PATRIOTE
SAVOISIEN
et au moment où
l'avènement
en France de la
Eépublique définitive paraît assuré.
Pous nous, il est
évident
que l'article du
Courrier
est une de ces compilations faites
uni¬
quement pour
être envoyées
à
Versailles
par des
gens
de haut-lieu qui en ont besoin, et y
être
placées
sous les yeux du gouvernement
;
per¬
sonne ne s'y est
trompé,
à
Chambéry
pas plus
que
dans
le
reste
de la Savoie. On a compris
de suite quel parti nos meneurs
réactionnaires
prétendaient
tirer des affirmations
calculées
de
leur
journal:
« Voyez,
diront-ils au gouvernement,
voyez
combien peu vous pouvez compter sur
les
républicains
de la
Savoie.
Ces
gens-là
sont
les ennemis
acharnés
de la France. Gardez-
vous de leur confier une fonction quelconque !
Il
faut les renvoyer des administrations et ne
pas leur abandonner un pouvoir dont
ils
pour¬
raient se servir contre la
mère-patrie.
Vos
seuls amis sont ceux
qui,
en 1860, sont venus
proposer à l'empereur l'annexion de la Savoie.
Ils
aiment
la
France,
ceux-là
!
mais malheureu¬
sement
ils ne peuvent plus rien pour
elle
!
Il
vous appartient de
réparer
les
erreurs
passées
et de ne plus vous
fier
qu'aux vrais amis de la
France,
aux
honnêtes
gens
du
Courrier
des
Alpes.... »
Telles
sont,
analysées, simplifiées,
les pa¬
roles qu'une certaine personne, en ce moment à
Paris,
aura
prononcées
en
présentant
la
feuille
réactionnaire. Mais
heureusement
nous sommes
là
pour
lui rafraîchir
la
mémoire
et pour
réta¬
blir,
en
toute
vérité,
et les
tendances
du parti
de la
réaction
et les
idées
vraies,
dégagées
de
toutes
fausses
interprétations,
du parti
républi¬
cain.
Quel
est
celui,
ou du parti
républicain
ou du
parti
royaliste, qui a toujours
montré
le plus
d'attachement
à la France ? La
réponse
est fa¬
cile.
Rappellerons-nous que ce furent des
républi¬
cains qui, en 1792,
reçurent
les troupes fran¬
çaises,
en arborant le drapeau tricolore, et qui
envoyèrent
de
toutes
les communes de la Sa¬
voie
des
députations
au
château
des Marches?
Rappellerons-nous que ce furent des
républi¬
cains
qui poussèrent
alors les premiers cris de
Vive
la France
?
Dirons-nous qu'ils
n'étaient
pas des royalistes ceux
qui,
dans
la
journée
du
27 octobre de la
même année,
suivant l'exemple
donné
par
la
Convention,
décrétèrent l'abolition
des
privilèges,
des distinctions, des droits
féo¬
daux
?
Enfin,dirons-nous
qu'ils
n'étaient
pas des
royalistes ceux qui, le 27 octobre encore,
« énoncèrent
leu
général
de la
Nation
des
Allobroges,
libre
et indépendante, d'être
unie
à
la nation
française
pour en faire partie
inté¬
grante?
»
Elle
était
certainement
républicaine
cette
As¬
semblée
des
Allobroges qui,
libre
de
choisir en¬
tre le despotisme et la
liberté,
demanda la pre¬
mière
annexion
à la
France
républicaine
:
«
Nos
hommages,
écrivait-elle
à la
Convention,
nos hommages ne sont pas
dictés
par
ces
orga¬
nes
corrompus
de
V
ancien
régime;
ce sont des
HOMMES
LIBRES
qui vous les
présentent... Vous
nous avez
laissés maîtres
de nous donner des
lois...
nous avons
émis
leu
d'être réunis
à
la
République française,
non par une simple al¬
liance,
mais
par une
union
indissoluble.
»
Ce
ne furent donc pas, pour nous servir
de l'expression de
l'Assemblée
des
Allobroges,
les
organes
corrompus de l'ancien
régime,
mais bien les
républicains,
les
hommes
libres
qui décidèrent
l'annexion de la Savoie à la
pa¬
trie
française.
En
même
temps,
cette
même
as¬
semblée,
s'adressant
au peuple, disait : «¬
fiez-vous de ces nouveaux
prosélytes
de la
liberté,
d'autant
plus dangereux qu'ils vous
feront de
grandes
protestations de civisme
Malheur
au sujet rampant de l'ancien
régime
qui,
tenant,
au
préjudice
de sa
patrie,
à ses
opi¬
nions
empoisonnées,
pourrait manifester des
intentions nuisibles à ses concitoyens. »
On
ne viendra pas nous dire que l'annexion
fut
forcée,
qu'elle se fit sous la pression des
baïonnettes françaises,
que nous
subîmes
alors
la
loi
du vainqueur, la
volonté
du plus fort, la
conséquence
de l'axiome suivant lequel la force
doit
primer le droit. Les documents de
l'épo¬
que abondent pour prouver que la
liberté
en¬
tière
fut
laissée
aux Savoisiens
dans
le
choix
de leur nouveau gouvernement.
Au
moment des
élections,
qui allaient
déci¬
der du sort de nos
contrées,
les commissaires
de la Convention Nationale de France firent
une longue
proclamation,
dans
laquelle se trou¬
vent ces dignes paroles :
« Si
vous
voulez
res¬
ter sous le joug de vos anciens
préjugés,
vous
êtes les maîtres
;
les Français,en
vous
plaignant,
respecteront
jusqu'à
votre aveuglement et ne
s'occuperont que de leur propre
sûreté.
Si vous
voulez
un gouvernement
libre, fondé
sur
l'éga¬
lité
des droits de
tous
les
citoyens
sans
distinc¬
tion,
nous vous jurons, au nom de la nation
française,
paix et alliance
éternelle.
»
Du
reste,
la Convention en agissait
ainsi
avec
tous
les peuples conquis, et
c'est
à propos
de nos
élections
qu'elle faisait
paraître
ce ma¬
gnifique
décret
qui
réglait,
au point de vue
exclusif
de
l'indépendance
des peuples, le droit
international.
«
Les
généraux français,
disait l'article 2,
pourront
adresser
aux peuples dont ils occupe¬
ront le territoire les proclamations, instruc¬
tions et invitations
nécessaires
pour les porter
à
se donner un gouvernement
libre;
mais ils
ne pourront ni les inviter à adopter les
lois
françaises, ni
leur proposer telle
autre
forme de
gouvernement. » «/v^u
Ainsi,
ce furent des
républicains
qui, en
1792, lièrent
librement,
volontairement, le sort
de la Savoie à
celui
de la France.
Et
certes, l'on sait si
l'œuvre
de
régénéra¬
tion européenne,
poursuivie
par la
mère-patrie,
demandait alors des sacrifices, un
dévouement
sans
limites,
un
attachement
à
l'épreuve même
des plus
grandes
infortunes
!
La France
com¬
mençait
ses luttes gigantesques contre les coa¬
litions
monarchiques': il
fallait
beaucoup d'hom¬
mes et beaucoup
d'argent:
la Savoie
républi¬
caine les donna avec
joie.
On sait qu'elle eut à
subir
tous
les changements de gouvernement,
toutes
les cruelles
destinées
de la patrie.Le
con¬
sulat arriva, puis l'empire. A ce moment le
parti
républicain
fut
entraîné,
comme tout le
reste,
dans
les terribles
aventures
de l'homme
du
dix-huit
brumaire.
Le
tumulte des passions politiques
s'éteignit
peu à peu sous le bruit des armes. Tous les es¬
prits,
toutes
les intelligences,
toutes
les
opi¬
nions
étaient emportées pêle-mêle
dans
cet
in¬
fernal
tourbillon
qui enveloppait l'Europe. On
t
dit que la vie de la France reposait sur un
coup de canon
;
les
préoccupations étaient
tou¬
tes aux
frontières,
et lorsque vint la fatale nou¬
velle
de
Waterloo,
on s'éveilla
comme d'un
long
et
pénible
cauchemar.
Nous
arrivons à 1815. Que firent les
répu¬
blicains
?
M.
Mermillod.
Voici
un article de
l'Avenir
national
qui
peut
édi¬
fier
nos lecteurs sur la
personnalité
de
M.Mermillod:
«
Un correspondant
italien
de la
Gazette
de
Cologne
lui
envoie de bien curieux
détails
et des
renseignements nouveaux sur l'origine de
l'in-
surection spirituelle
de
M.Mermillod
et sur ses
relations avec la cour de l'ex-empereur.
«
II y a de longues
années que.M. Mermillod
se fit
présenter
à la
famille
Bonaparte, et lui fit
servilement la cour. Il avait
sans
peine
gagné
l'esprit fanatique de
l'impératrice,
et ne
visait
à
rien
moins qu'à devenir le directeur spirituel
de
cette
dame. Il avait
même
un fort
élégant
domicile où
il
recevait
à
toute
heure
les
dévotes
de la cour et du voisinage, fort
éprises
de cet
abbé
galant.il obtint
même
de
prêcher
un
carê¬
me à
Sainte-Clotilde
et se lia intimement avec
celui
qu'on a
appelé
le
prêtre-cavalier,
M.
Bauer.
«
Ce qui est
plus
grave,
c'est
que
M.
Mermil¬
lod
s'était abouché
avec
l'archevêque
Bonne-
chose et
l'évêque
Dupanloup, dont il recevait
le
mot d'ordre, pour
cette
croisade contre l'es¬
prit
moderne, où ces
prélats
cherchent vaine¬
ment à s'illustrer.
« Mermillod
fit
même
sonder l'ex-empereur
et ses conseillers pour savoir s'il trouverait
l'appui
nécessaire
dans
le combat
qu'il s'apprê¬
tait à
livrer
au gouvernement suisse.
MM.
Bon-
nechose et Dupanloup peuvent donner de
pi¬
quants
détails
sur ces intrigues auxquelles ils
ont
été
gravement
mêlés.
«
Si la Francet été
dans
une
autre
posi¬
tion,
ou si les complots avaient été
mûrs au
mo¬
ment de l'annexion de la Savoie, il est fort
possible que le canton de
Genève
t couru de
graves dangers.
«
Tout
récemment
encore,
M.
Mermillod
se
rendit en Savoie où il
prononça
un discours
d'une
violence incroyable contre son propre
gouvernement. Son but
était d'intéresser
les
catholiques genevois aux intrigues des Gene¬
vois
de son
Eglise. Mais
il
n'y trouva pas l'ap¬
pui qu'il espérait.
«
En Suisse, du
reste,
à
part
les quelques
prêtres
obscurs qui ont signe les
pétitions,
M.
Mermillod
n'a
trouvé qu'indifférence.Le
Vater-
land
lui-même,
l'organe de l'ultramontanisme
suisse, manifeste une franche aversion contre
les
tendances
et les
menées
de
M.
Mermillod.
»
L'incident
Bonaparte.
Les
feuilles
bonapartistes s'obstinent à
pré¬
senter
l'expulsion du prince
Napoléon
comme
étant
de nature, vu la
présence
de la princesse
Clotilde,
à provoquer un refroidissement
dans
les relations du gouvernement
français
et du
gouvernement
italien.
C'est fausser à
plaisir
la
plus simple des situations.
D'abord,
il
est de
notoriété
publique que la
fille
de
Victor-Emmanuel
n'a pas été comprise
dans
la mesure qui a
frappé
son mari
:
elle l'a
suivi,
parce que tel
était
son bon
plaisir,
mais
elle
a été l'objet de
tous
les
égards
dus à son
caractère
personnel et à sa
qualité
de femme.
Le
roi d'Italie ne
peut
à aucun titre se
plain¬
dre de la
façon éminemment
courtoise dont a
été traitée
la princesse. Y
songeât-il,
d'ailleurs,
ce qui
n'est
pas vraisemblable, que ce serait
encore là de sa
part
un pur sentiment de fa¬
mille,
ne devant avoir aucune influence sur la
politique
de son gouvernement,
qui
est un gou¬
vernement constitutionnel,
placé
par
consé¬
quent
en dehors des influences et des caprices
souverains.
A
ce dernier point de vue
même,
une¬
flexion
n'est
pas
inutile. Si
l'Italie a quelque¬
fois,
dans
ces derniers temps, paru oublier les
vieilles
sympathies qui l'unissent à la France,
c'est
parce que la politique de l'empire
préten¬
dait exercer, de l'autre
côté
des
Alpes,
une
tutelle funeste, qu'un grand peuple ne pouvait
subir
sans
protestation : et au cas
où
le cabinet
de Rome serait
tenté,
comme le
prétendent
gratuitement les feuilles bonapartistes, de
s'occuper de l'incident
relatif
à
l'expulsion
du
prince
Napoléon,
il ne pourrait qu'en
éprouver
une impression favorable, en y voyant la
preuve que la France a bien
décidément
rompu
avec les Bonaparte et avec le
régime
dont
l'Italie
elle-même
a eu trop longtemps à souf¬
frir.
Par conséquent,
l'expulsion du prince ne
saurait avoir aucun
résultat
international¬
cheux, au contraire, et les
feuilles
bonapartistes
feront bien de chercher
un thème
plus vraisem¬
blable
pour leurs
attaques
contre le gouverne¬
ment.
A
méditer
par
les
amis
du
C0UBB9ËR.
Il
faut vraiment que les monarchistes soient
doués
d'une
incroyable dose d'effronterie, pour venir nous
parler encore de leur patriotisme.
Mais
à quelle
épo¬
que de notre histoire moderne,
cette
[vertu fut-elle
donc par eux mise en
évidence?
Serait-ce par ha¬
sard sous le
règne
du
roi-soleil,
de ses
prédécesseurs
et de son
chaste
successeur,
époque
pendant
la¬
quelle
tout patriotisme
officiel
consistait à se rouler
sous les pieds du
maître
dans
la fange de
toutes
les
servilités
?
Serait-ce
dans
la soumission du
maréchal
de
Richelieu
et de son noble
état-major
aux
infâ¬
mes recommandations de
Louis XY
concernant la
guerre
qu'il
avait entreprise de mauvais gré contre
Frédéric
dit le
Grand,
et notamment la bataille de
Rosbach,
perdue
par
ordre
royal?....
Seraitencore
dans
l'empressement
apporté
en 89
par les
glorieux
soutiens du
trône
et de l'autel à-
serler le sol
sacré
de la patrie,
menacée
au-dedans
par leurs conspirations
permanentes
et au dehors
par la
coalition européenne,
à laquelle par
surcroît
ces fiers
patriotes
sont
allés offrir
l'appoint de leur
courage, de leur
épée
et de
leur
cravache.
Est-ce par patriotisme qu'à la suite de nos
désas¬
tres
de 4814 et de 181S, ils ont
faufilé
leur
fétiche
obèse
parmi les fourgons de l'ennemi, et qu'en sup¬
plément
aux
énormes
contributions de guerre dont
la
pauvre France
était
alors
écrasée,
ils ajoutaient,
ces nobles paladins si pleins de
désintéressement
et
de grandeur
d'âme,
ils ajoutaient, dis je, le fameux
milliard
ditdes
émigrés,prélevé
sur
lamisère
publique
et la famine, pour indemniser la couardise et la
trahison triomphantes sur les ruines de la patrie.
Est-ce par patriotisme que,
pendant
la guerre si
désastreuse
que nous venons de subir, ils ont mis,
aux efforts surhumains de la
défense
nationale, tou¬
tes les
entraves
matérielles
et morales qu'ils ont pu
découvrir
dans
l'arsenal d'Escobar et qu'aujourd'hui
encore,
ils
luttent, avec
tant
d'acharnement et avec
les
mêmes
armes, pour le
rétablissement
d'un
régime
maudit par
l'histoire,
mais
qui
les ferait rentrer
dans
la
plénitude
de leurs
privilèges
et des odieux
abus
dont ils vivaient jadis, au risque, non-seulement
d'entraver le
relèvement
de la France, si noblement
et si patriotiquement conduit par
j'illustre président
qu'elle
s'est
choisi,
mais de la
rejeter
pour jamais
dans
l'abîme
ouvert par la bonapartaille et que les
monarchiens
associés s'évertuent
aujourd'hui à ren¬
dre plus profond encore.
Voudraient-ils
nous donner comme patriotiques
les
démarches
faites par leurs
émissaires
et à plu-
sieur reprises,
auprès
du prince chancelier-prussien,
pour l'amener à
considérer
le gouvernement
républi¬
cain
comme n'offrant aucune
sécurité,aucune
garan¬
tie pour l'acquit de notre
dette
;
mendiant, par ces
perfides insinuations, un redoublement de rigueurs
envers notre pauvre
chère
patrie, sinon un retour
offensif
et
l'immixtion
du vainqueur
dans
nos ques¬
tions constitutionnelles et gouvernementales. Et, tout
récemment
encore,
est-ce
que leur empressement à
répandre
la
fausse
nouvelle qu'une clause
secrète
du traité
de Francfort garantissait,
jusqu'à libéra¬
tion complète,
l'existence telle quelle de
l'assemblée
versaillaise,
peut
être considéré
comme un
acte
de
patriotisme
?
Car si leurs feuilles
inspirées
ont fait
éclore
et
propagé
ce canard
outrageant
pour la
France,
c'est
qu'il
fait partie de leurs
désirs
intimes
et que ce
n'est
pas là la seule
velléité anti-française
qui
s'agite
dans
leur cerveau.
Non,
non! qu'ils ne parlent pas de patriotisme,
pas plus
dans
le
passé
que
dans
le
présent
;
cette
haute
et sainte
qualité
ne saurait
être renvendiquée
pur
eux.AuraK on conservé
quelque doute
à
cet
égard,
que leur conduite
présente désillerait
tous
les yeux.
Aussi
nous n'insisterons pas et nous terminerons en
leur
déclarant
que leurs efforts demeureront fatale¬
ment impuissants,
lanl
qu'une nouvelle invasion ne
viendra
pas fondre sur le pays, et
qu'ils
ont
manqué
une excellente occasion de
succès qui
leur
était
ce¬
pendant
offerte par la providence, en ne colloquant
pas l'enfant
du
miracle
dans
les
bagages
de
Bismark
et en
n'obtenant
pas dece magnanimevainqueurqu'il
nous impose, comme
première
condition de
paix,
la
royauté
chambordindonne ; car, depuis
bientôt
un
siècle, il
n'est
plus que cettepatriotique
manièrede
faire
refleurir,
pour
un
matin,
la couronne des lys
sur
le
front meurtri de la France.
Un
acquittement
instruetif.
Nous
donnions
dans
notre dernier
numéro
la nou¬
velle
de l'acquittement des citoyens
prévenus
du
délit
de
Société secrète,
ponr avoir fait partie de
VAl¬
liance
républicaine
de Saint-Etienne. La
société
de
la
rue
Grolée,
à
Lyon,
était
la
première
alliance
¬
publicaine
qu'on ait poursuivie;
l'Alliance stépha-
noise
était
la
deuxième. Espérons qu'il
n'y en aura
pas de
troisième!
A
Lyon,
la
prévention
de
société
secrète écartée,
le tribunal correctionnel avait retenu
celle
d'association
illicite;
à Saint Etienne, l'acquit¬
tement
a été complet,
il
a
porté
à la fois sur la
pré¬
vention
de
société secrète
et sur celle d'association
illicite
: si bien que la poursuite, qui n'avait
éprouvé
qu'un
demi-échec
à
Lyon,
en a
éprouvé
un tout en¬
tier à Saint Etienne. Et ce
n'était
que justice!
L'Alliance
républicaine stéphanoise
, cemrae celle
de
Lyon,
s'était manifestée
publiquement de
mille
manières
diverses, et notamment par des affiches,
des
réunions
publiques, des
écrits
dans
les jour¬
naux.
Elle
avait fait imprimer et publier son pro¬
gramme; son but
n'était
autre
que l'affermissement
de la
République,
et son
principal
moyen d'action
consistait
dans
la propagande
électorale.
Comme la
société
lyonnaise, elle avait donc un
caractère
avoué;
comme
elle,
il
était
impossible qu'on la¬
clarât société secrèle.
Ce qui la distinguait plus par¬
ticulièrement
de son
aînée,
c'est
qu'elle comptait
dans
son sein les hommes qui, au moment de sa
fondation,
étaient revêtus
des principales fonctions
publiques
dans
le
département
de la
Loire,
M.
Ber-
tholon,
le
préfet républicain
d'alors, à leur
tête.
Or,
c'est
au
préfet qu'il
appartient d'autoriser les asso¬
ciations
de plus de vingt personnes : son concours
à
la
création
de
celle-ci était
donc la plus certaine et
la
meilleure de
toutes
les autorisations. D'où l'on
voit qu'il
s'agissait non seulement
d'une
société
avouée
au grand jour.mais encore
d'une
société très-
certainement
autorisée, ainsi
que vient de le
procla¬
mer le tribunal
compétent.
r
Comment
alors expliquer les poursuites?
Elles
ont,
hélas !
une de ces explications aux¬
quelles il faut si souvent recourir pour
pénétrer
les
motifs
des
actes
de certains de nos administrateurs
sous ce
régime
saugrenu qui a nom
«
la
République
sans
les
républicains
!
»
M.
Ducros, le
préfet
de la
République
dans
la
Loire,
est le Jacques de Tracy
de ce
département;
il est connu de
tous
comme
monarchiste et comme
clérical. Eh
bien
!
c'est
lui,
M.
Ducros, ce
n'est
pas
l'autorité
judiciaire,
c'est
lui
qui a pris
l'initiative
des poursuites
1
Invoquant
l'article
10 du code d'instruction
criminelle,
il a
rendu, le 8 octobre 1871, un
arrêté
par lequel il
ordonnait,
d'une
façon générale,
que « des perqui¬
sitions
seraient faites à Saint-Etienne à l'effet de
rechercher la situation de l'association dite :
l'Alliance
républicaine.
» II y aurait bien à dire, si
l'on
voulait, sur ce premier
acte
de l'instruction,
sur cet ordre de perquisition
donné
sans
spécifica¬
tion
de personnes et qui, par la
généralité
de ses
termes,
menaçait
à la fois de visites domiciliaires
tous
les
habitants
d'une
grande
cité
de cent
dix mille
âmes ! Mais
nous ne voulons pas
entrer
dans
les
détails.
Nous nous bornerons à ajouter que
l'Alliance
comptait
600
ou 700 membres ; qu'on n'en a pour¬
suivi
que
quarante
(les citoyens les plus influents du
parti
républicain
à Saint-Etienne)
;
que
dans
ce nom¬
bre de
quarante
prévenus
aujourd'hui
quarante
acquittés -
entrent
les
cinq
conseillers
généraux
qui
font le plus d'opposition à
M.
Ducros, la plupart
des membres du
conseil
municipal
;de Saint-Etienne
qu'il
a fait dissoudre et les principaux membres de
l'administration
départementale
qui a
précédé
la
sienne. : iV
Pendant plus d'un an (du 8 octobre 4871,
date
de
l'arrêté sus-indiqué,
au 14 octobre 4872, jour du
jugement), ces
honnêtes
citoyens ont été sous la
menace de peines qui pouvaient
s'élever jusqu'à
quatre
ans de prison, 1,000 francs
d'amende
et dix
ans de
privation
des droits civiques l
(loi
du
28 juillet
4848). Et pour comble, à l'audience, on a
essayé
de les assimiler aux assassins du
préfet
de
l'Espée
!
Leur
acquittement en
masse
est une
première
réponse
aux calomnies et aux poursuites
sans
fon*
dément
dont ils ont été l'objet.
Mais
ce
n'est
pas
assez. Des poursuites de ce genre, qui paraissent
s'attaquer
à tout un parti
dans
un
département,
sont une immense faute politique, quand elles ne
sont pas
fondées.
Les de Tracy ou les Ducros qui
les provoquent sont bien
loin
de contribuer à
l'œu¬
vre d'apaisement que dit poursuivre le gouverne¬
ment de
M.
Thiers. Ce
n'est
plus seulement
sans
les
Républicains,
c'est
contre
les
Républicains
qu'ils
paraissent
entendre
la
République
I
j
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