Institut National des Sciences Appliquées de Strasbourg GENIE CLIMATIQUE ET ENERGETIQUE FICHE DE LECTURE DU PROJET DE FIN D’ETUDES Amélioration des performances énergétiques des installations de production de chaleur par traitement magnétique des hydrocarbures Par Guillaume FRONGIA Tuteur entreprise : IP Arnaud SAUVAGE Tuteur COSTIC : Serge HAOUIZEE 27/07/2015 Introduction Le Service de l’Infrastructure de la Défense (SID) a été démarché par des sociétés fournissant des systèmes qui permettraient de faire une économie d’énergie substantielle de 5 à 11% sur les chaudières fonctionnant au gaz et au fioul, grâce une technique de traitement magnétique des hydrocarbures. Pour le compte du SID, le Centre d’Expertise Technique de l’Infrastructure de la Défense (CETID) a pour rôle de vérifier l’efficacité ou l’inefficacité des dispositifs magnétiques appliqués au traitement magnétique des hydrocarbures, réalisé préalablement à la combustion. Les gains associés restent à démontrer. L’étude est composée de deux parties dont la première est le contenu de la synthèse. Celleci expose les différentes recherches bibliographiques effectuées, les analyses documentaires, les essais de courte durée effectués au COSTIC sur des chaudières de petite puissance sur une courte durée, et l’étude de retours d’expérience. Elle s’achève avec l’introduction de la seconde partie de l’étude menée par le CETID, qui se traduit par des essais de longue durée sur des installations militaires existantes comprenant des chaudières de forte puissance et le suivi des installations des fournisseurs de systèmes magnétiques. 1. Recherche documentaire La première application des dispositifs magnétiques remonte à l’entre-deux guerres sur les moyens de transport afin d’augmenter leur autonomie : des électro-aimants étaient utilisés. Il Il s’en suit des dizaines de brevets à travers le monde sans que quiconque ne puisse donner une explication physique du phénomène jusque dans les années 2000. Seuls les principes techniques sont exposés dans les brevets. Sans résultats probants, la technologie s’est développée, de nombreux dispositifs ont été mis en place, d’une part en France mais aussi à travers le monde. Les retours d’expérience, les témoignages et les études universitaires se contredisent. Il est donc essentiel de confirmer si oui ou non les dispositifs magnétiques ont un effet réel sur la combustion. Le traitement magnétique des hydrocarbures se base sur la modification des propriétés quantiques des atomes et de ses électrons. Les applications de ce type sont déjà utilisées dans la société. Stockage informatique, spintronique, imagerie médicale et traitement de l’eau en sont les principaux domaines. Cela prouve que les propriétés moléculaires peuvent être modifiées lorsque les molécules sont soumises à un champ magnétique. Cependant, il faut rester prudent : les molécules visées ne sont pas du même type. Les molécules d’hydrocarbure sont stables de telle manière qu’un quelconque effet du champ magnétique est censé rester faible. Malgré cela, les tests expérimentaux effectués par l’université Rujie Yao, en Chine, regroupent les différents éléments suivants : une absorbance plus importante des rayons électromagnétiques à haute fréquence, une réduction de la tension de surface et de la viscosité lorsque certaines molécules d’hydrocarbure sont soumises à un champ magnétique. Bien qu’elles ne soient pas prouvées, les conséquences pourraient être bénéfiques pour la combustion : une économie de combustible visible par une augmentation du taux de CO2 et une diminution du taux d’O2 dans les fumées. Etudiant : Guillaume FRONGIA Tuteur : IP Arnaud SAUVAGE Amélioration des performances énergétiques des installations de production de chaleur par traitement magnétique des hydrocarbures 27/07/2015 1 2. Analyse documentaire Toute molécule réagit à un champ magnétique. Comment et dans quelles proportions, cela dépend de la nature du champ magnétique et de la nature de la molécule. La première partie de ce raisonnement théorique pourrait justifier les résultats effectués par l’université Rujie Yao, en Chine, qui a observé une augmentation de la fréquence des liaisons atomiques et une diminution de la viscosité d’hydrocarbures liquides. Il se pourrait donc qu’une augmentation de fréquence de vibration des liaisons covalentes diminue l’énergie d’activation nécessaire à la réaction de combustion. Une partie de l’énergie apportée ne serait donc pas absorbée mais restituée sous forme de chaleur. En ajoutant les recherches de l’université d’Arilaqia en Irak, ce sont les seules études qui montrent de telles expérimentations sur des molécules d’hydrocarbures, puisque les essais effectués par Zeeman, Stern et Gelarch ont été effectués sur des ions. Les preuves sontelles quantitativement suffisantes ? De plus, de nombreuses raisons scientifiques établies pourraient tendre à minimiser les résultats trouvés par ces universités. Les molécules d’hydrocarbure sont diamagnétiques et possèdent une susceptibilité magnétique intrinsèque extrêmement faible. De plus, la conductivité électrique moyenne des hydrocarbures est nulle. Enfin, le méthane, élément majoritaire du gaz naturel, est une molécule apolaire : sa structure géométrique équilibre spatialement les charges électriques et rend la molécule très stable. Le champ magnétique a donc un effet sur les molécules d’hydrocarbures. Mais les proportions de ces effets, mal définies, ne permettent pas de justifier l’efficacité de la technique de traitement magnétique des hydrocarbures. Ainsi, dans l’état actuel des connaissances, autant de raisons font que l’étude théorique dédiée au traitement magnétique des hydrocarbures ne comporte pas de preuves suffisantes à la vérification des performances des systèmes magnétiques. C’est pourquoi les preuves du fonctionnement du traitement magnétique des hydrocarbures doivent être fournies par des essais pratiques établis suivant un protocole précis. 3. Retours d’expérience Les retours d’expérience des fournisseurs, bien qu’ils montrent une augmentation du rendement des chaudières, sont quasiment tous inexploitables et ce pour les raisons suivantes : - L’analyse de la performance des installations par une comparaison entre la consommation de combustible et les DJU rend les résultats très incertains ; - Le réglage de l’excès d’air effectué entre des mesures prises avant installation des dispositifs et des mesures prises après installation des dispositifs fausse la possible augmentation de rendement des chaudières ; - Les chaudières manquent d’instruments de mesure, notamment des compteurs de combustible et des compteurs d’énergie pour analyser leur comportement ; - Le calcul du rendement de combustion donné par l’analyseur de fumées (formule de Siegert) et mis en lumière par les fournisseurs ne peut pas et ne doit pas être Etudiant : Guillaume FRONGIA Tuteur : IP Arnaud SAUVAGE Amélioration des performances énergétiques des installations de production de chaleur par traitement magnétique des hydrocarbures 27/07/2015 2 utilisé pour montrer une possible augmentation du rendement en affirmant à côté de cela que la température des fumées augmente. Enfin, les performances annoncées par les fournisseurs ne sont pas en accord avec les études et essais effectués par Gaz de France et le laboratoire ICARE-CNRS. Le Service de l’Infrastructure de la Défense n’est donc pas le premier organisme à étudier ces produits et cette technique. Afin de lever le doute, il est nécessaire qu’il effectue des tests afin de construire ses propres preuves. 4. Essais pratiques 4.1. Première série d’essais La première série de tests effectuée en décembre 2014 a permis de mettre en lumière les éléments suivants : - Aucune preuve ne permet d’affirmer pour l’instant que les systèmes magnétiques ont une réelle efficacité sur la combustion et le rendement utile de la chaudière : l’augmentation de la température des fumées annoncée par les fournisseurs et perçue dans les essais est toujours la conséquence de l’augmentation de la consommation de gaz dû à un probable dérèglement du bloc gaz. De plus, l’énergie produite reste relativement constante ; - L’incertitude des mesures est trop grande même si les résultats sont comparés de manière relative. Cela est notamment gênant dans le test effectué avec le produit Ja Tech placé sur la conduite pendant 6 jours ; - Les fournisseurs des dispositifs ont exposé le fait que la conduite d’alimentation gaz en acier absorbe le champ magnétique et qu’une durée de plusieurs semaines doit être respectée avant que le champ magnétique n’atteigne le combustible et ait un effet sur lui ; - L’augmentation de la température des fumées ne peut être le seul paramètre déterminant de la performance des systèmes magnétiques, contrairement à la démarche de vérification de l’efficacité de certains fournisseurs. Les systèmes magnétiques ont une action sur les paramètres de la chaudière. Mais puisque cette première série d’essais ne permet pas de certifier l’action du champ magnétique sur l’hydrocarbure et ses conséquences sur la combustion, le protocole doit être amélioré afin de lancer une deuxième série d’essais qui devrait permettre de vérifier et de quantifier la performance des dispositifs magnétiques. Etudiant : Guillaume FRONGIA Tuteur : IP Arnaud SAUVAGE Amélioration des performances énergétiques des installations de production de chaleur par traitement magnétique des hydrocarbures 27/07/2015 3 4.2. Amélioration du protocole Les problèmes mis en avant par les résultats de la première série d’essais servent de base à l’amélioration du protocole de la deuxième série d’essais : - Les dispositifs magnétiques doivent être placés à une distance raisonnable du bloc gaz afin que l’hypothèse de perturbation du champ magnétique soit éliminée ; - Le PCI du gaz compte comme la moitié de l’incertitude de mesures globale de l’instrumentation d’après le rapport effectué par le COSTIC [Annexe 6]. Un analyseur PCS doit être installé sur le banc d’essai pour améliorer l’incertitude globale des mesures [Annexe 7] ; - L’analyseur de fumées sera raccordé à la centrale d’acquisition afin d’avoir une évolution en temps réel des paramètres de fumées. C’est aussi un moyen plus pratique que les tickets imprimés par l’analyseur ; - Pour pallier les problèmes de « saturation magnétique » de la conduite d’alimentation, celle-ci doit être en cuivre pour obtenir des résultats immédiats. Le cuivre est un matériau diamagnétique qui n’absorbe pas le champ magnétique. Si le système magnétique a réellement un effet bénéfique sur la combustion, deux conditions doivent être vérifiées : une augmentation de l’énergie produite (à énergie consommée équivalente) et une augmentation de la température des fumées. Le rendement utile doit augmenter car son calcul ne prend pas en compte l’énergie perdue dans les fumées mais se traduit seulement par le rapport de l’énergie produite sur l’énergie consommée. 4.3. Deuxième série d’essais La série des essais effectués en mai 2015 annonce une rupture aux tests effectués en décembre 2014. Les variations des paramètres que l’on pouvait observer alors en décembre ne sont plus présents ici. Du fait que le régime de la chaudière ne soit pas tout à fait stabilisé, des faibles variations de température d’eau et de fumées sont observées. Cependant, les résultats restent fiables et précis. Les paramètres constants sont : - La composition des fumées ; - La consommation de gaz ; - Le PCS du gaz ; - Le rendement utile de la chaudière. La mise en place des systèmes sur la chaudière de petite puissance n’améliore pas son rendement utile. Les observations que les fournisseurs donnent telles que l’augmentation de la température des fumées de dizaines de degrés ou encore une combustion plus exothermique, ne sont pas présentes. Une transparence du système vis-à-vis de l’installation est observée. Les résultats provenant des deux séries d’essais mettent un terme aux tests de courte durée réalisés sur des chaudières de petite puissance. Des essais de longue durée, prévus sur des chaudières de forte puissance, représentent la deuxième partie de l’expérimentation lancée par le SID. Etudiant : Guillaume FRONGIA Tuteur : IP Arnaud SAUVAGE Amélioration des performances énergétiques des installations de production de chaleur par traitement magnétique des hydrocarbures 27/07/2015 4 5. Perspectives L’expérimentation sur une longue durée et sur des installations existantes apporte avantages et inconvénients. D’un côté, le problème de saturation magnétique des conduites en acier qui a été rencontrée lors de la première série d’essais n’aura pas lieu d’être ici. De plus, l’argument récurrent des fournisseurs affirmant que la durée des tests effectués au COSTIC est trop courte pour voir un quelconque résultat sera aussi mis en défaut. Cependant, la variation des besoins énergétiques des bâtiments influera une variation de rendement des chaudières. Pour pallier ce problème, la durée des mesures sera assez longue pour que la variation de rendement soit minimisée. Les fournisseurs de dispositifs veulent aussi prouver la performance de ces systèmes. C’est pourquoi certaines installations des fournisseurs seront suivies en parallèle des essais de longue durée. En cas de résultats négatifs sur les essais de longue durée, l’expérimentation s’achèvera. Au contraire, des résultats positifs ouvriront la voie à un pragmatique déploiement. Conclusion Les recherches bibliographiques et analyses documentaires montrent les limites des connaissances scientifiques à propos des effets du champ magnétique sur les molécules d’hydrocarbure. En complément, les essais réalisés par les fournisseurs des systèmes magnétiques ne sont pas exploitables. C’est pourquoi la réalisation d’essais pratiques par le CETID a été nécessaire. La première série des essais de courte durée a montré des variations des paramètres de la chaudière bien que celles-ci restent dans la plage d’incertitudes des mesures. Suite à l’amélioration du protocole, la deuxième série d’essais de courte durée montre une transparence des systèmes magnétiques vis-à-vis de l’installation. Ces résultats rejoignent les résultats effectués par le laboratoire de recherche ICARE-CNRS. En conclusion, au vu de toutes les informations présentement rassemblées, une réponse peut être délivrée à une partie de la problématique : dans le cas de chaudières de petite puissance et sur une courte durée, le traitement magnétique des hydrocarbures n’est pas efficace. La deuxième partie de l’expérimentation permettra de vérifier la performance des dispositifs magnétiques sur des chaudières de forte puissance et sur une longue durée. Etudiant : Guillaume FRONGIA Tuteur : IP Arnaud SAUVAGE Amélioration des performances énergétiques des installations de production de chaleur par traitement magnétique des hydrocarbures 27/07/2015 5