Siganus luridus (Rüppell, 1829) Océan Indien, mer Rouge

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Siganus
luridus (Rüppell, 1829)
Océan Indien, mer Rouge, Méditerranée
Poisson-lapin à queue tronquée, Poissons osseux nageant près du fond
A la suite de la découverte, la semaine passée, de l’espèce dite «poisson-lapin» au
niveau des côtes Algériennes (à l’est et à l’ouest) les Directions de la Pêche et des
Ressources halieutiques (DPRH) des wilayas concernées (El-Tarf, Chlef) ont mis en
garde contre le danger extrême que présente la consommation de ce poisson, dont la
chair constitue un risque de toxine mortelle.
Ce poisson ne doit pas être consommé car il contient du venin au niveau de sa queue,
de sa bouche, de son dos ainsi que dans ses intestins, dont une journée suffira à
provoquer la mort à la personne qui le consomme, a indiqué le directeur de la DPRH.
Selon la DPRH, ce poisson herbivore de 22 cm, apparu récemment près de nos côtes,
est également un envahisseur particulièrement redoutable, tant par son aptitude à se
multiplier très rapidement tout en menaçant les végétaux, notamment les précieux
herbiers de posidonie et les algues brunes.
A titre de rappel, le poisson lapin, de couleur brune, est originaire des eaux chaudes,
notamment de la mer Rouge et de l’océan Indien, et sa présence dans les eaux de la
Méditerranée pourrait s’expliquer, par «les changements climatiques et le
réchauffement des mers et océans relevés ces dernières années».
Poisson lapin à queue tronquée, sigan sombre, cordonnier grosse tête (île
Maurice), maguertie du large (La Réunion)
Dusky spinefoot, squaretail rabbitfish (GB), Pesce coniglio (I), Sigano nebuloso
(E), Dunkler Kaninchenfisch (D)
· Clef d'identification
Corps en forme de fuseau fortement comprimé latéralement et très élevé
Arrière du corps un peu lus rectangulaire Queue à bord droit Tête assez petite
Robe très variable
· Distribution
Siganus luridus est présent dans l'océan Indien : il est observé à La Réunion et
à l'île Maurice, jusqu'au Mozambique. Il est présent aussi en mer Rouge, et
c'est un immigré lessepsien* récent en Méditerranée occidentale.
· Biotope
Dans son secteur géographique d'origine, on observe ce poisson en eaux peu
profondes, généralement de 10 à 20 m de profondeur au maximum. Sur les
côtes d'Israël et du Liban (d'après M. Bariche) on le pêche toutefois jusqu'à 40
m
et
il
est
le
plus
abondant
vers
15
à
20
m.
Il nage très près du fond, là où les herbiers et les algues abondent. Pour la
même raison, on le voit surtout dans les milieux rocheux, plutôt qu'à proximité
des zones principalement coralliennes. Il fréquente également les zones de
sable compacté parsemées de débris solides : roches et madréporaires.
· Description
Le poisson-lapin à queue tronquée possède un corps en forme de fuseau,
fortement comprimé latéralement et très élevé. Sa taille est en moyenne
de 20 cm, mais les plus grands individus atteignent 30 cm. Ses écailles sont
minuscules et sa ligne latérale* est assez arquée. Les nageoires dorsale et
anale sont presque symétriques et donnent à l'arrière du corps une allure
un peu plus rectangulaire. Le plus souvent la dorsale, longue, est plaquée
contre le corps. La nageoire anale possède sept épines, ce qui ne se voit pas
chez les autres familles de poissons. Comme son nom l'indique, il possède
une queue terminée par un bord rectiligne, comme si elle avait été coupée
aux
ciseaux.
Elle
peut
être
parfois faiblement
convexe.
La tête est petite, et la bouche, bordée de replis labiaux* charnus, est
réduite et orientée vers le bas. Cette bouche est munie de petites dents en
forme d'incisives (incisiformes). Entre les yeux une bande sombre horizontale
peut être visible. La narine antérieure est munie d'une petite excroissance
dermique
aplatie.
La robe de ce poisson-lapin ne montre pas de caractéristiques très marquées,
et elle peut être très variable selon ses humeurs et les moments de la journée,
ce qui rend son identification délicate en présence d'espèces proches. Cette
robe
peut
sembler uniforme,
couleur jaune, brun
pâle ou
de
bronze, ou plus claire, argentée, avec des rayures horizontales fines et
irrégulières, alternant le sombre et le clair, la tête alors présente une partie
supérieure plus sombre. La nuit, ainsi qu'en situation de stress, elle peut
montrer des marbrures ou des rayures plus larges.
· Espèces ressemblantes
Dans l'océan Indien, en mer Rouge comme en Méditerranée Siganus
luridus risque d'être confondu avec Siganus rivulatus, le poisson-lapin à ventre
strié. Ce dernier possède une silhouette plus allongée, et une robe qui montre
le plus souvent sur le ventre des stries longitudinales jaunes ou orangées. En
général cette robe est plus claire que celle de Siganus luridus. La queue
de Siganus rivulatus présente des stries verticales sombres, plus ou moins
visibles, et elle se termine de manière échancrée.
En Méditerranée, il peut être éventuellement confondu avec la saupe (Sarpa
salpa), mais celle-ci a une robe plus argentée, avec une douzaine de lignes
jaune vif, ses nageoires dorsale et anale sont moins développées et prolongent
sa silhouette en fuseau.
· Autres noms scientifiques parfois utilisés, mais non valides
Amphacanthus luridus Rüppell, 1829
Classification:
Termes scientifiques
Termes en français
(international)
Embranchement
Sousembranchement
Chordata
Chordés
Descriptif/ caractéristiques
succinctes du groupe
Animaux à l’organisation complexe
définie par 3 caractères originaux :
tube
nerveux
dorsal,
chorde
dorsale, et tube digestif ventral. Il
existe 3 grands groupes de Chordés
: les Tuniciers, les Céphalocordés et
les Vertébrés.
Chordés possédant une colonne
vertébrale et un crâne qui contient
la partie antérieure du système
nerveux.
Vertebrata
Vertébrés
Super-classe
Osteichthyes
Ostéichthyens
Classe
Actinopterygii
Actinoptérygiens
Ossification
du
crâne
ou
du
squelette tout entier. Poissons
épineux ou à nageoires rayonnées.
Neopterygii Teleostei
Néoptérygiens
Téléostéens
Poissons
à
arêtes
osseuses,
présence d’un opercule, écailles
minces et imbriquées.
Sous-classe
Super-ordre
Ordre
Sous-ordre
Famille
Acanthopterygii
Acanthoptérygiens
Perciformes
Perciformes
Acanthuroidei
Acanthuroïdes
Siganidae
Siganidés
Genre
Siganus
Espèce
luridus
Vertébrés à squelette osseux.
Rayons épineux aux nageoires,
écailles cycloïdes ou cténoïdes,
présence d'une vessie gazeuse et
pelviennes
thoraciques
ou
jugulaires,
sans
être
systématiquement présents, sont
des
caractères
que
l'on
ne
rencontre
que
chez
les
Acanthoptérygiens.
Nageoires
rapprochées
pectorales.
pelviennes
très
des
nageoires
Poissons-chirurgiens.
Origine du nom français:
"Poisson-lapin" : à cause de ses gros yeux proches de son front busqué, et de sa petite
bouche très mobile, ce qui lui donne un profil évoquant celui du mammifère à grandes
oreilles.
"à queue tronquée" : car sa queue, contrairement à celles d'espèces proches, se
termine de manière très droite et semble donc avoir été coupée de manière abrupte.
Origine du nom scientifique:
Siganus est la latinisation du nom arabe qui est donné sur les bords de la mer Rouge
aux poissons-lapins.
luridus, directement repris du latin, et qui veut dire : jaunâtre, brun pâle, livide et par
extension blême, plombé voire sale, en raison de la couleur de la robe de ce poisson.
Alimentation:
Siganus luridus se nourrit d'une large variété d'algues benthiques. A l'occasion, il peut
consommer involontairement les petits invertébrés qui leur sont associés. Du sable peut
aussi être ingéré, il interviendrait dans la digestion.
Des études menées en Méditerranée orientale (Bariche) montrent que le poisson-lapin à
queue tronquée a beaucoup modifié son régime alimentaire pour s'adapter aux conditions
locales, bien différentes de celles du domaine indopacifique. Il semble se nourrir
préférentiellement
à
partir
des
algues
les
plus
communes
comme Halopteris spp, Padinaspp, Sphacelaria spp, Polysiphonia spp, Ulva spp,
et
Sargassum spp.. Il peut aussi consommer parfois Caulerpa racemosaqui est une espèce
introduite d'Australie et toxique.
Reproduction – Multiplication:
En mer Rouge comme en Méditerranée orientale la période de reproduction commence en
mai, elle se termine en août en mer Rouge, un mois avant en Méditerranée. La
fécondation est externe. Les œufs tombent sur le fond, la ponte est donc de type
démersale*,
et
éclosent
26
à
32
heures
plus
tard.
Les larves vivent trois jours sous la surface, se nourrissent de phytoplancton* et de
zooplancton*,
avant
de
rejoindre
le
Les juvéniles peuvent se rassembler en bancs considérables dans des baies abritées.
fond.
Vie associée:
Partout où on les rencontre, les poissons-lapins à queue tronquée rejoignent souvent des
poissons d'autres espèces pour former des bancs mélangés. En Tunisie, on les a vus en
compagnie de saupes.
Divers biologie:
Les
Siganidés
possèdent
à
leurs
nageoires
un
nombre
d'épines
inhabituel
:
- alors que la plupart des autres poissons en ont 3 au maximum à la nageoire anale, ils
en possèdent 7.
- les autres poissons ont une épine uniquement au bord antérieur de la nageoire
pelvienne, ils ont une épine également au bord postérieur.
Les épines de ces nageoires sont venimeuses, en relation chacune avec deux glandes à
venin.
Leur
rôle
est
essentiellement
défensif.
Lorsqu'il se sent face à un prédateur potentiel, il écarte ses nageoires et dresse ses
rayons, il devient alors une "pelote d'épingles" venimeuses.
Les poissons-lapins à queue tronquée évoluent dans le domaine indopacifique en petits
bancs d'une dizaine d'individus en général. On peut voir parfois des individus solitaires ou
en
petits
groupes
de
3
ou
4
individus.
En Méditerranée orientale, ils ont été observés (Francour) en bancs très importants : plus
de 5 000 individus dans un seul banc sur les côtes turques en août 2008 !
Informations complémentaires:
Les blessures causées à l'Homme par les épines à venin sont très douloureuses, mais la
douleur est normalement passagère et sans conséquence grave. Le Professeur Quignard,
ichthyologue, s'est piqué sur les rayons venimeux d'un poisson pourtant à demi-mort et a
ressenti une douleur qui a persisté plusieurs heures.
La Méditerranée ne possède que peu d’espèces d’animaux herbivores. Ce terme est
utilisé normalement pour désigner les animaux qui consomment les herbes au sens strict;
on peut y inclure les posidonies, grandes herbes marines, et par extension on y inclut
aussi les algues, qui n'ont qu'une parenté très lointaine avec les herbes! On compte
principalement parmi ces herbivores l’oursin violet (Paracentrotus lividus) et la saupe
(Sarpa salpa). De ce fait, un bon nombre d’algues méditerranéennes, au cours de leur
évolution, n’ont pas mis en place de stratégies de défense chimique. Ces défenses ont
pour but de les rendre toxiques, comme on peut le voir chez certaines espèces tropicales,
comme les caulerpes (Caulerpa spp.) qui ont dû apprendre à se défendre contre les
herbivores de leur milieu de vie. Une arrivée soudaine d’espèces herbivores voraces
pourrait donc, aux dires de certains scientifiques, avoir des conséquences redoutables
dans un milieu qui n’en comportait que peu. D'autres sont moins alarmistes, espérons
qu'ils ont raison.
Durant le vingtième siècle, par le canal de Suez, sont arrivées en Méditerranée deux
espèces de Siganidés.
En 1927 le poisson-lapin à ventre strié (Siganus rivulatus) arrive le premier en
Méditerranée. En 2000 il est aperçu en mer Adriatique.
Le poisson-lapin à queue tronquée (Siganus luridus) est arrivé à partir de 1956 sur les
côtes méditerranéennes d’Israël. En 2005 cette espèce est observée en Sicile et, en été
2008, deux individus sont pêchés près de Marseille, dans le Parc Marin de la Côte Bleue.
Ces poissons, furent à cette époque signalés sur le Forum de DORIS. L'un d'eux a vécu
près d'un an dans l'aquarium des locaux du Parc Marin de la Côte Bleue.
Ces deux poissons pêchés près de Marseille sont des signalements très isolés. Deux
hypothèses ont été retenues (Daniel B. et al, 2009) pour leur arrivée dans ce secteur
géographique.
Premièrement : un transport par les eaux de ballast d'un bateau : Marseille est un port
important.
Deuxièmement : un transport grâce aux courants marins (courant Ligure...) à partir
d'une
population
proche
connue
(Sicile,
Tunisie...)
ou
non.
Sur les côtes du Liban, des mesures d'abondance ont été effectuées (Bariche et al,
2004). 70 % des poissons observés sont des Siganidés. La répartition entre ces deux
espèces a été quantifiée : Siganus rivulatus : 72 %, Siganus luridus : 8 %. De ce fait les
populations de saupes sont inférieures à 1 %.
Les Siganidés sont de redoutables concurrents pour les saupes car le recrutement* de
leurs larves est bien meilleur, leur croissance est plus rapide, leur maturité sexuelle est
précoce, et leur fécondité plus importante !
Fiche N° 2561
Siganus luridus
0 - En Tunisie
Deux Siganus luridus étaient en compagnie de saupes.
siganus_luridus_fb1r.jpg
BRUN François
Sud Tunisie, 5 m
05/12/2009
10 - En Egypte
Presque sur le fond, balloté par la houle comme l'algue à côté de lui.
siganus_luridus_cw3r.jpg
WACQUANT Claude
Egypte, Dahab, 3 m
08/10/2008
30 - Intimidation
Pour intimider un éventuel agresseur le poisson-lapin dresse les rayons de ses
nageoires. Certains parmi ceux-ci sont venimeux.
siganus_luridus_fb_1.jpg
BRUN François
Sud Tunisie, 5 m
05/12/2009
40 - Robe de nuit
Les poissons-lapins à queue tronquée passent la nuit sur le fond, et arborent une
robe marbrée.
siganus_luridus_cw2.jpg
WACQUANT Claude
Turquie, Kas, 10 m, de nuit
03/10/2007
50 - En Méditerranée orientale
Un poisson-lapin à queue tronquée en compagnie d’un poisson-perroquet
(Sparisoma cretense), d’un serran écriture (Serranus scriba) et d’une castagnole
(Chromis chromis).
siganus_luridus_cw1.jpg
WACQUANT Claude
Turquie, Kas, 5 m
02/10/2007
60 - Premier en Méditerranée française
Voici un des deux premiers poissons-lapins à queue tronquée pêchés sur les côtes
françaises de Méditerranée.
siganus_luridus_bd1.jpg
DANIEL Boris
Carry-le-Rouet, en aquarium
14/07/2008
70 - Tête de lapin
En aquarium il a été possible de tirer le portrait de ce poisson farouche.
On remarque la bouche et le front évoquant ceux d'un lapin, ainsi que la narine
antérieure qui est munie d'une petite excroissance dermique aplatie.
siganus_luridus_ec1.jpg
CHARBONNEL Eric
Carry-le-Rouet, en aquarium
11/07/2008
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