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Chap. 6 CONQUETES, RIVALITES ET RESISTANCES EN AFRIQUE
SEPTENTRIONALE
- Présenter les raisons et le déroulement des conquêtes ;
- Présenter la (les) puissance(s) rivale(s), l’objet des dissensions, décrire les incidents
survenus du fait de ces incidents et présenter le mode de règlement adopté ;
- Décrire la réaction des populations locales : les motifs, les acteurs, et l’issue de cette
réaction.
INTRODUCTION
Les Turcs ottomans conquièrent l’Égypte en 1517 et, en l’espace de cinquante ans, établissent
un contrôle nominal sur la côte nord-africaine. Ainsi, tous les pays d’Afrique
méditerranéenne- excepté le Maroc- sont sous la domination turque sous le nom de «
Régences turques ». Cependant, l’Afrique septentrionale passe peu à peu aux mains des
européens, en particulier des Anglais et des Français. L’Algérie fut le premier territoire à
tomber dans l’escarcelle
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européenne ; suivirent la Tunisie, l’Egypte, le Maroc et la
Tripolitaine.
I- L’ŒUVRE DE CONQUETE FRANCAISE
A- En Algérie
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1- Rappel de l’installation ottomane en Algérie au détriment de l’Espagne
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Dans l'escarcelle de : locution prépositionnelle 1. dans l'ensemble des possessions de (quelqu'un) Exemple :
faire revenir dans l'escarcelle de son parti la plus haute fonction de son pays
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L’anéantissement des Almohades, en 1269, déclenche une rude bataille commerciale entre
chrétiens (Espagnols) et musulmans pour le contrôle des ports de la Méditerranée. La région
est partagée entre trois dynasties berbères
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: les Mérinides à Fès, les Abdelwadides à
Tlemcen
3
et les Hafsides à Tunis.
Dès la fin du XVe siècle, après la reconquête chrétienne (la Reconquista) de la totalité de
l’Andalousie, l’Espagne occupe plusieurs ports de la côte algérienne (Mers el-Kébir, Oran,
Béjaïa). Les Abdelwadides acceptent le protectorat espagnol, mais les autorités religieuses des
villes portuaires, soutenues par la population, engagent des corsaires
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, qui capturent les
navires marchands et retiennent l’équipage et la cargaison en échange d’une rançon. En 1518,
Alger et plusieurs autres ports sont assiégés par les Espagnols ; les Turcs ottomans sont
appelés à la rescousse.
Les Barberousse
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, deux frères corsaires d’origine grecque ou sicilienne selon les sources
et convertis à l’islam, obtiennent du sultan Soliman le Magnifique
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d’être envoyés en
Afrique du Nord avec une flotte. Ils chassent les Espagnols de la plupart de leurs nouvelles
possessions, et résistent au siège de Charles Quint
7
devant Alger (1541). Les Abdelwadides
sont déposés en 1554, et Khayr al-Din, le plus jeune des Barberousse, est nommé beylerbey,
c’est-à-dire représentant du sultan en Algérie. Proconsuls militaires d’Afrique, ces « rois
d’Alger » exercent leur autorité non seulement sur la zone littorale, mais aussi sur les pachas
de Tunisie et de Tripolitaine. En raison de son éloignement de Constantinople, la régence
d’Alger
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est gouvernée comme une province autonome.
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Au Maghreb, le déclin progressif du pouvoir des Almohades permet à trois dynasties locales de se mettre en
place au cours du XIIIe siècle : les Hafsides depuis Tunis (actuelle Tunisie), les Mérinides depuis Fès (actuel
Maroc) et, au centre, les Abdelwadides depuis Tlemcen (actuelle Algérie).
3
Important carrefour entre les routes transsahariennes, la Méditerranée (notamment l’Espagne musulmane d’Al-
Andalus) et le reste du monde arabe, Tlemcen connaît au xiii siècle un grand essor commercial et religieux
(construction de médersa et d’une grande mosquée) qui fait de la cité un exemple unique d’architecture
musulmane de cette époque en Algérie.
4
Histoire : aventurier des mers qui capturait des navires marchands pour le compte d'un État
5
Barberousse, nom donaux frères corsaires Arudj (1474-1518) et Khayr al-Din (1476-1546). Le nom de
Barberousse dériverait de celui de Baba (« père » en turc) Arudj, l’aîné.
Fils d'un potier grec de Mytilène (ou, selon les versions, d'un Sicilien renégat), les deux corsaires ont fait la
guerre de course au nom du sultan de Constantinople.
L’aîné, Arudj, se met au service de l'émir d'Alger pour chasser les Espagnols installés au Peñon, à l'entrée du
port d'Alger (1515). Il investit la cité et soumet l'arrière-pays.
Son frère, Khayr al-Din, lui succède sur les côtes nord-africaines, chasse les Espagnols du Peñon et fait fortifier
la ville par des captifs chrétiens. Il dévaste les côtes italiennes et même Nice (1543), bien qu'alliée de la France
en lutte contre Charles Quint.
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(v. 1494-1566), sultan de l’Empire ottoman (1520-1566). Conquérant, administrateur, protecteur des arts et des
lettres, Soliman surnommé le Législateur (Kanuni) par les Turcs et le Magnifique par les Occidentaux
s’est imposé comme le plus prestigieux des sultans pour avoir porté à son apogée la puissance et la splendeur de
l’Empire.
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Charles Quint (1500-1558), roi des Pays-Bas (1515-1555), roi d’Espagne sous le nom de Charles Ier (1516-
1556) et empereur du Saint Empire romain germanique (1519-1556).
Souverain de la Renaissance dont l’objectif a été de créer une monarchie catholique universelle à son profit,
Charles Quint s’est heurté à l’émergence du protestantisme et à celui des États nationaux, notamment de la
France.
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Le territoire de la Régence est divisé en quatre provinces : celle qui entoure Alger, directement sous l’autorité
du Dey, alors que les trois autres : Titteri, Constantinois, Oranie sont administrées par des beys, désignés par le
Dey.
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Conséquence indirecte de la Reconquista espagnole, l’établissement des Ottomans en Algérie
débouche sur la mise en place d’une monarchie élective et de formes de gouvernement qui ont
marqué profondément l’Algérie : au XVIIe siècle, Alger choisit son dey qui reçoit ensuite
l’investiture de Constantinople. L’ordre est en principe assuré par deux forces militaires
rivales, l’odjaq, la milice des janissaires, et la taïfa des raïs, la corporation des corsaires. Mais
l’arrière-pays le Sud, le Constantinois, la Kabylie échappe au pouvoir de la régence
d’Alger, qui est essentiellement une « colonie d’exploitation ». Le pouvoir ottoman a recours
à la formation de smalas (colonies militaires) et aux maghzens, des tribus privilégiées qui font
rentrer l’impôt.
2- La conquête française : les raisons et le processus
À l’extérieur, Alger doit sa puissance à l’efficacité de sa flotte de corsaires qui exerce une
forte influence en Méditerranée occidentale. Régulièrement, les États européens payent un
tribut pour assurer la protection de leurs navires, et les rançons des prisonniers apportent de
gros revenus à la régence. Mais à la fin du XVIIIe siècle, les progrès réalisés en matière
d’armement et de construction navale permettent aux Européens de mener une action
collective contre la capitale corsaire. En 1815, les États-Unis envoient une escadre navale à
Alger. L’année suivante, le dispositif défensif de la ville est pratiquement annihilé par une
flotte anglo-hollandaise.
Ainsi, la course qui avait fait la fortune des Barberousse n’est plus rentable. Aussi les pachas
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s’efforcent-ils d’assurer les ressources de la Régence en prélevant sur les diverses tribus un
impôt en grains et cuirs qu’ils vendent aux européens contre des produits manufacturés. En
1827, Le gouvernement de Charles X
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cherchait à détourner l’opinion publique française
d’un conflit qui l’opposait à ses Chambres. Pour cela il prit le prétexte d’un incident qui
opposa le dey Hussein au consul de France Deval (1827) au cours d’une discussion à propos
d’une affaire assez obscure de livraison de grains non payée : le dey Hussein aurait giflé le
consul français Duval
11
. En fait, Les causes de la conquête sont : la lutte contre la piraterie
maritime, le désir de prestige de Charles X de France, le besoin de certaines matières
premières (laine).
Charles X ordonne un blocus naval et une expédition militaire (dirigée par le Général
Bourmont) contre la ville. Les troupes françaises, fortes de 37 000 hommes, s’emparent
9
Gouverneur de province dans l'ancien Empire ottoman.
10
Charles X (1757-1836), roi de France de 1824 à 1830.
11
La conquête de l’Algérie n’est ni préméditée ni inscrite dans un plan de colonisation préconçu. Elle naît d’un
fait divers et de ses conséquences imprévues. En effet, le 29 avril 1827, le dey d’Alger frappe de son chasse-
mouches le consul de France lors d’une discussion financière houleuse. Deval, le consul, fait un rapport
circonstancié au gouvernement français dirigé par le comte de Villèle : il souligne l’insulte faite à la France ; en
conséquence, de Villèle décide de réparer l’outrage en organisant le blocus du port d’Alger. Mais cette première
mesure de rétorsion se révèle inefficace, et le vaisseau la Provence essuie les tirs des canons algérois.
L’injure n’étant pas vengée, le 31 janvier 1830, le gouvernement français mené par le prince de Polignac décide
de nouveau de punir le dey d’Alger. Le coup de chasse-mouches est, entre-temps, devenu un prétexte car, pour
Polignac et le roi Charles X, il s’agit d’une part, en France même, de relever le prestige du gouvernement
contesté par l’opposition libérale et, d’autre part, de trouver des débouchés commerciaux en Afrique du Nord
pour le port de Marseille qui périclite depuis les guerres napoléoniennes.
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d’Alger en 1830 et occupent une partie du pays
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. La capitulation du Dey Hussein le 5 juillet
1830 n’entraîna pas de réaction du sultan de Constantinople ; quant aux gens du pays, s’ils
n’eurent aucun regret des Turcs, ils détestèrent par principe, les Français parce que ces
derniers étaient chrétiens. Le gouvernement du roi Louis-Philippe hésitait entre la garde ou
l’abandon d’Alger ; il se contenta d’envoyer des gouverneurs avec mission de garder la région
d’Alger sans engager des dépenses importantes, car une bonne partie de l’opinion française
était hostile à ce qu’elle estimait une aventure coûteuse et sans intérêt
13
. Il fallut les difficultés
par Abd el-Kader et le bey Ahmed de Constantine pour faire passer « l’occupation restreinte »
à « l’occupation totale » souhaitée par le général Bugeaud (voir carte 3, page 104, Histoire
3e. Le monde contemporain, de 1815 à nos jours, Edicef)
3- La résistance algérienne : Abd el-Kader
Né près de Mascara (Algérie), Abd el-Kader en arabe Abd al-Qadir Nasr-Ed-Din est le
quatrième fils du chef d’une confrérie soufie, descendant d’une famille chérifienne. Destiné à
succéder à son père, il reçoit une éducation approfondie, apprend la théologie, la philosophie,
la littérature arabe et gagne très tôt la réputation d’être un homme pieux et cultivé. Entre 1826
et 1828, il effectue avec son père le pèlerinage (le hadj) à La Mecque, qu’il complète par des
séjours à Damas, Bagdad, Jérusalem et en Égypte, où il rencontre le vice-roi Méhémet Ali.
Abd el-Kader et son père rentrent en Algérie en 1829.
Le 5 juillet 1830, les Français s’emparent d’Alger alors sous domination de l’Empire
ottoman et entament la colonisation de l’Algérie (voir expédition d’Alger).
3.1. 1. Le premier djihad d’Abd el-Kader (1832-1837)
En novembre 1832, Abd el-Kader est présenté par son père à plusieurs tribus amies ; le jeune
homme de 24 ans est élu émir par ses pairs, et lance la première guerre sainte (le premier
djihad) contre les forces françaises d’invasion. Le 26 vrier 1834, Abd el-Kader obtient une
première victoire diplomatique en signant avec le général français Desmichels, gouverneur
d’Oran, un traité polémique (appelé le traité Desmichels) qui reconnaît dans sa version
arabe son autorité sur l’Oranais.
Cependant, après le désaveu du gouverneur par la France, Abd el-Kader reprend le combat,
défait les forces du général Trezel au défilé de La Macta (26 juin 1835), ne peut éviter le
pillage de Mascara (décembre 1835), perd Tlemcen (janvier 1836) et est vaincu à la bataille
de la Sikkak (6 juillet 1836). Par le traité de la Tafna (30 mai 1837), il obtient toutefois de la
France que représente alors le général Bugeaud la reconnaissance de sa souveraineté sur
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L’expédition est décidée. Au printemps 1830, 675 navires quittent Toulon pour transporter un corps
expéditionnaire commandé par l’ancien chef chouan, le comte de Bourmont. L’expédition débarque à 17 km
d’Alger le 14 juin 1830. Le 5 juillet, le dey capitule et s’enfuit. Le 10 juillet, Alger est aux mains des Français.
S’inspirant des proclamations de Napoléon Bonaparte faites en Égypte en 1798, Bourmont promet alors aux
habitants de respecter leur religion ; cependant il transforme rapidement des mosquées en églises.
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La conquête d’Alger ne profite ni à Charles X ni au gouvernement Polignac, renversés par la Révolution de
juillet 1830 avant d’avoir statué sur l’avenir de la conquête ; et ce n’est qu’en 1833 que Louis-Philippe
commence à imaginer une politique pour les territoires conquis. Ainsi l’aventure coloniale française en Algérie
commence dans un climat d’improvisation certain.
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la plus grande partie de l’Oranais et de l’Algérois, en contrepartie de sa soumission au roi
Louis-Philippe.
Ces différentes victoires militaires et diplomatiques permettent à Abd el-Kader d’étendre et de
consolider son territoire, jusqu’à former un véritable État. Celui-ci est doté d’une capitale
(Tagdempt), d’une monnaie (le boudiou), mais aussi d’une bureaucratie et d’une armée
rétribuées et efficaces. Il impose un régime autocratique, exigeant une totale loyauté des tribus
du Sahara, taxant uniformément tous ses sujets (égalité devant la me). Profondément
imprégné d’islam, il recrute au sein de l’aristocratie religieuse, mais n’hésite pas à faire appel
à des fonctionnaires européens et à des non musulmans.
3.2. 2. Le second djihad d’Abd el-Kader (1839-1847)
En novembre 1839, jugeant le traité de la Tafna violé, Abd el-Kader reprend la lutte et lance
un second djihad contre les Français. Le général Bugeaud, qui reçoit le gouvernement de
l’Algérie en 1840, combat la résistance algérienne en pratiquant, à partir de 1841, la tactique
de la terre brûlée. L’émir est alors contraint au nomadisme. Le 16 mai 1843, la smala d’Abd
el-Kader est prise par les troupes du duc d’Aumale, et l’émir sefugie au Maroc. Les
Français contraignent le sultan marocain à le chasser (traité de Tanger, septembre 1844) ; Abd
el-Kader rentre en Algérie et rouvre les hostilités en 1846.
Ayant de nouveau cherché refuge au Maroc (juillet 1846), Abd el-Kader est pourchassé par le
sultan et doit regagner l’Algérie, il se rend au général Lamoricière, le 23 décembre 1847.
Malgré la promesse qui lui est faite de le conduire (ainsi que sa famille) à Alexandrie ou à
Saint-Jean d’Acre, il est emmené avec sa suite en France où, la situation politique ayant
changé, il est retenu durant quatre ans. L’émir est libéré en octobre 1852, à la suite du coup
d’État de Louis-Napoléon Bonaparte. Ce dernier avec lequel se crée une amitié fidèle
lui annonce personnellement la fin de sa captivité.
Abd el-Kader meurt le 26 mai 1883 et est inhumé dans une mosquée de Damas ; en 1966, ses
cendres ont é rapatriées à Alger. Aujourd’hui encore, il est considéré comme un héros
national en Algérie.
B- En Tunisie
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