire de la première épître de Jean, traité VIII, 12, Paris, Cerf; 1961.
AUGUSTIN, La Trinité, dans Œuvres, Paris, Desclée, 1955, Livre XV, XVII, 27.
AUGUSTIN, La Trinité, dans Œuvres, Paris, Desclée, 1955, Livre XV, XVIII, 32.
AUGUSTIN, La Trinité, dans Œuvres, op. cit. Livre XV, XVII, 27.