2°) Voir animateur et intervenants
3°) Jean- Louis Triaud ( JLT ) brosse tout d’abord à grands traits l’islamisation de
l’Afrique et souligne l’importance du temps long en la matière. Il distingue la
situation du :
- Nord du continent, où la conquête du VIIème siècle ne doit pas masquer la
profonde dilution des apports arabo-musulmans dans le substrat autochtone.
Vu de Bagdad, le Maghreb ( couchant ) reste, des siècles durant, un « Far-
West ». Ainsi L’Afrique du Nord ne sera islamisée que vers 950 et arabisée
seulement deux siècles plus tard.
- Pour ce qui concerne l’Afrique sub-saharienne, JLT parle d’une imprégnation
par capillarité. Après des contacts initiaux mais circonstanciés datés d’environ
800, ce sont des commerçants ou des chefs de guerre arabes qui favorisent au
XIème siècle l’avancée de l’Islam dans les « Soudan » ( mot d’origine arabe
signifiant « noir » ). Est avérée l’existence, en Afrique noire, au XIVème siècle
d’un Islam de lettrés (à Tombouctou), au XVIIème de confréries soufi ( 1er
étudiants : « talibé » ), au XVIII et XIXème d’un Islam politiquement organisé
( califat de Sokoto et application de la Shari’a ).
JLT rappelle que la colonisation a favorisé la progression de l’Islam ( refuge
culturel et identitaire ) ; qu’aujourd’hui 1 africain sur 3 est musulman et que
l’Afrique est actuellement le théâtre d’une floraison de centre d’activités et
d’association d’obédience islamiste, développement non sans rapport avec
l’actualité internationale.
Jean-Claude Penrad ( JCP ) nous propose une plongée dans l’Afrique de l’Est,
objet de ses recherches les plus poussées. Il tient à souligner que bien avant
l’époque Mahométane, des échanges commerciaux , révélés par de difficiles
fouilles d’habitats et de coques de bateaux, s’opèrent entre les côtes de la
péninsule arabe et les côtes africaines de l’Océan Indien et du Golfe Persique.
JCP qualifie « d’Islam des comptoirs » la très lente imprégnation des pratiques
musulmanes dans cette partie de l’Afrique, notant l’absence de prosélytisme, moins
encore de jihâd du IX au XVIème siècle. Les découvreurs, puis colonisateurs
européens et notamment portugais occasionneront une radicalisation de cet Islam
est-africain ( essor des confréries et des conversions ), sur fond de rivalités
économiques et de tentatives de christianisation.
Bernard Salvaing ( BS ) est ensuite invité par l’animateur à restreindre au
maximum son exposé ( plus spécifiquement centré sur l’Afrique sahélienne ), faute
de temps. BS tient cependant à souligner que dans cette Afrique aussi, on relève
contrastes et paradoxes entre un Islam guerrier et un Islam pacifique, drainant le
long des routes du commerce, à travers le Sahara, durant des centaines d’années,
des marchands, des lettrés et plus tard des soufis, porteurs d’une acculturation
progressive et pacifique, de techniques d’écriture, de connaissances en tout genre,
et d'une loi universelle, révélée et écrite : l’Islam. S’appuyant sur les exemples
du Mali et du haut Nigeria, BS insiste sur cette complexité du fait musulman en
Afrique et invite à se défier de toutes les lectures à sens unique séduisantes du fait
de l’actualité « chargée » de cette religion.