L'exercice de la médecine entre foi, coutume et science Le ministre des Habous et des affaires islamiques Ahmed Toufiq était l'invité de la conférence inaugurale de l'université Mohammed VI des sciences de la santé de Casablanca. Son discours plein d'intelligence et d'érudition a permis de considérer la médecine sous le prisme de la culture marocaine. Aussi étonnant que cela puisse paraitre, c'est le ministre des Habous qui a animé la conférence d'ouverture de la nouvelle université de médecine de Casablanca. « Ce choix est motivé par une volonté de donner à cette cérémonie un caractère moins technique, Page 1/2 mais plus philosophique » nous assure la communication de l'université. Pari réussi : le ministre des Habous, Ahmed Toufiq a livré une lecture sur plusieurs axes des métiers de la médecine dans leur rapport avec l'individu et les spécificités de la culture marocaine. Il est nécessaire, afin d'instaurer un climat de confiance entre le médecin et son patient, de connaitre le milieu culturel du patient. De nombreux paramètres sont à prendre en considération dans cette équation, toutes tirées de la morale religieuse, des us et coutumes ou de la culture traditionnelle. A commencer par l'endurance. Cette qualité que l'on retrouve décrite dans plusieurs sourates et hadiths, et dans l'histoire du prophète Ayoub. La reconnaissance fait également partie des valeurs sur lesquels il est possible de bâtir une relation solide entre le médecin et le malade. En toute circonstance, le patient marocain est reconnaissant envers Dieu, et par extension envers son médecin traitant. Ce dernier devra faire preuve de compassion envers le malade. I l est également possible de puiser dans le soufisme. Avec son grand apport en spiritualité, il contribue à garder la maîtrise de soi, et peut s'avérer efficace lorsqu'il s'agit d'affronter la douleur, intrinsèquement libératoire et salvatrice. Toutefois, il convient de combattre les charlatans et autres guérisseurs, tout en préservant l'espoir spirituel chez le patient. Par ailleurs, il existe des attributs spécifiques liés aux médecins et d'autres aux patients. Ainsi, dans la culture populaire, le malade est le convive de Dieu, et compte tenu de la douleur ressentie, sa prière est exhaussée. Il suit un processus de purification de l'âme. Traditionnellement et historiquement, le statut de médecin est élevé au grade de sage. Il occupe aussi le rôle de confident auquel le patient trouve refuge dans la détresse. A ce propos, Ahmed Toufiq n'hésite pas à comparer l'hôpital, de par sa sacralité, aux lieux de culte. Toutefois, le ministre des Habous fait un distinguo important. Il faut différencier entre la médecine prophétique et la médecine pragmatique. Les « conseils du prophète dans ce sens sont contextuels, car il est venu pour nous apprendre la religion, et non les principes de la médecine » estime Ahmed Toufiq, citant au passage la doctrine d'Averroès. Page 2/2