pas vraiment! ». Pour être des modèles pertinents de maladie, les cellules expérimentales mises
dans la boîte devraient être comparables aux cellules affectées d’un corps humain. D’où
l’intérêt grandissant dans le domaine des cellules souches pour la production de lignées de
cellules pertinentes à l’étude de diverses maladies (par exemple, des cellules épithéliales
pulmonaires pour étudier des maladies comme la fibrose kystique) 3 à partir de cellules souches
générées par le propre patient.
Le concept de la génération de cellules souches directement à partir des cellules d’un patient
s’appuie sur une méthode nommée reprogrammation cellulaire, mise au point par le prix Nobel
de médecine 2012, Shinya Yamanaka.4 Cette méthode consiste à prendre des cellules matures
d’un patient (par exemple, des cellules de la peau) pour les mettre en culture dans une boîte de
Petri. On y introduit ensuite un ensemble défini de facteurs génétiques qui ramènent ces cellules
à l’état de cellules souches de type embryonnaire (aussi appelées cellules pluripotentes induites
ou cellules iPS). Ces cellules iPS partagent avec les cellules souches embryonnaires la qualité
d’être pluripotentes, c’est-à-dire qu’elles sont capables de se transformer en l’une ou l’autre des
diverses cellules d’un corps humain adulte (par exemple, cellules du cœur, des os, du cerveau
ou des poumons). Une fois que les cellules matures du patient ont été reprogrammées en
cellules iPS, les biologistes peuvent les faire se différencier pour les transformer en diverses cellules
spécifiques, pertinentes à l’étude d’une maladie donnée. De plus, ces cellules dérivant du
patient, elles devraient en théorie présenter les mêmes anomalies moléculaires en laboratoire
que dans le corps de ce dernier. Cela fournit aux chercheurs une plateforme cellulaire qui leur
permet d’observer les mécanismes moléculaires débouchant sur la maladie. En utilisant cette
méthode, les biologistes sont maintenant capables de produire des cellules spécifiques à un
patient et pertinentes à sa maladie, qui servent de substituts pour mieux comprendre cette
maladie et, plus généralement, notre corps.
Au-delà de leur utilisation révolutionnaire comme modèles cellulaires, les biologistes espèrent
également que les cellules iPS permettront éventuellement d’éviter aux patients la nécessité de
participer aux premières phases d’essais cliniques de médicaments. L’idée ici est que « le corps »
peut se résumer à une collection de cellules iPS du patient en laboratoire, aux fins d’analyses
préliminaires de l’efficacité et de l’innocuité de médicaments (par exemple, des cellules du foie
pour vérifier la métabolisation du médicament, des cellules cardiaques pour en évaluer sa
cardiotoxicité ou des neurones pour tester des composés neuroactifs).5 Ainsi, dans ces « essais
cliniques in vitro », ce sont les cellules différenciées du patient qui servent de déterminants du
corps pour, en théorie, prédire l’innocuité d’un nouveau médicament de recherche ou s’il
produira les effets thérapeutiques espérés. En conséquence, les résultats de ces essais cliniques
in vitro prédisant de façon fiable les réactions du corps à un médicament, de nombreux
médicaments de recherche (potentiellement toxiques) pourraient être ainsi testés sur « les
patients » sans pénétrer leurs corps.
Alors que les biologistes continuent à créer des modèles toujours plus performants pour mieux
extrapoler les résultats obtenus des cellules en laboratoire à celles de notre corps, celles-ci
semblent être encore considérées comme des outils – des entités animées destinées à la
recherche scientifique – et pas nécessairement comme des entités du corps. Cependant, en
cette ère de médecine régénératrice, la perception des cellules cultivées en laboratoire évolue
vers la notion que ces cellules représentent des composants exogènes de notre corps ou pour le