Fiche 8 Le niveau d’études « C’est difficile de demander au patient quel est son niveau d’études» Différentes raisons sont évoquées : - ça n’a d’intérêt qu’au niveau collectif, alors, demander ça pendant une consultation... le patient vient avec une plainte, on est dans une relation personnelle, poser une question « administrative » à ce moment-là, ça vient briser quelque chose je ne me vois pas très bien demander son niveau d’études à un patient que je suis depuis 20 ans ! les patients risquent d’être gênés, surtout ceux qui n’ont pas fait beaucoup d’études cela peut apparaître comme un jugement de valeur, comme si les gens étaient responsables de leurs problèmes, ou comme si leur santé, leurs comportements, s’expliquent par leur parcours à l’école .. c’est lourd, stigmatisant ! a-t-on le droit de poser cette question ? et finalement, à quoi ça sert exactement? Ce que l’on peut mettre en évidence, c’est qu’il est difficile de récolter cette information dans le cadre thérapeutique. Les réticences sont compréhensibles : le niveau d’études n’a pas de lien direct avec la santé du patient au niveau individuel. _______________________________________________________ TABLEAU DE BORD – Fiche 8.1 Alors pourquoi poser cette question ? Cette information est intéressante au niveau collectif, dans le cadre d’un observatoire sanitaire et social. Statistiquement, le niveau d’études est un bon indicateur de la vulnérabilité sociale, plus stable que la profession. Beaucoup d’études montrent une association entre le niveau d’études et divers problèmes de santé (cf par exemple l’Atlas de la Santé et du Social de Bruxelles-Capitale, 2006 – www.observatbru.be). Comment faire ? Tout d’abord décider qui va recueillir cette information. Comme il est dit dans la fiche n°5, pour cet item c’est à chaque équipe de voir ce qui est le mieux pour elle. Et ce n’est pas figé, cela peut-être chaque membre de l’équipe quand il en a la possibilité. Dans la pratique, nous avons pu constater deux tendances : Certains médecins en parlent en consultation, en passant d’abord par la profession lorsque la plainte s’y prête (mal de dos par exemple) ... la question vient parfois aussi, tout naturellement, lorsque le patient parle de sa vie, de son enfance... Mais pour la plupart, il semble préférable de découpler cette question de la relation thérapeutique, de la santé individuelle. En expliquant éventuellement aux patients, que, à l’instar d’autres données de type administratif, cette information est utile pour mieux connaître la population qui consulte dans toutes les maisons médicales, de manière générale. Il ne s’agit pas de mentir, ou de chercher des ruses pour parvenir à ses fins : mais de remettre les choses dans leur contexte collectif pour éviter d’être mal interprété. L’apposition de l’affiche d’information des patients dans la salle d’attente, dans le cabinet, peut faciliter la démarche : on explique que l’on récolte des données, pourquoi on les récolte et que l’on met donc tous les dossiers en ordre. Quelques idées pratiques : - Dans une équipe, la question est posée parmi d’autres, lors de l’inscription, à tous les nouveaux patients ; en général, les patients répondent sans commentaire. Dans le cas contraire, l’accueillante explique qu’il s’agit d’anticiper les besoins de la population pour organiser les activités dans la maison médicale. Elle pourrait aussi expliquer l’affiche d’information sur l’utilisation des données. - Dans une autre équipe, l’accueillante prend le dossier du patient, met à jour avec lui les données administratives y compris le niveau d’études. - Ailleurs, elle distribue en salle d’attente une fiche, un petit questionnaire à remplir, avec les items qui manquent dans les dossiers : l’écrit évite le face à face, il permet de sortir de la relation duelle et préserve mieux la confidentialité - Parfois l’accueillante met cette fiche sur les dossiers qui ne sont pas complets : le soignant dit « on a oublié de vous demander cela à l’accueil » ou « c’est pour compléter le dossier administratif » (c’est une manière de faire comprendre au patient que cela n’entre pas dans la relation thérapeutique). - Dans une équipe, au moment du passage à la facturation avec le numéro national, un document a été distribué aux patients avec tous les items socio-économiques du logiciel. Ils pouvaient ne pas répondre mais il n’y a eu que peu de refus – et pas spécialement sur cette variable. Cette équipe continue à procéder ainsi. A méditer... « Pour l’avoir testée lors de la semaine internationale de l’alphabétisation, la question « êtes-vous à l’aise avec la lecture et l’écriture » est généralement très bien reçue, à condition d’être posée dans le cadre d’une relation de confiance préétablie. (Dans des) groupes de discussion, beaucoup d’apprenants n’avaient jamais parlé de leurs difficultés de lecture ou d’écriture à leur médecin généraliste, mais auraient apprécié que celui-ci leur en parle »....(Gilles Henrard, Analphabétisme et santé, Mise au point à l’attention des médecins généralistes, Travail de fin d’étude DES 2005-2007, Université de Liège).