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Croissance : Hollande fait le gros dos et attend... 2016
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Charles Wyplosz est professeur d'économie internationale à l'Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID) à
Genève, et directeur du Centre international d'études monétaires et bancaires.
Ses principaux domaines de recherche sont les crises financières, l'intégration monétaire européenne, les politiques monétaires et
budgétaires ainsi que l'intégration monétaire régionale. Il intervient fréquemment comme expert auprès d'organisations internationales.
L'an passé, ce pauvre Monsieur Hollande avait annoncé une inversion de la courbe du chômage1, et d'inversion il n'y a point eu. C'était
vraiment risqué de sa part. On sait que le chômage varie en fonction de l'activité économique, mais avec un décalage de six à neuf mois en
moyenne. Or l'activité déclinait quand il a fait son annonce. Pour que les faits lui donnent raison, il aurait fallu un miracle. La punition pour
tant de hardiesse a été violente: plongée dans les sondages, effondrement électoral, obligation de nommer premier ministre son plus
sérieux rival. Tous les génies de la com qui gravitent autour du Président n'ont pas pu lui permettre d'échapper au ridicule.
Et voilà qu'il remet ça. Il nous promet un retournement économique2. Là, il a pris moins de risques. Au moment où il parlait, la plupart des
prévisionnistes annonçaient une croissance positive pour 2014. Il faut une jolie dose de naïveté pour s'enthousiasmer quand la croissance
passe de -0,2 % à + 0,1 %. Mais, bon, il a fallu à l'humanité des milliers d'années pour découvrir le chiffre zéro, il est peut-être normal que
Photo Clément Mahoudeau/Le Figaro
Crédits photo : CLEMENT MAHOUDEAU/Le Figaro
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ce chiffre fascine, même un Président. Le problème, c'est que la prévision économique est hautement imprécise.
S'ils sont vraiment sérieux, les prévisionnistes n'annoncent pas une croissance de 1 %, par exemple, mais entre 0,7 % et 1,3 %. Ce n'est pas
seulement de la prudence élémentaire, c'est tout simplement ce qu'ils trouvent dans leurs savants calculs statistiques. Mais, trêve de
considérations scientifiques, il se trouve que les résultats pour le premier trimestre de l'année sont annoncés quelques jours après
l'annonce du Président et que disent-ils? Zéro de croissance.3 Patatras, rebelote pour ce pauvre Monsieur Hollande.
Il est possible que le Président pourra bomber le torse, à la fin de l'année. Même plus tôt peut-être. Ces fameux résultats pour le premier
trimestre sont une estimation à la louche. L'honnêteté des producteurs de chiffres devrait se traduire par une annonce du genre: entre
-0,3 % et + 0,3 %. Dans quelques semaines, nous aurons une estimation plus précise, mais pas encore définitive, il faudra encore des mois
pour cela. Mais si en attendant on nous annonce (imprudemment, toujours) + 0,2 %, ce brave Monsieur Hollande aura droit à une ovation
admirative. Pas sûr que ça l'aide dans les sondages mais, s'il est normal, il doit bien avoir un amour propre.
De toute façon, il faut être honnête, le Président a fait son pronostic pour l'ensemble de l'année 2014. Là il joue presque sur du velours.
Presque. Parce que la situation économique de la France n'est pas rose du tout. Les exportations4 stagnent et les consommateurs ont du
mal à retrouver de goût de la dépense. Pas grand chose à attendre de ce côté là, mais quand même quelques dizaines de pourcent restent
plausibles. Le problème, c'est que l'austérité continue. Le célèbre pacte de responsabilité - ou bien est-ce le pacte de solidarité, je m'y
perds - comprend une baisse des dépenses de 50 milliards. Ce n'est pas rien. Ça veut dire un nouveau tour de vis pour la demande
interne. Quand on parle bien, on parle d'impulsion contractionniste, autrement dit d'austérité. Un nouveau coup de frein à la croissance.
Certes, il y a la baisse d'impôts pour les ménages à bas revenus, mais on nous promet qu'ils seront financés, autrement dit compensés soit
par des prélèvements supplémentaires (même si c'est moins d'évasion fiscale, ça ne change rien en ce qui concerne leur impact sur la
demande), soit par d'autres coupes dans les dépenses. Certes, il y a les baisses de charge sur les entreprises, l'autre volet du pacte. Mais
rien ne nous dit que les entreprises vont se précipiter pour dépenser cet argent. Depuis trois ans, elles épargnent au lieu d'investir, parce
que la logique est qu'elles investissent pour satisfaire la demande. Et s'il n'y a pas de reprise de la demande, il n'y aura pas de reprise des
investissements5.
Si vous êtes perdu, c'est bien normal. Moi-même qui vous parle, j'ai bien du mal à y voir clair. Ce qui me sauve, c'est le bout du chemin: le
gouvernement s'engage à réduire le déficit. Autrement dit, tous comptes faits, c'est officiellement l'austérité. Soit les dépenses vont
baisser, soit les impôts vont augmenter, soit un peu des deux, mais pour réduire le déficit, il faut serrer la vis.
Réduire le déficit en période de non-croissance, ou de croissance horriblement molle comme l'annonce le Président, c'est un contre-sens.
Alors pourquoi ce brave monsieur Hollande6 qui a été élu sur une promesse de fin de l'austérité, et qui clame son engagement total à
lutter contre le chômage, fait-il le contraire? Pourquoi le nouveau Premier Ministre, qui n'avait pas de mots assez durs pour fustiger
l'austérité quand il était Place Beauvau, cède-t-il lui aussi à ces mauvaise sirènes?
Officiellement, c'est pour respecter l'engagement de la France vis-à-vis de Bruxelles et de ses partenaires européens, y compris cette brave
Madame Merkel7. Quand on parle d'engagement de la France, il n'y a plus rien à dire. C'est notre honneur à tous qui est en jeu, et on ne
badine avec l'honneur. Oui mais voilà, nos dirigeants du jour se sont engagés vis-à-vis des électeurs exactement en sens inverse. Là, c'est
leur honneur à eux qui est en jeu, alors
Alors, ils jouent très fin. Les élections, les vraies, c'est dans trois ans. Ce qui déterminera le résultat, c'est l'évolution du chômage. Que la
courbe du chômage ne se soit pas alors inversée et ce pauvre Monsieur Hollande aura tout le temps qu'il veut pour collectionner des
papillons. Mais si le chômage est en train de dégringoler, il pourra s'en attribuer tous les mérites et les électeurs sauront se montrer
reconnaissants.
Pour cela, il faut que la croissance économique reparte solidement un an avant les élections, soit dans deux ans. C'est le pronostic le plus
probable si, en plus de la quasi certitude d'une économie américaine parfaitement revigorée, le reste de l'Europe retrouve la santé d'ici là.
Pauvre Monsieur Sarkozy8, lui qui, pour les beaux yeux de Madame Merkel, nous a fait le coup de l'austérité, appelée Plan Fillon, juste un
an avant les élections.
«  S'ils sont vraiment sérieux, les prévisionnistes n'annoncent pas une
croissance de 1  %, par exemple, mais entre 0,7  % et 1,3  %.  »
«  Si vous êtes perdu, c'est bien normal. Moi-même qui vous parle, j'ai bien du
mal à y voir clair.  »
«  Pour que Hollande puisse espérer être réélu, il faut que la croissance
économique reparte solidement un an avant les élections. C'est le pronostic le
plus probable.  »
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La croissance française à l'arrêt au début de l'année9
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1 http://plus.lefigaro.fr/tag/courbe-du-chomage
Charles Wyplosz
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2 http://plus.lefigaro.fr/tag/retournement-economique
3 http://plus.lefigaro.fr/tag/croissance.
4 http://plus.lefigaro.fr/tag/exportations
5 http://plus.lefigaro.fr/tag/investissements
6 http://plus.lefigaro.fr/tag/hollande
7 http://plus.lefigaro.fr/tag/merkel
8 http://plus.lefigaro.fr/tag/sarkozy
9 http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2014/05/15/20002-20140515ARTFIG00375-la-croissance-francaise-a-l-arret-au-debut-de-l-annee.php
Croissance : Hollande fait le gros dos et attend... 2016 http://www.lefigaro.fr/vox/economie/2014/05/20/31007-201...
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