Pour simplifier : de la même manière que l’Arabie saoudite est exportatrice du wahhabisme,
le Maroc, qui est imbibé de soufisme, a vocation à contribuer à son rayonnement en Afrique.
Toutefois, les Marocains ne sont eux-mêmes pas épargnés par la pénétration d’autres courants
islamiques et ils ont eux aussi besoin de repères. Fès est donc un lieu qui permet une réflexion
et une expression libres. C’est un écrin de la civilisation islamique, face au désarroi dans
lequel Daech plonge de nombreux croyants.
Pour les non-initiés, le soufisme peut paraître confrérique et même fermé. C’est ce qui
explique sa confidentialité ?
L’histoire du soufisme est d’abord populaire. Autrefois, le soufisme était culturel et
naturellement intégré dans le quotidien des musulmans. Cette réalité est toujours très présente,
mais elle est moins perceptible dans la culture moderne.
« Je pense et je veux croire qu’il y a un besoin de spiritualité chez les jeunes dont une partie
est détournée par des groupes extrémistes. Il nous faut donc faire rempart, par la spiritualité »
Avec ce festival, par-delà les limites de telle ou telle confrérie, nous ramenons cette réalité sur
la place publique. À Fès, des liens très forts existent avec la grande mosquée de la
Qarawiyine, avec la Tariqa Tijanya dont le tombeau du fondateur Cheikh Ahmed Tidjane
Chérif, se trouve dans la ville et donne lieu à un pèlerinage. L’islam soufi de rite malékite
irrigue l’Afrique de l’Ouest et la relation historique est très profonde entre les confréries et les
théologiens de part et d’autre du Sahara.
Je crois qu’aujourd’hui il faut aller au-delà du soufisme maraboutique et confrérique. En
Afrique, je rencontre beaucoup d’érudits qui sont parfois gênés que l’islam ne soit réduit qu’à
cela. Or il y a d’autres richesses dans notre civilisation en partage : la science, l’art…