Théâtre classique des Français. 1831.

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Théâtre classique des Français. 1831.
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LES
FEMMES
SAVANTES,
COMÉDIE.
ACTE
PREMIER.
I.
SCÈNE
ARMANDE,
HENRIETTE.
ARMANDE.
le beau nom de fille est un titre, ma soeur,
Quoi!
Dont vous voulez quitter la charmante
douceur!
Et de vous marier vous osez faire fête!
Ce vulgaire
dessein vous peut monter
en tête!
HENRIETTE.
Oui, ma soeur.
ARMANDE.
Ah! ce oui se peut-il supporter?
Et sans un mal de coeur sauroit-on
l'écouter?
Qu'a donc
Ma soeur?..?
HENRIETTE.
le mariage
en soi qui vous
ARMANDE.
Ah! mon
dieu! fi!
oblige,
4
LES
FEMMES
SAVANTES.
HENRIETTE.
Comment?
ARMANDE.
Ah!
fi!
vous dis-je.
Ne concevez vous point ce que, dès qu'on l'entend,
Un tel mot à l'esprit offre de dégoûtant,
De quelle étrange image on est par lui blessée,
Sur quelle sale vue il traîne la pensée?.
ma soeur,
N'en frissonnez-vous
point ? et pouvez-vous,
Aux suites de ce mot résoudre votre coeur ?
HENRIETTE.
Les suites de ce mot, quand je les envisage,
Me font voir un mari, des enfants, un ménage;
Et je ne vois rien là, si j'en puis raisonner,
Qui blesse la pensée, et fasse frissonner.
ARMANDE.
ô ciel ! sont pour vous plaire !
De tels attachements,
HENRIETTE.
Et, qu'est-ce qu'à mon âge on a de mieux à faire,
à soi, par le titre d'époux,
Que d'attacher
Un homme qui vous aime, et soit aimé de vous;
Et, de cette union de tendresse suivie,
Se faire les douceurs d'une innocente vie ?
Ce noeud bien assorti n'a-t-il pas des appas?
ARMANDE.
Mon dieu! que votre esprit est d'un étage bas!
Que vous jouez au monde un petit personnage,
aux choses du ménage,
De vous claquemurer
Et de n'entrevoir
point de plaisirs plus touchants
Qu'une idole d'époux, et des marmots d'enfants!
ACTE
I,
SCÈNE
I.
Laissez aux gens grossiers,
aux personnes
vulgaires,
Les bas amusements
de ces sortes d'affaires.
A de plus hauts objets élevez vos désirs;
un goût des plus nobles plaisirs,
Songez à prendre
de mépris le sens et la matière,
Et, traitant
comme nous, donnez-vous
toute entière.
A l'esprit,
à vos yeux,
Vous avez notre mère eu exemple
en tous lieux ;
on honore
Que du nom de savante
ainsi que moi, de vous montrer
sa fille ;
Tâchez,
aux clartés qui sont dans la famille,
Aspirez
aux charmantes
douceurs
Et vous rendez sensible
dans les coeurs.
de l'étude
Que l'amour
épanche
en esclave asservie,
Loin d'être aux lois d'un homme
ma soeur, à la philosophie,
Mariez-vous,
de tout le genre humain,
Qui nous monte au-dessus
à la raison l'empire
Et donne
souverain,
à ses lois la partie animale,
Soumettant
aux bêtes nous ravale.
Dont l'appétit
grossier
Ce sont là les beaux feux, les doux attachements
les moments
de la vie occuper
;
Qui doivent
sensibles
Et les soins où je vois tant de femmes
aux yeux des pauvretés
Me paroissent
horribles.
HENRIETTE.
Le Ciel, dont nous voyons que l'ordre est tout-puissant,
en naissant
nous fabrique
Pour différents
;
emplois
d'une étoffe
Et tout esprit n'est pas composé
Qui se trouve taillée à faire un philosophe.
aux élévations
Si le vôtre est né propre
les spéculations,
Où montent
des savants
Le mien est fait, ma soeur, pour aller terre à terre;
5
LES FEMMES
6
SAVANTES.
Et dans les petits soins son foible se resserre.
;
Ne troublons
point du Ciel les justes réglements
Et de nos deux instincts suivons les mouvements.
Habitez, par l'essor d'un grand et beau génie,
Les hautes régions de la philosophie
;
Tandis que mon esprit, se tenant ici-bas;
Goûtera de l'hymen les terrestres
appas.
Ainsi, dans nos desseins, l'une à l'autre contraire,
Nous saurons toutes deux imiter notre mère :
Vous, du côté de l'âme et des nobles désirs ;
Moi, du côté des sens et des grossiers plaisirs ;
Vous, aux productions
d'esprit et de lumière;
Moi, dans celles, ma soeur, qui sont de la matière.
ARMANDE.
se régler,
on prétend
Quand sur une personne
C'est par les beaux côtés qu'il faut lui ressembler;
Et ce n'est point du tout la prendre
pour modèle,
Ma soeur, que de tousser et de cracher comme elle.
HENRIETTE.
Mais vous ne seriez pas ce dont vous vous vantez,
Si ma mère n'eût eu que de ces beaux côtés;
Et bien vous prend, ma soeur, que son noble génie
N'ait pas vaqué toujours à la philosophie.
De grâce, souffrez-moi,
par un peu de bonté,
Des bassesses à qui vous devez la clarté ;
Et ne supprimez
point, voulant
qu'on vous seconde,
Quelque petit savant qui veut venir au monde.
ARMANDE.
Je vois que votre esprit ne peut être guéri
Du fol entêtement
de vous faire un mari :
ACTE
I,
SCÈNE
I.
7
Mais sachons, s'il vous plaît, qui vous songez à prendre
:
Votre visée au moins n'est pas mise à Clitandre?
HENRIETTE.
Et par quelle raison n'y seroit-elle
pas ?
de mérite?
Est-ce un choix qui soit bas!
Manque-t-il
ARMANDE.
Non : mais c'est un dessein
qui seroit malhonnête
autre enlever
la conquête
Que de vouloir d'une
;
Et ce n'est pas un fait dans le monde
ignoré
ait pour moi hautement
Que Clitandre
soupiré.
HENRIETTE.
Oui : mais tous ces soupirs chez vous sont choses vaines,
Et vous ne tombez
humaines
;
point aux bassesses
renonce
Votre esprit à l'hymen
pour toujours,
a toutes vos amours.
Et la philosophie
au coeur nul dessein pour Clitandre,
Ainsi, n'ayant
?
Que vous importe-t-il
qu'on y puisse prétendre
ARMANDE.
Cet empire
que tient la raison sur les sens,
aux douceurs
des encens ;
Ne fait pas renoncer
refuser un mérite
Et l'on peut, pour époux,
on veut bien à sa suite.
Que, pour adorateur,
HENRIETTE.
Je n'ai pas empêché
qu'à vos perfections
Il n'ait continué
ses adorations
;
au refus de votre âme,
Et je n'ai fait que prendre,
de sa flamme.
Ce qu'est venu m'offrir
l'hommage
ARMANDE.
Mais, à l'offre des voeux d'un amant dépité,
Trouvez-vous,
je vous prie, entière sûreté?
SAVANTES.
FEMMES
pour vos yeux sa passion bien forte,
Croyez-vous
Et qu'en son coeur pour moi toute flamme soit morte?
HENRIETTE.
Il me le dit, ma soeur; et, pour moi, je le croi.
ARMANDE.
Ne soyez pas, ma soeur, d'une si bonne foi;
Et croyez, quand il dit qu'il me quitte et vous aime,
Qu'il n'y songe pas bien, et se trompe lui-même.
HENRIETTE.
Je ne sais; mais enfin, si c'est votre plaisir,
Il nous est bien aisé de nous en éclaircir :
Je l'aperçois
qui vient; et, sur cette matière,
Il pourra nous donner une pleine lumière.
8
LES
SCÈNE
II.
HENRIETTE.
ARMANDE,
HENRIETTE.
Pour me; tirer d'un doute où me jette ma soeur,
Entre elle et moi, Clitandre,
votre coeur;
expliquez
le fond, et nous daignez apprendre
Découvrez-en
Qui de nous à vos voeux est en droit de prétendre.
ARMANDE.
Non, non, je ne veux point à votre passion
;
Imposer la rigueur d'une explication
Je ménage les gens, et sais comme embarrasse
Le contraignant
effort de ces aveux en face.
CLITANDRE.
mon coeur, qui dissimule peu,
Non, madame,
Ne sent nulle contrainte
à faire un libre aveu.
Dans aucun embarras
un tel pas ne me jette;
CLITANDRE,
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