Observatoire national des programmes et des pratiques • Supplément à
l’US
no596 du 16 janvier 2004 3
Le ministère de l’Éducation nationale
a chargé 3 groupes d’experts (groupe
sciences, groupe humanités, groupe tech-
nologie) d’effectuer une relecture des
programmes de collège avec l’objectif de
renforcer les liens entre les disciplines et
de prendre en compte les changements
des programmes de l’école primaire et
du lycée d’enseignement général et tech-
nologique. Le groupe sciences, présidé
par Jean-François Bach, professeur d’im-
munologie, a rendu un rapport dont le
caractère n’est pas encore définitif; deux
orientations sont choisies, pour toutes
les disciplines scientifiques, l’une relative
aux pratiques pédagogiques, la
démarche d’investigation, l’autre de
nature à renforcer la cohérence entre
disciplines, les thèmes de convergence.
La démarche d’investigation
C’est par cette démarche que le groupe
entend assurer la continuité pédago-
gique avec l’école primaire (cf : «la main
à la pâte »). Bien que les auteurs du rap-
port précisent que cette démarche n’est
ni unique, ni exclusive, on lit « une pré-
sentation de l’enseignant est parfois
nécessaire » et la séquence d’investiga-
tion est définie de façon très prescriptive
et rigide: le repérage des acquis des
élèves, le choix de la situation problème,
l’appropriation du problème et l’élabo-
ration de conjectures par les élèves, les
échanges argumentés entre élèves, l’ac-
quisition et la structuration des connais-
sances, l’opérationnalisation des connais-
sances. L’histoire de l’enseignement des
mathématiques, particulièrement sur les
trente dernières années, rend les ensei-
gnants très méfiants par rapport à ce
type d’injonction. Des recherches ont
d’ailleurs montré combien la mise en
œuvre d’une démarche réellement expé-
rimentale est délicate et consommatrice
de temps et que, mal maîtrisée, elle ne
conduit à aucun bénéfice pour les élèves
si ce n’est le contraire.
Les 6 thèmes de convergence
L’énergie, l’environnement, la météorologie, la
pensée statistique, l’éducation à la sécurité et
à la santé
Pour chacun de ces thèmes, il est fait
référence à chacun des programmes des
disciplines : les mathématiques y inter-
viennent essentiellement pour fournir
les outils de base tels que nombres, pro-
portionnalité, rudiments statistiques.
Cette vision réductrice des mathéma-
tiques, y compris dans leur rapport avec
les autres sciences, apparaît d’ailleurs
dès l’introduction du rapport : l’apport
des mathématiques à la construction
d’une vision globale du monde semble
se limiter aux nombres. « Se représenter
le monde» ne serait qu’une question
d’échelle et de puissances de 10, quid du
monde des formes? C’est oublier que
figures géométriques, schémas, tableaux,
graphiques sont des apports essentiels.
Pourquoi le texte ne dit-il rien de l’em-
ploi des lettres et du calcul littéral qui
correspond à un saut conceptuel extra-
ordinaire pour comprendre le monde
en le modélisant?
Même si l’enseignement de la physique,
à ce niveau, redoute, à juste titre, une
mathématisation prématurée, qui occul-
terait le sens, le passage à la quantifica-
tion s’avère, à un moment donné indis-
pensable(2). Lorsqu’il s’agit d’exploiter
les relations entre grandeurs variables
(fixer l’une, faire varier l’autre(3)), une
collaboration entre enseignants de
mathématiques et de physique pourrait
être riche et fructueuse : or celle-ci n’est
pas signalée dans le rapport.
Enfin le rapport préconise l’introduc-
tion d’éléments d’histoire des sciences
(sous la forme « Comment a-t-on décou-
vert ceci, compris cela? »), la mise à dis-
position des élèves de documents rédigés
en langue étrangère adaptés à leur
niveau. Il procède aussi au repérage des
principales polysémies du vocabulaire
scientifique utilisé au collège (telles que
hypothèse, milieu, facteur, puissance...).
Pour ce qui concerne la partie
propre aux mathématiques
La rédaction du paragraphe relatif aux
finalités et aux objectifs de l’enseigne-
ment des mathématiques reste très
proche de celle des actuels programmes.
Quant à l’organisation des apprentis-
sages et de l’enseignement, les propos
tempèrent ceux de l’introduction géné-
rale du rapport : «Les enseignants ont le
libre choix de l’organisation de leur
enseignement, dans le respect des pro-
grammes. » « Pour être efficace, les
connaissances doivent être identifiées,
nommées et progressivement détachées
de leur contexte d’apprentissage. Pour
cela, les activités de synthèse organisées
par l’enseignant sont fondamentales»
Le document rappelle que la question de
la preuve occupe une place centrale en
mathématiques et précise que « la prise
de conscience de ce qu’est la recherche
et la mise en œuvre d’une démonstration
est également facilitée par le fait, que, en
certaines occasions, l’enseignant se livre
à ce travail devant la classe, avec la par-
ticipation des élèves».
Sur le détail des contenus
mathématiques
Il y a la volonté affichée de mieux assu-
rer la continuité avec l'école primaire,
d'alléger le programme de Quatrième,
de valoriser les statistiques, la notion de
fonction et l'étude de la proportionnalité
mais il est difficile de vérifier ces buts
avoués car seul le programme de
Troisème est détaillé (en vue d’une
application à la rentrée prochaine dans
le cas de la réforme du collège); pour les
autres niveaux, il faut se satisfaire d'un
tableau synoptique.
Les modifications de contenus sont res-
treintes, à l’exception de la suppression
des vecteurs au collège. Or le vecteur
n’est t-il pas la « plaque signalétique
naturelle» de la translation ; de même le
déplacement sur un quadrillage prati-
qué dès le primaire n’est il pas une ren-
contre «naturelle » avec les coordon-
nées de vecteurs ? La rotation et la
translation seraient alors introduites
comme composées de deux symétries
orthogonales ; c’est cohérent comme
synthèse des apprentissages sur les trans-
formations étudiées en collège mais n'est-
ce pas trop éloigné de l’intuition des
élèves ?
Dans le souci d’alléger le programme
de Quatrième, jugé souvent trop lourd :
«translation, puissances autres que celles
de 10, ordre et multiplication seraient
transférés en Troisième. Par contre
agrandissement et réduction » serait
avancé en Quatrième.
Il y aurait moins d'exigences dans les
calculs littéraux pour les factorisations.
En statistiques, les quartiles seraient intro-
duits pour mesurer la dispersion d’une
série. On ne sait à quel niveau seront étu-
diées médiane, centre de gravité et ortho-
centre, distance d’un point à une droite.
Programmes du collège
Le rapport Bach