20 janvier 2009
Carlos Leitao, Économiste en chef (514) 350-3000
Sébastien Lavoie, Économiste (514) 350-2931
Martine Bérubé, Coordonnatrice (514) 350-3006
L'inflation demeure la priorité
à la Banque du Canada
La Banque du Canada continue de suivre la « vague d'assouplissement des conditions monétaires mondiales » en ce début d'année.
Comme la Banque d'Angleterre et la Banque centrale européenne l'ont fait il y a quelques semaines, les membres du Conseil de direction
ont décidé de réduire le taux directeur de d'un demi-point de pourcentage. Le taux cible de financement à un jour se situe maintenant à
1,00 %. Il y a un peu plus d'un an, celui-ci s'établissait à 4,50 %. Détérioration de l'économie mondiale, crise financière qui frappe
l'économie, confiance ébranlée des ménages et entreprises, tout porte à croire que le taux directeur atteindra un plancher de 0,50 % d'ici la
fin avril.
Malgré la crise financière et la récession, la Banque du Canada tient mordicus à la pierre angulaire de sa politique monétaire : la poursuite
d'une cible de maîtrise de l'inflation. « Un taux d'inflation bas, stable et prévisible représente la meilleure contribution que la politique
monétaire puisse apporter à la croissance économique et la stabilité financière à long terme ». C'est en partie en raison de ce mandat clair,
net et précis que la Banque du Canada ne parle peut-être pas de sortir l'autre boîte à outils comme la Fed, qui s'est tournée depuis quelque
temps déjà vers des « mesures quantitatives ».
Or, les membres du Conseil de direction ont voulu nous rappeler quelques points au sujet du champ de bataille qu'est l'inflation.
Premièrement, la politique monétaire est menée de manière symétrique : l'inflation faible prévue en 2009 est aussi préoccupante que
l'inflation élevée de l'été dernier. Qui plus est, notre banque centrale est prête à tolérer une inflation totale qui descend sous zéro pendant
deux trimestres en raison de la volatilité des cours de l'essence. On se souviendra l'été dernier que l'inflation a grimpé momentanément au-
dessus de la limite supérieure de la fourchette cible (3 %) en raison de la flambée du prix du pétrole.
Si on tolère une inflation totale en territoire négatif à court terme, il en est tout autrement à long terme. La Banque du Canada nous dit que la
déflation n'est pas une option, bien qu'elle n'utilise pas ce terme explicitement (pour une institution qui cible explicitement l'inflation à 2 %, le
mot déflation est probablement plus tabou que le mot récession). Notre banque centrale se fait rassurante en se rapatriant sur les bons
vieux adages tels que « les attentes d'inflation sont fermement ancrées » et que l'inflation mesurée par l'indice de référence (qui exclut les
composantes volatiles comme l'essence) « toucherait un creux de 1,1 % au quatrième trimestre ». Autrement dit, la Banque du Canada ne
pense pas que l'ensemble des prix des biens et services va reculer cette année, ce qui serait nécessaire pour parler du monstre qu'est la
déflation. Elle va plus loin en prévoyant que l'inflation totale et l'inflation tendancielle retourneront vers les 2 % au premier semestre de 2011,
le tout engendré par un regain de vie de l'économie canadienne (croissance du PIB réel de 3,8 % en 2010 après un recul de 1,2 % en 2009).
Somme toute, il faut se rendre compte à l'évidence qu'une cible explicite d'inflation est un atout de première classe durant ces temps
économiques si difficiles. La Banque du Canada l'a à ses côtés, alors que la Fed aimerait en dire autant. Au tour de la politique fiscale
fédérale d'ajouter de l'eau au moulin la semaine prochaine.
Sébastien Lavoie, économiste