Il fait alors le fou pour ne pas le devenir. À vingt ans, il se
marie et divorce aussitôt. Il exerce plusieurs petits métiers
dans la privation et une totale pauvreté. Entre-temps, il écrit,
anime des troupes théâtrales et devient journaliste. En 1940, il
se remarie. Pendant la Deuxième Guerre mondiale, Albert
Camus émigre en France où il prend part à la rédaction du
journal Combat dont il devient rédacteur en chef après la
libération.
Au lendemain de la guerre, Albert Camus est un écrivain
déjà connu. Ses idées passionnent les gens de nombreux pays
encore sous le choc des ruines morales et matérielles laissées par
les deux guerres mondiales. Le 17 octobre 1957, l’Académie
royale de Stockholm lui décerne le prix Nobel de littérature.
N’est-ce pas là une récompense méritée dont il faut jouir ?
Mais encore une fois, la mort est là. Elle le guette !
Avec ses vingt-deux titres ‒ dont cinq récits ‒, cinq pièces
de théâtre, dix essais et les deux carnets, l’œuvre d’Albert
Camus apparaît dans son ensemble comme un plaidoyer en
faveur de l’homme1, l’homme seul et étranger au monde,
l’homme victime du mal alors qu’il est souvent innocent, un
homme qui vit dans un perpétuel balancement entre le bien et
le mal, le oui et le non, la mesure et la démesure, l’envers et
l’endroit, l’exil et le royaume, entre le bonheur et le malheur…
Bref, un homme toujours en situation frontière. L’œuvre même
d’Albert Camus est le reflet de cette alternance de contraires.
Elle se situe entre la philosophie et la littérature et souvent
entre la philosophie et la poésie.
Cette bipolarité n’étiole cependant pas la profondeur de la
pensée d’Albert Camus. Elle n’atténue également en rien la
pertinence des analyses profondes que Camus fait sur le tragique
de la condition humaine ; une condition qui fait de l’homme
un être mortel rivé au temps et soumis à l’histoire, un homme
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