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Müşerref YARDIM
verser positivement. Ainsi, parfois, on cons-
tate que lorsqu’on encourage les étrangers
issus de l’immigration à s’intégrer totale-
ment, on leur manifeste du mépris ou de
l’hostilité vis-à-vis de leur culture d’origine
et on les pousse à surenchérir et à réagir
radicalement. En effet, pour certains jeunes,
montrer et revendiquer par des signes
extérieurs sa religion peut être compris
comme une façon de sentir qu’on apparti-
ent à un groupe quand on se sent menacé
ou rejeté. On observe dans beaucoup de
cultures différentes, dont les cultures occi-
dentales, un repli général vers les valeurs
ancestrales de la communauté ; enfin,
D’autres le voient comme un ac-
cessoire de mode, lié ou pas à la question
identitaire évoquée ci-dessus (Lacode, 2007:
5).
Si, dans ce débat, certaines
intéressées revendiquent porter le voile en
accord avec un choix personnel, elles sont
considérées soit comme des manipulées,
soit comme des manipulatrices; dans les
deux cas elles représenteraient un repli
identitaire menaçant les valeurs rattachées
aux droits humains (Anex, 2006: 73).
En effet, pour certains la question
du foulard ne semble pas s’être réduit pas à
un choix vestimentaire: il est accompagné
de valeurs et de visions du monde qui, bien
que diverses et changeantes, trouvent leur
origine dans une conception plutôt rigide
du dogme religieux, et dont certaines
nécessitent des accommodements aux
règles qui régissent le fonctionnement habi-
tuel des institutions en Occident (Anto-
mius) : une société́ qui a intégré́ les droits
fondamentaux de l’être humain ainsi que
les valeurs de liberté́, d’égalité́ entre hom-
mes-femmes et d’humanisme, se doit de
combattre les restes archaïques du religieux
sous toutes ses formes : voiles, excisions et
circoncisions, sacrifices, domination de
l’homme sur l’esclave, de l’homme sur la
femme, etc. » (La Libre 7 Janvier 2004). La
femme musulmane est victime de toutes les
oppressions et à travers ce type de préjugé,
on sous-entend l’oppression de l’homme
arabe ou musulman, des lois intransigean-
tes et barbares de la Charria, en somme de
cet islam totalitaire, machiste et tyrannique
(Lamrabet b). Une partie de l'Occident con-
çoit effectivement l'Islam comme politisant
obligatoirement sa pensée religieuse ou
comme un obscurantisme, une volonté
théocratique voulant rétablir la loi de Dieu
contre celle des « hommes » partout où il se
trouve. Il s'agit là d'un à priori réducteur, «
assimilant l'Islam dans un contexte des
Etats musulmans et dans un contexte mino-
ritaire » (Cesari, 2004: 70).
La femme musulmane est victime
de préjuges et de stéréotypes plus
précisément lorsqu’elle porte le hijab, le
foulard. Dans la plupart des cas ce type de
vêtement de la femme musulmane est asso-
cie à un aspect politique et social qui ne
peut être compatible avec la vison démocra-
tique et laïque (Spurles: 754). Quand il
s’agit de la question de la visibilité et de la
tenue de la femme musulmane, le débat se
fait avant tout autour la laïcité. La laïcité est
d’après N.Göle « tantôt avancée comme
une valeur universelle, républicaine qui
garantit l’égalité des sexes, et tantôt af-
firmée avec fierté́ comme un exceptionna-
lisme français. Cette ambivalence est
présente également quant à la définition de
l’Europe. L’idéal européen qui avait la ver-
tu de se proposer comme universel, donc
comme un modèle de référence qui peut
être pris comme inspiration et émulation
indépendamment de la particularité́ reli-
gieuse et culturelle, se défend aujourd’hui
comme une civilisation judéo-chrétienne.
Le débat sur la laïcité́ révèle la difficulté́ de
penser la différence islamique. L’Islam, une
référence externe, devient une référence
endogène en Europe. La visibilité́ des pra-
tiques et des symboles religieux dans les
espaces publics des pays européens témo-
igne de ce processus d’indigénisation. Les
musulmans pieux se rendent visibles aux