ECOLE NATIONALE VETERINAIRE D’ALFORT ANNEE 2003 UTILISATION DE LA VACCINATION EN ECOLOGIE EVOLUTIVE : APPLICATION A L’ETUDE DES INTERACTIONS HOTE-PARASITE, DES EFFETS MATERNELS ET DE L’IMMUNITE DU JEUNE CHEZ LA MOUETTE TRIDACTYLE (Rissa tridactyla) ET LE GOELAND MARIN (Larus marinus) THESE pour le DOCTORAT VETERINAIRE présentée et soutenue publiquement devant LA FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL le par Vincent STASZEWSKI er Né le 1 décembre 1978 à Ste Catherine-lez-Arras (Pas-de-Calais) JURY Président : M. ….. Professeur à la Faculté de Médecine de Créteil Membres Directeur : Pr. BOULOUIS Professeur, responsable du Département des Sciences Biologiques et Pharmaceutiques à l’ENVA Assesseur : Pr. COURREAU ; professeur au sein de l’UP Zootechnie Economie Rurale à l’ENVA Invité : Dr BOULINIER Docteur vétérinaire et Chercheur CNRS (CR1), Responsable de l'Equipe "Ecologie du Comportement et Biologie de la Conservation " au sein du Laboratoire d'Ecologie, UMR 7625, CNRS/ENS/UPMC REMERCIEMENTS A Monsieur le Professeur … Qu’il trouve ici l’expression de notre reconnaissance pour nous avoir fait l’honneur d’accepter la présidence du jury de notre thèse. A Messieurs les Professeurs Boulouis et Courreau Qu’ils veuillent bien trouver ici l’expression de notre déférente gratitude pour la célérité et l’application apportées à la relecture de ce travail. Au Docteur Boulinier Qu’il ait l’obligeance de trouver ici l’expression de notre profonde reconnaissance et de notre déférente gratitude pour le soin et l’implication personnelle qu’il a mis à nous guider et nous soutenir tout au long de ce travail de recherche. REMERCIEMENTS PERSONNELS L’exercice sans doute le plus difficile…et le passage sans doute le plus lu avec le résumé !! A ma famille Quand le bon chemin vous a été montré et que l’on vous a mis sur la bonne route, c’est plus facile de faire le bon choix à un carrefour. Merci Papa et Maman de m’avoir montré l’un des chemins à emprunter pour mener une vie heureuse…à moi de faire le reste !! C’est vrai que tu n’es peut-être pas toujours très facile à vivre…et moi non plus…Mais heureusement que la vie n’est pas un long fleuve tranquille !! Merci Anne pour les moments de complicité, ta disponibilité et l’attention avec laquelle tu as toujours suivi mon parcours. Le grand frère est paraît-il un exemple qui nous écrase…Mais rien de tout cela avec toi…Bien plus qu’un grand frère tu as toujours été le copain par excellence, prêt à faire toutes les bêtises possibles. Bien sûr j’avais quelques années de retard mais je ne m’en suis jamais aperçu grâce à ta jeunesse d’esprit ;o) Un membre récemment arrivé…mais qui a pris toute sa place dans la famille. Merci Karine pour le dynamisme, la bonne humeur que tu apportes dans la famille…et merci de rendre mon grand frère aussi heureux Merci Babczia de m’avoir montré, avec Dziadzia, la noblesse de l’amour du travail bien fait, le respect des autres et de m’avoir donné tant d’amour. Il y a tellement de choses encore que j’aurais aimé partager avec vous Dziadzia, Papi, Mamie, Tata Mauricette…mais j’espère que là où vous êtes, vous êtes heureux et que vous partagez mes joies A mes amis Il a déjà été difficile de savoir qui mettre dans la famille et qui mettre dans les amis, donc hors de question de hiérarchiser mes amis...Désolé pour cette mise en page un peu anarchique Je crois que ce que l’on est, on le doit pour une part majeure aux gens que l’on côtoie…je ne sais pas si le résultat est, ou deviendra, satisfaisant mais merci à tous d’avoir croisé ma route Sara, « Every little breeze carries a dream » disait un ami commun ;o)… merci pour tout ce que tu m’as apporté et RDV au lac des Chambres ; Jess, merci pour ta gentillesse Paix et bien !! Poutchpounette n°1 écoute bien ce que te racontent tes parents…je crois que leurs conseils sont bons à suivre !! C’est nul de vous avoir regroupé car j’ai une grande place pour chacun dans mes pensées mais merci à tout le groupe de clinique, Yoyo & Nath., Aline & Nico, Clara, Cat’, Sandy : Du pain d’épice aux séjours à la montagne ou en Normandie, en passant par des semaines cliniques dans une ambiance de déconne efficace ou encore les courses au trésor à Champi et les repas de Noël !! Il y a eu pas mal de choses partagées depuis les années de colocation avec Nouchki…merci pour tout Mathilde Quant à toi Nico, partant pour une prochaine séance de stat, sous une table, en chaussure de rando avec un baudrier ? Merci à tous les deux d’avoir toujours été là aux bons moments !! Amélie Mélo ou Docteur vive la montagne, le Tibet et la cuisine française Miss ondule ton corps sous la boule à facettes du BuddhaBar…Mais les deux aspects du personnage sont très attachants…Philippe, à quand le prochain match de rugby ? Mon petit JM…j’adore ton personnage de Commandant Cousteau Babacool…mais en plus derrière cela il y a quelqu’un de drôle et attachant Tu es l’archétype de la personne sur qui on peut compter…merci mille fois pour cela Anne-Laure Elvire, bon courage pour supporter Laurent ;o) Sérieusement, il fait parfois son chieur mais c’est vraiment quelqu’un de fiable…c’est agréable de savoir qu’on peut être aussi droit sans être borné Vive le chocolat, la tartiflette et le crumble (+/tiramisu et plutôt pas en même temps) merci Manu pour ta gentillesse, Moufdi pour ton sourire et ta bonne humeur Ne t’inquiète pas Fani, je suis sûr que la vie est bien plus comme dans Emilie J. qu’on ne croit…et puis à nous de la faire comme cela non ? Bon courage…à dans 8 ans pour le mariage !! Merci à la muse de la musique, à la déesse de la montagne et au dieu du sport sans qui la vie serait bien (trop) fade Arnaud, lampe sur le chemin et tous ceux qui gravitent autour d’Assises (Sophie, Manu, JP,…). J’ai fait un grand bond avec et un peu grâce à vous !! A Marie-B, Hélène, Sophie, Brigitte, Monique, mon petit chapitre et tous ceux dont j’ai croisé la route à Paris XII et à toute la CC d’Alfort Stéph., espèce de lâcheuse, dernière célibataire de la bande !!! N’oublie pas de travailler la technique aux échecs…et l’adéquation entre la couleur de tes maillots de bain et de tes yeux A tous les gens du DEA (notamment Anne, Natalia, JIHO, Arnaud, Thibault, Mélo…) merci pour les délires qui ont rendu cette année de Maud, merci de ton punch et de ton énergie si DEA aussi agréable communicative. A quand le prochain raid ? merci Stéphane : enfin quelqu’un avec des skis plus petits que les miens !! Aux trois mousquetaires de Jussieu…avec moi ça fait quatre…normal ; Jojo-l’hérétique, Julien monsieur stress et Sophie la reine des nuits parisiennes…et banonaises : je ne prendrais pas un tel plaisir à faire de la recherche si je ne savais pas que j’allais bosser dans une ambiance aussi sympa et avec des gens profondément gentils!! A vous, Céline H., Bertrand, Pauline et tous les autres vétos qui ont fait que les années passées dans l’école ont été si agréables Anne… tu as pas mal changé depuis que l’on se connaît…maintenant 14 ans !! et pas uniquement physiquement Seb, j’aurais pu sortir une grosse blague à deux francs…mais je préfère te dire Merci tout simplement Merci de votre amitié et de la confiance que vous me portez…Quand on a des amis comme vous, la vie ne peut réserver que de bonnes surprises A Toi Kévin et Emilie…vos routes s’éloignent un peu mais j’espère partager encore avec vous, ensemble ou séparément, des moments de complicité comme ceux que nous avons vécus pendant les 10 dernières années Merci aussi à ceux qui m’ont fait découvrir le monde de la recherche où des qualités comme la rigueur, l’ouverture d’esprit, la curiosité et l’écoute ne sont pas étouffées mais à la fois encouragées et développées. Merci notamment à Thierry, Karen et Julien :Thierry, merci pour ton aide à décrypter le monde de la recherche, tes conseils, tes orientations. Mais merci aussi pour ta gentillesse, ta disponibilité, tes encouragements : si le monde de la recherche me plaît autant c’est aussi grâce à l’ambiance que tu sais créer au sein de ton équipe.Thank you so much Karen for the time you spent sharing your clear and original point of view either in professional or non professional discussions!! Merci Thierry, Karen et Julien pour la patience avec laquelle vous m’avez formé aux techniques utilisées sur le terrain. Merci aussi pour toute l’aide que j’y ai reçue…et l’aide matérielle n’est pas la plus importante à mes yeux. C’est tout dire quand on sait l’investissement personnel que ces deux saisons de terrain ont requis pour certains !!! Merci Léa, Mme Chambot, Mme Jeanjean, Mylène et Emilie J., et aussi Elodie, Karin, Jon, Rob. Supporter des conditions matérielles et climatiques pas toujours faciles et une année 2003 mauvaise pour nos petits oiseaux n’aurait pas été aussi facile sans vous. Merci aussi à tous les enseignants qui ont compris qu’enseigner est autre chose que mettre le pied dans un stupide engrenage compétitif (Fantini, Tancrez, Douay, Hedel, Staszewski² et bien d’autres) Merci en particulier à Andy Gonzales et François Sarrazin de m’avoir transmis leur virus pour la recherche en écologie A tous ceux dont j’ai croisé la route au cours de mes stages et expériences professionnelles : pêcheurs des Comores ou de Norvège et boatmen de Madagascar, animaliers blacks de Chicago ou du CIT d’Evreux, SDF et personnel du SAMU social et de la Croix-Rouge, éleveurs de Picardie, du Perche ou de Bretagne, vétos d’un peu partout, chercheurs norvégiens, brésiliens, russes ou polonais, microbiologistes. Chacun d’entre vous m’a apporté et m’a permis d’apprendre un métier magnifique, qui contrairement à ce que certains croient, apporte bien plus que quelques chiffres sur un compte en banque. J’ai trouvé dans la formation au métier de vétérinaire une source de dynamisme, d’esprit d’initiative et d’autonomie, une formation qui entraîne à aborder les problèmes avec une approche « diagnostique » simple et pragmatique et, le plus souvent, efficace. Enfin, j’ai appris (ou plutôt commencé à apprendre) un métier pouvant être épanouissant à la fois intellectuellement, techniquement et humainement. Merci enfin à tous les animaux qui m’ont fait et me font aimer le métier de vétérinaire: Setif, Bricole, Flamme et Plume et les autres animaux de la maison, Rosalie et Tibère, Capi, Belle et Bobine, Don Juan Ypsos, les percherons du Perche, les Frisons et les chevaux en général, Thor et les autres macaques de Chicago, mes grosses bébêtes de Madagascar et des Comores avec lesquelles chaque rencontre est magique, mes petites mouettes de Vardø, les bouquetins, chamois, aigles et autres gypaètes de Samoëns. Bien sûr il y a l’Homme, le propriétaire, derrière l’animal quand on exerce en clientèle…mais le respect, l’affection et parfois l’admiration pour l’animal sont à la base de ma vocation pour ce métier…J’espère, avec mes petits moyens, pouvoir un peu partager cela et participer un peu à faire connaître et aimer ce monde fabuleux qu’est le monde animal. A scientist is a mimosa when he himself has made a mistake, and a roaring lion when he discovers a mistake of others. -- Albert Einstein, cité in Ehlers, Liebers Hertz. Les savants sont des gens, qui sur la route des choses inconnues, s'embourbent un peu plus loin que les autres. -- Alphonse Karr Enfin, comme le dit Nelson Mandela, « Alors que des enfants et des adolescents du monde entier sont capables de citer la boisson gazeuse ou la chaussure de course qu’ils préfèrent, comment ne pas être en mesure de garantir l’accès aux informations dont ils ont besoin pour rester en bonne santé et obtenir une éducation de base de qualité ? Dans un monde qui condamne si souvent l’apathie de ses jeunes, nous pouvons tendre la main aux millions d’adolescents impatients d’apporter des idées neuves et un enthousiasme débordant ». Le droit à l'éducation est un droit fondamental de l'homme. Il est nécessaire à l'exercice de tous les autres droits fondamentaux et au développement de la personnalité. J’ai eu la chance d’avoir accès à une éducation de qualité et je dédie cette thèse à Aude, Elinoam et tous les autres bouts d’choux à venir dans mon entourage. Puissent tous les enfants du monde avoir la chance d’avoir accès à des conditions de vie confortables et à un système éducatif permettant leur épanouissement. SOMMAIRE Introduction I La vaccination et son utilisation en écologie comportementale et évolutive I.a Trade-offs et coûts I.b Immunocompétence et sélection sexuelle I.c Ecologie et évolution de la dynamique de l’immunité Conclusion partielle II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune II.A Matériels et méthodes 1. Site d’étude 2. Modèles biologiques étudiés 3. Protocole expérimental 3.a Choix des modèles et contraintes éthiques 3.b Collecte des données 3.c Schémas vaccinaux 4. Analyses de laboratoire 4.a Extraction des anticorps du jaune d’œuf 4.b Dosage des anticorps anti-NDV 5. Analyses statistiques 5.a Influence de l’exposition à un parasite une année donnée sur le transfert dans les œufs d’Ac spécifiques l’année suivante 5.a.1 Influence de l’exposition sur le taux d’Ac après un an chez les mouettes 5.a.2 Relation entre les taux d’Ac de la mère et dans les œufs chez les mouettes 5.a.3 Transfert d’Ac spécifiques un an après exposition dans les œufs des goélands 5.a.4 Influence de la « qualité » des individus 6.a Interférence entre les Ac maternels et la mise en place de l’immunité du poussin chez la mouette tridactyle II.B Résultats II.C Discussion 1. Influence de l’exposition une année donnée sur le transfert d’Ac spécifiques dans les oeufs l’année suivante 2. Interférence entre transmission d’Ac maternels et mise en place de l’immunité du poussin Conclusion et perspectives de la seconde partie Conclusion générale 3 5 7 8 9 10 13 13 13 15 15 15 16 21 21 21 22 22 22 22 23 23 24 26 33 34 35 37 40 1 Références Bibliographiques Annexes Annexe 1 : Glossaire Annexe 2 : Tableau I. Etude en écologie impliquant l’exposition à un nouvel antigène et la production d’anticorps Annexe 3 : Tableau II. Sources de variabilité dans la réponse à la vaccination Annexe 4 : Encadré 1. Effets « collatéraux » potentiels des vaccins Annexe 5 : Encadré 2. Vaccination et évolution de la virulence Annexe 6 : Staszewski, V., Boulinier, T. sous presse. Vaccination: a way to address questions in behavioural and population ecology ? Trends parasitol.. 2 Introduction Les interactions hôte-parasite sont, à l’heure actuelle, un sujet important en écologie* comportementale et en écologie des populations. La réponse au parasitisme a des conséquences à l’échelle de l’individu mais aussi sur la dynamique des interactions hôteparasite, au même titre que d’autres caractères influençant la fitness* des individus. Dans ce contexte, la vaccination est de plus en plus utilisée pour étudier les coûts et les compromis (trade-offs*) associés à la réponse immunitaire de l’hôte au parasite. Par ailleurs, certaines expériences utilisant la vaccination apportent des informations sur les relations entre la résistance aux parasites et la sélection sexuelle ainsi que sur les conséquences de la variabilité des réponses immunitaires au sein des populations naturelles. Nous développerons, dans une première partie, ces problématiques dans un cadre général, puis nous montrerons comment nous avons utilisé la vaccination pour étudier les interactions hôte-parasite, les effets maternels et l’immunité du jeune chez la Mouette tridactyle (Rissa tridactyla) et le Goéland marin (Larus marinus). I La vaccination et son utilisation en écologie comportementale et évolutive Un parasite peut-être défini comme un organisme vivant sur ou au sein d’un autre organisme vivant (l’hôte) et tirant de celui-ci une partie ou la totalité de ses nutriments organiques, ceci ayant des conséquences négatives pour l’hôte (Combes 2001). Cette définition écologique inclut des pathogènes comme certains champignons, bactéries et virus qui se nourrissent à l’intérieur ou sur d’autres organismes vivants, ayant des conséquences négatives pour l’hôte. Ce type de parasites a été nommé microparasites par opposition aux macroparasites, de taille plus importante relativement à l’hôte. Cette définition diffère de la définition habituellement retenue en médecine vétérinaire, les macroparasites étant couramment appelés parasites. Par la suite, parasite sera utilisé selon le sens défini en écologie. Les parasites représentent une part importante de l’environnement biotique de la plupart des espèces et, vice versa, l’hôte constitue une part importante si ce n’est la totalité, de l’environnement biotique du parasite. Cela explique l’intérêt récent pour l’évolution et l’écologie des interactions hôte-parasite, les buts recherchés étant de (1) déterminer * Les mots en italique, suivis d’un astérisque, sont définis dans le glossaire placé en annexe. Les tableaux I et II, ainsi que les encadrés, sont placés en annexe. 3 I La vaccination et son utilisation en écologie comportementale et évolutive l’influence du parasitisme sur le comportement des individus (Combes 2001) et (2) comprendre l’évolution et la dynamique de populations naturelles (Grenfell et Dobson 1995, Schmid-Hempel et Ebert 2003, Hudson 2002). Ceci conduit à se poser plusieurs questions : quel est le coût de la réponse au parasite par rapport à l’investissement dans d’autres traits d’histoire de vie* ? Le parasitisme peut-il influencer les processus de sélection sexuelle ? Pourquoi le parasitisme est-il asymptomatique pour certains hôtes mais affecte certains autres ? L’abord de ces questions sous l’angle de l’écologie évolutive met en évidence l’importance de la variabilité génotypique et phénotypique dans les populations naturelles : le génotype de l’hôte affecte la susceptibilité au parasite (Sorci et al. 1997) et vice-versa ; de plus, ce sont les phénotypes des hôtes et des parasites qui sont impliqués dans les interactions (Agrawal 2001) : les effets de l’environnement sur le phénotype doivent donc être pris en compte. Résultant des interactions par définition négatives et souvent à long-terme entre hôtes et parasites, la sélection naturelle a entraîné la coévolution de l’hôte et du parasite (SchmidHempel et Ebert 2003). Il y a deux caractéristiques importantes des réactions des hôtes aux parasites : (1) les réponses sont plus ou moins spécifiques, (2) elles sont plus ou moins induites (Schmid-Hempel et Ebert 2003). La réponse immunitaire est l’une de ces réponses des hôtes aux parasites. Elle peut être innée (i.e. présente quel que soit l’environnement biotique des individus) ou acquise (i.e. activée uniquement en présence du parasite) (Frank 2002). Ainsi, la réponse immunitaire acquise (RIA) revêt un intérêt particulier en écologie évolutive (Zuk et Stoehr 2002). C’est un bon exemple illustrant comment une réponse induite permet de faire face à un environnement biotique variable (Frost 1999). De plus, la variabilité interindividuelle de la RIA peut être reliée à différents processus évolutifs et ses conséquences écologiques sont potentiellement très larges (Schmid-Hempel et Ebert 2003, Sheldon et Verhulst 1996, Norris et Evans 2000). La RIA est, par exemple, d’un grand intérêt pour les biologistes travaillant sur l’évolution de la plasticité phénotypique* en raison de son inductibilité (Frost 1999), de sa spécificité et, dans certains cas, de sa capacité à être transmise de la mère au jeune (Mousseau et Fox 1998, Gasparini et al. 2001, Moret et Schmid-Hempel 2001). Enfin, les mécanismes de la RIA sont complexes mais relativement bien connus grâce à des études médicales ou de biologie moléculaire (Germain 2001). La vaccination (immunisation active) est utilisée, dans la plupart des cas, pour protéger des individus contre un agent infectieux auquel ils risquent d’être exposés. L’immunisation 4 I La vaccination et son utilisation en écologie comportementale et évolutive active repose, entre autre, sur la réponse immunitaire à médiation humorale (avec production d’anticorps) stimulée par l’exposition à un antigène qui peut aussi bien être un microorganisme vivant atténué qu’un microorganisme mort ou encore d’autres substances ayant des propriétés antigéniques. De tels challenges immuns ne sont pas toujours utilisés pour la protection des individus mais aussi pour étudier les caractéristiques de leur réponse sérologique. La vaccination constitue un outil puissant pour répondre à des questions portant sur l’écologie évolutive des interactions hôte-parasite. Exposer expérimentalement un organisme à un antigène et contrôler le contexte de l’exposition (statistiquement et/ou expérimentalement) permet de répondre à diverses questions liées à l’aptitude à répondre à l’exposition au parasite. Cette approche peut être utilisée en populations naturelles pour étudier de nombreux aspects de l’écologie évolutive des maladies parasitaires (Grenfell et Dobson 1995). Nous nous attacherons à montrer comment l’immunisation active a été utilisée dans l’abord de diverses questions scientifiques et nous conclurons cette partie en soulignant les bénéfices qui pourraient être retirés en rapprochant l’immunologie de l’écologie évolutive des interactions hôte-parasites. Ce faisant, nous soulignerons la nécessité d’être prudent dans l’interprétation des résultats et présenterons des perspectives potentiellement intéressantes. Nous ne considèrerons pas ici la vaccination selon son but original de protection en médecine humaine et vétérinaire (Pastoret 1997), mais nous discuterons tout de même de l’utilisation des programmes de vaccination pour la compréhension de la dynamique des interactions hôte-parasite en populations naturelles. I. a Trade-offs et coûts La théorie des traits d’histoire de vie prédit que la variabilité interindividuelle dans l’expression d’un de ces traits, ici la réponse immunitaire, est fonction des stratégies d’allocation de ressources entre différents traits et de diverses contraintes (Stearns 1992). Selon de nombreuses études, la réponse immunitaire est coûteuse et l’on peut donc s’attendre à l’existence de trade-offs pouvant être mis en évidence (Sheldon et Verhulst 1996). Les ressources utilisées pour mettre en place une réponse immunitaire sont détournées d’autres activités coûteuses comme, par exemple la reproduction (Williams et al. 1999, Ilmonen et al. 2000, Råberg et al. 2000). Un individu faisant face à l’augmentation d’une activité coûteuse, comme l’élevage d’un nombre de descendants expérimentalement augmenté, pourrait avoir moins de ressources à investir dans la réponse immunitaire (Deerenberg et al. 1997, Nordling et al. 1998). Dans les deux cas, la vaccination a été utilisée pour mimer l’exposition à un pathogène qui entraînerait une réponse immunitaire spécifique (Norris et Evans 2000 ; voir 5 I La vaccination et son utilisation en écologie comportementale et évolutive Tableau I). Par exemple, des individus ont été exposés à un antigène nouveau, non pathogène ou à de “vrais” vaccins et de tels trade-offs ont été observés pour différentes espèces (Tableau I). La plupart des travaux récents concernant le rôle de l’immunologie dans la théorie des traits d’histoire de vie ont concerné la fonction immunitaire des oiseaux et les protocoles utilisés se sont inspirés d’études portant sur l’immunocompétence chez la volaille (par exemple, Emara et al. 2002). Des études récentes utilisant des oiseaux de populations naturelles ont étudié le coût de la production d’anticorps en mesurant les changements potentiels des taux métaboliques après l’exposition à un antigène (Svensson et al. 1998, Ots et al. 2001). Les réponses immunitaires sous différents niveaux de stress thermique ont aussi été comparées (Cichon et al. 2001). En résumé, ces études suggèrent que, au moins dans certaines conditions environnementales, il y a des coûts et des trade-offs associés à la mise en place d’une réponse immunitaire spécifique. Dans ce contexte, la vaccination semble être un outil puissant, si tant est qu’une interprétation prudente des résultats soit faite. Les individus varient dans leur réponse à différents antigènes et dans la manière dont ils répondent au même antigène. De plus, la production d’anticorps après une première exposition au parasite n’est qu’un des types de réponse parmi la variété des réponses immunitaires aux parasites. La vaccination reflète la complexité de la réponse « naturelle » aux parasites, à la fois redondante et complémentaire, dépendant de nombreux facteurs. Par exemple, la vaccination implique des cellules mémoire et à la fois les réponses à médiation humorale et cellulaire et des trade-offs potentiels entre ces réponses peuvent altérer les résultats (Schmid-Hempel et Ebert 2003 ; Encadré 1). La mise au point du protocole expérimental, avec des individus attribués aléatoirement aux groupes traités ou contrôle ainsi que le choix précautionneux de l’agent et du schéma vaccinal pourrait permettre de distinguer certains des phénomènes mis en jeu. A l’heure actuelle, peu d’études se sont penchées sur les interactions potentielles entre les traitements et les protocoles de vaccination utilisés. De plus, le choix de l’antigène, de la fréquence, du temps et du mode d’administration ainsi que de l’échantillonnage (Tableau II) peut être important. Ceci est à mettre en relation avec la difficulté d’attribuer un niveau d’immunocompétence à un individu et met en évidence un point important : les trade-offs peuvent exister à différentes échelles. Entretenir un système immunitaire fonctionnel n’a pas le même coût que répondre à un challenge immun particulier. Un article de Klasing (1998) souligne la nécessité de distinguer le faible coût énergétique de la production d’anticorps et le véritable coût d’une réponse immunitaire aiguë comprenant l’inflammation et d’autres composantes physiologiques d’une telle réponse. Enfin, l’hétérogénéité interindividuelle 6 I La vaccination et son utilisation en écologie comportementale et évolutive dans l’aptitude à investir dans différents traits va affecter les différents patrons (« patterns ») observés (Råberg et al. 2000, de Jong et van Nordwick 1992). I.b Immunocompétence et sélection sexuelle L’hétérogénéité interindividuelle va aussi affecter le choix du partenaire sexuel. Des études théoriques ou empiriques ont montré que les caractères sexuels secondaires mâles peuvent être porteurs d’une information sur l’aptitude à résister aux parasites et ce pour une grande variété d’espèces dimorphiques (Hamilton et Zuk 1983, Andersson 1994). Le niveau de résistance serait reflété par des caractères sexuels secondaires tels que des couleurs vives qui pourraient intervenir dans le choix du partenaire. Ceci serait le résultat d’un trade-off entre l’expression des caractères sexuels et la fonction immune (Frost 1999, Folstad et Karter 1992). Pour expliquer le lien entre le signal exprimé via les caractères sexuels secondaires (CSS) et la qualité des individus, Folstad and Karter (1992) ont proposé l’hypothèse de handicap (immunocompetence handicap hypothesis) qui postule qu’un facteur (par exemple, la testostérone) qui stimule la mise en place des CSS déprime d’autre part l’immunité. De nombreuses études testant les prédictions liant le choix des partenaires et la fonction immunitaire ont utilisé des protocoles de vaccination pour évaluer la compétence immunitaire des individus (Tableau I). Duffy et al. (2002) ont observé une relation positive entre la longueur des périodes de chant, un caractère impliqué dans le choix du partenaire chez l’étourneau Sturnus vulgaris, et la réponse immune à médiation humorale, évaluée suite à l’exposition à un nouvel antigène. Les expériences d’exposition à un antigène permettent de mieux évaluer l’aptitude individuelle à combattre un pathogène que l’évaluation du taux naturel de parasites, comme cela est pratiqué dans quelques études (Getty 2001). En effet, le taux de parasites va aussi refléter l’exposition passée aux parasites et pas nécessairement l’aptitude de l’individu à combattre les parasites. Certaines études montrent un effet potentiellement immunosuppresseur de la testostérone (Tableau I), mais les relations entre les systèmes neuroendocrine et immunitaire sont complexes. Ces systèmes interagissent via les cytokines ainsi que des voies neuronales et hormonales. Ils constituent un réseau de régulation finement contrôlé, bien loin du simple schéma action-réaction (Webster et al. 2002, Apanius 1998). Ceci doit être gardé à l’esprit lorsque l’on se penche sur des sujets liés à la sélection sexuelle ou à l’étude du stress (Encadré 1). La vaccination permet cependant d’aider à définir quelles composantes du 7 I La vaccination et son utilisation en écologie comportementale et évolutive système immunitaire sont stimulées (humorale ou cellulaire ; Tableau II) et à quelle échelle temporelle (chronique ou à court terme). La vaccination peut aussi être utilisée pour se pencher sur l’importance de la base génétique des phénomènes étudiés. Des lignées de poulets, Gallus domesticus, sélectionnés selon leur réponse immunitaire suite à l’injection de globules rouges de moutons (SRBC), ont montré, comme prédit, des différences au niveau des caractères sexuels secondaires (i. e. taille des ornements sexuels et niveau de testostérone, suggérant l’existence d’un trade-off entre l’immunocompétence et l’ornementation (Verhulst et al. 1999). La vaccination devrait aussi permettre de tester des hypothèses basiques et des prédictions en relation avec les hypothèses liant la résistance aux parasites et la sélection sexuelle comme l’existence d’une sensibilité au parasite héritable en populations naturelles (Sorci et al. 1997). I.c Ecologie et évolution de la dynamique de l’immunité Une caractéristique importante de la réponse immunitaire à médiation humorale, en relation avec son caractère induit et spécifique, est sa dynamique temporelle. Le niveau et les composantes de la réponse immunitaire à médiation humorale peuvent varier dans le temps et selon les individus. La cinétique de la réponse à différents parasites peut-elle être étudiée sous un angle évolutif ? En populations naturelles, les individus « manipulent »-ils leur risque d’exposition aux parasites dans l’optique de devenir immunisés contre les effets néfastes d’éventuelles ré-expositions (voir, par exemple, Møller et Erritzoe 2001) ? Les coûts et les avantages de telles stratégies peuvent être difficiles à déterminer. La transmission d’anticorps maternels de la mère au petit constitue un exemple pour lequel de telles stratégies seraient intéressantes à étudier (Gasparini et al. 2001, Heeb et al. 1998) : en quoi l’exposition de la mère aux antigènes peut-elle affecter le transfert d’antigènes ? Saino et al. (2002) ont montré que les femelles d’hirondelles de cheminée se reproduisant avec des mâles porteurs de plumes caudales allongées, ceci étant un caractère sexuel secondaire, transfèrent plus d’anticorps dans leurs oeufs contre un antigène auquel elles ont été exposées par vaccination. En revanche, les femelles de mâles à queue expérimentalement raccourTJ10.015 e2 1 s0r4 Tc0.0105 TD0.lle 8 I La vaccination et son utilisation en écologie comportementale et évolutive La dynamique immunitaire des individus va avoir des conséquences écologiques à l’échelle des populations. La plupart de ces conséquences sont bien connues car elles ont été incorporées depuis longtemps à des modèles de populations (par exemple modèles de type susceptible, exposé, infecté, résistant (SEIR) ) (Anderson et May 1991). L’étude des effets sur la dynamique des interactions hôte-parasite a bénéficié grandement des programmes de vaccination à large échelle. La comparaison des effets des programmes de vaccination sur la dynamique de la rougeole et de la coqueluche dans des villes du Royaume-Uni ont montré de forts effets spatiaux et non linéaires qui peuvent être interprétés comme des réponses spécifiques de chaque maladie au bruit dynamique (« dynamical noise ») : dans le cas de la rougeole, la dynamique devient irrégulière et non corrélée dans l’espace dans la période de vaccination massive tandis que le schéma inverse est observé avec la dynamique de la coqueluche qui devient plus régulière et mieux corrélée dans l’espace suite à la mise en place des programmes de vaccination (Rohani et al. 1999). Les conséquences évolutives de la vaccination ont été évaluées mais principalement en termes théoriques (Gandon et al. 2001). Or ces effets peuvent être très importants. Certains vaccins (par exemple contre l’hépatite B ou la poliomyélite) ne procurent pas une protection très importante contre la maladie relativement à d’autres. De tels vaccins partiellement efficaces (« imperfect vaccines »), utilisés à large échelle pourraient favoriser la sélection de parasites plus virulents, augmenter l’impact des infections et favoriser la sélection d’individus moins résistants au sein de la population (Gandon et al. 2001, Encadré 2). Conclusion partielle L’utilisation de la vaccination est utile dans l’abord de diverses questions d’écologie du comportement ou des populations. Il est clair que la réponse à médiation humorale est complexe et ne constitue que l’une des réponses des hôtes aux parasites. Ceci doit être gardé à l’esprit lors de la mise au point de protocoles d’expériences sur le terrain et lors de l’interprétation des résultats. Inversement, une approche sous l’angle de l’écologie évolutive peut être cruciale pour aborder des questions d’immunologie ou d’épidémiologie. Utiliser la vaccination, mis à part son objectif médical, dans des études en écologie devrait permettre de rapprocher écologie évolutive et épidémiologie (Gandon et al. 2001, Galvani 2003). Nous allons maintenant illustrer l’utilisation de la vaccination en écologie avec l’étude des interactions hôtes parasites, des effets maternels et de l’immunité du jeune chez la Mouette tridactyle et le Goéland marin. 9 10 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune « The complexity and interest of life history evolution arises because organisms have evolved so many different ways of combining (life history) traits to affect fitness ». Stephen Stearns (1992) résume ainsi le lien joignant les études d’écologie évolutive. Les traits d’histoire de vie sont liés par de nombreux trade-offs (compromis) se résumant à l’optimisation de la fitness de l’individu. Les ressources disponibles sont réparties entre les différents traits et ce qui est alloué à un trait ne l’est pas aux autres. Dans ce contexte, pour un individu, augmenter la qualité et la survie de sa descendance est un moyen d’augmenter sa fitness (au même titre qu’augmenter sa survie). Si le phénotype de la progéniture ne dépend pas que de son génotype et des conditions environnementales auxquelles il est soumis, mais aussi du phénotype de sa mère, on parle alors d’effet maternel (Falconer et MacKay 1996). D’ailleurs, ces variations phénotypiques maternelles peuvent être adaptatives (Mousseau et Fox 1998). Prendre en compte les variations phénotypiques maternelles, c’est prendre en compte les variations de l’environnement et la plasticité phénotypique adaptative de la mère, notamment dans le cadre de réponses induites par l’environnement (Stearns 1992, Falconer et McKay 1996). Une hypothèse pour expliquer l’importance des réponses induites est qu’elles diminuent le coût de la défense face aux « agressions » environnementales : face à des pressions environnementales variables dans l’espace et le temps, des réponses constitutives, permanentes, présentent des coûts importants et une efficacité généralement plus faible que les réponses induites (Tollrian et Harvell 1999). Une de ces contraintes environnementales sur le phénotype est l’interaction avec le phénotype d’autres êtres vivants, notamment dans le cadre d’interactions hôtes-parasites (Combes 1995, Agrawal 2001). Différentes stratégies de réponse ont été sélectionnées en réponse à ces contraintes : modifications des traits d’histoire de vie (Møller 1997), réponses comportementales (Barnard et Behnke 1990) et physiologiques (Sheldon et Verhulst 1996),… Il existe en particulier les réponses constitutives et les réponses induites du système immunitaire des vertébrés. Ce système est complexe et, schématiquement, il comprend (1) une réponse non spécifique, se basant sur des signaux généraux des parasites tels que les polysaccharides de membranes de certaines bactéries, mais aussi (2) une réponse spécifique, activée par la reconnaissance de petites régions de molécules des parasites (haptènes). Cette réponse consiste en la production d’anticorps (Ac) spécifiques et/ou en l’activation de la réponse cellulaire conduisant à la destruction des cellules infectées (Goldsby et al. 2000). Au sein même de cette réponse spécifique, il existe des compromis entre la spécificité, donc l’efficacité, et la largeur du spectre des parasites contre lesquels la réponse sera effective (Schmid-Hempel et Ebert 2003). Ces compromis sont aussi influencés par la variabilité spatio-temporelle des parasites auxquels sont exposés les individus (Frank 2002). 11 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune Une réponse maternelle induite dont les conséquences évolutives et écologiques ont peu été considérées est la transmission d’anticorps maternels. En particulier, peu d’études ont abordé cette problématique en milieu naturel (Gasparini et al. 2001) et en manipulant le niveau d’exposition au « parasite » (Buechler et al. 2002, Saino et al. 2002, 2003). Dans quelle mesure cette réponse sera fonction de la probabilité d’exposition des individus aux parasites, susceptible de varier dans l’espace et le temps ? En quoi les multiples facteurs affectant la variabilité de la réponse induite des individus vont-ils affecter l’intensité de cette réponse maternelle ? Dans quelle mesure cette réponse est-elle susceptible d’affecter la mise en place du système immunitaire de la descendance ? Les oiseaux sont des modèles de vertébrés intéressants, fournissant des échantillons de taille suffisante et pouvant être capturés et manipulés relativement aisément (Buechler et al. 2002, Roulin et al. 2003). Par ailleurs, dans beaucoup de systèmes hôte-parasite, on constate que le cycle des interactions durables se fait à l’échelle d’une année, notamment dans les systèmes où les hôtes sont exposés à des ectoparasites pendant la saison de reproduction, l’exposition étant saisonnière (Combes 1995). Chez les oiseaux, l’exposition aux parasites du nid, logiquement proportionnelle au temps passé sur celui-ci, est plus importante lors de la couvaison, une fois les œufs pondus : l’influence de l’exposition l’année précédente serait donc cruciale en terme d’influence sur les Ac transmis dans les œufs. Pour aborder ces questions en populations naturelles, il est possible de manipuler des systèmes naturels afin de contrôler certains des facteurs impliqués (Merino et al. 2000, Lindström et al. 2001, Duckworth et al. 2001). Enfin, chez les oiseaux, les grandes variations de fitness contatées en populations naturelles ont souvent été associées à des variations de la « qualité » individuelle (Clutton-Brock 1998). Or l’investissement dans la ponte est un processus coûteux qui peut être déterminant pour le succès reproducteur et la fitness de l’individu (Stearns 1992). Dans ce contexte, nous avons abordé deux questions : (1) Quelle est l’influence de l’exposition à un parasite une année donnée sur le transfert d’Ac spécifiques dans les œufs l’année suivante ? Quelle est l’influence de la réexposition au parasite avant la ponte (Heeb et al. 1998) et de la « qualité » des individus sur la quantité d’anticorps transmis ? Dans notre travail, nous avons décidé de contrôler l’exposition de l’hôte à un antigène par un protocole de vaccination. Certes, la vaccination ne mime pas exactement l’exposition à un parasite mais elle permet de contrôler le niveau d’exposition, la fréquence d’exposition, le type d’antigène et le type de réponse stimulée (Staszewski et Boulinier sous presse). Nous avons étudié cela chez la Mouette tridactyle (Rissa tridactyla), qui est exposée aux ectoparasites du nid (tiques, puces) d’une année sur l’autre. Nous avons aussi étudié cette question chez un autre modèle animal, le Goéland marin (Larus marinus), appartenant aussi à la famille des Laridés, mais dont l’exposition aux parasites, le régime alimentaire, le type de site de reproduction et le comportement des poussins dans les jours suivants l’éclosion sont différents. (2) En quoi la transmission d’Ac spécifiques peut-elle interférer avec la mise en place de l’immunité du poussin ? La présence d’anticorps maternels, fixant rapidement les 12 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune pathogènes, est susceptible de conférer au poussin une immunité passive, augmentant sa survie (Van der Heide et al. 1976, Westbury et Sinkovic 1978). Mais elle peut aussi interférer avec la mise en place du système immunitaire du poussin. Mis en évidence chez les oiseaux domestiques (Witter et Burmester 1979), entre autres dans le cas d’un vaccin contre la maladie de Newcastle (Eidson et al. 1982), ce phénomène est susceptible d’avoir de grandes implications s’il existe dans les systèmes naturels. Pour répondre à ces questions, nous avons donc exposé à un antigène (un vaccin contre la maladie de Newcastle (NDV)), des individus femelles de deux espèces d’oiseaux de mer, et ce en conditions naturelles. Cela nous a permis, d’une part, d’étudier l’effet du vaccin sur le taux d’Ac des individus un an après et, d’autre part, d’étudier la transmission maternelle d’anticorps spécifiques dans leurs œufs. Enfin, nous avons étudié comment les Ac maternels pouvaient interférer avec le développement de la réponse immunitaire spécifique du jeune. Pour cela, nous avons vacciné deux groupes de poussins : un groupe issu de mères vaccinées, l’autre issu de mères non vaccinées, puis nous avons comparé la dynamique des Ac produits par les poussins en réponse au vaccin. En cas d’interférence des Ac maternels avec la mise en place de la réponse du poussin, nous pouvons prédire que les poussins issus de mères vaccinées ne répondent pas ou répondent mal à la vaccination. En revanche, les poussins issus de mères non vaccinés devraient développer une réponse immunitaire spécifique en produisant des Ac anti-NDV. 13 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune II.A MATERIELS ET METHODES 1. Site d’étude L’étude a été menée au nord-est de la Norvège (70°22’N, 31°10’E), sur l’île d’Hornøya, d’une superficie d’environ 1 km². Cette réserve naturelle abrite une population multispécifique d’oiseaux de mer : guillemots de Troïl (Uria aalge), guillemots de Brunnich (Uria lomvia), guillemots à miroir (Cepphus grylle), petits pingouins (Alca torda), macareux moines (Fratercula arctica), cormorans huppés (Phalacrocorax aristotelis), goélands argentés (Larus argentatus) et enfin mouettes tridactyles (Rissa tridactyla) et goélands marins (Larus marinus) sur lesquels ont porté les expériences. Pour ce qui est de l’exposition aux prédateurs, en plus des goélands marins et argentés, nichent sur l’île deux couples de grands corbeaux (Corvus corax) ainsi qu’un couple de pygargues à queue blanche (Haliaeetus albicilla). Sur cette île, l’effectif de mouettes tridactyles est évalué à 21000 couples et celui de goélands marins à 250 couples (Anker-Nilssen et al. 2000). Depuis 1998, les mouettes tridactyles d’une partie de l’île font l’objet d’études observationnelles et expérimentales menées en collaboration avec des chercheurs norvégiens (T. Boulinier, J. Gasparini, K. McCoy, T. Tveraa). Certaines falaises sont accessibles ce qui rend possibles la manipulation du contenu des nids et la capture des adultes. En raison de l’hétérogénéité spatiale de certains facteurs (prédation, parasitisme ; Gasparini et al. 2001), nous avons limité l’étude spatialement à trois zones d’environ 100 nids, au sein d’une falaise qui en comprend 400. En ce qui concerne les goélands marins, nous nous sommes appuyés sur un programme d’étude sur les PCB (Polychlorobiphényles) mené par un groupe du Department of Arctic Ecology du Norwegian Institute for Nature Research (N.I.N.A.) à Tromsø (J.O. Bustnes, T. Tveraa). Ce programme nous a permis de profiter des connaissances pratiques et théoriques qu’ont acquises ces collègues norvégiens (Bustnes et al. 2002). 2. Modèles biologiques étudiés La Mouette tridactyle La Mouette tridactyle, Rissa tridactyla,(cf. figure 1) est un oiseau de mer colonial de la famille des Laridés. Elle niche en colonies denses sur les falaises de l’hémisphère nord pendant la saison de reproduction et passe le reste de l’année en mer (Cramp et Simons 1983). Les mouettes pondent généralement 2 œufs mais la taille de ponte peut varier de 1 à 3 œufs selon les années et les individus (Thomas et Coulson 1988). Sauf dans le cas d’une ponte de remplacement faisant suite à la perte de la première ponte, la 14 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune mouette tridactyle ne produit qu’une couvée par an. La couvaison, assurée en alternance par chacun des deux parents dure 27 jours. Ce n’est qu’après une période d’élevage d’au minimum 35 jours passés au nid, que les jeunes prennent leur premier envol. Comme pour beaucoup d’oiseaux marins, le taux de survie annuel pour les adultes est élevé (92% en Norvège, Erikstad et al 1995) ainsi que la fidélité au site de reproduction d’une année sur l’autre (Danchin et al. 1998). Le succès Fig 1 : Mouette tridactyle (Rissa tridactyla) Par Eugeny Koblik reproducteur peut varier selon les années et la in Rapport n° 113 du Norsk Polarinstitutt quantité de nourriture disponible (Oro et Furness 2002). Ainsi, la saison 2003 a été particulièrement tardive : le 29 juin 2002, la plupart des poussins avaient plus de vingt jours (87 sur 117 poussins présents sur les 300 nids de la falaise où l’expérimentation s’est déroulée, et 97 sur 137 poussins présents sur 300 nids en dehors de cette zone) tandis qu’à la même date en 2003, aucun poussin n’était éclos. De plus, le nombre de poussins produits fut aussi beaucoup moins élevé en 2003 (24 jours plus tard, le 23 juillet 2003, seulement 37 poussins dont 12 de plus de 20 jours et 26 dont 6 de plus de 20 jours étaient encore vivants dans les deux zones de 300 nids évoquées précédemment). Le Goéland marin Le Goéland marin, Larus marinus,(cf. figure 2) est aussi un oiseau colonial mais qui niche à même le sol. Il appartient également à la famille des Laridés. Le mâle construit plusieurs nids sur un territoire de superficie variable qu’il défend ardemment. La femelle choisit ensuite un de ces nids pour y pondre généralement trois œufs. Comme les mouettes tridactyles, le goéland marin ne réalise qu’une ponte par an sauf en cas de perte de la première ponte. La femelle produit alors une ponte de remplacement. Les Fig. 2 : Goéland marin (Larus marinus) Par Eugeny Koblik goélands sont à la fois prédateurs (de poissons et in Rapport n° 113 du Norsk Polarinstitutt d’autres oiseaux), charognards et opportunistes (poissons « volés » à d’autres oiseaux, déchets rejetés par les bateaux de pêches,…). Les poussins sont semi-nidifuges, car bien que dépendants des parents pour l’alimentation, ils sont tout de même aptes à quitter le nid dès la naissance tout en restant sur le territoire des parents (Cramp et Simons 1983). 15 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune 3. Protocole expérimental 3.a Choix des modèles et contraintes éthiques Les modèles animaux ont en partie été choisis en raison de leur bonne tolérance face aux perturbations, même quotidiennes (Sandvik et Barrett 2001) : les conséquences sur le succès reproducteur et la présence sur le nid sont négligeables chez les mouettes tridactyles. Les goélands sont, eux, accoutumés aux perturbations notamment humaines de par la position de leur nid (cf. collecte d’œufs). Par ailleurs, il est possible chez la mouette tridactyle d’échanger le contenu des nids sans conséquence pour la survie des petits (Storey et al. 1992). L’impact de l’expérimentation de collecte d’œufs sur les mouettes fut limité au maximum, notamment en remplaçant les œufs collectés par des œufs issus des nids d’accueil dans le but d’éviter des échecs de la reproduction. Pour les goélands, l’impact supplémentaire de l’expérimentation fut minime puisque plusieurs milliers d’œufs des nids non inclus dans l’étude sont de toute manière récoltés chaque année, pour une consommation traditionnelle (collecte autorisée jusqu’au 31 mai de chaque année). 3.b Collecte des données Capture des adultes Pour les mouettes tridactyles, la capture a été effectuée sur le nid, à l’aide d’une perche équipée d’un nœud coulant en nylon. Pour les goélands un nœud coulant fut disposé sur le nid dont la fermeture était radioguidée, déclenchée quand l’individu revenait couver. A chaque capture, les individus étaient pesés (à 5g près pour les mouettes, 10g près pour les goélands), la taille de l’aile pliée et la mesure de la longueur de la tête et du bec mesurées (Coulson et al. 1983) et, le cas échéant, bagués. Les captures ont été effectuées par un nombre restreint de manipulateurs (T. Boulinier et V. Staszewski pour les mouettes, J. A. Johanssen pour les goélands). Il est à noter qu’il n’est pas possible de capturer les oiseaux sur leur site avant la ponte des œufs. Les mouettes entrant dans l’étude étaient porteuses d’une bague métallique et d’une combinaison de 5 bagues colorées, ces dernières permettant leur identification à distance. Les goélands capturés les années précédentes étaient équipés d’une bague plastique porteuse d’une combinaison de 3 lettres et 1 chiffre permettant également leur identification à distance. Données observationnelles Les nids de mouettes, répertoriés dans le cadre du suivi global de reproduction, étaient observés tous les trois jours durant toute la période de reproduction (en 2003, d’avril à juillet). Les nids contenant des poussins appartenant au protocole expérimental 16 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune étaient contrôlés quotidiennement jusqu’à éclosion puis visités uniquement les jours où une prise de sang était nécessaire. En 2003, les nids de goélands furent observés deux fois par jour pendant la quinzaine de jours avant la période de ponte, pour déterminer si les individus pondant dans le nid faisaient partie des individus vaccinés en 2002 ou non. Par ailleurs, les nids furent inspectés quotidiennement pendant la période de ponte. Recueil des prélèvements Le sang est prélevé dans la veine alaire, à l’aide d’une seringue stérile héparinée (1 ml) et d’une aiguille 26G. Le plasma a été obtenu par centrifugation (5 min à 7000 tours/min) et a été maintenu congelé jusqu’à l’analyse au laboratoire. Le volume de plasma obtenu était toujours suffisant pour permettre d’effectuer le dosage des anticorps comme recommandé (50 µl). Tous les œufs furent mesurés (longueur, largeur). Pour les mouettes, les œufs furent prélevés lors de l’expérimentation d’échange d’œufs décrite ci-après. Dans deux cas, le jaune (partie de l’œuf analysée pour déterminer le taux en Ac) ne fut pas prélevé en raison du stade avancé de la couvaison mais les œufs furent placés dans un nid indépendant de l’étude. Pour les goélands, les œufs furent collectés dès la ponte « complète » : les nids étaient en effet suivis quotidiennement, les œufs marqués et prélevés dès la présence de trois œufs dans le nid. Ainsi la séquence de ponte a pu être déterminée. Après séparation d’avec l’albumen, le jaune fut placé dans un sac plastique individuel et congelé immédiatement. 3.c Schémas vaccinaux Choix du vaccin Pour mimer l’exposition au parasite tout en contrôlant la dose, le moment d’administration et les individus exposés, nous avons utilisé un vaccin. Le vaccin utilisé a été le vaccin Nobivac PMV, vaccin inactivé (Paramyxovirus du sérotype I (P3G)) en suspension huileuse. Le choix de ce vaccin a été motivé par son utilisation dans d’autres études en populations naturelles (Nordling et al. 1998, Saino et al. 2002, 2003) et par l’existence d’études chez les oiseaux domestiques montrant la persistance d’anticorps un an après vaccination (AMM (Autorisation de Mise sur le Marché) Nobivac® Paramyxo, Intervet). Enfin, de par le fait qu’il soit inactivé (i. e. l’agent vaccinal est mort), le vaccin permet un meilleur contrôle de la dose d’antigènes administrée qu’un vaccin vivant susceptible d’être plus efficace mais se multipliant au sein de l’animal auquel il est administré (Plotkin et Orenstein 1999). La maladie de Newcastle est une maladie très contagieuse, provoquant pour certaines souches de graves symptômes chez les espèces sensibles. Chez le poulet, le taux 17 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune de mortalité peut être supérieur à 50% (Terregino et al. 2003). Cette maladie est présente de façon naturelle chez de nombreuses espèces (Hubalek 1994). Administration du vaccin Un volume de 0,25 ml, volume standard pour le poulet et le pigeon (Eidson et al. 1982), a été injecté par voie sous-cutanée, en face dorsale du cou de l’animal (seringue stérile de 1ml, aiguille 20G). Ce volume permet une bonne précision et une bonne répétabilité de la dose d’antigène administrée. Les mouettes adultes ont reçu (2002) une ou deux injections dans l’optique de doser l’effet de l’intensité de l’exposition (cf. schéma vaccinaux). Les poussins de mouettes âgés de 1 jour (2003) et les goélands (2002) ont reçu une seule injection, comme suggéré dans le protocole de vaccination pour oiseaux domestiques. Expérience de test de l’influence de l’exposition à un parasite une année donnée sur les taux plasmatiques et sur le transfert d’Ac dans les œufs l’année suivante En 2002, au sein de la falaise dévolue à notre étude, toutes les mouettes capturées (n = 51) furent vaccinées (cf. figure 3). Lorsqu’elles ont pu être capturées une seconde fois (n = 33) après 13j +/- 2j (sauf pour deux mouettes capturées à 16 et 17 jours d’intervalle, exclues de l’étude des effets à court terme de la vaccination), elles reçurent une seconde injection pour tester l’effet sur les taux plasmatiques du nombre d’expositions à l’antigène. Le but était aussi de s’assurer qu’un niveau suffisant d’Ac serait produit par les individus vaccinés. Ainsi, dans l’optique d’étudier l’effet de l’exposition et des caractéristiques des individus sur les taux plasmatiques un an après exposition, un maximum des femelles capturées en 2002 fut recapturé en 2003 (n = 16). De plus, il était envisagé de tester l’effet d’une réexposition à l’antigène entre la première ponte en 2003 et la ponte de remplacement provoquée par la collecte des œufs. En 2003, la moitié des femelles recapturées reçurent donc une injection de sérum physiologique (contrôle) et l’autre moitié un rappel du vaccin. Enfin, 10 des 30 femelles dont les poussins entraient dans le protocole décrit ci-après ont été capturées pour contrôler que leurs taux d’anticorps étaient plus faibles que ceux des femelles exposées au vaccin. Les effectifs présentés ne tiennent pas compte des mâles qui furent exclus de l’étude après détermination des sexes selon des critères morphométriques et observationnels (Barrett et al. 1985, Jodice et al. 2000), confirmés par une détermination génétique du sexe a posteriori. 18 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune 2002 Fig 3 : Schéma vaccinal des mouettes Les goélands furent utilisés pour répondre, d’une façon complémentaire et avec un modèle proche (famille des Laridés), aux questions soulevées précédemment. Ce second modèle a cependant des caractéristiques différentes que ce soit le régime alimentaire (cf. exposition aux PCB), l’exposition des adultes aux parasites, ou encore le temps passé au nid par les poussins (l’exposition à certains parasites étant donc différente). Les femelles goélands furent vaccinées en 2002 pendant la couvaison (cf. figure 4). Le dimorphisme sexuel étant plus grand que chez la mouette (Cramp et Simmons 1983), le recours au sexage génétique n’a pas été nécessaire. Il fut impossible pour des raisons pratiques de capturer les goélands adultes un an après exposition : les animaux déjà capturés sont plus méfiants et le taux de capture eût été trop faible pour avoir des échantillons de taille suffisante pour permettre d’évaluer leur réponse à la vaccination. En revanche, raisonner sur les concentrations en Ac dans les œufs ne présentait pas ce type d’inconvénients. L’influence de l’exposition après un an fut donc évaluée en considérant directement le transfert d’Ac dans les œufs, sans, comme chez les mouettes, étudier les taux plasmatiques Capture et vaccination des femelles (n = 33) Prélèvement des œufs de nids d’individus vaccinés 2002 en 2002 (n = 16) ou non (n = 66) 2003 Fig 4 : Schéma vaccinal des goélands 19 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune Expérience de test de l’interférence des Ac maternels avec la mise en place de l’immunité du poussin chez la mouette tridactyle Pour tester l’effet de l’exposition de la mère à l’antigène un an avant, 30 œufs issus de mères vaccinées un an avant et 30 œufs issus de mères non vaccinées furent prélevés et placés dans un nid d’accueil. Au sein des couvées des femelles dont les œufs furent prélevés, un des deux œufs fut donc placé dans un « nid d’accueil » (cf. figure 5). Le jaune de l’autre œuf a été prélevé afin de déterminer son taux en Ac spécifiques pour étudier l’effet de l’exposition sur le transfert d’Ac dans les œufs un an après. Les oeufs furent placés dans un nid d’accueil, « indépendant » (un œuf de femelle vaccinée, un de non vaccinée dans le même nid), afin de contrôler pour un éventuel effet des conditions d’élevage des poussins par les parents sur leurs taux d’anticorps (Brinkhof et al. 1999). Les oeufs des nids d’accueil furent placés dans les nids des femelles, vaccinées ou non, dont les œufs avaient été prélevés afin d’éviter des échecs de la reproduction. Une fois les poussins éclos, ils furent tous vaccinés à un jour puis les prises de sang furent effectuées à 6 jours (n = 18), 10 jours (n = 9), 15 jours (n = 8), 20 jours (n = 4) et 24 jours (n = 2). Notons que les taux de survie des poussins en 2003 étaient particulièrement faibles comparés aux autres années et la saison tardive (cf. modèles biologiques). Ce phénomène est à mettre en relation avec une variabilité interannuelle des taux de succès de reproduction lié à la disponibilité des ressources (Oro et Furness 2002). 20 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune Mères vaccinées en 2002 Nids d’accueil Mères non vaccinées en 2002 A B A B A B Œufs non utilisés pour l’étude Nid d’accueil Jaunes d’œufs prélevés, taux d’anticorps déterminés B B B B Vaccination des poussins à 1 jour Prises de sang à 6-10-15-2024 jours Fig 5 : Récapitulatif de l’expérience visant à tester l’interférence des Ac maternels avec la mise en place de l’immunité du poussin B A11 A B1 C1 C1 21 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune 4 Analyses de laboratoire 4.a Extraction des anticorps du jaune d’œuf Les anticorps furent extraits en utilisant la méthode d’extraction décrite par Mohammed et al. (1986) adaptée selon la technique décrite par Gasparini et al. (2001). Le jaune est homogénéisé puis 2 ml sont prélevés, mélangés à un volume égal de tampon PBS par agitation à l’aide de billes de verre. Les anticorps sont ensuite recueillis dans la phase aqueuse obtenue après mélange avec un volume égal de chloroforme, agitation et centrifugation. Cela permet une bonne répétabilité des mesures, l’homogénéisation du jaune n’étant pas toujours efficace lors du prélèvement de faibles volumes. 4.b Dosage des anticorps anti-NDV La concentration en anticorps dans le plasma ou dans les extraits de jaune d’œuf fut déterminée à l’aide d’un test de type ELISA par compétition, utilisant des anticorps monoclonaux (Kit Svanovir SVANOVA Biotech, Uppsala Science Park, Uppsala, Suède). La concentration est exprimée en pourcentage d’inhibition (PI) selon les méthodes recommandées par les fournisseurs du kit (Czifra et al. 1996) et utilisées précédemment par d’autres auteurs. Ce test a été développé pour le diagnostic chez le poulet mais a déjà été employé avec d’autres espèces (Koch et al. 1998, Nordling et al. 1998, Saino et al. 2002). La valeur de P.I. augmente avec le taux d’anticorps dans l’échantillon. Dans un souci de clarté, les termes taux d’anticorps pourront être utilisés à la place de pourcentage d’inhibition. Basé sur une technique utilisant des Anticorps monoclonaux, ce test est très spécifique. Conçu pour le diagnostic chez le poulet, des limites sont fournies pour une interprétation qualitative (les valeurs inférieures à 30 % donnent un résultat négatif, et les valeurs supérieures à 40 % un résultat positif). Cependant (1) ces limites arbitraires ont été fixées pour le poulet et (2) rien ne s’oppose à l’utilisation quantitative des valeurs (Czifra et al. 1996). Les mesures étaient très répétables, aussi bien au sein d’une même plaque d’analyse (91.3%, F32,33 = 22.02, P < 0.0001) qu’entre plaques (95.5%, F21,22 = 39.46, P < 0.0001). Elles étaient aussi répétables pour les plasmas (98.0%, F14.15 = 110.40, P < 0.0001) que pour les œufs (même extraction (96.7%, F34,35 = 61.23, P < 0.0001) ou extractions différentes à partir du même jaune (83.3%, F14,15 = 11.00, P < 0.0001)). 22 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune 5. Analyses statistiques Les analyses statistiques ont été effectuées en utilisant le logiciel SAS (SAS institute, 1996). Pour les tests statistiques effectués, le niveau de significativité retenu pour les probabilités critiques était de P < 0.05. 5.a Influence de l’exposition à un parasite une année donnée sur le transfert dans les œufs d’Ac spécifiques l’année suivante 5.a.1 Influence de l’exposition sur le taux d’Ac après 1 an chez les mouettes Pour tester l’influence de l’exposition à un antigène sur le taux en anticorps spécifiques un an après exposition, nous avons comparé les moyennes des P.I. (taux d’Ac) plasmatiques des mouettes avant vaccination (2002) et après un an (2003), pour les 16 individus recapturés en 2003 (n = 16). Nous avons aussi comparé, pour les femelles vaccinées deux fois en 2002 les taux avant vaccination et 13 jours après la première injection, lors de la seconde injection. Par ailleurs nous avons comparé les P.I. des femelles capturées en 2003, selon qu’elles avaient été vaccinées en 2003 (n = 16) ou non (n = 10). Enfin, dans l’optique de tester l’effet du nombre d’expositions au parasite, nous avons comparé les taux d’Ac, un an après, des femelles vaccinées une (n = 5) ou deux fois (n = 11) en 2003. Lors des comparaisons de moyennes effectuées, la normalité de la distribution des échantillons a été testée grâce au test de Shapiro-Wilk (n < 2000) ; si les échantillons étaient indépendants, et si les échantillons étaient distribués normalement, un test t était pratiqué, tandis que si la distribution n’était pas normale un test U de Mann-Whitney était utilisé. Si les échantillons étaient dépendants, un test t apparié était utilisé si la distribution était normale et sinon un test de Wilcoxon était pratiqué. 5.a.2 Relation entre les taux d’Ac de la mère et dans les œufs chez les mouettes Nous avons étudié la relation entre les taux d’Ac dans le sang de la mère et ceux dans les œufs. Les valeurs de P.I. (taux d’Ac) des mères vaccinées étant attendues comme très supérieures aux P.I. des mères non vaccinées, nous avons effectué une analyse de covariance avec comme variable dépendante le P.I. de l’œuf, et comme variables indépendantes la variable « statut vaccinal de la mère » (mère vaccinée ou non) et le P.I. de la mère. La régression entre le P.I. des mères vaccinées et celui des œufs nous a permis de tester si une quantité d’Ac proportionnelle à celle circulant chez la mère est transmise dans l’œuf. 23 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune 5.a.3 Transfert d’Ac spécifiques un an après exposition dans les œufs des goélands Comme exposé précédemment, il fut impossible de recapturer les goélands adultes un an après exposition. Nous avons donc étudié l’influence de l’exposition à l’antigène en comparant les taux d’anticorps moyens des œufs des goélands vaccinés (n = 16 femelles vaccinées) ou non (n = 66 femelles non vaccinées) en 2002. Nous avons aussi évalué le fait que les jaunes d’œufs d’une couvée aient des taux plus proches entre eux que par rapport à la variabilité générale de la population. Pour ce faire, nous avons calculé la répétabilité (Lessels et Boag 1987) intraponte des taux d’anticorps des oeufs d’une couvée. La répétabilité fut aussi calculée séparément selon le statut vaccinal de la mère. 5.a.4 Influence de la « qualité » des individus Tout d’abord, nous avons retenu comme reflet de la qualité de la mère le volume moyen des œufs pondus. Gasparini et al. (soumis) ont en effet montré que, chez la Mouette tridactyle, le volume moyen des œufs pondus était un bon indice de la « qualité parentale », évaluée par l’aptitude à produire une ponte de remplacement. D’autre part, une autre hypothèse est que la quantité d’Ac investis dans les œufs ou circulants dans le sang est liée à la condition corporelle de l’individu. Nous disposions de différentes mesures morphométriques : poids, mesure de l’aile pliée, mesure de la tête et du bec (et mesure du tarse chez les goélands). Pour étudier cela, nous avons choisi, comme indiqué par Garcia-Berthou (2001) d’effectuer une régression multiple en utilisant les variables disponibles comme variables indépendantes. Cette démarche évite d’effectuer une première analyse (le calcul des résidus d’une relation poids-taille) pour ensuite effectuer une analyse de variance. Pour les mouettes, deux mesures de poids étaient disponibles au cours de la saison, mesurées lors des premiers et seconds évènements de capture en 2002 (soit à 13 jours d’intervalle). La variation de poids entre les deux événements de capture était une variable intéressante car pouvant refléter l’investissement de l’individu, en terme de perte de poids, au cours de la saison. Nous avons donc effectué l’analyse en introduisant comme variables indépendantes la mesure de la taille de l’aile pliée, la variation de poids entre les mesures ou une de ces mesures, et la taille moyenne des œufs pondus. En effet, nous n’avons pas utilisé dans la même analyse le poids et la variation de poids, le « variance inflation factor » indiquant un risque limité de multicollinéarité (VIF = 3.05) (Glantz et Slinker 1990). Les variables dépendantes furent le taux en Ac transmis dans les œufs, le taux en Ac dans le sang des adultes un an après exposition, 13 jours après exposition et les variations de ces deux derniers paramètres par rapport aux taux initiaux (avant 24 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune vaccination). Pour les goélands, une seule mesure de poids était disponible donc, à part la variation de poids, les variables indépendantes utilisées furent les mêmes que pour les mouettes. La seule variable dépendante a été le taux en Ac moyen dans les œufs pondus par un individu. En effet, les goélands adultes n’ont pas été capturés en 2003. La longueur de l’aile pliée a été retenue comme variable liée à la « taille » de l’animal. Une autre mesure équivalente aurait pu être choisie, la mesure de la longueur de la tête et du bec (ou encore la longueur du tarse pour les goélands). Chez les mouettes, ces paramètres étaient très corrélés dans le temps (coefficient de corrélation de Pearson : pour la longueur d’aile r = 0.9475, n = 33, P < 0.0001 et pour la mesure le la longueur de la tête et du bec r = 0.9320, n = 33, P < 0.0001). En effet, deux mesures de ces variables ont été effectuées à 13 jours d’intervalle, lors des deux évènements de capture en 2002. La mesure de l’aile fut retenue car étant la plus répétable dans le temps des deux mesures. D’autre part, une seule de ces deux mesures liées à la « taille » fut utilisée dans l’analyse pour deux raisons : ces variables étaient très corrélées entre elles (pour le premier événement de capture : r = 0.6313, n = 51, P < 0.0001) donc (1) utiliser toutes les variables n’aurait pas apporté plus d’information, (2) nous risquions d’être confrontés à des problèmes de multicolinéarité. Pour les mêmes raisons, la longueur de l’aile repliée a été utilisée chez les goélands (corrélations chez les goélands : effectif n = 27 ; coefficient de Pearson et probabilités critiques : entre la taille de l’aile (WL) et la mesure tête et bec (HB) : r = 0.5398, P = 0.0037, WL et mesure du tarse (TA) : r = 0.4979, P = 0.0082 et HB et TA : r = 0.7683 P < 0.0001). Le volume des oeufs a été calculé selon les formules suivantes : chez la mouette tridactyle : volume (mm3) = largeur(mm) ² x hauteur (mm) x 0.0004866 (Coulson 1963) et chez le goéland marin volume (mm3) = largeur(mm) ² x hauteur (mm) x 0.000476 (mm) (Bolton et al. 1992). 5.b Interférence entre les Ac maternels et la mise en place de l’immunité du poussin chez la mouette tridactyle Pour tester l’interférence des Ac maternels avec la mise en place de l’immunité du poussin, le jeu de données consistait en des mesures répétées sur les poussins, ( P.I. à différents âges), avec des données manquantes pour certains. En effet, la plupart des poussins sont morts avant 24 jours : leurs P.I. plasmatiques ne sont plus disponibles à partir d’un certain âge, variable selon les poussins (ils ne sont pas tous morts au même âge). D’autre part, pour deux poussins, le taux à « âge zéro » n’était pas disponible. 25 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune Le fait de placer dans un nid d’accueil un œuf issu de mère non vaccinée et un issu de mère vaccinée avait pour but de contrôler un éventuel effet élevage des parents, en utilisant dans le modèle statistique un effet nid comme effet aléatoire. Ce ne fut pas possible en raison de la faible proportion de nids comportant deux poussins (5 nids avec deux poussins sur 14 nids avec poussins à 6 jours). En revanche, le fait que les œufs soient attribués aléatoirement aux nids d’accueil permet de contrôler partiellement un éventuel effet d’élevage. Nous avons donc effectué une analyse de covariance à partir d’un modèle mixte ayant comme variable dépendante le P.I. (taux d’Ac) des poussins, comme effets fixes les variables statut vaccinal de la mère et âge du poussin et, comme effet aléatoire, un effet « poussin » hiérarchisé par rapport à l’effet statut vaccinal de la mère. L’âge du poussin fut pris en compte comme variable continue. L’analyse faite en considérant l’âge du poussin comme variable discrète apportait les mêmes résultats. La procédure Proc mixed a été utilisée (SAS Institute, 1996). Les résultats de la première analyse permirent de répéter l’analyse en séparant les poussins issus de mères vaccinées de ceux issus de mères non vaccinées afin de tester s’il y avait bien une décroissance au cours du temps des Ac chez les poussins issus de mères vaccinées et une augmentation au cours du temps chez les poussins issus de mères non vaccinées. Les paramètres de covariance estimés indiquèrent le sens de la relation (option COVTEST, SAS). On verra que la répétabilité des taux d’anticorps dans les œufs au sein d’une couvée a été observée chez les goélands (cf. résultats) ainsi que par d’autres études sur la mouette tridactyle (Gasparini et al. 2001). Par souci de clarté, nous noterons donc comme taux à âge zéro, le taux d’anticorps (P.I.) mesuré sur un œuf de la même couvée. 26 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune II.B RESULTATS Notons tout d’abord que, bien qu’elles ne se soient pas toutes reproduites, 88% des femelles vaccinées en 2002 ont été observées à nouveau en 2003 (45 femelles sur 51). Le déroulement de la saison 2003, avec une reproduction très tardive des oiseaux et des échecs de reproduction nombreux, a par ailleurs altéré la vérification de certaines hypothèses. Influence de l’exposition à un parasite une année donnée sur le transfert dans les œufs d’Ac spécifiques l’année suivante Nous nous sommes penchés sur l’influence de la vaccination sur le taux d’Ac plasmatiques des mouettes un an après exposition. Comme attendu, on constate une forte augmentation du taux d’anticorps plasmatiques chez les femelles vaccinées un an après exposition (test Wilcoxon : n = 16, P < 0.0001) : ces femelles passent d’un P.I. moyen de 29.6% +/-3.9 à 88.0% +/-3.9 (cf. figure 6). Cette augmentation était déjà notée 13 jours après exposition avec un P.I. moyen augmentant de 30.6% +/-2.6 à 55.6% +/-4.3 (test t apparié : t = 5.81, n = 31, P < 0.0001). PI 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 16 Avant vaccination 9 13 jours après 16 Un an après 10 Non vaccinées Fig. 6 : P.I. (taux en Ac spécifiques anti-NDV) des mouettes vaccinées en 2002 et recapturées en 2003 (moyennes +/- erreur standard et taille d’échantillon). Sont présentées de gauche à droite, les valeurs pour les 16 femelles vaccinées en 2002 et recapturées en 2003 de (1) leur P.I. en 2002 avant vaccination (2) leur P.I. en 2002 13 jours après la primo injection (n = 9 car seules 9 de ces 16 femelles furent capturées et vaccinées deux fois en 2002) (3) leur P.I. en 2003 (un an après vaccination) et enfin (4) les taux, en 2003, des 10 mouettes non vaccinées en 2002, capturées en 2003, dont les oeufs ont été utilisés dans l’étude. Il y a une différence significative entre les P.I. avant et un an après vaccination et entre les taux en 2003 selon que les femelles aient été vaccinées ou non en 2002. 27 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune On ne constate pas de différence significative des taux d’Ac plasmatiques un an après exposition entre les femelles vaccinées une fois l’année précédente et celles vaccinées deux fois (Test U ; Z = -4.19 P = 0.9567, n1 = 5 n2 = 11). Bien sûr, les tailles d’échantillon sont faibles pour se permettre de rejeter une hypothèse de type H0 mais il est à noter que la valeur de la moyenne des P.I. en 2003 des femelles vaccinées une fois est en fait supérieure à celles de femelles ayant reçu deux injections. Par ailleurs, nous avons étudié chez les mouettes la relation entre le taux d’Ac spécifiques dans le plasma de la mère un an après exposition et dans les œufs qu’elle a pondus. On constate un effet significatif sur le taux d’anticorps dans les œufs du statut vaccinal de la mère (F1,21 = 4.80, P = 0.0399) ainsi que de son taux d’anticorps un an après vaccination (F1,21 = 127.6, P < 0.0001). Une régression linéaire effectuée en séparant les mères vaccinées des mères non vaccinées montre un effet significatif du taux d’anticorps de la mère chez les individus issus de mère vaccinées (r² = 0.9353, n = 16, P < 0.0001) mais pas d’effet chez les individus non vaccinés (r² = 0.1685, n = 8 car pour deux individus, les taux dans les œufs n’étaient pas disponibles, P = 0.5177) (cf. figure 7). 100 PI de l'oeuf 80 60 40 20 0 -20 0 20 40 60 80 100 120 PI du plasma de la mère Fig 7 : Relation entre le P.I. des œufs et le P.I. du plasma de la mère (en rose les valeurs pour les individus vaccinés, en bleu non vaccinés). Une analyse de covariance sur l’ensemble des données montre un effet significatif sur le taux d’anticorps dans les œufs du caractère vacciné ou non de la mère ainsi que de son taux d’anticorps. Une régression linéaire est ensuite faite séparément selon le caractère vacciné ou non de la mère. Elle met en évidence un effet significatif du P.I. du plasma de la mère si elle est vaccinée. On note qu’un des individus vaccinés présente des valeurs proches de ceux non vaccinés. Une erreur de manipulation peut être exclue, l’individu ayant été capturé et vacciné à deux reprises en 2002. Par ailleurs, la relation est toujours significative en excluant ce point (r² = 0.8458 P < 0.0001). 28 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune En ce qui concerne les goélands, nous avons étudié l’effet de l’exposition au parasite un an après exposition. Pour les raisons exposées précédemment, nous avons étudié les P.I. dans les œufs (cf. figure 8). Un an après exposition, le P.I. moyen des œufs des couvées issues de femelles vaccinées ont des taux en Ac plus élevés (77.44 +/-6.17 n = 16) que ceux de femelles non vaccinées en 2002 (29.23 +/- 3.24 n = 66) (test U, Z = 4.80, n1 = 16, n2 = 66, P < 0.0001). 100 80 60 PI 40 20 66 16 0 Non vaccinés Vaccinés Fig 8 : P.I. (moyenne +/- erreur standard et taille d’échantillon) des œufs (taux d’Ac spécifiques anti-NDV) un an après exposition pour des femelles goélands vaccinées (n = 16) ou non (n = 66). Pour le calcul de l’erreur standard pour les valeurs de chaque individu, les taux des œufs d’une même couvée étant très proches (cf. ci après), c’est la moyenne des taux de la couvée qui a été retenue. Par ailleurs, les P.I. des œufs d’une couvée sont très proches (cf. figure 9). La répétabilité des taux en anticorps au sein d’une même ponte est de 97.7 % (F81,164 = 84.47, P < 0.0001). La répétabilité a d’ailleurs été calculée au sein de chaque groupes : elle est de 96.35 % (F65,132 = 53.93, P < 0.0001) pour les non vaccinés et 96.80% (F15,32 = 61.62, P < 0.0001) pour les vaccinés. 29 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune Sum of inhib 120 PI des oeufs 100 80 nest2 60 40 20 A B C A B C F G H F G H X Y Z X Y Z F G H X Y Z F G H F G H F G H F G H X Y Z X Y Z A B C A B C 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 17 Nids nest egg Fig. 9 : P.I. (taux d’anticorps spécifiques anti-NDV) des œufs de goélands marins un an après exposition. Les barres d’une même couleur représentent les trois œufs d’une couvée. Enfin, nous avons étudié l’influence de la qualité des individus sur les taux en Ac après exposition et leur transfert dans les oeufs. Pour les mouettes, les trois variables que nous avons tenté d’expliquer furent (1) le taux d’Ac dans les œufs ainsi que les taux en Ac (2) 13 jours après vaccination et (3) un an après vaccination (ainsi que leur variations par rapport aux taux avant vaccination pour ces deux dernières). Les variables explicatives furent le poids (ou sa variation), la taille de l’aile et le volume moyen des œufs pondus. Aucun effet significatif de ces variables ne fut mis en évidence (cf. Tableau III, figure 10). 30 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune Tableau III : résultats d’une des régressions multiples effectuées sur les données des mouettes ; la variable dépendante est le taux d’Ac transmis par les femelles vaccinées dans les oeufs (n = 16). Les tests furent répétés en enlevant les facteurs un à un sans mettre en évidence d’effet significatif, même du volume moyen des oeufs (F1,14 = 3.42 P = 0.0741). . variable Valeur de F d.d.l. P Taille de l’aile 0.25 1,12 0.6312 Poids 0.75 1,12 0.4081 Volume moyen des œufs pondus 3.48 1,12 0.0951 Augmentation du PI plasmatique 100 80 60 40 20 0 -20 40 45 50 55 60 Volume moyen des oeufs pondus Fig 10 : Augmentation du P.I. du plasma (en %) entre avant et 13 jours après vaccination en fonction d’un indice de qualité, le volume moyen des oeufs pondus (n=29 et non 33, nombre de mouettes capturées deux fois en 2002, car certains nids sont inaccessibles donc le volume moyen des œufs indisponible). Cette figure est un exemple de l’absence de relation entre les indices de qualité retenus et la variation du taux en Ac. 31 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune Pour les goélands, les mêmes analyses furent effectuées. Nous avons tenté d’expliquer le taux d’anticorps moyen transmis dans les œufs par un individu, par son poids, sa taille de l’aile et le volume moyen des œufs pondus par cet individu. Une fois encore, aucun effet significatif ne fut mis en évidence (cf. tableau IV). Tableau IV : Résultats d’une des régressions multiples effectuées sur les données des goélands ; la variable dépendante est le taux d’Ac transmis par les femelles vaccinées dans les oeufs (n = 16). Les tests furent répétés en enlevant les facteurs un à un sans mettre en évidence d’effet significatif. variable Taille de l’aile Valeur de F d.d.l. P 1.76 1,12 0.2114 32 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune PI 100 90 80 70 60 (%) 50 40 30 20 10 0 15 12 0 9 9 6 4 5 10 4 4 3 15 1 20 2 24 Age des poussins (en jours) Fig 11 : Evolution du P.I. (moyenne +/- erreur standard, effectif) des poussins au cours du temps. En rouge le P.I. des poussins issus de femelles vaccinées, en bleu issus de femelles non vaccinées. Suite à une analyse de covariance, on constate un effet significatif du statut vaccinal de la mère ainsi que de l’âge du poussin. Le taux à « âge 0 » est, comme justifié précédemment, le taux dans le jaune d’un œuf de la même couvée. D’ailleurs en répétant l’analyse sans ces valeurs, les effets sont toujours significatifs (F1,21 = 14.64, P = 0.0010). En répétant le test en séparant les poussins selon le traitement de la mère, on constate une diminution au cours du temps des anticorps dans le sang des poussins issus de mères vaccinées (facteur estimé -1.61119, d.f. = 21, P = 0.0007 ) et une augmentation chez les poussins issus de mères non vaccinées (1.8113, d.f. = 16, P = 0.0008). On peut noter qu’en raison de la faible taille des échantillons, il n’est pas possible de tester , à partir de l’âge de 15 jours (14 jours après vaccination), si les moyennes des taux des deux catégories de poussins sont significativement différentes. 33 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune II.C DISCUSSION Dans cette étude conduite au sein de populations naturelles d’oiseaux, nous avons donc voulu tester l’influence de l’exposition à un parasite une année donnée sur le transfert d’Ac spécifiques dans les œufs l’année suivante, ainsi que l’influence de la réexposition au parasite avant la ponte et de la « qualité » des individus sur la quantité d’anticorps transmis. Par ailleurs, nous nous sommes attachés à mettre en évidence une éventuelle interférence de ce transfert d’anticorps avec la mise en place du système immunitaire du poussin. Nous avons donc exposé deux espèces d’oiseaux de mer à un vaccin contre la maladie de Newcastle. Chez la mouette tridactyle, nous avons mis en évidence, un an après exposition, un transfert d’anticorps spécifiques dans les œufs associé à une augmentation des taux d’anticorps spécifiques dans le plasma des femelles. Nous avons par ailleurs montré, un an après exposition, le transfert d’Ac spécifiques dans les oeufs chez les goélands marins ainsi qu’une forte corrélation des taux en anticorps au sein d’une couvée. Enfin, nos résultats suggèrent un effet de la transmission d’Ac maternels sur la réponse des poussins dans les premières semaines de vie à un vaccin administré à l’âge de 1 jour. Nous avons mimé l’exposition au parasite en utilisant un vaccin. La vaccination permet d’aborder les questions posées avec une méthode expérimentale et non uniquement corrélative. En effet, la limite d’approches purement corrélatives (Gasparini et al. 2001) est que le niveau d’exposition aux parasites n’est pas fixé ; or, ce niveau de parasitisme peut être lié à certains facteurs affectant la transmission d’Ac dans les œufs, la qualité des individus par exemple. Ainsi, l’interprétation des résultats peut se révéler difficile. Prenons un exemple : si les œufs d’individus de bonne qualité ont des taux en Ac élevés, on ne peut conclure au fait que ce soit dû à une meilleure transmission des Ac ou, peut-être, à une exposition aux parasites plus forte que celles d’individus de moins bonne qualité. Pour résoudre ce problème, il est aussi possible de manipuler le niveau de parasitisme (Merino et al. 2000, Lindström et al. 2001, Duckworth et al. 2001). Cette approche permet de mieux reproduire l’impact réel des parasites. Mais un vaccin permet le contrôle précis de la dose reçue, du nombre d’expositions, du type d’antigène et de la voie de présentation antigénique empruntée (Staszewski et Boulinier sous presse). La vaccination permet en outre de sélectionner les individus exposés et leurs caractéristiques (expérimentalement ou statistiquement cette fois) dans des populations naturelles où ce type de limites est souvent rencontré. Enfin, elle permet de focaliser l’expérience sur les effets immunologiques de l’exposition au parasite. Cela permet de s’affranchir (1) des autres types de réponses aux parasites (modification des traits d’histoire de vie, réponses comportementales, flore commensale,…) (2) des autres effets du parasite sur l’hôte que 34 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune l’induction d’une réponse immunitaire spécifique (spoliation, réponse immunitaire non spécifique,…). En ce qui concerne les protocoles expérimentaux, il est à noter que le déroulement de la saison 2003, avec des échecs importants de la reproduction dans la colonie de mouettes tridactyles, a pu affecter la puissance des tests qui ont pu être réalisés. Les protocoles mis en place ont néanmoins permis de répondre à plusieurs questions importantes. 1. Influence de l’exposition une année donnée sur le transfert d’Ac spécifiques dans les œufs l’année suivante Il a été montré chez de nombreuses espèces animales que la transmission d’immunité passive augmentait la survie du petit, particulièrement chez les mammifères grâce aux études sur le colostrum (Speicher et Hepp 1973, Sawyer et al. 1977). Augmenter la survie de sa descendance signifie augmenter sa propre fitness. C’est pourquoi les travaux concernant l’évolution des traits d’histoire vie et les compromis ayant pour but d’augmenter la fitness des individus ont noté l’importance potentielle de l’immunité passive d’origine maternelle (Price 1998). Le transfert d’Ac dans les oeufs représente un sujet de choix pour l’étude de ces phénomènes en populations naturelles mais l’impact d’un tel phénomène reste à évaluer. En effet, Gasparini et al. (2001) se limitent à une approche corrélative, sans manipuler le niveau de parasites. L’absence de contrôle du niveau d’exposition entraîne les limites évoquées précédemment. Par ailleurs, Saino et al. (2002,2003) montrent que le transfert d’Ac maternels est affecté par la qualité du partenaire sexuel ou le sexe du poussin, mais leurs études se limitent à un effet à court terme et ne considère pas l’effet du transfert d’Ac maternels sur l’immunité du poussin (cf. ci-après). Dans ce contexte, nous avons montré que, même un an après l’exposition, (1) cette exposition entraîne le transfert d’Ac spécifiques dans les œufs, et que (2) l’intensité de ce transfert est liée à l’intensité de la réponse de la mère à l’antigène en terme d’anticorps spécifiques dans le plasma. Ceci est suggéré (1) par une forte corrélation des taux d’Ac des œufs d’une même couvée ainsi que (2) par l’existence d’une relation entre les taux d’Ac dans le plasma de la mère et les taux dans les œufs, pour les individus vaccinés uniquement. Ces résultats montrent donc l’existence d’une réponse spécifique induite et d’un transfert d’immunité passive de la mère au poussin via le jaune d’œuf et ce un an après l’exposition à l’antigène. Par ailleurs, le protocole initial, qui incluait la possibilité de tester l’effet d’un rappel du vaccin juste avant la ponte de remplacement, n’a pu être mené comme prévu. Ce protocole consistait en la revaccination des adultes, un an après exposition, au 35 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune moment de la ponte. Une ponte de remplacement est alors provoquée en prélevant les œufs. Les conséquences de la réexposition à l’antigène auraient donc pu être étudiées sur la ponte de remplacement. Cependant, nous avons constaté de forts taux plasmatiques en anticorps un an après exposition, aussi bien pour les femelles vaccinées à une qu’à deux reprises. La forte immunogénicité du vaccin, amenant une faible variabilité des P.I. un an après exposition, aurait rendu difficile la mise en évidence d’un effet de la réexposition au vaccin en 2003 : les mouettes ayant déjà des taux élevés en anticorps, il aurait été difficile de déceler une augmentation des taux suite à la réexposition. Dans le cadre d’un travail sur le coût de la réponse immunitaire chez une autre espèce d’oiseaux, Nordling et al. (1998) avaient utilisé ce vaccin et obtenu une variabilité plus grande de la réponse en Ac plasmatiques, chez les adultes, selon la dose administrée. Par ailleurs, la saison de reproduction 2003, particulièrement tardive, a limité la taille des échantillons : nous n’avons pu tester cet effet en 2003. Pour ce qui est de la qualité corporelle, plusieurs variables furent testées grâce à une régression multiple (Garcia-Berthou 2001). Les variables testées ont été une variable reflétant la « qualité reproductive » des individus : la mesure de la taille moyenne des œufs pondus (Gasparini et al. soumis) ainsi que différentes mesures morphométriques (cf. matériels et méthodes). Il n’a pas été possible de distinguer un effet sur le transfert d’Ac spécifiques, que ce soit de la taille de l’individu, de son poids (lié à sa condition corporelle), de sa variation de poids entre deux intervalles de capture (lié à son investissement entre ces deux évènements) et de la taille moyenne des œufs pondus (lié à ses qualités de reproducteur). Il est à noter néanmoins que la taille réduite des échantillons, et la forte immunogénicité du vaccin, développée précédemment, n’ont pas fourni les meilleures conditions pour détecter une telle relation. Cependant, cette relation n’a pas non plus été mise en évidence chez le goéland marin, espèce pour laquelle des taux plus variables d’Ac avaient été observés. 2. Interférence entre transmission d’Ac maternels et mise en place de l’immunité du poussin L’inefficacité d’un vaccin à cause d’anticorps d’origine maternelle a été découverte chez l’homme avec l’utilisation du vaccin oral contre la poliomyélite (Perkins et al. 1959) et du vaccin vivant contre la rougeole (Albrecht et al. 1977). Depuis, cet effet a été constaté chez d’autres espèces (Witter et Burmester 1979, Eidson et al. 1982). Mais à notre connaissance, l’étude de ce phénomène en populations naturelles ainsi que de ses implications en écologie évolutive n’avaient pas encore été abordées. 36 II Application à l’étude des interactions hôte-parasite, des effets maternels et de l’immunité du jeune Nous avons montré un effet du caractère vacciné ou non de la mère sur l’évolution du taux d’anticorps du poussin dans les premières semaines de vie. De plus, malgré des échantillons de taille réduite, nos données suggèrent une augmentation des taux en anticorps anti-NDV des poussins n’ayant pas reçu d’anticorps maternels, qui répondent donc à leur vaccination à 1 jour. En revanche, la présence d’anticorps maternels a été associée à une décroissance des taux d’anticorps spécifiques et nous n’avons pas mis en évidence de réponse au vaccin pour les poussins issus de mères vaccinées. Ce phénomène suggère, pour ce type d’antigène, l’existence d’une interférence entre la présence d’anticorps et la mise en place de l’immunité du jeune. Les Ac maternels pourraient empêcher, ou tout au moins diminuer, la réponse spécifique induite par l’exposition à l’antigène. Ces résultats sont cohérents avec une étude menée, à plus court terme, chez des oiseaux domestiques (Eidson et al. 1982). Elle a montré le même effet de la transmission d’anticorps maternels : à l’âge d’environ trois semaines, les taux des poussins vaccinés à un jour issus de mères non vaccinées, deviennent supérieurs à ceux de mères vaccinées. L’intérêt pour l’estimation et la mesure des effets maternels est loin d’être récent (voir Mousseau et Fox 1998 pour une revue) et le transfert d’immunoglobulines de la mère au petit est connu depuis longtemps, notamment chez les mammifères (voir Anderson 1995 pour une revue). Pourtant, l’interprétation de ces phénomènes sous le jour des théories d’écologie évolutive est relativement nouveau (Franck 2002). D’autre part, peu d’études expérimentales en populations naturelles ont considéré l’effet de l’exposition à un parasite sur la réponse immunologique après une année. A notre connaissance seuls Nordling et al. (1998) et Ardia et al. (2003) ont abordé ce thème, et en se limitant à l’effet sur les adultes. Cette question est intéressante si l’on considère le caractère saisonnier de l’exposition à de nombreux parasites, que ce soit dû au cycle des parasites (tiques, certains trématodes, cestodes ou nématodes,…), à une exposition annuelle (sites de reproduction, de migration, climat …) ou à une possible réactivation saisonnière de l’effet des parasites (Gylfe et al. 2000). Cette étude, menée en populations naturelles apporte donc des éléments nouveaux pour la compréhension du rôle joué par les effets maternels dans le cadre des interactions hôtes-parasites. La réponse induite, potentiellement adaptative, a une dynamique qui peut se répercuter sur l’investissement dans l’effort reproducteur au cours de futures saisons de reproduction, période pendant laquelle l’individu sera exposé au parasite. 37 Conclusion et perspectives CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES DE LA SECONDE PARTIE En conclusion, cette étude a mis en évidence, un an après exposition, un transfert d’anticorps spécifiques dans les œufs associé à une augmentation des taux d’anticorps spécifiques dans le plasma des femelles de mouettes tridactyles. Nous avons par ailleurs montré un tel transfert d’Ac spécifiques dans les oeufs chez les goélands marins, ainsi qu’une forte corrélation des taux en anticorps au sein des couvées. Enfin, nos résultats suggèrent un effet de la transmission d’Ac maternels sur la réponse des poussins dans les premières semaines de vie à un vaccin administré à l’âge de 1 jour. Cependant, de nombreux points restent à éclaircir pour mieux appréhender les implications écologiques et évolutives du transfert d’Ac spécifiques de la mère au poussin, et en particulier des conséquences d’un tel transfert sur la mise en place du système immunitaire du jeune. Moment de l’exposition et dynamique de la transmission d’Ac maternels dans un système hôte-parasite naturel. La mouette tridactyle est parasitée par la tique des oiseaux de mer, Ixodes uriae, ectoparasite hématophage. Cette dernière est vecteur de la bactérie Borrelia burgdorferi. De précédentes études ont souligné l’importance de l’hétérogénéité spatiale de ce système hôte-parasite : (1) la distribution du parasite et la dynamique de l’hôte sont variables dans l’espace mais relativement prévisibles dans le temps (Boulinier et al. 1996, 2002), (2) sur le plan génétique, les populations du parasite sont structurées entre espèces hôtes (McCoy et al. 2001) et leur taux de dispersion dépend de l’hôte (McCoy et al. 2003), et (3) en termes d’interactions locales entre l’hôte et le parasite, la réponse des mouettes aux parasites comprend un effet maternel tel que la transmission d’anticorps spécifiques dans les œufs (Gasparini et al. 2001, 2002), mais aussi la possibilité que le parasite soit adapté localement à son hôte (McCoy et al. 2002). Ainsi, l’exposition au parasite n’est pas uniforme : dans certaines zones, les mères et les poussins sont exposés au parasite. Dans d’autres zones, les mères ne semblent pas avoir été exposées au parasite. Pour étudier leur effet sur le transfert d’Ac maternels et l’impact sur le système immunitaire du jeune, une expérimentation pourrait permettre de manipuler le niveau d’exposition au parasite (déparasitage de portions de falaise, de nids voire d’individus à l’aide d’acaricide sélectif) ainsi que le moment de l’exposition du poussin (par exemple en déplaçant les poussins d’un nid non infecté à un nid infecté à différents âges). Ceci serait alors étudié de manière expérimentale, dans un système naturel où l’hôte et le parasite ont coévolué (Shedon et Verhulst 1996). 38 Conclusion et perspectives En quoi la transmission d’Ac maternels peut-elle affecter l’épidémiologie d’un parasite dans une population d’hôte ? En plus de sa spécificité et de son caractère induit, une caractéristique importante de la réponse immune est sa dynamique temporelle : le niveau et le type de réponse varient dans le temps. Ainsi, la variation du statut infectieux de la mère peut affecter le transfert d’anticorps maternels : au niveau populationnel, la dynamique de l’immunité de l’individu a été depuis longtemps incorporée dans des modèles théoriques type S.E.I.R. (Susceptible, Infected, Exposed, Resistant) (Anderson et May 1991). Tenir compte de la transmission d’anticorps maternels pourrait être important en terme de modélisation de l’effet potentiel des parasites sur les populations d’hôtes, mais aussi en terme d’épidémiologie (Blasco et al. 2001). Existe-t-il plusieurs stratégies de transmission des anticorps maternels selon le pathogène ? Divers travaux chez les oiseaux domestiques (Heimel 1995 pour revue) ont montré que le taux de transmission des anticorps de la mère au poussin n’est pas le même selon l’antigène contre lequel ils sont dirigés. D’autre part, il a été montré que selon le pathogène contre lequel ils sont dirigés, les Ac maternels pouvaient protéger le petit plus ou moins efficacement (Davelaar et Kouwenhoven 1977, Van der Heide et al. 1976), voire être incapables d’empêcher l’infection (Fahey et al. 1983). La virulence du pathogène et son degré de pathogénicité pour le poussin jouent-ils un rôle important dans le transfert d’Ac maternels ? En d’autres termes, le choix de la stratégie adoptée pourrait dépendre de la pathogénicité du parasite et du risque d’exposition de la descendance : face à un parasite peu dangereux, le choix pourrait être d’investir peu dans les anticorps transmis, permettant au poussin de développer ses propres défenses. A l’inverse, face à un pathogène risquant de causer la mort du poussin à court terme, la priorité pourrait être de protéger le petit au maximum. Par ailleurs, dans quelle mesure la réponse est-elle adaptative, sachant que suivant le parasite/pathogène impliqué, l’efficacité va pouvoir varier et le gain en fitness pouvoir être variable (Norris et Evans 2000) ? Ces questions pourront être abordées par une approche comparative mais aussi théorique. Cette dernière permettrait d’étudier le gain en fitness en faisant varier la virulence du pathogène, l’efficacité de l’immunité conférée par la mère, le niveau d’interférence des Ac maternels avec la mise en place de l’immunité du poussin. Enfin, certains travaux suggèrent non pas l’interférence des Ac maternels avec la mise en place du système immunitaire du petit mais plutôt un effet de stimulation par « copie » du répertoire d’anticorps transmis par la mère (Anderson 1995). Au niveau 39 Conclusion et perspectives évolutif, quels sont les facteurs susceptibles d’avoir orienté l’importance de l’un ou l’autre de ces mécanismes, quels sont les poids respectifs du parasite et de l’hôte dans cette orientation ? Les implications en terme de coût de la reproduction et d’augmentation de la fitness du petit sont bien évidemment très grandes. 40 Conclusion et perspectives CONCLUSION GENERALE La vaccination est de plus en plus utilisée pour étudier les coûts et les compromis (trade-offs) associés à la réponse immunitaire de l’hôte au parasite. Par ailleurs, certaines expériences utilisant la vaccination apportent des informations sur les relations entre la résistance aux parasites et la sélection sexuelle ainsi que sur les conséquences de la variabilité des réponses immunitaires au sein des populations naturelles. Dans une étude conduite au sein de populations naturelles d’oiseaux, nous avons voulu tester l’influence de l’exposition à un parasite une année donnée sur le transfert d’Ac spécifiques dans les œufs l’année suivante, ainsi que l’influence de la réexposition au parasite avant la ponte et de la « qualité » des individus sur la quantité d’anticorps transmis. Par ailleurs, nous nous sommes attachés à mettre en évidence une éventuelle interférence de ce transfert d’anticorps avec la mise en place du système immunitaire du poussin. Nous avons donc exposé deux espèces d’oiseaux de mer à un vaccin contre la maladie de Newcastle. Chez la mouette tridactyle, nous avons mis en évidence, un an après exposition, un transfert d’anticorps spécifiques dans les œufs associé à une augmentation des taux d’anticorps spécifiques dans le plasma des femelles. Nous avons par ailleurs montré, un an après exposition, le transfert d’Ac spécifiques dans les oeufs chez les goélands marins ainsi qu’une forte corrélation des taux en anticorps au sein d’une couvée. Enfin, nos résultats suggèrent un effet de la transmission d’Ac maternels sur la réponse des poussins dans les premières semaines de vie à un vaccin administré à l’âge de 1 jour. Pourtant, de nombreuses questions restent sans réponse. (1) En quoi le moment de l’exposition affecte-t-il la dynamique de la transmission d’Ac maternels dans un système hôte-parasite naturel ? (2) En quoi la transmission d’Ac maternels va-t-elle affecter l’épidémiologie du parasite ? (3) Dans quelle mesure la réponse est-elle adaptative, sachant que suivant le parasite/pathogène impliqué, l’efficacité va pouvoir varier et le gain en fitness pour la descendance pouvoir être variable. (4) Enfin, la virulence du pathogène et son degré de pathogénicité pour le poussin jouent-ils un rôle important dans le trade-off entre conférer au petit une immunité passive protectrice et interférer avec la mise en place de son système immunitaire ? Des approches aussi bien expérimentales que théoriques permettront de répondre à ces questions. 41 Références bibliographiques REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES Agrawal, A. A. 2001. Phenotypic plasticity in the interactions and evolution of species. Science, 294, 321-326. Albrecht, P., Saltzman, E. J., Krugman, S. (1977). Persistence of maternal antibody in infants beyond 12 months: mechanism of measles vaccine failure. J. Pediatry, 91, 715-718. Anderson, M. (1994) Sexual Selection. Princeton University Press Anderson, R. M., May, R. M. (1991). Infectious diseases of humans: Oxford university press. Anderson, R. W. (1995). On the maternal transmission of immunity: a 'molecular attention' hypothesis. Biosystems, 34, 87-105. 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L’écologiste n’étudie pas des cellules ou des organes ni même des individus mais des populations, des peuplements et des écosystèmes » (Barbault 1981). Haeckel, en 1866 a proposé ce terme pour désigner la science qui étudie les rapports entre les organismes et le milieu où ils vivent. Cette définition reste valable même si l’écologie a évolué pour se trouver à l’heure actuelle à l’interface, entre autres, de la physiologie, de l’éthologie, de la génétique et de la systématique. Fitness : (parfois traduit par aptitude phénotypique) nombre de descendants à long terme. En réalité, comme on ne peut pas la calculer, ni même être certain qu'une action d'aujourd'hui aura un effet sur les générations lointaines à venir, on l'emploie surtout en tant que "probabilité d'avoir beaucoup de descendants à long terme". Les théories de l’écologie et de l’évolution sont basées sur la nécessité pour un individu de maximiser sa fitness ou, plus exactement sur le fait que les gènes permettant d’augmenter la fitness des individus seront sélectionnés au cours du temps. Trade-offs (mot à peu près équivalent à compromis) : compromis entre l’allocation de ressources limitées entre différents traits d’histoire de vie, avec, comme objectif, la maximisation de la fitness. En quelque sorte, l'individu doit adapter au mieux la répartition des ressources disponibles pour maximiser sa fitness. Rq : Ces phrases peuvent paraître finalistes mais il est commode en écologie évolutive de raisonner de manière finaliste. Il est à chaque fois sous-entendu que les mécanismes sont sous la dépendance des règles d'évolution. En effet, la sélection naturelle peut amener à une adaptation des organismes, adéquation entre un organisme et son environnement qui lui permet de se perpétuer plus efficacement dans son milieu habituel que tout autre organisme introduit dans ce milieu. Pour que le caractère évolue, il faut que le caractère soit variable dans la population, qu'il y ait un support génétique à cette variabilité, que le succès reproducteur soit variable et que le succès reproducteur soit associé au caractère. Ainsi, parler en terme de stratégies adoptées par les individus ne doit pas choquer. Bien sûr, cette démarche peut paraître finaliste voire anthropomorphique. Mais ce type de langage est très utile. Dans certains domaines de la biologie, il est devenu commun de décrire les comportements, les adaptations des plantes, des animaux ou même des gènes de cette Annexe 1: Glossaire manière. Ce langage nécessite l’attention et les connaissances nécessaires pour le décrypter. Mais il est parfois plus clair de dire "l'individu doit ajuster au mieux sa réponse au milieu" que de dire "la sélection naturelle conduit à retenir systématiquement, de génération en génération, les individus qui ont les caractères amenant une réponse la plus ajustée aux agressions du milieu". Traits d’histoire de vie (expression dérivée de l’anglais life history traits): paramètres, caractéristiques liées à la croissance, la survie et la reproduction des individus. Plasticité phénotypique : capacité à présenter des adaptations des caractéristiques morphologiques, physiologiques, etc. en fonction de différentes conditions environnementales Annexe 2: Tableau I Tableau I. Etude en écologie impliquant l’exposition à un nouvel antigène et la production d’anticorps Sujet de l’étude Antigène utilisé Espèce (nom commun/ Conclusions Réference nom latin ) Trade-offs entre traits d’histoire de vie et fonction immunitaire Challenge immun Vaccin contre la Gobemouche noir/ L’activation de la réponse immunitaire [Ilmonen et al. diphtérie/tétanos Ficedula hypoleuca entraîne une réduction du succès 2000] reproducteur SRBC a SRBC Etourneau sansonnet/ L’activation de la réponse immunitaire ne Sturnus vulgaris diminue pas le score reproducteur Hirondelle bicolore / L’effort reproducteur réduit la réponse Tachineta bicolor immunitaire à long terme [Råberg et al. 2000] [Ardia et al. 2003] Manipulation des traits d’histoire de vie ou étude corrélative entre un trait et l’immunocompétence KLHb Hirondelle bicolore / Le niveau de la réponse immunitaire à [Hasselquist et al. Tachycineta bicolor médiation humorale est corrélé à la date de 2000] ponte et reflète l’effort reproducteur Vaccin contre le NDVc Gobemouche à collier / L’effort reproducteur diminue l’intensité de [Nordling et al. Ficedula albicollis la réponse immunitaire spécifique et la 1998] résistance aux parasites SRBC Diamant mandarin / L’effort reproducteur diminue l’intensité de [Deerenberg et al. Taeniopygia guttata la réponse immunitaire spécifique L’effort 1997] reproducteur diminue l’intensité de la Annexe 2: Tableau I réponse immunitaire spécifique Statut nutritionnel SRBC Serin cini / Serinus serinus L’immunocompétence est liée au statut [Hoi-Letner et al. nutritionnel 2001] Vaccin contre la Faisan / Phasianus Les ornements sexuels reflètent la condition [Ohlsson et al. diphtérie/tétanos colchicus nutritionnelle 2002] Divers antigènes (revue)) Volaille L’alimentation affecte la résistance au [Klasing 1998] maladies infectieuses Coût énergétique de la réponse immunitaire Vaccin contre la Mésange bleue/ Parus Stress énergétique, immunosuppression et [Svensson et al. diphtérie/tétanos caeruleus coût de la réponse humorale 1998] SRBC Mésange charbonnière / Un challenge immun augmente l’activité [Ots et al. 2001] Parus major métabolique basale Réponse immunitaire et sélection sexuelle Immunocompétence reflétée par les caractères sexuels secondaires KLH SRBC Etourneau sansonnet / La longueur des séquences de chant reflète [Duffy et Ball Sturnus vulgaris l’immunocompétence 2002] Effraie des clochers / Tyto Les taches sur le plumage reflètent [Roulin et al. 2000] alba l’immunocompétence Mérion superbe / Malurus La testostérone diminue Utilisation d’hormones sexuelles SRBC [Peters 2000] Annexe 2: Tableau I cyaneus l’immunocompétence mais en liberté, les mâles avec plus de testostérone sont plus immunocompétents KLH SRBC Etourneau sansonnet / La testostérone diminue Sturnus vulgaris l’immunocompétence à médiation humorale Moineau domestique / La testostérone augmente l’expression de Passer domesticus caractères sexuels mais interagit avec la [Duffy et al. 2000] [Evans et al. 2000] corticostérone pour affecter l’immunocompétence humorale Un challenge immune affecte les caractères sexuels secondaires SRBC Merle noir / Turdus merula Un challenge immun diminue la coloration [Faivre et al. 2003] du bec Effets maternels immunologiques NDV Hirondelle rustique / Les femelles se reproduisant avec des males Hirundo rustica plus attractifs (caractères sexuels [Saino et al. 2002] manipulés) investissent plus dans leurs oeufs SRBC a Hirondelle bicolore / Pas de mise en evidence de transfert d’Ac [Lozano et Tachycineta bicolor maternels Ydenberg 2002] Abbréviations : SRBC, Sheep red blood cells ; KLH, Keyhole limpet haemocyanin ; NDV, Newcastle disease virus. Annexe 3 : Tableau II Tableau II. Sources de variabilité dans la réponse à la vaccination La réponse varie notamment en terme de spécificité, de durée, d’effet mémoire, ainsi que de classe, titre, isotope et avidité des anticorps Conséquences pour les conclusions écologiques Liée aux antigènes Voie activée Vaccins inactivés, sous-unités ou toxines : voie exogène en général => Niveau élevé d’anticorps, peu ou pas de réaction à médiation cellulaire et immunité des Effets de différents “parasites” testé (intracellulaire muqueuses (IgA) [Pastoret 1997] ou extracellulaire), différents coûts évalués Vaccins vivants (naturels ou atténués) ou action d’adjuvants (CD4+/Th1 ou CD8) => réponse cellulaire (+/- humorale) [Pastoret 1997] “Superparasitisme” Interférence avec d’autres antigènes injectés [Uylveige et al. 2000] Liée aux adjuvants : Titre et durée de la réponse en anticorps . Permet de choisir le niveau de challenge immun [O’Hagan et al. 2001] Détermination de l’avidité des anticorps, de leur spécificité, des isotypes et sous-classes Stimuler l’immunité constitutive [O’Hagan et al. 2001] Etudier précisément la dynamique de la réponse immunitaire Pour les conséquences, voir la Encadré 1 Annexe 3 : Tableau II Une manière de tester les coûts associés à la Induction de l’immunité à médiation cellulaire [Pastoret 1997] réponse à médiation cellulaire Liée aux individus Environnement / aptitude à l’utiliser Nourriture disponible (quantité de différentes substances[caroténoïdes,…]) [Ohlsson et al. 2002, Saino et al. 2000] Niveau de “stress” [Apanius 1998] (interactions sociales [De Groot 2001], stress thermique, qualité de l’habitat,…) Statut immunitaire de l’hôte et infections passées [Pastoret 1997] Caractéristiques individuelles Age Sujet de nombreuses études mais peuvent constituer des variables confondantes si elles ne sont pas prises en compte Sexe [Rosen et al. 1999] CMH/HLA [Gilbert et al. 1998] gènes autres que liés au CMH [Yonash et al. 2001] Immunodéprimés ou pas (YOPIs : Young, Old, Pregnant, Immunodepressed) Lié au protocole vaccinal = “histoire de l’infection” Re-éxposition aux antigènes Permet de tester les prédictions liées à la Nombre d’injections dynamique de l’immunité Intervalle entre deux injections Conséquences pratiques Interactions entre ces facteurs Annexe 4 : Encadré 1 Encadré 1. Effets « collatéraux » potentiels des vaccins Hypersensibilité/réactions allergiques immédiates : Ce type de réaction est relativement rare (e.g., pour 1 personne sur 19 000 présentant une réaction fébrile, 26 sur 76 000 souffrent de réactions locales au vaccin contre la diphtérie et le tétanos chez l’homme) (Zent et al. 2002). Cependant, dans les études d’écologie, les vaccins utilisés ont souvent été mis au point pour d’autres espèces, ce qui pourrait conduire à une augmentation du nombre de tels problèmes. Interactions avec d’autres composantes du système immunitaire : Par exemple, le vaccin contre le NDV a des propriétés antitumorales. Ces propriétés antitumorales pourraient être la résultante d’une production de cytokines (Csatary et al. 1993). Ce phénomène pourrait conduire à de fausses interprétations, particulièrement quand l’immunocompétence à médiation humorale et cellulaire sont testées chez le même animal : la vaccination contre le NDV pourrait influencer la réponse à médiation cellulaire. Toxicité des adjuvants : Les adjuvants vaccinaux (Hunter 2002) sont nécessaires à la production d’une réponse forte et prolongée mais ils peuvent influencer bien plus que le niveau et la durée de la réponse immunitaire (e.g. effets comportementaux et physiologiques). Par exemple, un investissement réduit dans la reproduction suivant un challenge immun pourrait être dû à des effets de l’adjuvant et non à la réponse immunitaire per se. Effets en terme de stress : La plupart des expériences de vaccination impliquent la capture des individus. L’effet d’un stress potentiel associé à la capture et à la manipulation des individus est souvent supposé contrôlé par la comparaison à un groupe d’individus pour lesquels une solution saline est injectée. Un stress aigu peut supprimer certaines composantes de l’immunité et en augmenter d’autres (Moraska et al. 2002), ceci devrait être pris en compte lors de l’interprétation des résultats. Protection croisée : De nombreuses études provoquent une immunisation contre des antigènes non pathogènes ou auxquels les animaux ne sont pas exposés habituellement. Pourtant certains vaccins peuvent induire une immunité non spécifique (Huang et al. 2000) : les animaux du groupe vacciné peuvent ainsi être protégés contre des pathogènes alors que les animaux du groupe contrôle ne le sont pas. Ceci peut réduire la capacité à détecter le coût d’un challenge immunitaire. Annexe 5 : Encadré 2 Encadré 2. Vaccination et évolution de la virulence La possibilité que les parasites puissent évoluer en réponse à la pression de sélection liée aux programmes de vaccination a été explorée (Mc Lean 1995). Des études se sont penchées sur l’apparition et la multiplication de mutants qui présentent des épitopes différents de ceux présents dans le vaccin (Mc Lean 1995, Gupta et al. 1997). Des développements théoriques récents de ces études ont considéré une adaptation alternative à la vaccination, impliquant les traits d’histoire de vie du pathogène, notamment sa virulence (mortalité induite de l’hôte) et le taux de transmission (Gandon et al. 2001). Ces modèles ont incorporé une théorie évolutive de la virulence dans un cadre épidémiologique. Cette théorie prédit que les traits d’histoire de vie du parasite vont évoluer pour maximiser la fitness du parasite. En particulier, la compétition entre les souches de parasites pourrait conduire à une évolution vers une plus grande virulence, résultant de trade-offs entre transmission et virulence, ce à différents niveaux. Par exemple, la souche la plus virulente au sein d’un hôte pourrait avoir une plus grande chance d’être compétitive vis-à-vis des autres souches et donc d’être transmise. En ce qui concerne l’effet des programmes de vaccination, des modèles mathématiques ont été utilisés pour étudier l’effet potentiel de vaccins variables dans leur type et dans le niveau d’efficacité (Gandon et al. 2001). Les résultats exacts de la modélisation vont dépendre de la biologie de chaque interaction hôte-parasite ainsi que des hypothèses de base du modèle (Gandon et al. 2001, Soubeyrand et Plotkin 2002, Gandon et al. 2002), mais les vaccins mis au point pour diminuer le taux de croissance des parasites et/ou leur toxicité sont susceptibles de diminuer la sélection contre des parasites virulents. Ceci pourrait ainsi conduire à l’évolution vers de plus hauts taux de virulence intrinsèque et donc à des maladies plus graves chez les individus non vaccinés. Inversement, des vaccins mis au point pour bloquer l’infection n’induiraient pas de tels effets et pourraient même orienter la sélection vers une moins grande virulence. C’est pourquoi un parasite qui suit une stratégie conduisant à une virulence optimale au sein d’un hôte résistant va induire une virulence non optimale chez un hôte sensible, en relation avec les conditions dans lesquelles se fait l’évolution de la virulence. Les vaccins réduisant le taux de croissance des parasites au sein des hôtes ou agissant sur les toxines pourraient sélectionner des souches plus virulentes s’ils réduisent la mortalité de l’hôte sans coût pour le parasite et donc réduire la sélection contre les parasites les plus virulents. Cette approche met en évidence la nécessité de connaître le fonctionnement des différents vaccins et leur implications évolutives et épidémiologiques. Cela souligne aussi la nécessité d’une bonne connaissance biologique du système étudié et d’un suivi des indicateurs de l’évolution de la virulence lors de programmes de vaccination à large échelle. UTILISATION DE LA VACCINATION EN ECOLOGIE EVOLUTIVE : APPLICATION A L’ETUDE DES INTERACTIONS HOTE-PARASITE, DES EFFETS MATERNELS ET DE L’IMMUNITE DU JEUNE CHEZ LA MOUETTE TRIDACTYLE (Rissa tridactyla) ET LE GOELAND MARIN (Larus marinus) NOM et Prénom : STASZEWSKI Vincent RESUME : En écologie, la vaccination est de plus en plus utilisée pour étudier les coûts et les compromis (trade-offs) associés à la réponse immunitaire de l’hôte au parasite, les relations entre la résistance aux parasites et la sélection sexuelle ou les conséquences de la variabilité des réponses immunitaires au sein des populations naturelles. Nous avons dans une première partie étudié ces problématiques dans un cadre général puis nous avons présenté les résultats d’un travail expérimental qui s’est orienté donc selon deux axes : (1) Quelle est l’influence de l’exposition à un parasite une année donnée sur le transfert d’Ac spécifiques dans les œufs l’année suivante ? Quelle est l’influence de la réexposition au parasite avant la ponte et de la « qualité » des individus sur la quantité d’anticorps transmis ? (2) En quoi la transmission d’Ac spécifiques peut-elle interférer avec la mise en place de l’immunité du poussin ? En effet, la présence d’anticorps maternels, fixant rapidement les pathogènes, est susceptible de conférer au petit une immunité passive, augmentant sa survie. Mais elle peut aussi interférer avec la mise en place du système immunitaire. Pour répondre à ces questions nous avons donc exposé à un antigène (vaccin contre la maladie de Newcastle) des oiseaux femelles (mouettes tridactyles (Rissa tridactyla) et goélands marins (Larus marinus)), pour étudier la transmission, l’année suivante, d’Ac spécifiques à cet antigène dans leurs œufs. Chez la mouette tridactyle, nous avons mis en évidence, un an après exposition, un transfert d’Ac spécifiques dans les œufs associé à une augmentation des taux d’Ac spécifiques dans le plasma des femelles. Nous avons par ailleurs montré, un an après exposition, le transfert d’Ac spécifiques dans les oeufs chez les goélands marins ainsi qu’une forte corrélation des taux en Ac au sein d’une couvée. Enfin, nos résultats suggèrent un effet de la transmission d’Ac maternels sur la réponse des poussins, dans les premières semaines de vie, à un vaccin administré à l’âge de 1 jour. Et pourtant de nombreuses questions restent sans réponse. (1) En quoi le moment de l’exposition affecte-t-il la dynamique de la transmission d’Ac maternels dans un système hôte-parasite naturel ? (2) En quoi la transmission d’Ac maternels va-t-elle affecter l’épidémiologie du parasite ? (3) Dans quelle mesure la réponse est-elle adaptative, sachant que suivant le parasite/pathogène impliqué, l’efficacité va pouvoir varier et le gain en fitness pour la descendance pouvoir être variable. (4) Enfin, la virulence du pathogène et son degré de pathogénicité pour le poussin jouent-ils un rôle important dans le trade-off entre conférer au petit une immunité passive protectrice et interférer avec la mise en place de son système immunitaire ? Des approches aussi bien expérimentales que théoriques permettront de répondre à ces questions. Mots-clés : Effet maternel, interactions hôte-parasite, immunité du jeune, anticorps spécifiques JURY : Président Directeur Assesseur Invité Pr Pr Boulouis Pr Courreau Dr Boulinier Adresse de l’auteur : Laboratoire d’Ecologie, UPMC 7 Quai St-Bernard, Case 237 75005 Paris USE OF VACCINATION IN EVOLUTIONNARY ECOLOGY: APPLICATION TO THE STUDY OF HOST-PARASITE INTERACTIONS, MATERNAL EFFECT AND JUVENILES’ IMMUNITY IN KITTIWAKES (Rissa tridactyla) AND BLACKBACKED GULLS (Larus marinus) SURNAME : STASZEWSKI Given name : Vincent SUMMARY : Vaccination is increasingly used in ecology to study trade-offs linked to host immune response to parasites, the relationship between resistance to parasites and sexual selection or consequences of variability of immune responses in wild populations. We study these questions in a general frame in a first part then, we present the results of an experimental study, considering two main questions: (1) How does exposure to parasites influence antibodies (Ab) transfer in the egg after one year? Which is the influence of reexposure to parasite before egg laying and of individual quality on the quantity of antibodies transmitted? (2) Could transfer of specific antibodies interfere with chick immune response? In fact, maternal antibodies, by fixing antigen quickly, could increase chick’s survival, conferring passive immunity. But it might also interfere with early immune response. To address these questions, we exposed female kittiwakes (Rissa tridactyla) and Great Black Backed (GBB) gulls (Larus marinus) to an antigen (vaccine against Newcastle Disease) to study transfer, after one year, of specific antibodies in egg yolk. For kittiwakes, we observed, one year after exposure, the transfer of specific antibodies parallel to increased levels of specific Ab in mothers’ plasma. We also observed, one year after exposure, the transfer of specific Ab in the eggs of GBB gulls and a strong correlation among intra-clutch Ab levels. Finally, our results suggest an effect, during first weeks posthatching, of maternal transfer of Ab on chick’s immune response to a vaccine injected at one day. However, some questions remain unanswered. (1) Does timing of exposure affect the dynamics of transfer of maternal Ab in a natural host-parasite system? (2) Does transfer of maternal Ab affect parasite epidemiology? (3) Is this response adaptative given that, considering parasite, efficiency and increase of offspring fitness may vary? (4) Finally does parasite virulence and pathogenicity affect importantly the trade-off between conferring to the young a protective passive immunity and interfering with its immune response? Experimental as well as theoretical approaches might help answering these questions. KEY WORDS: maternal effect, host-parasite interactions, juvenile’s immunity, specific antibodies JURY : President Director Assessor Guest Pr Pr Boulouis Pr Courreau Dr Boulinier Adresse de l’auteur : Laboratoire d’Ecologie, UPMC 7 Quai St-Bernard, Case 237 75005 Paris