CANEVAS Care Economy 26 octobre 2009

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Conférence Femmes de la FEPS
CANEVAS
Care Economy 26 octobre 2009
Care Economy dans la perspective de l’Église : Jacqueline Lavoyer-Bünzli
Qui parle de quoi ?
Invitée à réfléchir aux enjeux de la « Care Economy » en lien avec l’Eglise, j’ai été confrontée d’emblée à deux difficultés :
1. D’abod, à la question : Qui peut valablement parler, dans quelque domaine que ce soit, au nom de l’Eglise ou des
Eglises ? En ce qui me concerne, je ne peux évidemment pas m’exprimer au nom de l’Eglise au sens spirituel de
corps du Christ ou d’Eglise universelle. Ni au nom des Eglises chrétiennes de Suisse, dont les réalités sont
diverses. Ni au nom des Eglises protestantes, dont les contextes respectifs sont très différents d’un canton à
l’autre. Je ne peux pas davantage prétendre donner le point de vue de l’Eglise réformée évangélique du canton de
Neuchâtel, puisque je ne suis plus conseillère synodale depuis fin juillet – donc plus sa représentante « officielle ».
De plus, le regard que l’on a depuis cette fonction n’est pas forcément partagé par les autres acteurs, comes les
paroisses ou les centres cantonaux. Donc, je vous parle en tant que chrétienne engagée que son parcours a
conduit à bien connaître l’Eglise – au sens à la fois de cadre institutionnel et de communauté vécue - dont elle est
membre.
2. Ensuite, au fait que les notions de « care » et de « care economy » sont nouvelles. C’est une thématique
émergente, donc mouvante et encore largement ignorée. En faisant quelques recherches pour me préparer à cette
journée, j’ai constaté que de manière générale les termes utilisés sont encore assez fluctuants : économie
informelle, économie parallèle, économie sous-terraine.. Il faut donc veiller à bien situer les contours de la réflexion
- notamment pour la part de « care » assurée bénévolement – et à préciser les définitions au gré des discussions,
comme l’a fait Brigitte Schnegg en introduction à son exposé.
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Ceci étant posé, je vais, malgré tout, essayer d’articuler « Care » et « Care Economy » avec « Eglise » dans ma
compréhension actuelle.
De quoi est-il question ?
1. Care
 En français, «(to) care » c’est prendre soin, porter une attention bienveillante, accompagner
 Dans l’Eglise, le « care » correspond à la diaconie, c’est-à-dire à l’engagement en faveur des laissés-pour-compte
qui fait partie intégrante de la mission essentielle de l’Eglise. Toutefois, la diaconie est plus large que le « care » au
sens où nous en parlons aujourd’hui, car elle englobe aussi d’autres activités que l’éducation et la prise en charge
des enfants, des personnes malades ou handicapées et des personnes âgées comme, par exemple, l’aumônerie
des prisons, l’aumônerie des rues, les services sociaux d’Eglise (CSP)etc.
 Mme Schnegg a souligné que le « care » est un besoin humain fondamental. Retournant cette cette idée, j’affirme
qu’en Eglise, l’attention portée aux plus faibles est un devoir incontournable. Il est à relever qu’au moment où
l’EREN a pris conscience de l’ampleur de ses difficultés financières (en 2005), elle a commencé par se demander
coment accomplir sa mission essentielle dans le contexte actuel. Elle a donc travaillé à rétablir son équilibre
financier, certes, mais en répartissant ses ressources en fonction de cette mission – et non des seules
contingences matérielles. « Témoigner en paroles et en actes », tel est le principe fondamental que le Synode a
adopté comme point de départ de ce processus appelé « Visions prospectives ».
 En Eglise, le « care » - au sens de diaconie - peut être formel, c’est-à-dire assuré par des professionnels (pasteurs,
diacrs, permanents laïcs) dans des services ou institutions spécialisées, ou informel, c’est-à-dire réalisé dans les
paroisses sous forme d’entraide de proximité.
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2. Care Economy
 La « Care Economy » étant une thématique émergente, force est de constater que l’Eglise s’est jusqu’ici montrée
peu concernée par ses enjeux sous l’angle économique et, en particulier, sous l’angle de la part assumée par les
femmes.
3. Rôle et responsabilité des Eglises
Les Eglises jouent actuellement plutôt un rôle secondaire/indirect dans ce secteur:
 Longtemps présentes dans le secteur au sens étroit (soins aux enfants, aux personnes malades ou âgées),
historiquement à l’origine de pratiquement toutes les institutions modernes (hôpitaux, homes/hospices, foyers pour
enfants, écoles, etc.), les Eglises s’en sont progressivement retirées parce que ces services ont été reconnus
d’intérêt public et repris par l’Etat. La diminution des ressources financières n’est donc pas la principale raison de
ce retrait, dû à l’évolution globale de la société occidentale. Par conséquent, seule l’existence des institutions
toujours sous la responsabilité de l’une ou l’autre Eglise (fondations ecclésiastiques, écoles confessionnelles, etc.)
peut être menacée par la crise.
 A ma connaissance, aujourd’hui, la présence directe des Eglises dans les domaines sanitaire et éducatif a surtout
pris la forme des diverses aumôneries, souvent œcuméniques, que leurs professionnels (pasteurs, diacres)
assurent dans des institutions « tierces » (hôpitaux physiques et psychiatriques, EMS, institutions spécialisées pour
enfants, etc.) Dans le canton de Neuchâtel, certaines de ces aumôneries sont partiellement subventionnées par
l’Etat, sur la base de conventions de partenariat avec les 3 Eglises reconnues. On cherche à étendre ce modèle à
l’ensemble des prestations d’intérêt général offertes par les Eglises, resp. à augmenter les participations
d’institutions publiques ou privées.
 Dans l’EREN, au niveau des paroisses, il existe quelques groupes de visiteurs/visiteuses, généralement formées et
encadrées par des professionnel-les, ainsi que qq projets novateurs dans le domaine de la diaconie de proximité
(groupe pour parents seuls, groupes pour endeuillés , projet d’offres spécifique pour familles avec jeunes enfants).
Ce type d’engagement est plutôt de l’ordre de l’appui psycho-social – mais avec cela, nous entrons déjà dans une
compréhension élargie du « care » et du rôle des Eglises en la matière...
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Les Eglises ont à réinterpréter, dans le contexte actuel, leur mission de toujours. L’essentiel de cette mission
est, d’une part, de diffuser la Bonne Nouvelle et, d’autre part, de se soucier des plus faibles = repérer les
« laissés-pour-compte » - discerner les nouveaux besoins sociaux et se donner les moyens de se solidariser d’y répondre


Come je l’ai déjà dit, les Eglises ne peuvent tout simplement pas renoncer à leur implication dans ce qui relève de
l’aide aux personnes fragilisées - même sous la contrainte financière !
Cependant, de nouvelles formes d’engagement diaconal demandent à être développées. Elles doivent prendre en
compte les enjeux sociaux actuels, notament ceux de la « care economy », tout en ravivant l’élan
« prophétique » des Eglises.
Voici quelques pistes concrètes:
 1ère piste : prendre conscience, reconnaître largement et explicitement les prestations non-rétribuées dont
bénéficient les Eglises elles-mêmes (cf. principes de la politique du bénévolat adoptée par le Synode de l’EREN). Il
s’agit de commencer par mettre en lumière – dans l’économie interne des Eglises – la part de ressources
informelles, notamment celle mses à disposition par les femmes, donc de réduire ainsi la « part d’ombre » dans
l’économie suisse
 2ème piste : valoriser, voire valider, les compétences offertes et acquises en Eglise, en les dissociant de la question
du salaire. Avec cette approche centrée sur ce qui est effectivement nécessaire, demandé, donné et reçu - et non
sur l’aspect monétaire - l’Eglise (ré)affirmerait sa spécificité, inviterait la société à un changement de perception et
contribuerait à faciliter les passages entre économie formelle et économie informelle, ce que l’on pourrait
considérer comme une sorte de nouveau paradigme.
 3ème piste : contribuer à la réflexion sur l’articulation « care » professionnelle – « care » bénévole à partir des
synergies entre services spécialisés et paroisses.
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 4ème piste : Repérer les nouveaux besoins diaconaux incl. « care » et proposer des pistes pour y répondre, en
particulier développer de nouvelles approches communautaires (c’est-à-dire situées entre le totalement
institutionnalisées et l’exclusivement privé), favorisant des lieux de « nouvelle sociabilité » et de soutien mutuel par exemple en encourageant les réseaux de jeunes parents, les groupes de partage pour personnes s’occupant
de proches âgés, etc. et en se faisant l’écho de leurs besoins et/ou revendications
L’Eglise est appelée à accomplir une mission divine, mais elle est aussi une organisation
humaine et un acteur social. Elle ne doit pas sous-estimer son impact, y compris en matière
de « care » et de genre. Cet impact passe par sa cohérence institutionnelle « interne », sa
créativité (inspiration !) et la clarté de son positionnement dans ses divers partenariats
avec la société civile.
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