Mythologie 1
Mythologie
Le dieu Thor de la mythologie nordique affrontant les g€ants, M. E.
Winge, 1872.
On appelle mythologie (du grec •‚ƒ„…„†‡ˆ, de •‰ƒ„Š
mythe et …‹†„Š discours), soit un ensemble de mythes
li€s Œ une civilisation, une religion ou un th•me
particulier, soit l'€tude de ces mythes. Les chercheurs
qui €tudient les mythologies sont appel€s
Ž•mythologues••.
Comprise comme ensemble de mythes, la notion de
mythologie est g€n€ralement utilis€e pour d€crire des
ensembles de r€cits et de figures divines, humaines ou
monstrueuses brass€s par les syst•mes religieux des
civilisations anciennes ou de soci€t€s traditionnelles,
€loign€es dans l'espace ou dans le temps.
Comprise comme l'€tude des mythes, la mythologie
remonte €galement Œ l'Antiquit€, dans la mesure o‘ les
Grecs anciens portent tr•s rapidement un regard critique
sur leurs propres mythes, ce qui am•ne Œ des
interpr€tations li€es Œ une volont€ de r€€criture r€aliste
ou moralisante, via des courants tels que l'€vh€m€risme
et la pratique du commentaire all€gorique. Mais ce n'est
qu'au XIXe•si•cle que les €tudes mythologiques se
constituent en une discipline Œ pr€tention scientifique,
dans le contexte du d€veloppement des sciences
sociales, en particulier de l'anthropologie. C'est aussi Œ
ce moment que na’t la mythologie compar€e, con“ue
d'abord sur le mod•le de la linguistique compar€e. De
cette €volution sont issus les principaux courants des €tudes mythologiques aux XXeXXIe•si•cles, tels
l'interpr€tation ritualiste, l'approche psychanalytique ou le structuralisme.
La mythologie comme ensemble de mythes
Tout comme la notion de mythe, le terme Ž mythologie • provient de la Gr•ce antique et a d'abord €t€ utilis€ dans le
contexte de la culture grecque ancienne. Par la suite, les deux notions ont €t€ appliqu€es Œ toutes sortes de cultures
parfois radicalement diff€rentes. Cela peut poser des probl•mes de m€thode lorsqu'on €tudie ces cultures, dans la
mesure o‘ l'emploi de ces notions revient Œ supposer d'embl€e que l'ensemble des religions, cultes et r€cits
ancestraux fonctionnent exactement de la m”me fa“on que ceux de la mythologie grecque, alors que des €tudes plus
attentives ont r€v€l€ souvent des diff€rences profondes d'une culture Œ l'autre[1] . De plus, on parle g€n€ralement des
mythologies au pluriel : la question de savoir dans quelle mesure on peut les rassembler sous un concept unifi€ est un
probl•me complexe, qui rel•ve de la mythologie compar€e.
Mythologie 2
Les mythologies du monde
Aujourd'hui, nous parlons couramment de Ž mythologies • pour d€signer les r€cits religieux des peuples anciens ou
exotiques, €loign€s dans le temps ou dans l'espace. Le terme est employ€ de fa“on extr”mement large, au point d'”tre
parfois synonyme de Ž folklore •.
Vecteurs et sources de la mythologie
Les mythologies se sont transmises dans le temps et l'espace par diff€rents vecteurs :
la tradition orale dont on suppose qu'elle a €t€ le tout premier support des diff€rentes mythologies du monde
(selon des modalit€s tr•s variables, puisqu'elle prend des formes tr•s diff€rentes selon les r€gions du monde) ;
les –uvres artistiques qui y puisent leurs sujets, pour en offrir des restitutions ou des r€€critures (aussi bien en
litt€rature que dans les arts visuels et plastiques, peinture, sculpture, c€ramique, mais aussi musique, danse, et plus
r€cemment cin€ma, bande dessin€e, t€l€vision et jeux) ;
les r€f€rences, allusions ou r€cup€rations dans des domaines non artistiques (ouvrages et discours politiques,
techniques, m€dicaux, etc.) qui, tout comme les €vocations artistiques, ont parfois une grande influence sur
l'€volution des mythologies, en pr€servant certains mythes au d€triment d'autres, en les transformant, en inventant
de nouvelles variantes, etc. ;
les collections et r€sum€s de mythes, par exemple les ouvrages des mythographes antiques dans le domaine
gr€co-romain, et, plus r€cemment, les dictionnaires de mythologie et les recueils de mythes et l€gendes.
les recueils et transcriptions €crites r€alis€s par les anthropologues, les philologues et les folkloristes.
De nos jours, bon nombre de mythologies sont encore vivantes, au sens o‘, ind€pendamment du probl•me complexe
de la croyance[2] , les r€cits mythiques continuent Œ se transmettre par l'interm€diaire de ces diff€rents supports, et
continuent Œ €voluer au fil des r€€critures et de l'apparition de nouvelles variantes. Ces diff€rents supports et vecteurs
de transmission constituent autant de sources sur lesquels se fondent les mythologues pour d€limiter un corpus
mythologique afin de l'€tudier. Selon l'approche adopt€e pour l'€tude, on y inclut parfois des –uvres et des
d€veloppements modernes, consid€r€s comme autant de variantes r€centes des m”mes mythes[3] .
Tablette
ougaritique
relatant le
mariage du
dieu El et sa
prog€niture
divine
(XIVe-XIIIe
s av. J.-C.,
Mus€e du
Louvre).
R”, Atoum et le
serpent
Apophis,
€pisode du
Livre des
portes €gyptien
(peut-”tre
XIVe-XIIe s.
av. J.-C.).
Combat entre Zeus et Typhon sur
une hydrie grecque Πfigures
noires (v.550 av. J.-C.).
Monolithe dit Ž•Pierre du
Soleil•• relatant la
cosmogonie azt•que
(v.1479, Mus€e national
d'anthropologie, Mexico).
Mythologie 3
Poup€es repr€sentant
les kachinas, dans la
culture des
Am€rindiens du Sud
Ouest des —tats-Unis
(dessins dans un livre
d'anthropologie de
1894).
Statue ΠUbud,
sur l'’le de Bali,
repr€sentant
Arjuna, un des
h€ros du
Mahâbhârata.
Un griot,
d€positaire de la
tradition orale
en Afrique de
l'Ouest, ici Œ
Diffa, au Niger.
Le Wagyl, cr€ature du temps du
r”ve des Aborig•nes, sur un
panneau du King's Park ΠPerth
(Australie de l'Ouest).
Mythologie, mythe et concepts voisins
La notion de mythologie fait partie d'un vaste ensemble de termes que le langage courant utilise souvent de fa“on
interchangeable, mais qui ne sont pas synonymes. Le sens donn€ Œ ces termes, tout particuli•rement au mot mythe,
varie consid€rablement selon que l'on parle de leur usage dans le langage courant ou du sens qu'ils rev”tent en tant
que notions chez les diff€rents auteurs qui se sont consacr€s aux €tudes mythologiques. Les distinctions qui suivent
ne peuvent donc ”tre qu'indicatives, mais elles permettent tout de m”me de distinguer les notions employ€es par les
sciences humaines (mythologie, mythe, folklore) des termes qui correspondent souvent Œ des genres litt€raires
(conte, fable, €pop€e) ou des notions litt€raires (fiction).
Mythologie et folklore. Au sens que lui donnent les derni•res avanc€es des €tudes mythologiques, une
mythologie est un ensemble de mythes qui forment un syst•me dot€ d'une certaine coh€rence, sous-tendu par la
logique propre au syst•me de pens€e d€velopp€ par une communaut€ donn€e, dans un endroit et Œ une €poque
donn€s[4] . En ce sens, elle est proche du folklore (en anglais le Ž•savoir du peuple••) qui met l'accent sur l'id€e
d'un patrimoine commun Œ une communaut€ donn€e. Le folklore est cependant une notion plus large que celle de
mythologie, dans la mesure o‘ mythologie et mythe mettent l'accent sur les r€cits et les personnages, objets, lieux,
etc. qu'ils mettent en sc•ne, c'est-Œ-dire sur la dimension narrative, tandis que le folklore englobe €galement les
rites, les savoir-faire, les chansons, les danses, et tout ce qui rel•ve du Ž•patrimoine culturel immat€riel de
l'humanit€•• au sein d'un peuple donn€ (m”me s'il est souvent indispensable d'€tudier aussi ces €l€ments lorsqu'on
€tudie les mythes). Une autre distinction possible est chronologique : on nomme mythologies les ensembles de
r€cits remontant Œ l'Antiquit€, tandis que ceux apparus plus tardivement (au Moyen ˜ge ou apr•s) rel•vent plut™t
du folklore.
Mythes et légendes. La notion de mythe elle-m”me poss•de des fronti•res particuli•rement floues et son sens
varie selon les courants de pens€e et les auteurs qui l'€tudient. Cependant, les mythes et les mythologies qu'ils
forment se caract€risent entre autres par le fait qu'ils font, au moins Œ l'origine, l'objet d'une €laboration et d'une
transmission orales, que l'on peut faire remonter, en th€orie, avant l'apparition de l'€criture. Cela suffit Œ les
distinguer de la l€gende, qui, €tymologiquement, est un r€cit couch€ par €crit pour ”tre lu (legenda est le f€minin
de l'adjectif verbal du verbe latin legere, lire, donc : Ž•[histoire] qui doit ”tre lue, Œ lire••). Un autre crit•re de
distinction possible consiste Œ cantonner les appellations de Ž•mythes•• et de Ž•mythologie•• aux r€cits et
ensembles de r€cits qui fournissent des explications aux Ž•grandes questions•• philosophiques que se pose
l'humanit€ et qui mettent en jeu l'ordre du monde : la cr€ation du monde et son fonctionnement, l'apparition de
l'humanit€, les possibles fins du monde, etc. On appelle alors Ž•l€gendes•• tous les r€cits dont les enjeux sont
moins fondamentaux[5] .
Mythologie 4
Contes et fables. Le conte est encore diff€rent : m”me lorsqu'il fait l'objet d'une tradition orale, son
fonctionnement est diff€rent de celui des mythes, car le conte forme un genre extr”mement codifi€ qui r€pond Œ
des contraintes pr€cises (en particulier dans le cas du conte merveilleux €tudi€ par Vladimir Propp dans
Morphologie du conte). De plus, Œ partir de la Renaissance, le conte devient un genre litt€raire et doit alors ”tre
€tudi€ comme tel. De m”me, la fable et l'anecdote sont des genres litt€raires.
Sens ancien du mot «‚fable‚». š partir du d€but du XVIIe•si•cle, le mot Ž•fable•• a €t€ utilis€ comme synonyme
de Ž•mythe••, ce dernier terme l'ayant remplac€ au XXe•si•cle. Le terme €tait employ€ au pluriel (les fables,
c'est-Œ-dire les diff€rents mythes) ou au singulier collectif : Ž•la Fable•• d€signait l'ensemble des r€cits
mythologiques, et €tait donc plus ou moins synonyme de Ž•la mythologie••[6] .
Épopées, sagas et autres évocations artistiques. La mythologie ne se confond pas avec les diff€rents genres
litt€raires qui se basent sur des sujets mythologiques, mettent en sc•ne des personnages, lieux, objets etc.
mythologiques, ou s'inspirent plus ou moins librement de la mythologie dans les fictions qu'ils d€veloppent.
Ainsi, les grandes €pop€es telles que le Cycle troyen en Gr•ce antique, le Mahâbhârata en Inde ancienne ou les
sagas islandaises m€di€vales ne sont que certaines des sources de leurs mythologies respectives : m”me si leur
importance est tr•s grande, il faut se d€faire de l'id€e selon laquelle une €pop€e comme lIliade ou lOdyssée
contiendrait la Ž•version officielle•• de tel ou tel mythe, et pr”ter attention Œ la part d'adaptation et de remodelage
due au contexte historique de l'€laboration de ces –uvres, aux contraintes propres Œ tel ou tel genre litt€raire (par
exemple, le mythe grec d'›dipe est surtout connu par les trag€dies de Sophocle dont le d€nouement est
particuli•rement sombre, mais il en existait une version €pique dans le Cycle th€bain qui contenait des variantes
notables), voire aux int€r”ts politiques ou religieux qui pr€sident Œ son €laboration.
Mythologie et fiction. Enfin, m”me si, de nos jours, les mythologies rel•vent pour nous de la fiction, elles ne s'y
cantonnent pas, surtout dans le cas de mythologies anciennes, et il faut prendre en compte, pour les comprendre,
leurs rapports avec l'histoire, la philosophie, la politique, les connaissances techniques, et plus g€n€ralement avec
les diff€rents aspects des soci€t€s qui leur ont donn€ naissance.
Mythologie 5
Utilités, utilisations, récupérations
Jupiter et Sémélé de Gustave Moreau (1895),
exemple de sujet tir€ de la mythologie grecque
dans la peinture symboliste.
Les fronti•res entre la mythologie et des domaines tels que les arts, les
sciences et la politique sont particuli•rement poreuses. Cela s'explique
en partie par le fait qu'aux €poques anciennes, les distinctions que nous
faisons aujourd'hui entre la religion, l'histoire et les sciences,
n'existaient pas ou €taient tr•s diff€rentes. Dans le domaine grec, par
exemple, la mythologie avait Πla fois une valeur religieuse (elle parlait
des dieux et de leur culte), de renseigner sur des probl•mes
philosophiques (la cr€ation du monde, l'apparition des hommes et des
femmes, l'amour, la mort, etc.) et historiques (pour les Anciens, des
personnages tels que Th€s€e ou H€racl•s avaient r€ellement exist€ au
m”me titre que plus tard Solon ou P€ricl•s), mais aussi sur l'histoire
des sciences (elle proposait des explications sur l'apparition des
sciences et des techniques, attribu€es Œ tel dieu ou Œ tel h€ros). Les arts
y puisaient leurs sujets, mais on utilisait aussi la mythologie Œ l'€cole
(les mythes fournissaient des sujets d'exercices de rh€torique), et les
hommes politiques et les orateurs incluaient les mythes parmi les
exemples qu'ils utilisaient pour illustrer leurs discours. De nos jours, on
con“oit plut™t une mythologie comme un ensemble coh€rent et referm€
sur lui-m”me, qui rel•ve presque exclusivement de la fiction (on ne lui
pr”te plus de valeur historique ou scientifique, par exemple).
Mais en dehors de ces diff€rences dans les distinctions entre disciplines
et domaines de pens€e entre les €poques anciennes et l'€poque
contemporaine, les mythologies ont toujours fait l'objet d'utilisations et
de r€appropriations conscientes dans divers domaines et Œ des fins tr•s
variables.
Les mythologies dans les arts
Les mythologies sont ainsi un v€ritable vivier pour les arts. D•s l'Antiquit€, les sources les plus fameuses grœce
auxquelles nous connaissons les mythologies sont souvent des –uvres d'art, des €pop€es aux c€ramiques en passant
par la sculpture. Tr•s t™t, les artistes, Œ commencer par les po•tes, n'ont pas h€sit€ Œ se r€approprier les mythes pour
proposer leur propre vision de la mythologie dont ils avaient h€rit€. Au Moyen ˜ge et Œ la Renaissance, et jusqu'aux
€poques modernes et contemporaines, les diff€rentes mythologies n'ont jamais cess€, dans toutes les parties du
monde, de susciter d'innombrables reprises, r€€critures et r€inventions de la part des artistes (voyez par exemple
Peinture mythologique). Certaines –uvres sont si bien pass€es Œ la post€rit€ qu'elles ont exerc€ une influence durable
sur les mythes qu'elles traitaient (ainsi les trag€dies de Sophocle ont beaucoup influenc€ notre vision de l'histoire
d'›dipe, et la t€tralogie de Wagner la repr€sentation des dieux germaniques et nordiques). Inversement, certaines
–uvres qui, au d€part, €taient de pures inventions litt€raires con“ues sur le mod•le des mythes, se sont si bien
int€gr€es Œ l'imaginaire collectif qu'elles sont presque consid€r€es comme des mythologies Œ part enti•re de nos jours
(ainsi la mati•re de Bretagne m€di€vale, et en particulier le cycle arthurien, sont, au d€part, une cr€ation litt€raire
d€velopp€e par un nombre croissant d'auteurs, mais constituent Œ pr€sent la l€gende arthurienne). De nos jours
encore, d'innombrables artistes empruntent leurs sujets aux diverses mythologies ou s'en inspirent.
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