Kathleen Weil dans ses petits souliers

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Petits penchants eschatologiques chez
Philippe Couillard
KATHLEEN WEIL DANS SES PETITS SOULIERS
Coincée entre son chef et les « choix
personnels » des intégristes, sa liberté
d'expression se voit réduite à un
« risque personnel ».
Mal à l'aise dans ses petits souliers, la ministre Kathleen Weil
ne semble plus savoir sur quel pied danser. Le souvenir de
l'humiliation de Fatima Houde-Pépin aux mains du chef semble avoir
porté fruits : comme les autres membres du caucus libéral, elle a vite
appris que sa liberté d'expression se réduisait à un « risque personnel
». D'ailleurs, le chef a fini par mettre les points sur les « i » à
l'épineuse question des croyants qui pratiquent une version radicale
de leur religion : « l'intégrisme fait partie des choix personnels de
chacun ». Voilà une bien étrange théorie de la part du premier ministre
du Québec.
Apeurée, la ministre Kathleen Weil s'incline en disant qu'elle
accepterait de travailler « avec un intégriste dans son cabinet ». Puis,
inquiète de l'énormité de ce qu'elle vient de dire, elle nuance : « un
rigoriste religieux qui ne fait de mal à personne ». Voilà le genre de
sottises qui peuvent sortir de la bouche de quelqu'un au bord de la
panique. Bref, la ministre aime mieux passer pour sotte que d'oser
contredire son chef.
Philippe Couillard a donc mis les choses au clair : il n'hésitera
pas à sévir pour défendre les droits des intégristes, y compris ceux qui
« pratiquent une version radicale de leur religion ». Mais jusqu'où
soutiendra-t-il les serviteurs de Dieu dans leur délire spirituel ? N'y
a -t-il pas des limites à tout ? La « Loi de Dieu » aurait-elle préséance
sur l'autorité de la loi des hommes ? Comment interpréter l'étonnant
préambule de la Charte canadienne des droits et libertés qui proclame
la suprématie de Dieu : « Attendu que le Canada est fondé sur la
suprématie de Dieu et la primauté du droit » ? Ce préambule n'est-il
pas une censure idéologique au principe même de laïcité ? Alors,
examinons du côté de la Loi de Dieu.
Le Coran, ce Livre sacré que les intégristes qualifient de «
Vraie constitution du monde », est composé de 6,226 versets, dont au
moins quatre cents soulèvent de graves questionnements face à nos
lois criminelles, et au maintien de la paix... dans le monde ! Le Dieu,
auteur de ces versets, est sans doute le même Dieu dont la suprématie
a été placée au-dessus de nos lois par le Canada anglais en 1982. Dans
quelle mesure la suprématie de Dieu peut-elle exercer son empire sur
la loi des hommes ? Comment concilier ces versets avec les articles
318 et 319 du Code criminel qui proscrivent l'incitation à la haine et
au génocide, alors que Dieu paraît tellement obsédé par l'idée de
pourchasser, de piéger, de tuer et d'exterminer ses ennemis
irréductibles ?
Philippe Couillard, qui se proclame le protecteur des «
intégristes qui pratiquent une version radicale de leur religion », ne
risque-t-il pas d'attiser la foi ardente des dévots déterminés à verser
des flots de sang impur pour mieux se soumettre à la volonté de Dieu ?
Examinons quelques uns de ces versets où Dieu exhorte les croyants
à massacrer ses ennemis et, surtout, interrogeons-nous sur le sens des
responsabilités de notre premier ministre face à la montée d'une
violence idéologique qui peut surgir de partout et n'importe quand ?
Un examen de quelques uns des ces « versets de purification » est
d'autant important que les islamistes affichent leur ferme intention de
les appliquer tels qu'ils les trouvent dans les textes sacrés que sont le
Coran et la Sunna :
Sourate 9
Verset 5 : Capturez les polythéistes ; [les polythéistes visés sont les
chrétiens qui offensent Dieu en disant qu'il aurait eu une aventure
avec Marie d'où serait né un Fils, Jésus]
Assiégez-les ;
Dressez leur des embuscades ;
Et tuez-les tous !
Toutefois, s'ils se repentent ; [c. à d. s'ils cessent de blasphémer en
disant que Dieu a eu un Fils avec Marie]
S'ils font la prière;
S'ils paient la taxe légale; [due à ceux qui défendent les droits de Dieu]
Laissez-les en paix !
Sourate 9
Verset 14 : Faites leur la guerre afin qu'Allah les châtie de vos mains
et leur fasse honte.
Sourate 9
Verset 29 : Faites la guerre à ceux qui ne croient ni en Allah ni au Jour
dernier ;
Faites la guerre à ceux qui n'interdisent pas ce que Allah et le Prophète
ont interdit;
Faites la guerre à ceux qui ne professent pas la religion de la Vérité ;
Faites leur la guerre jusqu'à qu'ils paient la taxe légale, et qu'ils soient
enfin devenus humbles et soumis.
Sourate 9
Verset 73 : Ô Prophète !
Fais la guerre aux hypocrites et aux infidèles; [les hypocrites sont les
mauvais musulmans]
Traite-les avec rigueur ;
La géhenne est leur demeure !
Sourate 9
Verset 123 : Faites la guerre aux infidèles qui vivent dans votre
voisinage immédiat et soyez durs à leur égard ;
Sourate 2
Verset 217 : La tentation de l'idolâtrie est pire que le meurtre et le
carnage ! [sont idolâtres ceux qui, par exemple, font des
représentations symboliques de Dieu]
Sourate 2
Verset 244 : Appréhendez-les et tuez-les partout où vous le trouverez !
Allah vous donne une autorité pleine et entière sur eux.
Sourate 8
Verset 39 : Faites leur la guerre jusqu'à ce que la sédition soit anéantie
et que toute croyance ne soit que celle en Allah.
Sourate 8
Verset 55 : Il n'y a pas d'animal plus vil aux yeux d'Allah que les
infidèles qui s'obstinent à ne pas croire.
Sourate 47
Verset 4 : Ne soyez pas des lâches;
Ne demandez pas la paix quand vous avez la supériorité !
Allah est avec vous et ne réduira pas le mérite de vos actions.
Sourate 47
Verset 35 : Quand vous rencontrerez des infidèles, tuez-les jusqu'à en
faire un grand carnage !
Sourate 4
Verset 74 : Nous accordons une récompense sans limites à celui qui
combat sur le chemin de Dieu, qu'il soit tué ou qu'il soit vainqueur.
Ces versets, jamais abrogés, ont toujours force de loi. Ils
constituent la principale source d'inspiration des intégristes. Il y en a
quelques centaines comme ça au service d'un messianisme
eschatologique et guerrier. La propagande islamiste les exploite
abondamment pour inciter les jeunes, les déséquilibrés et les révoltés
à la haine, au meurtre, au génocide. C'est Dieu, dans sa colère, qui
exige l'extermination des impurs afin que son « Royaume advienne
sur la terre». Il s'exprime sans détours, à l'impératif, sur un ton
péremptoire, et, surtout, il ne souffle jamais un seul mot de mises en
accusation, de preuves, de procès équitables. Sa Justice doit être
prompte ! sévère ! implacable !
La volonté divine d'en finir avec les impurs est un appel à
l'apocalypse pour hâter la fin du monde. La plupart de ces quelques
quatre cents versets ne passeraient pas le test des articles 318 et 319
du Code criminel. Pourtant, au mépris du bon sens, Philippe Couillard
se proclame le défenseur de ces candidats à la justice divine, de ces «
intégristes qui pratiquent une version radicale de leur religion ». «
C'est un choix personnel ! » nous dit-il.
En ces temps de révolution islamique, les intégristes qui
revendiquent « une version radicale de leur religion » ont choisi le
monde entier comme théâtre de leurs opérations. Ils trouvent dans le
Coran et la Sunna l'inspiration idéologique dont ils ont besoin pour
justifier leur entreprise eschatologique et guerrière. Ils sont exaltés
par le goût du martyr et l'ivresse de la mort au point de prétendre
qu'aucun Vrai croyant ne devrait avoir peur de l'apocalypse
puisqu'elle annonce ̶ enfin ! ̶ le « Royaume de Dieu sur la terre ».
Alors on peut se demander qui, aujourd'hui, encourage, promeut et
finance ce fanatisme meurtrier, dénué de toute moralité et spiritualité.
Depuis plus d'une cinquantaine d'années, l'Arabie saoudite se
distingue, parmi les pays musulmans, par sa volonté de s'approprier
la direction politique de l'Islam dans le monde. Ainsi, sur le plan
externe, ce pays finance la prédication, le missionnariat, la création
d'institutions islamiques, l'enseignement de l'islam radical wahhabite,
la construction d'écoles et de mosquées, et ce, sans compter un
mécènat exemplaire au profit du terrorisme international. Bref,
partout où, dans le monde, l'argent peut faire une différence dans la
lutte du Bien contre le Mal, l'Arabie saoudite ne manque jamais
d'afficher sa puissance politique en restant à la hauteur de ses
obligations religieuses. D'ailleurs, en vertu de l'article 23 de la Loi
fondamentale du 1er mars 1992, l'appel à la propagation de la foi est
même devenu une obligation constitutionnelle.
Sur le plan interne, ce pays a mis en place un système
ambitieux de propagation de la foi consistant à accueillir et à prendre
en charge tout visiteur ou pèlerin venu y séjourner, ne serait-ce que
quelques jours. Personne n'est oublié et rien n'est laissé au hasard, de
sorte que des pèlerins rapportent régulièrement être sortis transformés
de leur odyssée spirituelle dans ce pays. Qui, par exemple, n'est pas
sorti de l'Arabie saoudite en exhibant fièrement une barbe qu'il n'avait
pas à son arrivée.
Pour ce qui est des visiteurs issus de la mécréance, ils sont pris
en charge par des prédicateurs salafistes formés au frais de l'État, de
sorte que la conversion d'un mécréant à la Vraie foi est célébrée
comme un haut fait, une victoire éclatante dans la lutte implacable du
Bien contre le Mal. Les Saoudiens tirent une grande vanité de ce
genre de conversions, d'abord parce qu'elles confirment la supériorité
morale de l'Islam sur l'Occident, et ensuite parce que « Dieu accorde
des récompenses sans limites à ceux qui combattent sur son chemin
».
Bref, l'Islam est sans conteste la religion du XXIième siècle. Il
est déjà bien implanté chez-nous, de sorte qu'il nous faut maintenant
essayer de mieux le comprendre. Au Québec, il constitue un
enrichissement inattendu à notre vieux projet ̶ multiculturel ̶ de
constituer, au sein d'un Canada uni, une province accueillante,
tolérante, moderne, progressiste, évoluée, ouverte d'esprit et, surtout,
ouverte aux idées les plus déroutantes. De cet Islam, promesse
d'innombrables débats sur la justice et la souffrance en ce bas monde,
on peut déjà tirer quelques traits distinctifs:
a) l'Islam est une allégeance, une communauté, un regard sans
compromis sur le Mal ;
b) l'Islam est porté par un projet messianiste, eschatologique et
guerrier ;
c) l'Islam est une entreprise de purification de l'humanité afin de
faire advenir le Royaume de Dieu sur la terre ;
d) l'Islam est en état de révolution perpétuelle ;
e) l'Islam est en guerre contre lui-même ;
f) l'Islam est en guerre contre tout le monde ;
g) l'Islam ne se résigne à la paix que lorsqu'il s'y voit contraint par
des dictateurs odieux et musclés.
Bref, le premier ministre du Québec est assurément très
ouvert d'esprit, mais il devrait avoir le bon sens de reconnaître qu'il
n'existe aucune frontière entre l'Islam radical et la notion
eschatologique de recourir à la violence pour séparer le Bien du
Mal.
Christian Néron
Membre du Barreau du Québec,
Constitutionnaliste,
Historien du droit et des institutions.
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